Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 99 IV 9



99 IV 9

3. Arrêt de la Cour de cassation pénale du 19 janvier 1973 dans la cause
Perroud contre Ministère public du canton du Valais. Regeste

    Art. 148 und 242 Abs. 1 StGB. Das Verhältnis zwischen Art. 242 Abs. 1
StGB und Art. 148 StGB ist analog demjenigen zwischen dieser Bestimmung
und Art. 154 StGB. So begeht der Täter, der durch Inumlaufsetzen falschen
Geldes in Täuschungs- und Bereicherungsabsicht einen andern schädigt,
ein Vergehen, das in unechter Gesetzeskonkurrenz zum Verbrechen des
Betruges steht.

Sachverhalt

    A.- En décembre 1970, Gabriel Perroud s'est rendu en Angleterre avec
André Métroz dans l'intention de s'y procurer personnellement de faux
dollars américains. Il y a effectivement acquis huit billets de 100 $
pour le prix de 800 fr. Il en a écoulé quatre en France, lors de son
retour, auprès de diverses stations services; il en a remis trois à son
compagnon Métroz et il a changé le dernier à la gare de Martigny.

    B.- Le 3 février 1972, le Tribunal du IIIe arrondissement pour les
districts de Martigny et St-Maurice a condamné Perroud pour acquisition,
importation et prise en dépôt de fausse monnaie (art. 244 al. 1 CP),
pour mise en circulation de fausse monnaie (art. 242 al. 1 CP) et
pour escroquerie (art. 148 CP), à quatre mois d'emprisonnement, peine
complémentaire à celle de trois ans de réclusion prononcée par le même
tribunal le 25 novembre précédent, pour divers autres délits.

    Le 23 juin 1972, le Tribunal cantonal du Valais, statuant sur appel,
a condamné Perroud à la peine globale de trois ans de réclusion et quatre
mois d'emprisonnement, pour les infractions jugées les 25 novembre 1971
et 3 février 1972.

    C.- Perroud se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral; il conclut
à la libération du chef d'accusation d'escroquerie. Le Ministère public
propose le rejet du pourvoi.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- L'autorité cantonale admet qu'il y a concours idéal entre les art.
242 al. 1 et 148 CP. Citant un arrêt du Tribunal supérieur de Zurich (BlZR
1947 no 93), elle relève que le dessein d'enrichissement et l'intention
de causer un dommage à autrui ne sont pas des éléments constitutifs du
crime réprimé à l'art. 242 CP. Ainsi, cette disposition s'appliquerait
seule à celui qui écoule sans contre-partie de l'argent falsifié, mais
elle fonderait, en concours idéal avec l'art. 148 CP, la condamnation
de celui qui, comme ici, tire profit de la mise en circulation de fausse
monnaie et montre par là son dessein de s'enrichir et de porter préjudice
à autrui (GRAVEN, FJS 1013 a ch. IV/2 b).

    Le recourant combat cette interprétation en invoquant, par analogie,
la jurisprudence du Tribunal fédéral sur la relation existant entre les
art. 154 et 148 CP.

Erwägung 2

    2.- Dans plusieurs arrêts (notamment RO 72 IV 169 et 88 I 42), le
Tribunal fédéral a établi que l'art. 154 CP constitue par rapport à l'art.
148 CP une disposition spéciale, en matière de mise en circulation de
marchandises. Lorsque l'auteur d'une telle infraction réussit à tromper
autrui, qu'il agit dans le dessein de s'enrichir et qu'il lèse la personne
trompée ou un tiers, les éléments constitutifs de l'escroquerie sont certes
réunis. Cependant, en plaçant les art. 148 et 154 CP dans le même titre des
infractions contre le patrimoine, le législateur a montré non seulement
que la seconde de ces dispositions n'accorde pas simplement, dans son
domaine, une protection accessoire à celle qui dérive de l'art. 148 CP,
en réprimant des actes qui échapperaient à la sanction de celui-ci, mais
encore qu'elle représente de plus une règle particulière primant l'autre,
lorsque les hypothèses des deux dispositions sont réalisées. Cette
primauté vaut toutefois uniquement si l'astuce reprochée à l'auteur
ne consiste que dans l'affirmation sciemment erronée - voire dans le
fait de laisser volontairement croire à tort - que la marchandise mise
en circulation est authentique, non altérée ou intacte. En revanche
l'art. 148 CP s'appliquera - et s'appliquera seul - lorsque l'auteur,
ne se contentant pas de déclarations fausses, use d'autres procédés
astucieux pour induire l'acquéreur en erreur.

    L'application analogique que le recourant voudrait faire de ces
principes à son cas ne s'impose pas d'emblée, malgré la similitude
rédactionnelle des deux dispositions considérées dans les versions
italienne et française. Sans compter en effet que les textes
allemands diffèrent (art. 154: "Inverkehrbringen" von Waren; art. 242:
"Inumlaufsetzen" falschen Geldes), il reste que l'un des éléments du
raisonnement rappelé plus haut consiste dans la présence des articles
148 et 154 CP dans un même titre du Code pénal, alors que l'art. 242 CP
figure dans un autre.

    a) Sur le premier point, la doctrine dominante admet que
les différences du texte allemand ne sont pas déterminantes et que
l'élément matériel de l'infraction est le même dans les deux cas (HAFTER,
Schweizerisches Strafrecht, partie spéciale p. 378 IV; LOGOZ, Commentaire,
no 1 ad art. 242; THORMANN/v. OVERBECK, no 1 ad art. 242). Il n'y a pas
de raisons de s'écarter de cette manière de voir.

    Sur le plan subjectif, il existe dans l'une comme dans l'autre
hypothèse un dessein de tromper impliqué par le fait de donner un bien taré
pour authentique et intact. D'ailleurs, la convention internationale du 20
avril 1929 concernant le faux monnayage, en vue de l'adhésion à laquelle
les art. 240 ss. CP ont été édictés (cf. FF 1930 vol. 2 p. 29) et qui, par
conséquent, peut contribuer à leur interprétation (GERMANN, Textausgabe,
9. Aufl., S. 370), tient la tromperie pour l'un des éléments subjectifs de
ces délits. THORMANN/V. OVERBECK partagent cet avis (no 6 ad art. 240),
ainsi que le Tribunal supérieur du canton de Zurich luimême, dans l'arrêt
cité par la décision attaquée (BlZR 1947 no 93, consid. 3). On peut donc
admettre, abstraction faite de cas très particuliers qu'il convient de
réserver, que d'une manière générale, la mise en circulation de fausse
monnaie, à l'instar de celle de marchandise falsifiée (cf. RO 71 IV 12,
83 IV 194), comprend le dessein de tromper.

    Les deux infractions coïncident donc pour l'essentiel en ce qui
concerne la mise en circulation et la tromperie.

    b) Ce qui précède n'autorise cependant pas à conclure que l'art. 242
CP, au même titre que l'art. 154 CP, constitue une règle spéciale au
regard de l'art. 148 CP. Il faut pour cela que le bien protégé soit le
même dans les deux cas.

    La place occupée par l'art. 242 dans le Code pénal ne l'empêche pas
de tendre à protéger le patrimoine. La genèse de la loi révèle que le
titre dixième, dont l'intitulé ne se réfère d'ailleurs pas comme celui des
précédents à un bien protégé déterminé, réprime diverses infractions dont
le seul point commun est qu'elles ont leur origine dans une falsification
et qui sont par conséquent caractérisées en quelque sorte par le moyen
employé (cf. HAFTER, op.cit. § 91 p. 556). La diversité des intérêts qui
peuvent être lésés par ces infractions permet d'imaginer différents biens
juridiques dont la protection devait être assurée par les dispositions
du titre dixième du Code pénal. La doctrine n'est pas unanime sur ce
point (cf. LOGOZ, op.cit., no 2, remarques générales sur les art. 240
à 250), mais on peut se dispenser de l'éclaircir. En effet, il n'est
pas nécessaire qu'à chaque disposition du code corresponde un seul
bien protégé (cf. notamment les infractions contre les moeurs: LOGOZ,
op.cit., no 3, remarques générales sur les art. 187 à 212, et SCHWANDER,
Das schweizerische Strafgesetzbuch, no 636). Il suffit en l'occurrence
que l'art. 242 LP ait aussi - voire accessoirement (LOGOZ, loc.cit.) -
pour but de protéger le patrimoine (SCHWANDER, op.cit. no 705; BAUMANN,
Bull. stén. CE, 1931 p. 205) pour qu'il constitue une disposition spéciale
au regard de l'art. 148 CP. Il n'y a donc aucune raison de ne pas appliquer
à l'art. 242 CP la jurisprudence relative à l'art. 154 CP.

    Le crime réprimé par l'art. 242 peut assurément être commis sans que
l'auteur ait agi dans un dessein d'enrichissement ni lésé autrui. Mais
il ne s'ensuit pas qu'il faille nécessairement admettre le concours
idéal. En fait, la mise en circulation de fausse monnaie implique presque
toujours ce dessein et un dommage. La législateur s'en est rendu compte:
l'art. 242 al. 2 vise le cas de celui qui a reçu pour bonne une pièce
qui ne l'est pas et qui, constatant après coup son infortune, décide
de reporter sa perte sur un autre (Bull. stén. CN 1929 p. 445). Or,
ce résultat suppose préjudice et dessein d'enrichissement. Selon la
thèse du Tribunal cantonal, il faudrait admettre, dans ce cas également,
le concours idéal avec l'art. 148, ce qui serait contraire à la ratio
legis. Au surplus, en cas de concours idéal, le délinquant qui met en
circulation de la fausse monnaie serait passible d'une peine maximum
plus lourde (art. 148 et 68 ch. 1 CP) que le faussaire (art. 241),
dont l'infraction a paru plus grave au législateur (Bull. stén. loc.cit.).

    S'étant borné à mettre de faux billets en circulation, le recourant
a donc été condamné à tort en vertu de l'art. 148 CP.

Entscheid:

Par ces motifs, la Cour de cassation pénale:

    Admet le pourvoi, annule l'arrêt attaqué et renvoie la cause à la
juridiction cantonale pour nouvelle décision.