Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 99 IB 413



99 Ib 413

55. Arrêt du 21 septembre 1973 dans la cause X. contre Commission fédérale
des banques Regeste

    Verwaltungsgerichtsbeschwerde gegen eine Zwischenverfügung.  Art. 97
und 101 OG, 45 VwG. Editionspflicht.

    1.  Eine Zwischenverfügung ist beschwerdefähig, wenn sie einen
nicht wieder gutzumachenden Nachteil bewirken kann und wenn die
Beschwerde auch gegen die Endverfügung zulässig ist (Bestätigung der
Rechtsprechung). Begriff des nicht wieder gutzumachenden Nachteils
(Erw. 1).

    2.  Die Eidg. Bankenkommission kann auf Grund des Anlagefondsgesetzes
Massnahmen gegen die Fondsleitung und die Depotbank treffen, dagegen
nicht gegen einen Aktionär der Leitungsgesellschaft, auch wenn er über
die Mehrheit der Aktien verfügt. Sie kann ihn daher nicht zwingen, als
Partei Urkunden vorzulegen (Erw.2 a).

    3.  Hingegen kann sie ihn als Dritten zur Edition verpflichten
(Erw. 2 b).

Sachverhalt

    La société anonyme S. assume la direction du fonds de placement
P. Sans faire partie de ses organes, X. est actionnaire majoritaire de
ladite société. Il dirige un bureau financier.

    La Commission fédérale des banques (CFB) a ouvert une enquête sur la
distribution des parts du fonds de placement P. X. a admis que la société
S. avait émis environ 20 000 parts du fonds pendant l'exercice 1971/72,
que son bureau avait souscrit une tranche de ces titres, à concurrence de
15 à 20 millions de francs et qu'il en avait vendu la presque totalité,
à un prix de 2 à 3% supérieur au prix d'émission, par l'intermédiaire de
30 à 50 agents qui ont visité la clientèle à domicile ou répondu à ses
demandes écrites.

    Invoquant la nécessité d'obtenir des renseignements complémentaires
et s'estimant en droit de les exiger des personnes et sociétés visées
par l'art. 14 de la loi sur les fonds de placement (LFP), la CFB a décidé
ce qui suit:

    "1. X. est dans l'obligation de remettre, dans les 14 jours, à la
Commission fédérale des banques, les documents suivants:

    a) une liste de toutes les personnes qui ont eu, entre le 1er
octobre 1971 et ce jour, une activité dans la prospection, la publicité,
l'information, la prise de commandes ou la vente de parts P., avec
indication des nom, prénom, lieu d'origine, domicile, No de code et
commission brute reçue;

    b) les doubles ou photocopies de tous les "bons de commande" et autres
décomptes sur l'émission ou la vente de parts P. pendant la période du
1er octobre 1971 au 31 décembre 1972, avec mention du nombre de parts
commandées ou décomptées, le prix par part, la somme totale payée, le nom
et l'adresse du client, la date, le No de code et le nom de l'intermédiaire
(agent, conseiller financier, etc.).

    2. ... (Communication.)

    La décision indique qu'elle peut faire l'objet d'un recours de droit
administratif dans les dix jours.

    X. a exercé ce moyen en temps utile. Il conclut à l'annulation du
prononcé et au renvoi de la cause à la CFB.

    Celle-ci propose principalement de déclarer le recours irrecevable,
subsidiairement de le rejeter.

    Les motifs sommaires de la décision attaquée ayant été complétés dans
la réponse de l'autorité, un second échange d'écritures a été ordonné.

    La CFB envisageant d'intervenir à la fin de son enquête soit contre le
recourant, soit contre la société S., celle-ci a été invitée à s'expliquer
à son tour en tant que partie virtuelle. Elle l'a fait, en adoptant pour
l'essentiel la thèse du recourant.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- La CFB a pris la décision attaquée dans le cadre d'investigations
à la fin desquelles, en tant qu'autorité de surveillance des
fonds de placement, elle peut être appelée à ordonner des mesures
administratives. On a donc affaire à une décision rendue au cours d'une
procédure qu'elle ne termine pas, c'est-à-dire à une décision incidente,
susceptible d'être suivie d'une décision finale (RO 98 I/a 443, 98
I/b 283).

    La recevabilité du recours de droit administratif formé contre une
décision incidente est subordonnée à deux conditions. D'une part, selon le
texte exprès de l'art. 101 lit. a OJ, la décision finale doit elle-même
être sujette à ce recours; d'autre part, d'après l'interprétation
jurisprudentielle des art. 97 al. 1 OJ, 5 al. 2 et 45 al. 1 LPA, la
décision incidente doit être de nature à causer un dommage irréparable. Il
importe peu en revanche qu'elle figure ou non dans l'énumération de
l'art. 45 al. 2 LPA (RO 97 I 478 s., 97 V 249, 98 I/b 284 ss., 98 V 221).

    a) En l'espèce, quel qu'en soit le destinataire, la décision finale
s'appuiera sur la loi concernant les fonds de placement, soit sur un texte
de droit public fédéral, pour imposer des obligations ou en constater
l'inexistence dans un cas particulier. Répondant ainsi à la définition de
l'art. 5 al. 1 LPA, auquel renvoie l'art. 97 al. 1 OJ, elle est sujette
au recours de droit administratif.

    Le fait que le prononcé d'une décision finale ne soit pas encore
certain, mais dépende de l'examen des pièces requises par la décision
incidente, n'exclut pas la recevabilité du recours dirigé contre
celle-ci. S'il en était différemment, la possibilité de recourir contre
les décisions incidentes serait fermée dans la plupart des cas, l'issue
définitive de la cause étant en général problématique au moment où ces
décisions sont prises. L'art. 101 lit. a OJ perdrait une grande partie
de la portée que le législateur entendait lui attribuer.

    b) Ainsi qu'il ressort de la jurisprudence, la notion de dommage
irréparable n'est pas nécessairement la même dans la procédure du recours
de droit administratif et dans celle du recours de droit public (RO 98
I/b 286 s.). Lorsqu'il est saisi d'un recours de droit administratif,
le Tribunal fédéral ne juge pas de l'existence d'un dommage irréparable
selon un critère unique, mais il adopte celui qui s'accorde le mieux avec
la nature de la décision attaquée (ibidem). En particulier, il ne se borne
pas à considérer comme irréparable le seul dommage qu'une décision finale
favorable au recourant ne peut faire disparaître complètement. Cependant, à
tout le moins, un dommage de ce genre doit être tenu pour irréparable dans
la procédure du recours de droit administratif comme dans celle du recours
de droit public. Or, même si la CFB renonce à rendre une décision finale
contre le recourant, le dommage que la décision attaquée est de nature à
lui causer subsistera entièrement: d'un côté, les frais occasionnés par
la production des pièces sollicitées auront été assumés en pure perte;
de l'autre, les démarches que la CFB se propose d'entreprendre auprès
des clients du recourant risquent d'affecter durablement la marche de
ses affaires. On se trouve donc bien en présence d'un dommage irréparable.

    Certes, selon la CFB, il serait loisible au recourant de se faire
rembourser ses frais dans l'hypothèse où l'enquête ouverte contre
lui le mettrait hors de cause. Toutefois, en cas de contestation
sur le montant à restituer, le recourant devrait se fonder sur la loi
concernant la responsabilité de la Confédération, de ses autorités et de
ses fonctionnaires pour introduire un procès dont le succès, dépendant
de la preuve d'un acte commis sans droit, serait aléatoire. Dans ces
conditions, on ne saurait qualifier de réparable le dommage auquel le
recourant est exposé.

    Il est vrai que, suivant la jurisprudence relative à l'art. 87 OJ,
la voie du recours de droit public n'est ouverte contre les décisions
incidentes que s'il en résulte un dommage non seulement irréparable,
mais encore juridique (RO 98 I/a 443). Sans doute cette dernière
exigence est-elle liée à la nature particulière du recours de droit
public, dont la recevabilité suppose la lésion d'un droit au sens de
l'art. 88 OJ. Aussi peut-on se demander si elle s'applique également
au recours de droit administratif, dont l'art. 103 lit. a OJ subordonne
l'admissibilité à la simple violation d'un intérêt digne de protection
(cf. RO 98 V 221). Cependant, point n'est besoin de résoudre cette
question en l'espèce. En obligeant le recourant à faire des prestations,
la décision attaquée modifie la situation de droit à son détriment;
elle lui fait donc subir un dommage juridique.

    Au demeurant, peu importe que le préjudice en cause soit plus ou
moins grave, la loi n'ayant pas égard à cette circonstance.

    c) Les exigences légales sont ainsi remplies et la décision est
susceptible de recours, contrairement à l'opinion que soutient la CFB
dans sa réponse.

Erwägung 2

    2.- La décision attaquée ne précise pas contre qui se dirigera la
décision finale. Adressée au recourant, c'est à lui seul qu'elle impose des
obligations. Si elle a été communiquée à la société S. aussi bien qu'au
recourant, elle n'indique pas à quel titre. Dès lors, à ne considérer
que la décision attaquée, on peut se demander si le recourant ne sera
pas l'unique objet de la décision finale. Toutefois, la CFB ayant prévu,
dans l'instance fédérale, la possibilité de rendre une décision finale
contre la société ou contre le recourant, il y a lieu de tenir compte
maintenant déjà de ces deux éventualités. En effet, si le recours devait
être admis dans la première, il serait loisible à la CFB de renouveler
ses injonctions au recourant eu égard à la seconde. Aussi se justifiet-il
d'examiner d'emblée l'une et l'autre.

    a) Si le recourant est le destinataire de la décision finale, c'est
en qualité de partie qu'il a été invité par la décision attaquée à fournir
des documents. Pour que cette réquisition se justifie, il est nécessaire:
1o que la CFB ait la compétence de prendre une décision finale envers le
recourant; 2o que celui-ci soit tenu, en tant que partie, de collaborer à
la constatation des faits; 3o que les pièces exigées soient pertinentes,
c'est-à-dire de nature à influer sur le sort de la cause.

    La première condition n'est pas remplie. En vertu de l'art. 42 al. 1
LFP, la CFB veille au respect des dispositions de la loi et du règlement
par la direction et la banque dépositaire. Ainsi qu'il ressort clairement
de ce texte, elle est habilitée à prendre des mesures de surveillance
contre la direction et la banque dépositaire, à l'exclusion de toute autre
personne juridique ou physique, notamment d'un actionnaire de la société
de direction. Dans ces conditions, il est inutile de se demander si le
devoir de loyauté prescrit par l'art. 14 al. 1 LFP à la direction et par
l'art. 14 al. 4 LFP aux administrateurs, gérants et membres de la société
fonctionnant comme direction, ainsi qu'aux sociétés qui les touchent de
près, incombe également aux actionnaires de la société de direction. Dans
l'affirmative même, il ne s'ensuivrait pas que la CFB soit compétente
pour intervenir à l'égard de ces actionnaires. En tout cas, comme elle le
reconnaît d'ailleurs elle-même, il ne lui appartient pas de faire observer
la législation sur les voyageurs de commerce. Sans doute peut-elle dénoncer
à l'autorité compétente les actes par lesquels l'actionnaire d'une société
de direction contrevient à cette législation. Toutefois, contrairement à
ce qu'elle prétend, la faculté de dénoncer n'implique pas celle d'ouvrir
une enquête pour étayer une dénonciation. Une telle enquête ne peut être
entreprise que par l'autorité compétente pour agir en cas d'infraction.

    La demande de la CFB ne répond pas non plus à la deuxième condition
indiquée. Sans doute, selon l'art. 12 LPA, applicable aux procédures
instruites par la CFB en vertu de l'art. 1er al. 2 lit. d LPA, l'autorité
procède-t-elle à l'administration des preuves, en particulier au moyen
des renseignements des parties. Cependant, ainsi qu'il résulte des
art. 13 à 19 LPA, l'art. 12 LPA n'impose d'obligation que dans la mesure
précisée par les dispositions qui le suivent. Or, en ce qui concerne le
devoir de renseigner des parties, l'art. 13 al. 1 LPA fait règle. Il les
astreint à collaborer à la constatation des faits: a) dans une procédure
qu'elles introduisent elles-mêmes; b) dans une autre procédure, en tant
qu'elles y prennent des conclusions indépendantes; c) en tant qu'une
autre loi fédérale leur impose une obligation plus étendue de renseigner
ou de révéler. Manifestement, aucune de ces hypothèses n'est réalisée en
l'espèce: le recourant n'a pas introduit de procédure devant la CFB; il n'a
pas pris de conclusions indépendantes dans l'enquête ouverte contre lui;
enfin, si l'art. 42 al. 4 LFP habilite la CFB à demander des renseignements
et des documents à la direction, à la banque dépositaire, aux sociétés
immobilières qui font partie du fonds de placement, ainsi qu'au reviseur,
il ne s'applique pas aux actionnaires de la société de direction.

    L'inaccomplissement des deux premières conditions dispense le Tribunal
fédéral de se prononcer sur l'accomplissement de la dernière. De toute
façon, dans la mesure où le recourant sera visé par la décision finale,
c'est-à-dire où il fait figure de partie, la réquisition qui lui a été
adressée ne peut être maintenue.

    b) Il reste à examiner si elle se justifie dans l'éventualité où
la décision finale se dirigera contre la société S. et où, dès lors, le
recourant ne joue pas le rôle de partie. Une réponse affirmative dépend
aussi de trois conditions: 1o la CFB doit être compétente pour rendre
une décision finale contre la société S.; 2o le recourant doit être tenu
de fournir des documents à titre de témoin ou de tiers; 3o les pièces
réclamées doivent être pertinentes, soit propres à influencer l'issue de
la cause.

    En vertu des art. 42 ss. LFP, la CFB est en droit d'intervenir contre
une société de direction telle que la société S. La première exigence
est donc satisfaite.

    Il en est de même de la deuxième. Point n'est besoin de décider si
la CFB peut ordonner l'audition de témoins et se fonder sur l'art. 17 LPA
pour inviter le recourant à fournir des documents à titre de témoin. Quoi
qu'il en soit, selon l'art. 51 al. 1 PCF, auquel renvoie l'art. 19
LPA, les tiers sont obligés de produire les titres en leur possession,
sous réserve des titres relatifs à des faits sur lesquels ils peuvent
refuser de témoigner conformément à l'art. 42 PCF. Or, en l'espèce, les
conditions auxquelles est subordonné le devoir imposé par l'art. 51 al. 1
PCF sont toutes remplies: d'abord, les pièces requises par la décision
attaquée sont des titres, c'est-à-dire qu'elles sont de nature à prouver
l'existence de faits de portée juridique; ensuite, le recourant ne conteste
pas détenir ces documents ou du moins les renseignements qui permettent de
les établir; de plus, il ne se trouve pas dans un des cas exceptionnels
visés par l'art. 42 PCF, le secret bancaire dont il se prévaut n'étant
pas protégé par l'art. 321 ch. 1 CP, auquel se réfère cette disposition.

    Enfin, au regard de la troisième exigence posée, la décision attaquée
échappe également à la censure du Tribunal fédéral. D'une part, sous
le titre "Devoir de loyauté", l'art. 14 al. 1 LFP invite la direction
d'un fonds de placement à le gérer exclusivement dans l'intérêt des
porteurs de parts; or, lorsqu'une société de direction vend des parts,
en cours d'émission, à un prix supérieur à celui qui a été calculé sur
la base de l'art. 12 al. 3 LFP, il n'est pas exclu qu'elle viole son
devoir de loyauté. D'autre part, on peut se demander si le recourant n'a
pas procédé à une telle vente et si la société S. ne doit pas en être
tenue pour responsable; en effet, bien que le recourant ne fasse pas
partie des organes de cette société, il en est le principal actionnaire,
lui a prêté une somme considérable et figure au registre du commerce
sous la même adresse qu'elle, ce qui permet de supposer qu'il joue un
rôle prépondérant dans l'activité de cette société; preuve en est aussi
que, sur les formules de commande de parts, il a fait apposer au timbre
humide, à côté de l'en-tête imprimé au nom de son bureau et à son adresse,
la mention "Service d'information du fonds P.", accompagnée encore une
fois de cette même adresse. Ce sont là autant de raisons d'admettre
que les pièces demandées au recourant sont propres à influer sur la
décision qui sera prise éventuellement contre la société S. Assurément,
en l'état actuel de la procédure, il ne s'agit pas de fixer les conditions
auxquelles une violation de la LFP sera susceptible d'être retenue à la
charge de celle-ci; il suffit de constater qu'une telle violation n'est
pas impossible et que les documents sollicités du recourant peuvent
contribuer à en établir l'existence.

    c) Il n'y a pas lieu de suivre la société S. lorsqu'elle suggère,
à titre subsidiaire, que l'enquête soit exécutée au moyen d'un "contrôle
fiduciaire" par les soins d'un organe de revision, comme le prévoit
l'ordonnance concernant le placement de fonds étrangers, du 26 juin
1972. Il appartiendra à la CFB de décider de la manière dont elle doit
mener son enquête et de commettre des experts si elle le juge utile. Il
va de soi, cependant, qu'elle devra agir avec tact et discrétion, pour
éviter de causer sans nécessité un préjudice aux parties et aux tiers.

Erwägung 3

    3.- En conclusion, le recours est bien fondé dans la mesure où la
décision finale se dirigera contre le recourant, et mal fondé en tant
qu'elle sera prise contre la société S. Dans ces conditions, la décision
attaquée doit être maintenue, mais à des fins limitées. Aussi convient-il
de rejeter le recours au sens des considérants.