Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 99 IA 126



99 Ia 126

16. Arrêt du 11 juillet 1973 dans la cause Bruchez et consorts contre
Barras, commune de Bagnes et Conseil d'Etat du canton du Valais. Regeste

    Öffentliches Baurecht. Voraussetzungen der Erteilung einer
Baubewilligung, mit der eine Ausnahme von den Vorschriften des
Gemeindebaureglements über die Bauhöhe bewilligt wird.

    Die staatsrechtliche Beschwerde hat grundsätzlich rein kassatorische
Funktion (Erw. 1).

    Selbst wenn keine kantonale oder kommunale Bestimmung es erheischt, hat
die Behörde, will sie nicht gegen Art. 4 BV verstossen, ein Bauprojekt,
das nach einer ersten öffentlichen Auflage tiefgreifende Änderungen
erfahren hat, nochmals öffentlich aufzulegen (Erw. 3).

    Im vorliegenden Falle hat die Missachtung dieses Grundsatzes nicht
die Nichtigkeit der Bewilligung zur Folge angesichts der Interessen des
Bewilligungsempfängers (Erw. 4).

    Wenn der Mangel im Laufe des Verfahrens geheilt wurde, ist die
Bewilligung aus jenem Grunde auch nicht anfechtbar (Erw. 5). Gegenstand
der verfassungsmässigen Eigentumsgarantie (Erw. 6). Um zu entscheiden,
ob ein wichtiger Grund ("juste motif") für eine Ausnahme von den auch die
Nachbarn schützenden Vorschriften vorliege, sind die in Frage stehenden
Interessen gegeneinander abzuwägen (Erw. 7).

    Im vorliegenden Falle hat das Interesse der Nachbarn, deren Grundstücke
sich während längerer Zeit im Schatten des bewilligten Gebäudes befinden
und daher stark entwertet werden, als höher zu gelten als die zur
Rechtfertigung der Ausnahmebewilligung angerufenen öffentlichen Interessen
(Erw. 8).

Sachverhalt

    A.- La loi valaisanne du 19 mai 1924 sur les constructions prévoit que
les communes sont autorisées à édicter des règlements sur la police des
constructions (art. 4)'qui doivent être approuvés par le Conseil d'Etat
(art. 6).

    La commune de Bagnes a adopté en 1960 un "Règlement d'application
du plan d'aménagement de Verbier-Station" (RAPAV), homologué par le
Conseil d'Etat le 15 novembre 1960. Des modifications ont été apportées
à ce règlement, notamment en 1969, et sont entrées en vigueur dès leur
approbation par le Conseil d'Etat le 29 octobre 1969.

    Ce règlement prévoit qu'une autorisation préalable du Conseil communal
est obligatoire pour les constructions neuves (art. 48), que celui qui veut
effectuer une telle construction doit solliciter par écrit l'autorisation
du Conseil communal (art. 51).

    Le règlement contient encore les dispositions suivantes:

    Art. 53: Le Conseil communal publie au Bulletin officiel les
demandes en autorisation de bâtir après réception d'un dossier complet.
Les intéressés peuvent prendre connaissance des plans et dossiers auprès de
la Commune. La mise à l'enquête ne préjuge pas de la décision du Conseil
communal. Ce dernier est autorisé à dispenser de l'enquête les travaux
qu'il juge ne pas intéresser le voisin ou le public. Les observations,
réserves et oppositions des tiers doivent être adressées, dans le
délai fixé par l'avis public'en deux exemplaires'sous pli recommandé
au Conseil communal. Le Conseil communal ne prendra en considération
que les oppositions fondées sur le droit, sur des motifs d'intérêt
général'd'édilité, d'hygiène et de police du feu.

    Art. 55: Lorsque le Conseil communal autorise l'exécution du
projet'il délivre au maître de l'ouvrage un permis de construire. Le
permis de construire ne dispense pas de l'obligation de respecter les lois
et règlements. Demeurent réservées les dérogations consenties par les
autorités compétentes pour de justes motifs. Le maître de l'ouvrage est
tenu de conformer ses travaux aux pièces et plans approuvés; s'il veut
y apporter des modifications il doit présenter une nouvelle demande. Si
le Conseil communal n'autorise pas la construction projetée'il avise le
requérant en lui indiquant les motifs de son refus. Le permis est accordé
sans préjudice aux droits des tiers et sous la seule responsabilité du
propriétaire constructeur. Le Conseil n'est pas responsable envers les
opposants ni envers le propriétaire de la décision prise par lui après
enquête.

    Art. 78 (77 de la version de 1969): Les décisions prises par le Conseil
communal en application du présent règlement et de la loi cantonale sur
les constructions du 19 mai 1924, peuvent faire l'objet d'un recours au
Conseil d'Etat dans les vingt jours dès leur notification.

    L'ordonnance du Conseil d'Etat valaisan du 13 janvier 1967 sur
l'organisation et les attributions de la Commission cantonale des
constructions (OCCC) prévoit d'autre part que la demande de permis de
construire est soumise par l'administration communale à une enquête
publique de 10 jours au moins (art. 7 al.1). Pour les travaux de peu
d'importance ou les modifications de projets qui ne touchent pas aux
intérêts de tiers'il peut être fait abstraction de l'enquête publique
(art. 7 al. 2). Selon l'art 9 OCCC, si la commune approuve le projet,
elle le transmet à la CCC en l'accompagnant de sa décision et, le cas
échéant, des oppositions. Enfin, selon l'art. 21 OCCC, les décisions de
la CCC, comme celles des communes, peuvent faire l'objet d'un recours au
Conseil d'Etat.

    B.- Le 6 septembre 1968, l'architecte Torello a présenté à
l'administration communale de Bagnes, pour le compte d'une société
immobilière en formation, une demande d'autorisation pour la construction
à Verbier d'un bâtiment comportant un silo à voitures, des locaux
commerciaux, un hôtel garni et des appartements. Ce projet a été mis
à l'enquête publique dans le Bulletin officiel no 37 du 13 septembre
1968. Aucune opposition n'a été formée dans le délai imparti par cette
publication, et le 1er octobre 1968 la Municipalité de Bagnes a accordé,
en ce qui la concerne, l'autorisation. Mais la Commission cantonale des
constructions'après avoir consulté un architecte, a écrit à Torello, le
29 octobre 1968, que le projet de construction n'était pas satisfaisant du
point de vue esthétique et devait être complètement revu. Finalement, selon
les instructions qui lui furent données par la Commission, l'architecte
a présenté un nouveau projet comportant d'importantes modifications
par rapport au premier. Le projet primitif prévoyait trois niveaux
de garages, un étage commercial et, sur la dalle du dernier niveau de
garages, cinq corps de bâtiments d'une hauteur de plus de 15 m calculée
sur les façades latérales, et dont le faîte était à une hauteur de 20 m
de la route cantonale en son point le plus bas. Ces corps de bâtiments
étaient carrés et décalés les uns par rapport aux autres de la distance
d'une largeur de façade, de telle sorte qu'ils se touchaient à leur
angle nord-ouest. La Commission cantonale ayant demandé la suppression
d'un bâtiment en compensation de la surélévation des autres bâtiments
projetés'le second projet remplaçait les cinq corps de bâtiments prévus
sur la dalle supérieure du dernier niveau des garages par deux corps
de bâtiments d'une hauteur supérieure à celle qui était prévue par le
premier projet.

    L'administration communale de Bagnes a approuvé le nouveau projet
le 10 décembre 1968. Les 3 et 13 janvier 1969, la Commission cantonale
des constructions a donné l'autorisation de construire à la société
immobilière, qui avait pris le nom de "S.I. Les Arcades".

    C.- Gaston Barras se trouvait au bénéfice d'un droit d'emption sur
les immeubles que possédait la S.I. Les Arcades. Après l'obtention par
la société du permis de construire, il a déclaré, le 25 janvier 1969,
exercer son droit d'emption et les immeubles ont été transférés à son
nom. Les travaux de construction ont alors été entrepris.

    D.- Le 11 septembre 1969, Bruchez, qui est un voisin du fonds sur
lequel la construction est effectuée, a écrit à l'administration communale
de Bagnes qu'il faisait opposition à la réalisation du nouveau plan,
ce dernier n'étant pas conforme à celui mis à l'enquête publique.

    La commune'qui avait été saisie d'une autre demande dans le même sens,
a remis le projet modifié à l'enquête publique, avec publication dans
le Bulletin officiel du 2 janvier 1970. Il y a eu plusieurs oppositions,
que la commune de Bagnes a rejetées par décisions du 27 mai 1970, relevant
notamment que l'art. 55 RAPAV autorise des dérogations pour justes motifs
aux règles de construction visées dans le règlement et que l'apport de
250 places de parc dans une station "où le problème de parcage revêt un
aspect aujourd'hui des plus critiques est à considérer avec un point de
vue tout particulier".

    Entre-temps'le 7 avril 1970, Victor Germanier, Albert Tirou, Anne-Marie
Duphénieux et les époux Gabriel Duphénieux, tous opposants, s'étaient
adressés au Conseil d'Etat pour lui demander d'ordonner l'arrêt immédiat
des travaux sur le chantier. Les mêmes personnes et Hubert Bruchez ont
déféré la décision communale au Conseil d'Etat, concluant à ce que la
construction du complexe Les Arcades selon les plans mis à l'enquête
publique au mois de décembre 1969 ne soit pas autorisée.

    Par décision du 14 octobre 1970, le Conseil d'Etat a rejeté le
recours dans la mesure où il était recevable. Il a considéré que Tirou
ne pouvant "justifier la violation de ses droits juridiquement protégés
par la construction litigieuse", son recours n'était pas recevable; la
légitimation des autres recourants a été en revanche admise. Le Conseil
d'Etat a considéré que l'autorisation de construire n'était pas nulle et
que d'autre part la commune pouvait en l'espèce, se fondant sur l'art. 55
RAPAV, octroyer une dérogation pour le bâtiment en construction.

    E.- Agissant par la voie du recours de droit public, Bruchez,
Germanier, Tirou, Anne-Marie Duphénieux et les époux Duphénieux demandent
au Tribunal fédéral d'annuler la décision du Conseil d'Etat du 14 octobre
1970, de déclarer nulle ou révoquer l'autorisation de bâtir, enfin de
renvoyer la cause au Conseil d'Etat pour qu'il refuse l'autorisation de
bâtir sollicitée par la mise à l'enquête publique de décembre 1969.

    Le Conseil d'Etat et l'intimé Barras concluent au rejet du recours,
dans la mesure où il est recevable.

    La Chambre de droit public a visité les lieux et fait établir par un
architecte une expertise dont les conclusions seront reprises dans les
considérants de droit du présent arrêt.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

    I. Questions préliminaires 1. - Sous réserve d'exceptions qui ne se
trouvent pas réalisées dans le présent cas, le recours de droit public
a une fonction purement cassatoire (RO 98 Ia 577). Les conclusions des
recourants ne sont recevables que dans la mesure où elles tendent à
l'annulation de l'arrêté du Conseil d'Etat.

Erwägung 2

    2.- Le recours cantonal de Tirou a été jugé irrecevable. La Chambre de
céans ne pourrait dès lors annuler la décision attaquée'en ce qui concerne
ce recourant, que si elle reposait sur une application arbitraire des
dispositions du droit cantonal sur la recevabilité, soit plus précisément
sur la qualité pour agir. Il convient d'examiner ce point d'emblée,
avant d'aborder le cas des autres recourants.

    Pour dénier à Tirou la qualité pour agir devant lui, le Conseil
d'Etat se fonde sur l'art. 20 de l'arrêté du 11 octobre 1966 concernant la
procédure administrative, qui dispose que "le droit de recours appartient
à quiconque est atteint par la décision et a personnellement un intérêt
digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée". Se référant à
la jurisprudence de la Cour de céans concernant l'art. 88 OJ, il interprète
cette disposition en ce sens que le voisin n'a qualité pour recourir que
s'il peut alléguer la violation d'une disposition tendant à protéger non
seulement l'intérêt général, mais encore l'intérêt des voisins en tant
que tels. Dans le cas particulier de Tirou, il estime que les intérêts
de celui-ci ne sont pas juridiquement protégés par les règles sur la
hauteur des constructions, la distance entre son chalet et le lieu où
l'on construit étant trop grande et les bâtiments projetés n'ayant pas
pour effet de le priver de lumière ou de porter atteinte à sa tranquillité.

    Tirou ne soutient pas, dans son recours de droit public'que les motifs
ainsi avancés par le Conseil d'Etat soient arbitraires. Il reproche
en revanche à l'autorité cantonale de n'avoir pas tenu compte du fait
qu'il est également propriétaire d'une parcelle, actuellement louée à
l'entreprise chargée de la construction et immédiatement voisine des
bâtiments des Arcades.

    Ce grief est mal fondé. Il incombait au recourant de justifier de
sa qualité pour agir devant l'autorité cantonale elle-même. Il ne l'a
pas fait. Le recours cantonal déposé en son nom était accompagné d'une
procuration le désignant comme propriétaire du chalet "La Pastourelle". Le
dossier ne renferme pas de pièce dont l'autorité cantonale eût dû tenir
compte d'office et qui eût établi l'existence d'une seconde parcelle
propriété de ce même recourant. Le Conseil d'Etat n'est donc pas tombé dans
l'arbitraire et le recours doit être rejeté en tant qu'il émane de Tirou.

    II. Griefs formels

Erwägung 3

    3.- Les autres recourants se plaignent tout d'abord de la violation
de leur droit d'être entendus, le permis de construire ayant été délivré
sans qu'ils aient eu l'occasion de se prononcer sur les plans remaniés
présentés par l'architecte Torello.

    a) L'art. 53 RAPAV prescrit que les demandes en autorisation de bâtir
sont mises à l'enquête sauf si le Conseil communal en décide ainsi, en
ce qui concerne les travaux qu'il juge ne pas intéresser le voisin ou le
public. Selon la même disposition, le Conseil communal ne doit prendre
en considération que les oppositions fondées sur le droit, sur des motifs
d'intérêt général d'édilité, d'hygiène et de police du feu.

    Il résulte de ce texte que les personnes directement intéressées,
mais aussi le public en général, sont autorisés à faire opposition à une
demande en autorisation de bâtir et que l'opposition peut être fondée
sur des motifs d'intérêt général et non seulement sur des motifs touchant
l'intérêt personnel de son auteur.

    C'est donc à juste titre que les recourants affirment qu'ils étaient
en droit d'exiger, quel que fût leur intérêt personnel'que la commune
de Bagnes mît à l'enquête les plans de la construction. Alléguant
une violation de ce droit, ils ont qualité pour recourir au regard de
l'art. 88 OJ.

    b) Les plans ont effectivement été mis à l'enquête par publication du
13 septembre 1968. Les recourants ne le contestent pas, mais ils relèvent
que les plans qui étaient alors déposés ne sont pas ceux qui ont servi de
base à la construction actuelle. Ils ont été modifiés ultérieurement et
l'autorisation de construire a été accordée sur la base de plans modifiés,
qui, à l'époque'n'ont pas été soumis à l'enquête publique.

    Les recourants déclarent que l'art. 55 RAPAV "exige absolument qu'une
nouvelle demande soit soumise à l'autorité dès qu'une modification doit
être apportée aux plans approuvés et ouvre par là une nouvelle procédure
de mise à l'enquête publique obligatoire". Mais ils se trompent lorsqu'ils
prétendent que cette disposition s'applique ici. En effet, l'art. 55 4e
phrase concerne le cas où le maître de l'ouvrage, après avoir obtenu
l'autorisation de construire, entend apporter des modifications à ses
plans approuvés par l'autorité.

    En l'espèce, c'est dans le cadre de la procédure d'approbation, et
avant d'obtenir l'approbation, qu'à la demande de la Commission cantonale
des constructions le maître de l'ouvrage a été appelé à modifier ses
plans primitifs. Il a donc, quant à lui, satisfait aux dispositions
réglementaires.

    c) En revanche, il sied de se demander s'il n'appartenait pas à
l'administration communale, une fois qu'elle eut reçu les plans remaniés à
la demande de la Commission cantonale, de les mettre à nouveau à l'enquête
avant de délivrer son autorisation. Ce point n'est pas résolu d'une façon
expresse par le règlement communal. Mais'd'après l'art. 7 al. 2 OCCC,
l'administration communale peut se dispenser de soumettre à l'enquête "les
modifications de projets qui ne touchent pas aux intérêts de tiers". Or
les intérêts de tiers étaient évidemment "touchés" en l'espèce.

    Le Conseil d'Etat, dans l'arrêté attaqué, s'exprime à ce sujet d'une
façon quelque peu contradictoire. Il relève que la commune, plus de 7 mois
après le début des travaux, "se décida, sous la pression de voisins plus
ou moins directs de la construction, de pallier au vice d'absence de mise
à l'enquête par la publication au Bulletin officiel du 2 janvier 1970"
et il examine "si ce vice entraîne la nullité du permis de bâtir délivré
en janvier 1969". Il semble donc qu'il admette expressément l'existence
d'un vice de forme. Par la suite, cependant, il affirme que'bien qu'il
soit indiqué de le faire, on ne peut exiger d e l'autorité compétente qui
veut accorder une dérogation "qu'elle s'assure que les voisins - dont les
droits peuvent être lé és par cette dérogation - en soient dûment avisés",
lorsqu'aucune disposition légale ou réglementaire ne le lui impose.

    Le Conseil d'Etat ne fait pas mention de l'art. 7 OCCC et les
recourants eux-mêmes n'invoquent pas ce moyen. Mais cela ne saurait
tirer à conséquence. Car il apparaît évident que si un projet se trouve
totalement transformé, comme l'a été le projet ici en cause, où cinq
bâtiments d'une hauteur de 16 m 50 ont été remplacés par deux bâtiments
d'une hauteur de 25 m, la bonne foi exigeait que l'autorité communale,
même sans disposition légale, mît ce nouveau projet à l'enquête.

    d) L'autorité communale a relevé il est vrai que ni les recourants
ni personne d'autre n'avaient pris connaissance du premier projet mis à
l'enquête publique et que ce projet n'avait pas été frappé d'opposition,
bien qu'il comportât déjà des dérogations au règlement des constructions
de Verbier. Mais le fait que les recourants n'ont pas pris connaissance du
premier projet ne les prive pas du droit de s'opposer au projet qui a fait
l'objet de l'autorisation de construire. L'autorité n'a pas à rechercher
si, oui ou non'les intéressés ont consulté le dossier déposé au bureau
communal ou s'ils en ont eu connaissance d'une autre façon. Du fait que
la publication de la mise à l'enquête a été régulièrement effectuée, ils
sont censés en avoir pris connaissance. De toute façon, le fait qu'ils
n'auraient pas consulté les plans ne les empêche pas de former opposition
lors d'une seconde mise à l'enquête motivée par une modification du projet
primitif. Dans ce cas, le requérant ne peut rien déduire en sa faveur du
fait que le projet primitif n'a pas suscité d'opposition.

    e) Le Conseil d'Etat déclare qu'en ne mettant pas à l'époque à
l'enquête le projet modifié à la demande de la Commission cantonale
des constructions, la commune avait vraisemblablement estimé que cette
modification ne portait pas préjudice aux intérêts des voisins, le nouveau
projet leur étant plus favorable que le projet initial.

    Le Tribunal fédéral a effectivement statué qu'il n'était pas
arbitraire de faire abstraction d'une nouvelle mise à l'enquête dans le
cas où un projet de construction a été amendé à la suite de l'opposition
de tiers dans l'intérêt de ces derniers (RO 91 I 346 et arrêt Le Bouleau
SA du 8 mars 1961). En l'espèce, le projet définitif est cependant trop
différent du premier projet pour que l'on puisse appliquer un raisonnement
analogue. S'il est plus favorable aux voisins en ce que cinq bâtiments
ont été remplacés par deux, il est aussi plus défavorable en ce sens que
ces deux bâtiments sont beaucoup plus hauts que ceux du premier projet. Il
ne s'agissait donc pas d'une modification dont d'emblée on pouvait penser
qu'elle ne porterait aucun préjudice aux tiers.

    Il ressort de ce qui précède que la commune de Bagnes a violé le droit
des recourants d'être entendus lorsqu'elle a, en ce qui la concerne,
accordé le permis de construire sans ouvrir une nouvelle enquête à la
suite du dépôt du deuxième projet. 4. - Les recourants considèrent que
cette violation doit entraîner la nullité de l'autorisation de construire
délivrée à la Société Les Arcades.

    a) D'après l'opinion dominante, tout acte administratif affecté d'un
vice n'est pas nécessairement nul. Pour décider s'il doit ou non être
considéré comme tel, il y a lieu de procéder à une pesée des intérêts en
présence. L'acte ne sera nul que dans des cas exceptionnels (cf. IMBODEN,
Der nichtige Staatsakt, p. 72 ss.)'notamment quand trois conditions sont
réunies cumulativement, soit quand le vice est grave, qu'il est patent
ou pour le moins facilement reconnaissable, qu'enfin l'admission de la
nullité ne porte pas atteinte d'une manière intolérable à la sécurité
juridique ou que les intérêts du citoyen confiant dans la validité de la
décision ne sont pas méconnus d'une façon intolérable (IMBODEN, Schweiz.
Verwaltungsrechtsprechung, 4e éd. vol. I no 326 II p. 189; cf. aussi
GRISEL, Droit administratif suisse, p. 202/203). Dans son arrêt publié
au RO 83 I 5'le Tribunal fédéral a déclaré que cette opinion avait pour
elle des arguments sérieux et qu'elle n'était en tout cas pas arbitraire
(voir aussi RO 71 I 198). Dans l'arrêt RO 92 IV 197, la Cour de cassation
pénale du Tribunal fédéral a déclaré qu'un acte administratif ne pouvait
être considéré comme absolument nul et inefficace que s'il était affecté
de vices fondamentaux, ressortant prima facie de l'acte lui-même.

    b) En l'espèce, on ne peut pas considérer que le vice, si regrettable
soit-il, ait une gravité telle que l'autorisation de construire doive
être considérée comme nulle. La première demande mise à l'enquête, qui
ne s'est heurtée à aucune opposition, comportait déjà des dérogations
par rapport aux dispositions légales. La deuxième demande tenait compte
des exigences posées par la Commission cantonale des constructions dans
l'intérêt de l'esthétique et aussi dans celui des voisins.

    D'autre part, la société propriétaire avait satisfait aux exigences
formelles que lui imposait le règlement communal. Ce n'est pas à elle
qu'il appartenait de demander la publication de la demande d'autorisation
modifiée. Mais il incombait aux autorités compétentes de procéder à
cette formalité. Les intérêts de l'intimé, confiant dans la décision
déjà prise par les pouvoirs publics, seraient donc méconnus d'une façon
intolérable si l'on considérait l'autorisation comme nulle.

Erwägung 5

    5.- Un acte affecté d'un vice, mais qu'on ne saurait considérer
comme nul, peut faire l'objet d'une demande d'annulation (IMBODEN,
Schweiz. Verwaltungsrechtsprechung'loc.cit.). En l'espèce, cependant,
le vice formel dont l'autorisation de construire est affectée ne doit
pas non plus entraîner l'annulation. En effet, la Commune a ouvert en
décembre 1969 une nouvelle procédure d'enquête, et les recourants ont pu
se prononcer à cette occasion. Si leur droit d'être entendus n'a pas
été respecté à l'origine, le vice a été réparé à cette époque dans la
mesure où il pouvait l'être. Par cette nouvelle enquête'l'administration
communale a eu connaissance des avis exprimés par les recourants et elle
s'est déterminée à leur sujet en rejetant les oppositions. Les opposants
ayant recouru auprès du Conseil d'Etat, celui-ci, qui est l'autorité
hiérarchique supérieure en matière de police des constructions (art. 21
OCCC)'a également pris en considération les oppositions qui avaient été
formées et, tout en les écartant, a tranché en connaissance de cause
(RO 93 I 656 no 82, 94 I 108 consid. 3, 96 I 188).

    On reviendra plus bas (consid. 9) sur un autre grief formel soulevé
par les époux Duphénieux seuls.

    III. Griefs matériels

Erwägung 6

    6.- Sur le fond, les recourants invoquent l'art. 4 Cst., ainsi que
les art. 3 et 6 de la constitution valaisanne, qui proclament l'égalité
devant la loi et l'inviolabilité de la propriété. Ces deux dernières
dispositions n'ont cependant pas de portée propre par rapport aux règles
correspondantes de la Constitution fédérale. Le recours se fonde donc en
réalité sur les art. 4 et 22 ter Cst., ce dernier invoqué implicitement.

    Les recourants ont qualité pour se plaindre de la violation des règles
de construction de Verbier-Station. En effet, ainsi que le reconnaît le
Conseil d'Etat, les dispositions de ce règlement qui fixent l'emplacement
et les dimensions des maisons, visent à garantir aux particuliers un
minimum de lumière et de tranquillité, en même temps qu'à assurer le
développement rationnel des agglomérations. Les recourants sont dès lors
fondés à invoquer l'art. 4 Cst., soit le principe de l'interdiction de
l'arbitraire, qui protège tous les intérêts des citoyens présentant une
importance juridique, ainsi que la garantie de la propriété, qui, en
dehors du droit de propriété proprement dit, protège une série d'autres
droits patrimoniaux appartenant au domaine du droit privé ou qui, de par
leur nature, ont été considérés, lors de l'institution de la garantie
de la propriété, comme étant liés à ce droit (RO 91 I 419). Le contenu
du droit de propriété ne résulte pas seulement des dispositions légales
sur les droits réels, mais de toutes les règles juridiques qui touchent
à la propriété, notamment des règles cantonales et communales sur les
constructions (ibid.). Ces règles créent pour les propriétaires fonciers
une sphère d'intérêts juridiques qui, bien qu'elle dépasse le cadre du
droit de propriété comme tel'fait partie des biens juridiques protégés
par la garantie de la propriété.

Erwägung 7

    7.- L'art. 13 RAPAV'applicable à la zone dite "de base" dans laquelle
se trouve le bâtiment des Arcades'dispose que la hauteur des bâtiments
est'en général, de 13 m, avec deux étages sur rez-de-chaussée plus
des combles habitables, les hôtels pouvant compter un étage de plus
et atteindre 15 m 50. Pour autoriser la construction litigieuse, qui
s'écarte de manière importante de ces règles'l'autorité cantonale se
fonde sur l'art. 55 du même règlement, qui admet des dérogations "pour
de justes motifs". En l'espèce, elle voit un juste motif dans le fait
que l'intimé aménagera dans le bâtiment des places de parc, ce qu'il
n'aurait pas fait, faute de rentabilité, s'il avait dû respecter les
prescriptions réglementaires.

    a) La constitutionnalité de l'art. 55 RAPAV n'est pas mise en
question. C'est sur l'existence d'un "juste motif" et sur les conséquences
à en déduire que porte le litige.

    La notion de "juste motif" est un concept juridique non défini; son
contenu doit être précisé par voie d'interprétation, compte tenu du but
de la norme, ainsi que de sa place dans la loi et dans le système général
du droit (RO 96 I 373 consid. 4). Comme les dispositions analogues qui
figurent dans de nombreux règlements de construction, la règle de l'art. 55
RAPAV doit permettre d'assouplir les exigences du règlement lorsque, dans
un cas particulier, leur application stricte se révélerait contraire à
l'intérêt public, ou porterait une atteinte excessive aux intérêts d'un
propriétaire, sans que l'intérêt public ou l'intérêt des voisins le
justifie. Il est notamment admissible, en principe, et sous certaines
conditions qui seront encore examinées, de déroger aux règles sur les
dimensions des bâtiments, lorsque leur application rendrait impossible ou
compliquerait à l'excès la réalisation d'un ouvrage d'utilité publique, que
celui-ci soit construit par la collectivité ou par un particulier. C'est un
motif de cet ordre que l'autorité cantonale invoque en l'espèce. Personne
ne soutient, en effet, que sans le parking un bâtiment réglementaire
n'eût pas été rentable et eût imposé un sacrifice excessif au propriétaire.

    On ne peut guère contester aujourd'hui que la création de places de
parc en dehors de la chaussée, dans une station de sport d'hiver et aux
fins de permettre le déneigement, soit d'utilité publique. Une dérogation
au règlement pourra en principe être concédée si elle est nécessaire
à la réalisation de tels ouvrages. Mais il faut encore que l'autorité
mette en balance d'une part l'intérêt public à la réalisation de ceux-ci
et d'autre part l'intérêt public à l'application stricte du règlement
et l'intérêt privé des propriétaires voisins au respect par les tiers
des règles qu'ils doivent eux-mêmes observer. Ce n'est que si le premier
l'emporte qu'il y aura un juste motif de déroger au règlement. Cependant,
la notion d'intérêt public est elle-même un concept juridique non défini,
laissant à l'autorité administrative une marge d'appréciation (cf. RO
98 I/b 422). Qu'il s'agisse de la fixation des règles concernant la
hauteur des bâtiments (cf. RO 94 I 136 lit. a) ou, comme en l'espèce,
des conditions d'une dérogation à ces mêmes règles, le Tribunal fédéral
ne reverra qu'avec retenue le résultat de cette pesée des intérêts,
car il ne lui appartient pas de substituer son appréciation à celle de
l'autorité cantonale sur une question dont la solution dépend surtout
des conditions locales (cf. RO 95 I 554 lit. b).

    b) Pour revoir le résultat de la pesée des intérêts, la Chambre se
fondera sur les constatations faites à l'occasion de l'inspection oculaire
et sur l'expertise. A propos de celle-ci, une observation s'impose.

    L'expert fait surtout la comparaison entre le projet qui a été mis
à l'enquête en septembre 1968 (projet 1) et celui qui a servi de base à
l'exécution de la construction (projet 3). Or il appert des renseignements
obtenus de la Commission cantonale des constructions et de la commune
que ce sont en réalité - contrairement à ce qu'il croyait - les plans du
projet no 2 (soit ceux qui ont été approuvés par la Commission cantonale
des constructions) qui ont été mis à l'enquête et qui font l'objet de
l'arrêté attaqué. L'intimé l'a confirmé dans sa lettre du 28 novembre 1972,
déclarant que les plans des projets exécutés comportent des modifications
qui ont été jugées par la commune "comme n'étant pas de nature à provoquer
une nouvelle mise à l'enquête publique".

    Ce sont donc les plans du projet no 2 qui devraient servir de base
à la décision du Tribunal fédéral. Si vraiment les plans d'exécution
présentaient des différences essentielles par rapport aux plans ayant
fait l'objet de l'enquête, il eût appartenu aux intéressés d'agir à ce
sujet auprès des autorités cantonales et de les inviter à prendre toutes
mesures utiles pour faire respecter la décision du Conseil d'Etat. Le
Tribunal fédéral, au stade actuel en tout cas'n'a pas à examiner si la
décision prise par le Conseil d'Etat a été correctement exécutée.

    Cependant, si l'expert a fait essentiellement la comparaison entre
le projet 1 et le projet 3, alors que le Tribunal n'a pas à connaître en
théorie de ce dernier projet'son rapport et son rapport complémentaire
permettent tout de même de dire que le deuxième projet comporte par
rapport au premier une aggravation importante des inconvénients résultant
de la construction pour les voisins. Comme l'a rappelé l'expert'le premier
projet prévoyait une hauteur de 16 m 50 à la corniche et de 20 m au faîte,
tandis que le deuxième projet prévoyait 25 m à la corniche et 29 m 50 au
faîte. Le projet d'exécution n'a en somme rehaussé l'immeuble dans son
ensemble que de 1 m 10. Certes aussi, la largeur de la maison s'est accrue
de 5 m. Mais il n'en demeure pas moins que le projet d'exécution, s'il
a pu aggraver quelque peu les inconvénients résultant de la construction
pour les voisins'n'a tout de même pas modifié dans l'ensemble les plans du
deuxième projet. C'est d'ailleurs l'opinion aussi bien de l'administration
communale de Bagnes que de la Commission cantonale des constructions et
de l'intimé.

    Il n'est donc pas utile d'inviter l'expert à compléter son étude. Les
différences constatées entre le deuxième projet et le projet d'exécution
ne sont pas telles que les conclusions générales de l'expert basées sur le
troisième projet puissent être infirmées si on les applique au deuxième
projet. En outre, il ne serait de toute façon pas réaliste de faire
totalement abstraction de la construction telle qu'elle a été achevée et
de renvoyer les recourants à agir à nouveau auprès de l'autorité cantonale
sur ce point.

Erwägung 8

    8.- a) Personne ne prétend - il serait téméraire de le faire -
que la dérogation consentie à l'intimé se justifie par des motifs
d'ordre esthétique ou urbanistique. Techniquement, rien ne s'opposait
à la construction d'un parking souterrain semblable à celui qui a été
autorisé, mais surmonté de bâtiments réglementaires. Si, comme l'intimé
et la commune le soutiennent, un tel ouvrage n'était pas rentable
dans son ensemble - contrairement à celui qui a été autorisé - et si
l'intérêt public commandait la création de places de parc à cet endroit,
la commune aurait pu contribuer aux frais de construction ou aux revenus
de l'exploitation. Vu sous cet angle, l'intérêt public allégué se dégrade
donc en un simple intérêt financier de la collectivité publique'qui
s'épargne une dépense. Or, selon la jurisprudence constante du Tribunal
fédéral, les intérêts purement fiscaux de la collectivité ne sont en
général pas considérés comme étant d'intérêt public (RO 88 I 253 et les
arrêts cités). A cet égard, la présente espèce se distingue de la cause
Vuadens contre Vouvry et Valais (arrêt inédit du 15 septembre 1971) où,
à défaut d'une dérogation - du reste de peu d'importance - il eût été
techniquement exclu de créer, dans de bonnes conditions, soit une piscine
couverte accessible au public, soit un poste de commandement souterrain
pour l'organisme local de protection civile. A tout le moins l'intérêt
public allégué apparaît ici d'importance secondaire. Il ne justifierait
qu'une atteinte légère aux intérêts juridiquement protégés des voisins.

    b) Il ressort du rapport d'expertise et de l'inspection oculaire
qu'en réalité les dérogations consenties au constructeur du bâtiment
"Les Arcades" causent un préjudice considérable à certains voisins, dont
Bruchez et Germanier. Aux équinoxes, ces recourants sont privés l'un de
42% et l'autre de 30% de la durée d'ensoleillement possible, soit une
perte de 4 h 40 et de 3 h 20. Certes, pour Bruchez'le premier projet
emportait déjà une perte d'ensoleillement de 3 h 10; on ne saurait
cependant en tirer aucune conclusion'puisque cette perte a encore
été considérablement aggravée par le deuxième projet et par les plans
d'exécution. Or, en matière de bâtiments hauts'les législations cantonales
modernes considèrent comme admissible une perte d'ensoleillement de 2
heures seulement à l'équinoxe (Berne, art. 130 de l'ordonnance sur les
constructions, du 26 novembre 1970; Bâle-Campagne, § 17 de l'ordonnance
d'exécution - du 27 janvier 1969 - de la loi sur les constructions),
voire à un jour moyen d'hiver (St-Gall, art. 69 de la loi sur les
constructions, du 6 juin 1972). C'est aussi cette dernière norme qu'admet
l'Office zurichois pour la planification régionale dans un rapport de 1967
(Anleitung zur Bestimmung des Schattenverlaufs von hohen Gebäuden, Die
2-Stunden-Schattenkurve). Bien que la législation valaisanne ne connaisse
pas de règles analogues, il est évident qu'un dépassement de 133% et de
66% des valeurs considérées ailleurs comme le maximum tolérable constitue
une atteinte très grave pour le propriétaire voisin touché, surtout dans
un lieu touristique. Lorsqu'elle atteint de telles valeurs absolues'la
perte d'ensoleillement affecte en effet la salubrité des bâtiments, ou,
si les parcelles voisines sont encore non bâties, empêche pratiquement d'en
tirer parti conformément à la destination de la zone (cf. arrêt de ce jour
dans la cause Schmid, RO 99 Ib 149 consid. 4). L'intérêt public invoqué,
supposé qu'il puisse être pris en considération, n'apparaît dès lors de
toute façon pas tel qu'il justifie la lésion infligée aux voisins, dont
les propriétés sont fortement dévaluées à dire d'expert. Au demeurant,
en portant atteinte aux intérêts juridiquement protégés des voisins,
l'autorité communale et à sa suite l'autorité cantonale ont porté atteinte
à l'intérêt public, qui exige lui aussi que l'on ne puisse, surtout dans
une station de montagne, construire sans nécessité absolue un bâtiment
écrasant par sa masse les immeubles voisins et les privant de soleil et
de lumière. En approuvant l'autorisation litigieuse, l'autorité cantonale
a donc manifestement excédé son pouvoir d'appréciation et gravement violé
le principe de proportionnalité, car il n'existe aucun rapport raisonnable
entre l'atteinte aux intérêts juridiquement protégés des voisins et le
résultat recherché (GRISEL, Droit administratif suisse, p. 400). Partant,
la décision écartant les oppositions de Bruchez et de Germanier doit
être annulée comme arbiraire. Il appartiendra à l'autorité cantonale de
tirer les conséquences de cette annulation et de dire de quelle façon
l'application de règles conformes à la constitution doit être assurée. Le
Tribunal fédéral n'a pas, à ce stade du litige, à se prononcer sur les
suggestions de l'expert concernant la réparation du dommage.

Erwägung 9

    9.- a) La situation est différente pour les autres recourants,
dont les propriétés sont situées au sud de la construction litigieuse
et ne se trouvent pas dans l'ombre portée de celle-ci. Sans doute les
règles sur la hauteur des bâtiments peuvent-elles avoir pour les voisins
d'autres effets favorables, comme celui de leur garantir la vue et de les
préserver des vues plongeantes sur leur propre fonds. Mais les recourants
eux-mêmes ne soutiennent pas que la dérogation consentie aggrave leur
situation à cet égard. De toute façon, ce préjudice ne serait en aucune
façon comparable à celui qui résulte de la perte d'ensoleillement et qui
affecte la salubrité même des bâtiments touchés. Les recourants Duphénieux
ne subissent donc pas, du fait de la dérogation, un dommage sensiblement
supérieur à celui qui serait résulté de bâtiments réglementaires. En tant
qu'il met en cause cette dérogation, leur recours est mal fondé.

    b) Les époux Duphénieux se plaignent que les balcons ne se trouvent
qu'à 2 m 40 de la limite de leur fonds, alors que le règlement prévoit
3 m. Ils reprochent à l'autorité cantonale de n'avoir pas statué sur
ce moyen.

    De fait'le Conseil d'Etat ne s'est pas prononcé, relevant seulement
que les distances prévues par le droit cantonal étaient respectées. Mais
peu importe. L'autorité n'est pas tenue de répondre à tous les arguments
présentés par les parties, lorsqu'ils sont manifestement irrecevables
ou mal fondés (TINNER, Das rechtliche Gehör, RDS 1964 II 363; DARBELLAY,
Le droit d'être entendu, ibid., p. 445). Or, en l'espèce, le moyen avait
été présenté tardivement, puisque les recourants ne l'avaient évoqué
que dans une lettre adressée au Conseil d'Etat le 28 septembre 1970,
bien après l'échéance du délai de recours.

Entscheid:

              Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Rejette le recours de Tirou et celui des consorts Duphénieux, en tant
qu'il est recevable; admet le recours de Bruchez et de Germanier et annule
la décision attaquée.