Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 97 I 305



97 I 305

43. Arrêt du 23 juin 1971 dans la cause Bouille SA contre Creatini et
Tribunal de prud'hommes du district de Neuchâtel. Regeste

    Willkür. Anspruch auf Lohn im Krankheitsfall (Art. 335 OR).

    Anrechnung des von einer Krankenkasse bezahlten Krankengeldes auf
den vom Arbeitgeber geschuldeten Lohn (Art. 130 Abs. 1 KUVG).

    Die Lohnzahlungspflicht des Arbeitgebers kann unter gewissen
Voraussetzungen durch Kollektivvertrag durch die von einer Krankenkasse
geleistete Taggeldentschädigung abgelöst werden.

Sachverhalt

    A.- Par lettre du 12 février 1969, Alceste Creatini a été engagé
comme mécanicien faiseur d'étampes par la Société anonyme G. et E.
Bouille, fabrique de boîtes de montres à Neuchâtel. Le 30 octobre 1970,
l'employeur lui a signifié son congé pour la fin du mois de décembre 1970.
Creatini a été absent pour cause de maladie du 2 au 9 novembre 1970,
puis du 24 novembre au 2 décembre 1970. Par lettre du 25 novembre 1970,
Bouille SA l'informa que l'assurance-maladie couvrait 80% du salaire et
que le 20%, de même que les deux premiers jours de maladie, étaient à la
charge du salarié.

    B.- Bouille SA n'ayant versé, pour les jours de maladie, que
l'indemnité de La Bernoise, compagnie d'assurance sur la vie avec laquelle
elle avait conclu un contrat d'assurance contre la maladie, Creatini
ouvrit action devant le Tribunal de prud'hommes du district de Neuchâtel,
réclamant à son employeur le solde du salaire auquel il avait droit au
31 décembre 1970 selon le contrat, soit 409 fr. 35. Bouille SA conclut
au rejet de la demande, affirmant que Creatini n'avait droit pendant
la maladie qu'à 80% de son salaire à partir du 3e jour de maladie, soit
au montant versé par La Bernoise, à laquelle elle payait elle-même les
primes concurremment avec Creatini.

    Se fondant sur l'art. 335 CO, le tribunal a condamné l'employeur à
payer à Creatini le montant de 409 fr. 35.

    C.- Agissant par la voie du recours de droit public, la Société anonyme
G. et E. Bouille requiert le Tribunal fédéral d'annuler le jugement du
Tribunal de prud'hommes du district de Neuchâtel du 25 janvier 1971. Elle
invoque la violation de l'art. 4 Cst.

    Répondant au nom du Tribunal de prud'hommes, son président conclut
au rejet du recours; l'intimé fait de même.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Selon l'art. 23 de la loi du 23 mai 1951 sur la juridiction des
prud'hommes, les décisions des tribunaux de prud'hommes ne peuvent pas
faire l'objet d'un recours en cassation civile; une telle voie n'est
ouverte qu'en cas de violation des règles de compétence (art. 23 al. 2),
ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

    Ainsi la décision attaquée est une décision finale prise en dernière
instance cantonale, contre laquelle est ouverte la voie du recours de
droit public pour violation de l'art. 4 Cst.

Erwägung 2

    2.- En condamnant l'employeur à payer à Creatini le montant de 409 fr.
35, le Tribunal de prud'hommes a fait application de l'art. 335 CO, selon
lequel, dans les contrats de travail conclus à long terme, l'employé ne
perd pas son droit au salaire pour un temps relativement court, lorsqu'il
est empêché de travailler sans sa faute pour cause de maladie.

    La recourante ne conteste pas que l'intimé remplisse en principe les
conditions prévues par l'art. 335 CO. Ayant travaillé dans l'entreprise
pendant près de deux ans, Creatini était au bénéfice d'un contrat à long
terme, tout au moins d'après l'opinion dominante (cf. OSER/SCHÖNENBERGER,
Obligationenrecht, ad art. 335 rem. 17; SCHWEINGRUBER, Commentaire du
contrat de travail, p. 66/67). L'interruption de travail a duré un peu
plus de deux semaines; il s'agissait donc d'un temps relativement court
eu égard à la durée antérieure de l'emploi.

    Cependant, la recourante affirme que le jugement entrepris est
arbitraire parce qu'il n'a pas tenu compte de ce que l'employeur, ayant
conclu un contrat d'assurance-maladie collective avec une compagnie
d'assurance, pouvait se dispenser de payer le salaire dû conformément à
l'art. 335 CO et que dès lors l'intimé n'avait droit qu'aux indemnités
d'assurance. Selon la recourante, Creatini savait ou devait savoir
que l'assurance conclue par la recourante la libérait des obligations
résultant de l'art. 335 CO, parce que d'une part les conditions de
l'assurance-maladie étaient placardées dans l'entreprise, et que d'autre
part l'intimé payait la moitié des primes de l'assurance. Enfin, dit-elle,
l'intimé "aurait pu être affilié à la FOMH", qui a conclu une convention
contenant une clause libératoire de l'art. 335 CO pour l'employeur qui
crée une caisse-maladie en faveur de son personnel.

Erwägung 3

    3.- Aux termes de l'art. 130 al. 1 LAMA, lorsque le travailleur est
affilié à une caisse-maladie reconnue et que l'employeur supporte au
moins la moitié des contributions, l'indemnité de chômage due par la
caisse-maladie peut être déduite du salaire dû à teneur de l'art. 335
CO. La jurisprudence a admis que cette disposition est applicable
par analogie à l'assurance qui n'a pas été contractée auprès d'une
caisse-maladie reconnue par la Confédération au sens de la LAMA, mais
auprès d'une entreprise privée d'assurance (RO 96 II 138). La compagnie
La Bernoise est une telle entreprise privée.

    La recourante avait donc le droit de déduire du salaire le montant
des prestations de la caisse-maladie. Mais l'intimé ne lui a pas contesté
ce droit. Il a réclamé le paiement de la différence entre le salaire dû
aux termes du contrat de travail et les montants payés par la compagnie
d'assurance, soit le salaire pour le délai d'attente pendant lequel la
compagnie d'assurance ne paie pas d'indemnité, et le 20% du salaire pour
les jours suivants, la compagnie ne payant que 80% du salaire dû selon
le contrat de travail. D'après l'art. 130 LAMA, ces montants demeurent
dus par l'employeur.

Erwägung 4

    4.- La jurisprudence a cependant admis qu'il était possible de
remplacer par convention collective, à certaines conditions, l'obligation
de l'employeur prévue à l'art. 335 CO par le paiement d'indemnités
journalières versées par une caisse-maladie (RO 96 II 136).

    a) En l'espèce, la recourante n'a ni prouvé ni même allégué
expressément qu'une telle substitution résultât d'une convention collective
ou du contrat de travail individuel conclu avec Creatini.

    b) Les allégations de la recourante selon lesquelles les conditions de
l'assurance-maladie faisaient l'objet d'un placard apposé dans l'entreprise
et selon lesquelles elle payait la moitié des primes sont nouvelles et par
conséquent irrecevables dans un recours de droit public pour arbitraire
(RO 92 I 346, 95 I 142). Au surplus, la recourante n'a même pas produit le
placard dont elle fait état et dont on ignore le contenu; le fait qu'elle
payait la moitié des primes ne suffisait pas pour qu'elle fût libérée de
l'obligation résultant de l'art. 335 CO.

    D'autre part, le fait qu'une convention collective conclue avec la FOMH
libère, à l'égard des affiliés à ce syndicat, l'employeur de l'obligation
de payer le salaire en cas de maladie ne saurait influer sur la solution
de la présente espèce, alors que l'employeur ne prétend pas que l'intimé
serait membre de la FOMH. Au surplus, cette allégation aussi est nouvelle.

    c) La recourante tente de s'appuyer sur l'arrêt publié au RO 96 II
133. Il s'agissait alors de l'application d'une convention collective de
travail prévoyant la substitution d'une assurance-maladie à l'obligation
résultant de l'art. 335 CO. En l'espèce, Creatini n'étant pas affilié à un
syndicat, il appartenait à l'employeur de prévoir cette substitution dans
le contrat individuel, s'il l'estimait utile. Or la lettre d'engagement
du 12 février 1969 ne contient rien à ce sujet. Il n'est dès lors pas
nécessaire d'examiner si les conditions prévues dans le contrat conclu
avec La Bernoise créent pour le travailleur un régime aussi favorable
que celui qui résulte de l'art. 335 CO et si une clause de substitution
eût été admissible.

    Le recours est ainsi dépourvu de tout fondement; partant, le jugement
du Tribunal de prud'hommes ne peut être taxé d'arbitraire.

Erwägung 5

    5.- L'art. 29 al. 5 de la loi fédérale sur le travail dans les
fabriques du 18 juin 1914 (LTF), applicable aux entreprises industrielles
en vertu de l'art. 72 al. 2 de la loi fédérale sur le travail dans
l'industrie, l'artisanat et le commerce, du 13 mars 1964, prévoit la
gratuité de la procédure. La jurisprudence a admis que le principe de la
gratuité vaut pour tous les degrés de la juridiction que le litige peut
parcourir (RO 62 II 232, no 60). Bien que le recours de droit public
constitue en quelque sorte une procédure nouvelle, indépendante de la
procédure cantonale, il n'y a pas lieu de lui refuser le bénéfice de
l'art. 29 al. 5 LTF.

    Selon communication de l'Office fédéral de l'industrie, des arts et
métiers et du travail, la société anonyme G. et E. Bouille est inscrite
au registre des entreprises industrielles. Elle bénéficie ainsi de la
gratuité de la procédure.

Entscheid:

Par ces motifs, le Tribunal fedéral:

    Rejette le recours.