Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 95 II 22



95 II 22

4. Arrêt de la IIe Cour civile du 6 février 1969 dans la cause Cuennet
contre Liardet. Regeste

    Gesetzliches Grundpfandrecht der Handwerker und Unternehmer (Art. 837
ZGB). Güterzusammenlegung.

    Baut der Eigentümer von in eine Güterzusammenlegung einbezogenen
Grundstücken auf einer Liegenschaft, die ihm unter dem neuen Zustande
zugewiesen wird, über die er aber im Grundbuch noch nicht verfügen kann
(vgl. Art. 656 Abs. 2 ZGB), so hat der Unternehmer sein gesetzliches
Grundpfandrecht auf den Parzellen eintragen zu lassen, die dem Besteller
unter dem alten Zustand gehörten, und dabei zu verlangen, dass das
Pfandrecht auf das dem Besteller zum Ersatz zugewiesene Grundstück, auf
dem er Arbeiten ausführt, übertragen wird (Art. 802 ZGB), sobald die durch
die Güterzusammenlegung bedingten Formalitäten im Grundbuch vollzogen sind.

Sachverhalt

    A.- Ernest Liardet était propriétaire de trois parcelles non contiguës
formant les articles 5005 (Près de l'Abbaye, pré de 980 m2), 5034 (Les
Pâquiers, verger de 560 m2) et 5131 (A Epinettes, champ de 1725 m2) du
cadastre de la commune de Bevaix. Ces immeubles sont compris dans le
périmètre d'une entreprise de remaniement parcellaire. Liardet devait
recevoir à leur place, dans le nouvel état, un terrain sis en un autre
endroit (place et jardin de 3119 m2, formant le nouvel article 6231 du
cadastre de Bevaix).

    Le 17 décembre 1964, Liardet a conclu avec l'entreprise Stella SA,
à Servion, un contrat relatif à la construction d'une villa, pour le
prix forfaitaire de 130 000 fr., sur le terrain qui lui était destiné
dans le nouvel état. Les travaux de charpenterie et certains travaux
de menuiserie ont été confiés à Henri Cuennet, entrepreneur à Léchelles
(canton de Fribourg), qui les a acceptés comme sous-traitant de Stella SA

    Cuennet a terminé ses travaux le 2 juillet 1965. Il a présenté une
facture de 8200 fr. Stella SA, qui avait des difficultés financières et
qui est tombée plus tard en faillite, ne l'a pas payé.

    Le 29 septembre 1965, à la requête de Cuennet, le Président du Tribunal
du district de Boudry a ordonné l'inscription provisoire d'une hypothèque
légale d'entrepreneur en garantie d'une créance de 8200 fr. "sur les
immeubles formant les articles 5005, 5034, 5131 ou tout autre immeuble
remplaçant ceux-ci, soit vraisemblablement le nouvel article 6231"
du cadastre de la commune de Bevaix. L'ordonnance fixait à une année
la durée de l'inscription provisoire et à 30 jours le délai pour ouvrir
action au fond. La durée de l'inscription provisoire a été prolongée au
31 mars 1969 par ordonnance du 28 septembre 1966.

    L'inscription provisoire a été opérée au registre foncier sur les
articles 5005, 5034 et 5131 avec la mention figurant dans le dispositif
de l'ordonnance.

    B.- Par demande du 29 octobre 1965, Cuennet a fait assigner devant
le Tribunal cantonal de Neuchâtel Liardet, l'architecte Hervé Martin et
Stella SA Il a pris des conclusions tendant à la reconnaissance de sa
créance de 8200 fr. et à l'inscription définitive de l'hypothèque légale.

    Liardet a conclu au rejet de la demande et, reconventionnellement,
à la radiation de l'hypothèque légale inscrite à titre provisoire.

    Martin a conclu au rejet de la demande.

    Stella SA s'en est remise à la décision du tribunal. Elle s'est
reconnue débitrice envers Cuennet et Liardet. Elle a été déclarée en
faillite en cours d'instance. La production de Cuennet a été admise
à l'état de collocation, mais aucun dividende n'a été distribué aux
créanciers chirographaires. Dans la mesure où la cause était dirigée
contre la masse en faillite de Stella SA, elle est devenue sans objet et
le juge délégué à l'instruction a rendu le 17 juillet 1967 une ordonnance
de classement.

    Statuant le 1er juillet 1968, le Tribunal cantonal neuchâtelois a
rejeté les conclusions du demandeur et ordonné la radiation de l'hypothèque
légale inscrite provisoirement sur les articles 5005, 5034 et 5131 du
cadastre de la commune de Bevaix en faveur de Cuennet.

    En ce qui concerne l'hypothèque légale, les juges cantonaux ont
motivé leur décision, en bref, comme il suit: L'inscription provisoire a
été opérée dans le délai légal de trois mois dès l'achèvement des travaux
(art. 839 al. 2 CC), pour autant qu'elle se rapportait aux articles 5005,
5034 et 5131 du cadastre. La demande en justice a été formée dans le
délai imparti à cet effet par le juge (art. 961 al. 3 CC). Créancier de
l'entrepreneur Stella SA, Cuennet a qualité pour requérir l'inscription
d'une hypothèque légale sur l'immeuble pour lequel il avait fourni des
matériaux ou du travail (art. 837 al. 1 ch. 3 CC). Toutefois il n'a
ni allégué ni prouvé qu'il eût exécuté des travaux sur les parcelles
formant les articles 5005, 5034 et 5131 du cadastre. Il a laissé entendre
que Liardet avait construit sur le terrain qui lui sera attribué dans le
nouvel état, mais ne prétend pas que le défendeur était propriétaire de ce
terrain lorsque la construction a été érigée, ni même lors de l'envoi en
possession, qui a eu lieu le 15 mars 1968, c'est-à-dire après la requête
d'inscription de l'hypothèque légale.

    La cour cantonale ne se prononce pas sur le point de savoir si
le droit du sous-traitant de requérir l'inscription d'une hypothèque
légale sur le fonds bâti ne s'éteint pas lorsque le propriétaire a payé à
l'entrepreneur général le prix correspondant aux travaux du requérant. En
effet, le défendeur n'a pas allégué ni prouvé les faits sur lesquels il
aurait pu fonder une pareille objection.

    C.- Contre ce jugement, Cuennet recourt en réforme au Tribunal
fédéral. Il abandonne ses conclusions en paiement de sa facture de 8200
fr. tant contre Liardet que contre Martin. Il conclut à l'inscription
définitive en sa faveur, en garantie de sa créance de 8200 fr., d'une
hypothèque légale "sur les immeubles formant les articles 5005, 5034 et
5131 du cadastre de Bevaix, ou tout autre immeuble remplaçant ceux-ci dans
le cadre des opérations de remaniement parcellaire, soit vraisemblablement
le nouvel article 6231 du cadastre de Bevaix".

    L'intimé Liardet conclut au rejet du recours. Il admet dans sa réponse
que les travaux de Cuennet ont été faits sur l'immeuble qui forme l'article
6231 du cadastre.

    D.- Il ressort d'une attestation du conservateur du registre foncier
de Boudry du 15 août 1968, produite par le recourant, que, lors de
l'introduction du registre foncier fédéral, l'hypothèque légale inscrite
à titre provisoire a été transférée sur l'immeuble immatriculé sous no
6231 du cadastre de la commune de Bevaix.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Selon l'art. 837 al. 1 ch. 3 CC, les artisans et entrepreneurs
employés à des bâtiments et autres ouvrages peuvent requérir l'inscription
d'une hypothèque légale sur l'immeuble pour lequel ils ont fourni des
matériaux et du travail ou du travail seulement, en garantie de leurs
créances contre le propriétaire ou un entrepreneur. Il ressort clairement
de cette disposition que l'hypothèque légale des artisans et entrepreneurs
doit être inscrite au registre foncier comme un droit de gage grevant
l'immeuble sur lequel la construction est érigée. Dans l'arrêt Robusti
c. Kieswerk Hüntwangen, du 24 novembre 1966 (RO 92 II 229 s., consid. 1),
le Tribunal fédéral a jugé que l'obligation de souffrir la constitution
d'une pareille hypothèque était une obligation propter rem, c'est-à-dire
une obligation rattachée à la propriété du fonds sur lequel les travaux
sont exécutés; dès lors, le droit personnel de requérir l'inscription d'une
hypothèque légale en garantie de la créance d'un entrepreneur s'exerce
contre le propriétaire actuel de l'immeuble en question, par exemple,
en cas d'aliénation, contre le tiers acquéreur.

    Conformément à l'art. 839 al. 2 CC, l'inscription doit être requise,
ou plus exactement, d'après le texte allemand, doit être opérée au plus
tard dans les trois mois qui suivent l'achèvement des travaux. Il suffit
pour observer ce délai qu'une inscription provisoire soit prise sur
l'ordre du juge et que le requérant fasse ensuite valoir son droit en
justice dans le délai imparti à cet effet par l'ordonnance (art. 961 CC;
RO 89 II 306 s., consid. 3).

    En l'espèce, le recourant a requis et obtenu en temps utile
l'inscription provisoire d'une hypothèque légale d'entrepreneur,
en garantie de sa créance de 8200 fr. contre l'entreprise Stella SA,
"sur les immeubles formant les articles 5005, 5034, 5131 ou tout autre
immeuble remplaçant ceux-ci, soit vraisemblablement le nouvel article
6231". Le jugement déféré constate que l'article 6231 du nouvel état
n'existant alors pas au registre foncier, aucune inscription n'a pu y
être portée. Le recourant a cependant produit une attestation du 15 août
1968 dans laquelle le conservateur du registre foncier de Boudry déclare
que la mise à l'enquête de la transcription des droits réels ensuite
de l'introduction du registre foncier fédéral sur la partie remaniée du
territoire de la commune de Bevaix s'est déroulée du 1er au 30 mai 1968
et qu'aucune réclamation n'a été formulée au sujet de la transcription
de l'hypothèque légale provisoire de 8200 fr. en faveur d'Henri Cuennet,
passée des anciens articles 5005, 5034 et 5131 du cadastre de la commune de
Bevaix à la nouvelle parcelle no 6231 du même cadastre, propriété d'Ernest
Liardet. L'art. 55 al. 1 lettre c OJ interdit assurément d'alléguer
des faits nouveaux et de produire des preuves nouvelles à l'appui d'un
recours en réforme. Toutefois, le Tribunal fédéral ne saurait ignorer un
fait concernant l'état du registre foncier dans lequel il sera appelé à
ordonner une inscription, selon le sort du recours (cf. art. 78 al. 2
PCF applicable en vertu du renvoi de l'art. 40 OJ; art. 18, 19 et 22 ORF).

Erwägung 2

    2.- La cour cantonale a jugé que l'hypothèque légale ne pouvait pas
être inscrite à titre définitif sur les articles 5005, 5034 et 5131,
parce que la construction n'avait pas été érigée sur ces parcelles. A
son avis, l'inscription ne saurait être opérée non plus sur l'immeuble
formant le nouvel article 6231, parce que la requête serait tardive, à
défaut d'inscription provisoire, d'une part, et que l'intimé n'était pas
propriétaire de ce terrain lorsque les travaux ont été exécutés ni lors
du dépôt de la demande, d'autre part. Selon les premiers juges, Liardet a
construit sur le fonds d'autrui. Cuennet n'aurait pu requérir l'inscription
d'une hypothèque légale que dans une procédure dirigée contre l'ancien
propriétaire du sol qui a reçu la construction. Et il n'eût pas été en
mesure de le faire en temps utile, du moment que l'article 6231 du nouveau
cadastre de la commune de Bevaix n'existait pas en tant qu'immeuble lorsque
l'entrepreneur a requis l'inscription provisoire, puis l'inscription
définitive de l'hypothèque légale. Sans doute, en pareille occurrence,
l'entrepreneur ou l'artisan peut-il paraître mal protégé; sa situation
n'est cependant pas différente de celle de tout entrepreneur ou artisan
dont le client a entrepris une construction sur le fonds d'autrui: il lui
appartient de se renseigner au registre foncier sinon avant de construire
du moins avant de demander l'inscription provisoire de l'hypothèque.

Erwägung 3

    3.- Le raisonnement de la juridiction neuchâteloise méconnaît la
situation particulière dans laquelle le remaniement parcellaire place
les propriétaires intéressés et leurs créanciers.

    Selon les art. 702 et 703 CC, les cantons peuvent apporter dans
l'intérêt public des restrictions à la propriété foncière, notamment en
ce qui concerne les améliorations du sol et les réunions parcellaires de
fonds ruraux ou de terrains à bâtir; ils règlent la procédure et doivent
édicter à cet effet des dispositions détaillées. La loi neuchâteloise sur
les améliorations foncières du 21 mai 1958 (LAF) prévoit diverses mesures
en vue d'améliorer le sol et d'en faciliter l'exploitation. Parmi ces
mesures figurent les remaniements et les réunions parcellaires. Aux termes
de l'art. 32 LAF, le remaniement parcellaire consiste en la mise en commun
des biens-fonds d'un territoire déterminé, à l'exclusion des bâtiments
à l'usage d'habitation, et en leur répartition entre les propriétaires
intéressés en fonction d'un nouveau réseau de chemins.

    Comme le relève la doctrine récente, le remaniement parcellaire
produit certains effets comparables à ceux de l'expropriation. Ainsi les
propriétaires de biens-fonds compris dans le périmètre de l'entreprise
sont contraints d'abandonner leurs parcelles. Celles-ci sont réunies en
une seule masse, puis réparties entre les intéressés dans une nouvelle
distribution des terres (cf. MEIER-HAYOZ, n. 35 ad art. 666 CC; ZOLLINGER,
Die Güterzusammenlegung im Kanton Bern, thèse Berne 1946, p. 98; GYGI,
Das bundesrechtliche Gebot zur ausführlichen Ordnung des Verfahrensrechts
bei Güterzusammenlegungen, Monatschrift für bernisches Verwaltungsrecht
und Notariatswesen, 1954, p. 327 s.). Assurément, un auteur plus ancien
tenait l'obligation d'accepter de nouvelles parcelles pour un échange,
forcé, il est vrai, mais un échange privé entre particuliers (SERVIEN,
Etude juridique de la législation vaudoise sur les améliorations foncières,
thèse Lausanne 1928, p. 64). Toutefois son argumentation a été réfutée par
HAAB (n. 55 ad art. 656 CC). Par la nouvelle répartition, les intéressés
deviennent propriétaires de nouvelles parcelles qu'ils reçoivent en
échange ou en remplacement (cf. le texte allemand de l'art. 802 CC)
des anciennes, de telle sorte que le remaniement parcellaire entraîne
une subrogation réelle (cf. HAAB, n. 55 in fine ad art. 656 CC; LIVER,
n. 27 ad art. 731 CC et n. 80 ad art. 734 CC).

Erwägung 4

    4.- De même qu'en matière d'expropriation, la propriété des nouvelles
parcelles est acquise avant l'inscription au registre foncier, mais le
propriétaire ne peut disposer de son nouveau bien-fonds au registre foncier
qu'après l'accomplissement de cette formalité (art. 656 al. 2 CC; RO 52 I
150). C'est le droit cantonal qui détermine le moment où la propriété des
nouvelles parcelles remplace celle des anciennes (HAAB, n. 55 ad art. 656
CC). Selon l'art. 40 LAF, le Conseil d'Etat ordonne l'envoi en possession
par voie d'arrêté, à la demande du syndicat d'améliorations foncières,
lorsque la répartition des nouvelles parcelles est définitive; les
modalités de l'entrée en possession sont fixées par l'assemblée générale
des propriétaires intéressés. Les droits réels sur les nouveaux immeubles
sont ensuite inscrits au registre foncier conformément à l'art. 42 LAF.

    Pendant la durée de la procédure, chaque propriétaire d'immeubles
compris dans le périmètre de l'entreprise conserve le droit de disposer
de ses anciennes parcelles ou plus exactement de sa prétention idéale à
l'attribution de nouvelles terres de même valeur; il peut, par exemple,
conclure une vente ou constituer des hypothèques. Toutefois, son droit
de propriété est frappé d'une restriction en ce sens que le propriétaire
ne saurait accomplir des actes de disposition qui porteraient préjudice
à la procédure de remaniement parcellaire en cours. A cet égard,
la procédure de remaniement parcellaire produit un effet comparable
à celui du ban d'expropriation visé à l'art. 42 LEx. (HAAB, n. 56 ad
art. 656 CC; ZOLLINGER, op.cit., p. 105; SERVIEN, op.cit., p. 84; GYGI,
loc.cit., p. 328). Les gages constitués sur les immeubles cédés passent,
en conservant leur rang, sur les immeubles reçus en échange (art. 802
CC). Jusqu'à l'envoi en possession des nouvelles parcelles, les droits
réels constitués par le propriétaire sont inscrits au registre foncier
sur le feuillet des anciennes parcelles. Après l'envoi en possession,
l'intéressé est proprétaire des nouvelles parcelles, qui sont désormais
l'objet de ses actes de disposition, mais il ne pourra en disposer
formellement au registre foncier qu'une fois l'inscription opérée (art. 656
al. 2 CC). Dans l'intervalle, on ne saurait considérer que la procédure
de remaniement parcellaire entraîne un blocage du registre foncier. La
pratique résout la difficulté en procédant à une inscription provisoire
des immeubles qui sont l'objet d'un acte de disposition. L'inscription
provisoire est opérée sur le vu de pièces justificatives délivrées par
les organes de l'entreprise d'améliorations foncières, qui indiquent
les anciennes parcelles du disposant et les nouveaux immeubles qui lui
sont définitivement attribués (HAAB, n. 56 ad art. 656 CC; ZOLLINGER,
op.cit., p. 107; NUSSBAUM, Die Bodenverbesserungen, speziell die
Güterzusammenlegungen und ihre Behandlung im Grundbuch unter besonderer
Berücksichtigung der aargauischen Verhältnisse, ZBGR 9 - 1928 - p. 193 ss.,
241 ss., notamment 253 et 11 - 1930 - p. 1 ss., notamment 2). Sans doute la
solution choisie n'est-elle qu'un pis aller qui convient à l'inscription
d'un petit nombre d'opérations. Elle ne saurait être généralisée, sinon
l'inscription provisoire en chaîne de mutations successives rendrait
pratiquement sans objet l'inscription définitive du nouvel état. Elle
pourrait d'ailleurs se heurter à des difficultés supplémentaires lorsque
le remaniement parcellaire est suivi d'une épuration du registre foncier,
comme le prescrit l'art. 32 al. 3 LAF. Et l'artisan ou l'entrepreneur
qui entend faire inscrire une hypothèque légale fondée sur l'art. 837
al. 1 ch. 3 CC n'est pas en mesure d'exiger que les démarches soient
entreprises en vue d'une inscription provisoire du bien-fonds grevé dans
le nouvel état, ni surtout que ces formalités soient menées à chef dans
le délai de l'art. 839 al. 2 CC.

Erwägung 5

    5.- En l'espèce, Liardet a fait construire une villa sur la parcelle
qui devait lui être attribuée dans le nouvel état et qui forme le nouvel
article 6231 du cadastre. Contrairement à l'opinion exprimée par la
cour cantonale, il n'a pas bâti sur le fonds d'autrui. Il a exercé en
quelque sorte par anticipation son droit d'user de la surface de terrain
à l'attribution de laquelle il avait une prétention idéale, non encore
matérialisée par l'inscription formelle d'un droit de propriété au registre
foncier. Sans doute avait-il obtenu des organes compétents de l'entreprise
de remaniement parcellaire l'autorisation de construire ou, du moins,
l'assurance que la nouvelle parcelle no 6231 lui était définitivement
attribuée, bien que le Conseil d'Etat n'ait pas encore ordonné l'envoi en
possession. S'il avait contracté par exemple un emprunt en banque avec
une garantie hypothécaire, le gage n'aurait pas pu être inscrit sur la
nouvelle parcelle, dont on ne pouvait pas encore disposer au registre
foncier. L'hypothèque aurait donc grevé les anciennes parcelles formant
les articles 5005, 5034 et 5131 du cadastre, nonobstant le fait qu'aucune
construction n'y était édifiée, puis elle aurait passé, en conservant
son rang, sur la parcelle formant le nouvel article 6231 du cadastre,
en vertu de l'art. 802 CC.

    Dans les circonstances particulières où il se trouvait, Cuennet a
procédé correctement en requérant l'inscription provisoire d'une hypothèque
légale d'entrepreneur sur les immeubles formant les articles 5005, 5034 et
5131 du cadastre de la commune de Bevaix ou tout autre immeuble remplaçant
ceux-ci, soit vraisemblablement le nouvel article 6231. Il a demandé ainsi
que l'hypothèque soit inscrite sur les anciennes parcelles du propriétaire
et maître de l'ouvrage, les seules qui pouvaient alors être grevées d'un
gage inscrit au registre foncier. Mais il a aussi exprimé la volonté que
le gage soit transféré aussitôt que possible sur les nouveaux immeubles
que le propriétaire grevé recevrait en échange ou en remplacement des
anciens, conformément à l'art. 802 CC. Il a précisé le nouvel article du
cadastre sur lequel l'hypothèque légale serait transférée en indiquant
qu'il s'agirait vraisemblablement de l'article 6231, sans doute parce
qu'à l'époque où il a formé sa requête, l'immatriculation du terrain sous
ce numéro n'était pas encore définitive. Et le Président du Tribunal du
district de Boudry a fait droit à la requête ainsi formulée.

    Du reste, Cuennet n'avait pas la possibilité d'agir autrement. S'il
avait tenté de requérir l'inscription de l'hypothèque légale sur les
articles du cadastre que formait, dans l'ancien état, la portion de
terrain qui est immatriculée comme article 6231 dans le nouvel état, il
se serait probablement heurté à la résistance des anciens propriétaires,
exposés au risque d'un transfert de l'hypothèque sur les immeubles qu'ils
recevraient eux-mêmes dans le nouvel état (art. 802 CC). Qui plus est,
la détermination du rang de l'hypothèque légale par rapport aux autres
droits de gage grevant la portion de terrain qui forme le nouvel article
6231, d'une part, et les articles 5005, 5034 et 5131, anciennes parcelles
propriété de Liardet, d'autre part, aurait provoqué de graves difficultés,
vu la règle de l'art. 802 CC.

    Dès lors, c'est à bon droit que l'inscription provisoire de
l'hypothèque légale a été opérée, dans le délai fixé par l'art. 839 al. 2
CC, sur les anciennes parcelles formant les articles 5005, 5034 et 5131
du cadastre de la commune de Bevaix. En cours d'instance, l'inscription a
été reportée sans opposition sur le nouvel article 6231, définitivement
attribué à Liardet, qui peut en disposer au registre foncier. C'est sur
ce dernier immeuble que doit être portée l'inscription définitive.

Entscheid:

Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Admet le recours, réforme le jugement rendu le 1er juillet 1968 par
le Tribunal cantonal de Neuchâtel et admet la demande en ce sens que
l'inscription définitive d'une hypothèque légale de 8200 fr. est ordonnée
en faveur du recourant sur l'immeuble formant le nouvel article 6231 du
cadastre de la commune de Bevaix, propriété de l'intimé.