Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 83 IV 108



83 IV 108

30. Arrêt de la Cour de cassation pénale du 22 mars 1957 dans la cause
Pittet contre Ministère public du Canton de Vaud. Regeste

    Schutz öffentlicher Wappen.

    Anwendungsbereich der Art. 2 und 3 des BG zum Schutze öffentlicher
Wappen und anderer öffentlicher Zeichen vom 5. Juni 1931.

Sachverhalt

    A.- Roger Pittet exploite à Pully un commerce en gros de souvenirs,
d'articles pour fumeurs et de lunettes solaires. En automne 1955, il
commanda à la maison Lorioli Fratelli, à Milan, 150 cuillers à café en
alpacca ornées des armoiries de la Confédération ou de cantons suisses
et 420 insignes en tombac émaillé et doré représentant les mêmes
armoiries. Ces marchandises lui furent livrées en janvier 1956. Il
fit souder les insignes sur des articles-souvenirs tels que briquets,
cuillers etc.

    B.- Dénoncé par la Direction générale des douanes pour infraction
à loi du 5 juin 1931 pour la protection des armoiries publiques et
autres signes publics (LPAP), Pittet s'est vu infliger une amende de
20 fr. par le Tribunal de simple police du district de Lausanne. Le
tribunal a considéré qu'en vendant des cuillers fabriquées à Milan et
munies dans cette ville d'armoiries publiques suisses, le prévenu avait
contrevenu intentionnellement aux art. 3 litt. c et 9 de la loi, mais
que l'importation d'insignes destinés à être apposés en Suisse sur des
objets ne tombait pas sous le coup de la loi.

    La Cour de cassation vaudoise a maintenu ce jugement, le 14 janvier
1957.

    C.- Le condamné se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral, en
concluant à libération.

    Le Ministère public propose de rejeter le pourvoi.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- L'art. 2 al. 1 LPAP interdit d'apposer pour un but commercial,
en particulier comme éléments de marques de fabrique ou de commerce,
certains signes publics, notamment les armoiries des cantons, sur des
produits destinés à être mis en circulation comme marchandises ou sur leur
paquetage. L'art. 3 al. 1 permet de faire figurer ces mêmes signes "sur
des enseignes, des annonces, des prospectus ou des papiers de commerce"
ou de les employer "d'une autre manière ne tombant pas sous le coup de
l'art. 2, 1er alinéa, pourvu que l'emploi ne soit pas contraire aux bonnes
moeurs". L'art. 3 al. 2 lit. c répute contraire aux bonnes moeurs l'emploi
"qui est fait par un étranger établi à l'étranger".

Erwägung 2

    2.- Contrairement à ce qu'ont admis les premiers juges et, avant eux,
le Bureau de la propriété intellectuelle, ce n'est pas l'art. 3 mais
l'art. 2 LPAP qui s'applique en l'espèce. D'après le message du Conseil
fédéral (FF 1929 III 633), le projet distingue, s'agissant des armoiries
de la Confédération et des cantons, entre

    a)  l'enregistrement comme marque et l'emploi consistant dans
l'apposition sur des produits destinés à être mis en circulation comme
marchandises (art. 1er al. 1 ch. 1 et art. 2 al 1 ch. 1) et

    b)  les emplois autres, notamment l'apposition sur des enseignes,
des annonces, des prospectus et des papiers de commerce (art. 3).

    Tandis que l'enregistrement comme marque et l'emploi décrit sous
lit. a sont interdits d'une façon absolue, hormis quelques exceptions,
les emplois autres (lit. b) ne sont interdits que s'ils heurtent les
bonnes moeurs. Cette distinction a gardé toute sa valeur, les art. 2 et
3 de la loi reproduisant pour l'essentiel les art. 2 et 3 du projet.

    Les armoiries en cause ayant été apposées non sur des enseignes, des
annonces, des prospectus ou des papiers d'affaires, mais sur des cuillers,
c'est-à-dire sur des produits destinés à être mis en circulation comme
marchandises, l'art. 2 entre seul en considération. Peu importe, sous
cet angle, que l'auteur de l'apposition soit un Suisse ou un étranger
établi à l'étranger. Dès qu'une marchandise ou son emballage est muni des
armoiries de la Confédération ou d'un canton "pour un but commercial",
l'interdiction consacrée par l'art. 2 al. 1 est violée.

Erwägung 3

    3.- Sur le sens de l'expression "pour un but commercial", le Conseil
fédéral explique (message p. 634):

    "En limitant l'interdiction à l'apposition,pour un but commercial'on
veut empêcher qu'elle ne puisse être étendue à un emploi des signes en
question dans un dessein purement décoratif, par exemple pour décorer
des produits des arts appliqués (des gobelets, des coupes, etc.)."

    En l'espèce, les armoiries apposées sur les cuillers servent
manifestement à la décoration. Mais elles sont aussi et en même temps
utilisées à des fins commerciales: elles doivent faciliter la vente
des objets qu'elles ornent. Elles ont donc une double fonction et il
en ira le plus souvent de même lorsqu'il s'agit de "produits destinés à
être mis en circulation comme marchandises". Cependant, les mots "pour
un but commercial" ont été insérés à l'art. 2 afin d'en rétrécir le champ
d'application. Pour leur assurer cet effet, il faut nécessairement admettre
que, dès le moment où les armoiries sont apposées sur des marchandises pour
des fins décoratives, elles échappent à l'interdiction de l'art. 2 LPAP,
même si elles doivent concurremment faciliter la vente. Il s'ensuit donc
que la disposition légale précitée touchera principalement l'emploi des
armoiries comme éléments de marques de fabrique ou de commerce, mais cela
est conforme aux intentions du législateur (message précité, p. 633 i.f.).

    Le Ministère public ne soutient d'ailleurs pas qu'il serait interdit
de munir des articles-souvenirs d'armoiries publiques. S'il a cru Pittet
punissable, c'est seulement parce qu'il a estimé par erreur que l'art. 3
LPAP s'appliquait.

Entscheid:

          Par ces motifs, la Cour de cassation pénale:

    Admet le pourvoi, annule l'arrêt attaqué et renvoie la cause à
l'autorité cantonale pour que celle-ci libère le prévenu.