Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 139 V 457



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Urteilskopf

139 V 457

59. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit social dans la cause A. contre
Allianz Suisse Société d'Assurances SA (recours en matière de droit public)
8C_859/2012 du 29 juillet 2013

Art. 8 Abs. 2 UVG in Verbindung mit Art. 7 Abs. 2 UVG und Art. 13 UVV;
Empfehlung Nr. 7/87 "Unregelmässig Beschäftigte" der Ad-hoc-Kommission Schaden
UVG vom 4. September 1987, geändert am 17. November 2008.
Ob ein unregelmässig Teilzeitbeschäftigter die Minimalgrenze von wöchentlich 8
Arbeitsstunden erreicht, um für Nichtberufsunfälle versichert zu sein, kann
aufgrund der Berechnungsmethode bestimmt werden, welche die Ad-hoc-Kommission
Schaden UVG in der Empfehlung Nr. 7/87 vorschlägt. Auch wenn diese das Gericht
nicht bindet, sieht sie einfach anzuwendende Kriterien vor und ermöglicht eine
Gleichbehandlung der Versicherten. Sie erscheint daher nicht als gesetzwidrig,
namentlich nicht soweit sie den Versicherern vorschreibt, für die Berechnung
der durchschnittlichen wöchentlichen Arbeitszeit in einer massgeblichen 3- oder
12-monatigen Periode vor dem Unfall nur effektive Arbeitswochen
zusammenzurechnen (E. 7).

Sachverhalt ab Seite 458

BGE 139 V 457 S. 458

A. A. est agriculteur indépendant. Parallèlement à cette activité, il travaille
comme contrôleur pour l'Etablissement X. L'essentiel de cette activité est
exercé durant les mois de juillet et août, notamment pour les contrôles des
prestations écologiques requises. Pendant les saisons de contrôle, elle peut
être exercée à raison de 8 heures par jour, mais au maximum 30 heures par
semaine. Les collaborateurs de X. sont assurés pour les accidents
professionnels et non professionnels auprès d'Allianz Suisse Société
d'Assurances SA (ci-après: Allianz).
A. a été victime d'un accident le 12 juin 2009. Il était occupé à nettoyer la
façade de sa ferme au moyen d'un appareil à pression. Il se trouvait seul sur
un échafaudage, sur la première planche. Cette planche a probablement basculé
lorsqu'il a marché dessus. Elle s'est décrochée et a provoqué la chute de A.
d'une hauteur de 2,25 mètres.
Le 8 octobre 2009, l'Allianz a informé A. que, dans la mesure où son contrat de
travail avec X. portait sur une durée de travail hebdomadaire moyenne
inférieure à 8 heures, il ne bénéficiait pas d'une couverture d'assurance pour
les accidents non professionnels. Elle a rendu une décision dans ce sens le 10
novembre 2009, qu'elle a confirmée par une décision sur opposition du 12 août
2011.

B. A. a recouru contre cette dernière décision devant le Tribunal cantonal de
la République et canton du Jura, Cour des assurances, qui a rejeté son recours
par arrêt du 12 septembre 2012.

C. A. exerce un recours en matière de droit public en concluant à l'annulation
de cet arrêt et à la condamnation d'Allianz à lui verser les prestations
légales.
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L'Allianz conclut au rejet du recours.
Le recours a été admis.

Erwägungen

Extrait des considérants:

2. Selon l'art. 8 al. 2 LAA en corrélation avec les art. 7 al. 2 LAA et 13 OLAA
(RS 832.202) dans sa version en vigueur depuis le 1^er janvier 2000), les
travailleurs occupés à temps partiel moins de 8 heures par semaine ne sont pas
assurés contre les accidents non professionnels; ils le sont seulement contre
les accidents professionnels. Cette réglementation spéciale pour les
travailleurs à temps partiel repose principalement sur l'idée qu'il n'est guère
possible d'inclure les accidents non professionnels dans l'assurance
obligatoire pour tous les travailleurs, car il faudrait percevoir sur de bas
salaires des primes démesurément élevées pour couvrir ce risque pendant de
longues interruptions de travail (Message du 18 août 1976 à l'appui d'un projet
de loi fédérale sur l'assurance-accidents, FF 1976 III 189; voir aussi, sur la
genèse de l'art. 13 OLAA, PASCALE BYRNE-SUTTON, Le contrat de travail à temps
partiel, 2001, p. 322 ss).
(...)

4.

4.1 Jusqu'à présent, la jurisprudence a laissé indécis le point de savoir
comment calculer le seuil minimal de 8 heures pour une personne exerçant une
activité à temps partiel et occupée de manière irrégulière. Selon ALFRED MAURER
(Schweizerisches Unfallversicherungsrecht, 2^e éd. 1989, p. 117 note de bas de
p. 196a), il faut déterminer la charge de travail chaque semaine séparément: le
travailleur est assuré pour les accidents non professionnels pour chaque
semaine durant laquelle il a travaillé 8 heures au moins (dans le même sens:
BYRNE-SUTTON, op. cit., p. 325, qui relève que ni la LAA ni l'OLAA ne font
référence à l'établissement d'un calcul moyen sur plusieurs semaines). Comme
l'ancien Tribunal fédéral des assurances a eu l'occasion de le souligner, si
cette méthode a le mérite de la clarté, elle présente des inconvénients
majeurs. Indépendamment de l'insécurité juridique qu'elle crée pour les
travailleurs sur appel, lesquels ignorent en début de semaine s'ils seront
assurés ou non, elle engendre un manque de prévisibilité à long terme pour le
travailleur (voir ATF 126 V 353 consid. 3 p. 355 s.). D'autres auteurs
préconisent de se fonder sur une durée hebdomadaire moyenne de travail en
prenant une période de référence suffisamment longue
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pour être représentative (SUSANNE LEUZINGER-NAEF, Sozialversicherungsrechtliche
Probleme flexibilisierter Arbeitsverhältnisse, in: Neue Erwerbsformen -
veraltetes Arbeits- und Sozialversicherungsrecht?, Erwin Murer [éd.], 1996, p.
118; STEPHAN RAGG, Die Lohnfortzahlungspflicht des Arbeitgebers im System der
obligatorischen Unfallversicherung, 1997, p. 60; voir ATF 126 V 353 consid. 3
p. 356).

4.2 La Commission ad hoc sinistres LAA (dans laquelle plusieurs assureurs LAA
privés, dont l'Allianz, ainsi que la Caisse nationale suisse d'assurance en cas
d'accidents, sont représentés) a été créée afin que les divers organismes
appliquent la LAA de façon uniforme. Elle émet dans ce but des recommandations
(consultables sur le site internet www.koordination.ch/fr/online-handbuch/
uvg-ad-hoc/recommandations). C'est ainsi qu'elle a établi à l'intention des
assureurs-accidents une recommandation pour l'application de l'art. 13 al. 1
OLAA (Recommandation n° 7/87 intitulée "Employés occupés à temps irrégulier",
du 4 septembre 1987, révisée le 17 novembre 2008). Il en ressort notamment que,
pour les travailleurs à temps partiel occupés irrégulièrement, la couverture
d'assurance pour les accidents non professionnels doit être admise si l'une des
conditions alternatives suivantes est remplie:
- la durée moyenne hebdomadaire de travail atteint au moins 8 heures;
- les semaines d'au moins 8 heures de travail sont prépondérantes.
Selon la recommandation toujours, lors de la détermination des heures de
travail hebdomadaires totales, il convient de prendre en compte les heures
travaillées ainsi que les heures d'absence pour cause de maladie ou d'accident.
Les semaines durant lesquelles l'assuré n'a pas travaillé (pour une autre
raison) ne sont pas prises en compte dans ce calcul. Autrement dit, seules les
semaines au cours desquelles l'intéressé a effectivement travaillé - ne
serait-ce qu'une seule heure - entrent dans le calcul. Par ailleurs, seules les
semaines entières sont prises en considération. Si le début ou la fin de la
période déterminante tombe entre deux fins de semaine, la semaine est
considérée entamée et ne compte pas. Enfin, le calcul pour l'examen de la
couverture s'opère sur une longue période (3 ou 12 mois précédant l'accident),
la solution la plus favorable à l'assuré devant être retenue.
Les recommandations de la Commission ad hoc sinistres LAA ne sont ni des
ordonnances administratives, ni des directives de
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l'autorité de surveillance aux organes d'exécution de la loi. Elles necréent
pas de nouvelles règles de droit. Même si elles ne sont pas dépourvues
d'importance sous l'angle de l'égalité de traitement des assurés, elles ne
lient pas le juge (ATF 134 V 277 consid. 3.5 p. 283 et les références citées).

5. Les premiers juges ont tout d'abord relevé que si l'on faisait application
de la méthode de calcul préconisée par MAURER, le recourant serait couvert
contre les accidents non professionnels durant la semaine du 8 au 14 juin 2009
puisque celui-ci avait travaillé 8,5 heures pour le compte de X. la dernière
fois en date du 9 juin 2009, en suivant un cours de formation. Ils ont
toutefois écarté cette méthode parce qu'elle était source, selon eux,
d'insécurité juridique pour les motifs exposés plus haut (cf. supra consid.
4.1).
Ils ont ensuite dressé le compte des heures travaillées par le recourant pour
X. dans l'année qui a précédé l'accident, soit 89 heures au total (recte: 93
heures), réparties de la manière suivante (semaines entières):

- 2,5   heures du 9 au 15 juin 2008;
- 10,25 heures du 23 au 29 juin 2008;
- 23,75 heures du 30 au 6 juillet 2008;
- 16,5  heures du 7 au 13 juillet 2008;
- 0,5   heures du 4 au 10 août 2008;
- 20,5  heures du 11 au 17 août 2008;
- 1,75  heures du 15 au 21 septembre 2008;
- 2,5   heures du 22 au 26 (recte: 28) septembre 2008;
- 2,5   heures du 3 au 9 novembre 2008;
- 8,25  heures du 2 au 8 février 2009;
- 4     heures du 1er au 7 juin 2009.

Ils ont constaté que sur les 11 semaines susmentionnées, 5 comptaient au moins
8 heures de travail, cependant que 6 autres comptaient moins de 8 heures. Les
semaines comptant au moins 8 heures n'étaient donc pas prépondérantes au sens
de la recommandation précitée. La juridiction cantonale a également observé que
la moyenne des heures sur la base des semaines effectivement travaillées
(conformément à ce que prévoit la recommandation) donnait un résultat supérieur
à 8 heures, soit 8,09 heures (recte: 8,45 heures). A son avis
BGE 139 V 457 S. 462
toutefois, une application à la lettre de la recommandation conduirait à ce
résultat choquant qu'un travailleur occupé uniquement une semaine par an plus
de 8 heures serait assuré pour les accidents non professionnels. Cela serait
contraire à la volonté du législateur, pour qui il n'était guère possible
d'inclure les accidents non professionnels dans l'assurance obligatoire pour
tous les travailleurs à temps partiel. L'art. 13 OLAA vise donc les personnes
travaillant à temps partiel de manière plus ou moins régulière ou continue.
Aussi bien convient-il, toujours selon les premiers juges, d'additionner, dans
le calcul de la moyenne, l'ensemble des semaines d'une période de référence (à
l'exclusion toutefois des semaines non travaillées pour cause de vacances, de
service militaire ou encore de maladie ou d'accident). Dans le cas particulier,
compte tenu de toutes les semaines de l'année (sauf 4 semaines de vacances), la
moyenne est de 1,85 heures (89 : 48 semaines, soit 52 semaines - 4 semaines de
vacances; en réalité 1,93 heures: 93 : 48 semaines). Les premiers juges en ont
conclu que le recourant n'avait pas droit aux prestations, faute d'une
couverture d'assurance auprès de l'intimée.
(...)

7.

7.1 Il faut donner raison aux premiers juges lorsqu'ils écartent la méthode
préconisée par MAURER au profit d'une moyenne calculée rétrospectivement. La
méthode de la moyenne présente l'avantage de tenir équitablement compte des
situations dans lesquelles l'horaire de travail est soumis à des fluctuations.
Même si elle n'offre pas toutes les garanties au plan de la prévisibilité,
l'assuré est à même de se rendre compte, rétrospectivement, d'une éventuelle
insuffisance de sa couverture, ce qui pourra l'inciter à conclure une assurance
privée.

7.2 On ne saurait en revanche suivre la juridiction cantonale lorsqu'elle
calcule la moyenne des heures compte tenu de toutes les semaines de l'année,
indépendamment du fait que l'assuré a ou non travaillé durant toutes ces
semaines.

7.2.1 L'art. 13 OLAA parle de "travailleurs à temps partiel"
("Teilzeitbeschäftigte Arbeitnehmer", "dipendenti occupati a tempo parziale").
Au sens étroit, la notion de travail à temps partiel correspond certes, en
règle ordinaire, à un temps de travail réduit par rapport à l'horaire normal
dans une entreprise. Cependant, de manière plus large, elle englobe aussi le
travail irrégulier, par exemple quelques
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heures de travail dont le nombre varie de semaine en semaine ou encore des
périodes de travail qui se succèdent (sur ces divers points, voir JEAN-PHILIPPE
DUNAND, in Commentaire du contrat de travail, Dunand/Mahon [éd.], 2013, n^os 47
ss ad art. 319 CO; STREIFF/VON KAENEL/RUDOLPH, Arbeitsvertrag, 7^e éd. 2012, n^
os 18 ss ad art. 319 CO; BRUNNER/BÜHLER/WAEBER/BRUCHEZ, Commentaire du contrat
de travail, 3^e éd. 2004, n. 1 ss p. 407 ss; BYRNE-SUTTON, op. cit., p. 80 ss;
GABRIEL AUBERT, Le travail à temps partiel irrégulier, in Mélanges Alexandre
Berenstein, 1989, p. 215 ss).

7.2.2 Sous ses différentes formes, les rapports de travail à temps partiel sont
considérés comme étant de durée indéterminée, encore qu'il soit parfois délicat
de savoir si les prestations sont fournies dans le cadre d'un seul contrat ou
de plusieurs contrats successifs (de durée déterminée), notamment lorsque le
salarié travaille à des intervalles relativement longs ou irréguliers. En
effet, le travail à temps partiel irrégulier doit être distingué du travail
auxiliaire ou occasionnel, qui repose sur la multiplication de contrats de
travail (à plein temps ou à temps partiel) de durée déterminée (voir p. ex.
DUNAND, op. cit., n^os 60 ss ad art. 319 CO; BRUNNER/BÜHLER/WAEBER/BRUCHEZ, op.
cit., n. 4 p. 408; AUBERT, op. cit., p. 221).

7.2.3 La prise en considération des semaines non travaillées (pour un motif
autre que le service militaire, les vacances, la maladie, etc.), telle que
préconisée par la juridiction cantonale, aurait pour effet de diminuer la
moyenne de l'horaire hebdomadaire et aurait souvent pour conséquence, sous
l'influence de facteurs aléatoires, d'exclure de l'assurance des accidents non
professionnels les travailleurs qui, bien que répondant à la définition de
travailleurs occupés à temps partiel, seraient moins bien traités que d'autres
travailleurs à temps partiel qui exercent leur activité de manière plus
régulière. Le risque d'une mise à contribution abusive de l'assurance que
semble craindre la juridiction cantonale doit être relativisé. Indépendamment
du fait que l'exemple cité (une semaine par année) n'est guère représentatif
des diverses formes de travail à temps partiel, cet exemple relèverait plutôt
d'un travail occasionnel ou accessoire, soit de contrats de durée déterminée.

7.2.4 En définitive et bien que la recommandation déjà citée de la Commission
ad hoc sinistres LAA ne lie pas le juge (cf. supra consid. 4.2), il convient de
constater qu'elle pose des critères simples d'application. Elle permet, dans la
mesure du possible, d'assurer une
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égalité de traitement entre assurés. Des moyennes sur une durée assez longue (3
mois ou une année) sont réputées cerner au plus près la réalité. Elle
n'apparaît donc pas contraire à la loi, notamment dans la mesure où elle
prescrit aux assureurs de ne comptabiliser dans la moyenne que les semaines
effectives de travail. Il n'y a dès lors pas de raison de s'en écarter.

7.3 Dans le cas particulier, il y a lieu de constater que les rapports de
travail s'étendent sur une longue période et impliquent de la part du
travailleur des prestations à des intervalles plus ou moins réguliers. On peut
dès lors conclure à l'existence d'un contrat de travail irrégulier de durée
indéterminée. Ainsi qu'on l'a vu, il convient, pour calculer la durée
hebdomadaire moyenne de travail, de ne compter que les semaines travaillées. Si
l'on prend une base annuelle comme période de référence (du 11 juin 2008 au 12
juin 2009) - solution plus favorable à l'assuré -, et que l'on ne tient compte
que des semaines entières (celles du 9 au 15 juin 2008 et du 8 au 14 juin 2009,
entamées, tombent), on constate que le recourant travaillait en moyenne plus de
8 heures par semaine (90,5 heures travaillés: 10 semaines = 9,05 heures). Au
moment de l'accident, il était donc également assuré contre les accidents non
professionnels.