Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 139 V 327



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Urteilskopf

139 V 327

41. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit social dans la cause La
Mobilière Suisse Société d'Assurances SA contre D. (recours en matière de droit
public)
8C_101/2012 du 2 mai 2013

Regeste

Art. 6 Abs. 2 UVG; Art. 9 Abs. 2 lit. a UVV; unfallähnliche Körperschädigungen.
Ein Fersenbeinbruch nach heftigem Schlag der Ferse gegen den Boden stellt eine
unfallähnliche Körperschädigung dar, soweit er nicht eindeutig einer Krankheit
oder einem degenerativen Zustand zuzuschreiben ist (E. 3).

Sachverhalt ab Seite 327

BGE 139 V 327 S. 327

A. D. est assurée obligatoirement contre le risque d'accident auprès de la
Mobilière Suisse Société d'Assurances SA (ci-après: la Mobilière).
Le 23 janvier 2011, alors qu'elle était à son domicile, elle s'est blessé le
pied droit en le frappant contre le sol en béton, dans un moment decolère. Les
médecins consultés ont diagnostiqué une fracture-impactdu calcanéum droit et
attesté une incapacité de travail de 100 % jusqu'au 7 mars 2011.
Par décision du 20 avril 2011, confirmée sur opposition le 9 juin suivant, la
Mobilière a refusé de prendre en charge les suites de cet
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événement au titre de l'assurance-accidents obligatoire, motif pris qu'à défaut
d'un facteur extérieur, l'atteinte ne constituait ni un accident ni une lésion
corporelle assimilée à un accident.

B. Par jugement du 7 décembre 2011, la Chambre des assurances sociales de la
Cour de justice de la République et canton de Genève a annulé la décision sur
opposition du 9 juin 2011 et condamné la Mobilière à prendre en charge les
suites de l'événement du 23 janvier 2011 au titre des prestations dues en cas
de lésions corporelles assimilées à un accident.

C. La Mobilière a formé un recours en matière de droit public contre ce
jugement dont elle demandait l'annulation, en concluant à la confirmation de sa
décision sur opposition du 9 juin 2011, subsidiairement au renvoi de la cause à
la juridiction cantonale pour nouveau jugement.
Le recours a été rejeté.
(résumé)

Erwägungen

Extrait des considérants:

3.

3.1 Aux termes de l'art. 6 al. 2 LAA, le Conseil fédéral peut inclure dans
l'assurance-accidents des lésions corporelles qui sont semblables aux
conséquences d'un accident. En vertu de cette délégation de compétence, il a
édicté l'art. 9 al. 2 OLAA (RS 832.202), selon lequel certaines lésions
corporelles sont assimilées à un accident même si elles ne sont pas causées par
un facteur extérieur de caractère extraordinaire, pour autant qu'elles ne
soient pas manifestement imputables à une maladie ou à des phénomènes
dégénératifs. Les fractures figurent dans la liste exhaustive de l'art. 9 al. 2
OLAA à la let. a.
La notion de lésion assimilée à un accident a pour but d'éviter, au profit de
l'assuré, la distinction souvent difficile entre maladie et accident. Aussi,
les assureurs-accidents LAA doivent-ils assumer un risque qui, en raison de la
distinction précitée, devrait en principe être couvert par l'assurance-maladie.
Les lésions mentionnées à l'art. 9 al. 2 OLAA sont assimilées à un accident
même si elles ont, pour l'essentiel, une origine vraisemblablement maladive ou
dégénérative, pour autant qu'une cause extérieure ait, au moins, déclenché les
symptômes dont souffre l'assuré (ATF 129 V 466; ATF 123 V 43 consid. 2b p. 44;
ATF 116 V 145 consid. 2c p. 147; ATF 114 V 298 consid. 3c p. 301).

3.2 La juridiction cantonale a admis l'existence d'une fracture du calcanéum
droit due à un facteur extérieur consistant dans le violent
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coup de talon donné contre le sol. Bien qu'elle ait été facilitée par une
carence en vitamine D consécutive à l'allaitement, les premiers juges ont
considéré que cette lésion corporelle assimilée à un accident n'était pas
manifestement imputable à une maladie ou à des phénomènes dégénératifs, du
moment que le violent coup de talon donné contre le sol apparaît comme la
condition sine qua non de la lésion. En ce qui concerne l'exigence d'un lien de
causalité adéquate, la juridiction cantonale a relevé qu'il n'est certes pas
dans le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie qu'un coup de
talon contre le sol entraîne une fracture. Toutefois, en présence d'une
atteinte à la santé physique, l'assureur-accidents répond aussi des
complications les plus singulières et les plus graves qui ne se produisent
habituellement pas selon l'expérience médicale, de sorte que la causalité
adéquate a été admise par la juridiction cantonale.

3.3 La recourante conteste l'existence d'une lésion corporelle assimilée à un
accident en faisant valoir que la fracture du calcanéum droit n'est pas due à
un facteur extérieur.

3.3.1 Tout d'abord, elle allègue que le seul fait que l'intimée a éprouvé pour
la première fois des douleurs après avoir frappé le sol de son pied ne suffit
pas, selon la jurisprudence, pour admettre l'existence d'un facteur extérieur.
Ce moyen n'est pas pertinent. Le facteur doit être extérieur en ce sens qu'il
doit s'agir d'une cause externe et non interne au corps humain (cf. FRÉSARD/
MOSER-SZELESS, L'assurance-accidents obligatoire, in Soziale Sicherheit, SBVR
vol. XIV, 2^e éd. 2007, p. 859 n. 66). En l'espèce, les douleurs éprouvées ne
sont pas apparues spontanément mais à la suite du coup porté contre le sol,
lequel constitue un facteur extérieur clairement reconnaissable.
Par ailleurs, il faut admettre l'existence d'un facteur extérieur générant un
risque de lésion accru lorsqu'un geste quotidien représente une sollicitation
du corps plus élevée que ce qui est physiologiquement normal et
psychologiquement contrôlé. C'est le cas en particulier lors de la survenance
d'une circonstance qui rend incontrôlable un geste de la vie courante, comme un
accès de colère au cours duquel une personne effectue un mouvement violent non
maîtrisé.

3.3.2 Par un deuxième moyen, la recourante fait valoir que le coup de talon
donné contre le sol a entraîné une fracture en raison notamment d'un phénomène
dégénératif sous la forme d'une déminéralisation des os ou d'un déficit en
vitamine D. Aussi, soutient-elle
BGE 139 V 327 S. 330
que ce geste ne représente pas un risque accru en regard d'une sollicitation
normale de l'organisme et qu'il doit être qualifié objectivement de quotidien
ou d'habituel.
Cette argumentation n'est toutefois pas apte à mettre en cause le point de vue
des premiers juges. Le fait que le geste de frapper le sol du pied puisse être
qualifié éventuellement de quotidien ou d'habituel permet, certes, de nier le
caractère extraordinaire du facteur extérieur (ATF 121 V 35 consid. 1a p. 38;
ATF 118 V 59 consid. 2b p. 61 et les références), mais il ne constitue pas un
critère pour nier l'existence d'un tel facteur.
Par ailleurs, on ne saurait soutenir en l'occurrence que la fracture est
manifestement imputable à des phénomènes dégénératifs (cf. art. 9 al. 2 in
initio OLAA). Du reste, la recourante ne le prétend pas puisqu'elle évoque
seulement une origine partiellement dégénérative. Au demeurant, le fait qu'il
ait pu exister un terrain favorisant la survenance d'une fracture ressortit à
la question de la causalité. Or, sur ce point, il n'y a pas de motif de mettre
en cause le point de vue des premiers juges, selon lequel il existe un lien de
causalité naturelle et adéquate entre la fracture du calcanéum droit et le
violent coup de talon donné contre le sol. (...)
Enfin, la recourante ne saurait nier son obligation de prendre en charge les
suites de l'événement du 23 janvier 2011 en excipant du caractère volontaire de
l'atteinte. L'existence d'un accident - ou, comme en l'occurrence, d'une lésion
corporelle assimilée à un accident - ne peut être niée que si l'intention porte
sur l'atteinte à la santé et non sur le comportement qui produit l'atteinte
dommageable (ATF 115 V 151 consid. 4 p. 152). Or, en l'espèce, si le geste de
l'intimée était volontaire, ses conséquences dommageables ne l'étaient pas.

3.3.3 Vu ce qui précède, la recourante était tenue de prendre en charge les
suites de l'événement du 23 janvier 2011 au titre des prestations de
l'assurance-accidents obligatoire en cas de lésions corporelles assimilées à un
accident au sens de l'art. 9 al. 2 let. a OLAA. Le jugement entrepris n'est dès
lors pas critiquable et le recours se révèle mal fondé.