Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 139 III 297



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Urteilskopf

139 III 297

44. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit civil dans la cause A. contre
PPE X. (recours en matière civile)
5A_246/2012 du 17 avril 2013

Art. 82 Abs. 1 SchKG; provisorische Rechtsöffnung, Schuldanerkennung; Kosten
des Miteigentums.
Die von der Versammlung der Stockwerkeigentümer genehmigte Kostenabrechnung in
Verbindung mit dem vom betriebenen Eigentümer unterzeichneten Reglement über
die Verwaltung und Benutzung des Stockwerkeigentums stellt keine
Schuldanerkennung im Sinne von Art. 82 Abs. 1 SchKG dar (E. 2.1-2.3).
Verpfändet der betriebene Eigentümer zur Sicherung bestimmter Kosten einen
Schuldbrief, der nur nach Tilgung dieser Kosten herauszugeben ist, stellt dies
in Verbindung mit einer von der Versammlung der Stockwerkeigentümer einstimmig
genehmigten Kostenabrechnung hingegen einen provisorischen Rechtsöffnungstitel
dar (E. 2.4).

Sachverhalt ab Seite 298

BGE 139 III 297 S. 298

A. A. et B. sont propriétaires communs en société simple de la propriété par
étages n^o 21195, de 235.45 o/oo, de la parcelle de base n° 10212 de la commune
de C.
Un litige est survenu entre A. et la communauté des propriétaires d'étages "PPE
X." (ci-après: la PPE) concernant le montant des charges et des frais de
rénovation à verser selon le règlement d'administration et d'utilisation de
l'immeuble en propriété par étages du 13 septembre 2000 et les décomptes pour
les années 2008, 2009 et 2010.
Par acte du 8 juillet 2009, A. et B. ont remis en nantissement à la PPE une
cédule hypothécaire portant sur un montant de 200'000 fr. "en couverture des
arriérés de charges 2008-2009 [...]".

B. Le 24 novembre 2010, la PPE, représentée par ses administrateurs, a déposé
une réquisition de prise d'inventaire pour la
BGE 139 III 297 S. 299
sauvegarde de son droit de rétention au sens de l'art. 712k CC contre A. Elle a
invoqué à titre de créance les charges échues du 31 décembre 2008 au 24
novembre 2010 représentant un montant de 145'088 fr. 70.
Dans le délai imparti dès la communication du procès-verbal d'inventaire, elle
a déposé une réquisition de poursuite en réalisation de gage mobilier. Le 9
février 2011, l'Office des poursuites de la Sarine a ainsi notifié à A. un
commandement de payer (poursuite en réalisation d'un gage mobilier n° x) la
somme de 145'088 fr. 70. Le poursuivi y a fait opposition totale le 14 février
2011.
Statuant le 8 juillet 2011 sur la requête du 25 février précédent de la PPE, le
Président du Tribunal civil de la Sarine a prononcé la mainlevée provisoire de
l'opposition à concurrence du montant mis en poursuite. Il a en outre octroyé à
la requérante une équitable indemnité de 500 fr. et mis les frais de justice à
la charge du poursuivi. Il a considéré en bref qu'une reconnaissance de dette
pouvait être déduite du règlement d'administration et d'utilisation de
l'immeuble en propriété par étages, en particulier des art. 22 et 25, ainsi que
des décomptes de charges 2008, 2009 et 2010 approuvés à la majorité par
l'assemblée générale des propriétaires d'étages. Il a aussi tenu compte du fait
que le poursuivi et B. avaient remis en nantissement une cédule hypothécaire de
200'000 fr. pour couvrir les arriérés de charges 2008 et 2009, ce qui valait
reconnaissance de dette pour cette période.
Le 17 février 2012, la II^e Cour d'appel civil du Tribunal cantonal du canton
de Fribourg a partiellement admis le recours interjeté par A. et a réformé le
premier prononcé en ce sens qu'elle a accordé la mainlevée provisoire à
concurrence de 138'988 fr. 70.

C. Par écriture du 26 mars 2012, A. exerce un recours en matière civile au
Tribunal fédéral. Il conclut à l'annulation de l'arrêt cantonal et à sa
réforme, en ce sens que la requête de mainlevée provisoire est rejetée, une
indemnité équitable de 500 fr. à titre de dépens et de frais de procédure étant
mise à la charge de la PPE. Il demande aussi l'allocation en sa faveur de
dépens pour la procédure fédérale.
L'autorité cantonale n'a pas formulé d'observations. L'intimée propose,
principalement, l'irrecevabilité du recours pour défaut de motivation et,
subsidiairement, son rejet. La réponse a été communiquée au recourant pour
information.

D. La requête d'effet suspensif a été rejetée par ordonnance du 27 mars 2012.
BGE 139 III 297 S. 300
Admettant partiellement le recours, le Tribunal fédéral a réformé l'arrêt
cantonal en ce sens qu'il a prononcé la mainlevée provisoire de l'opposition à
concurrence de 57'478 fr. 65.

Erwägungen

Extrait des considérants:

2. Le recourant conteste que l'intimée soit au bénéfice d'une reconnaissance de
dette au sens de l'art. 82 al. 1 LP. Il prétend en substance que l'autorité
cantonale a violé le droit fédéral en considérant qu'il était engagé par le
règlement d'administration et d'utilisation de la propriété par étages et que
le montant de cette dette était déterminable par le rapprochement de ce
document et des décomptes de charges 2008, 2009 et 2010 approuvés par
l'assemblée générale. Se référant à une jurisprudence valaisanne (Revue
valaisanne de jurisprudence [RVJ] 2004 p. 307), il soutient que le décompte de
la communauté des propriétaires d'étages ne représente pas à lui seul un titre
de mainlevée au sens de la loi. Il relève par ailleurs que, si le règlement
d'administration et d'utilisation arrête le principe d'une contribution aux
charges communes et aux frais de l'administration commune proportionnellement à
la valeur des parts et prévoit l'obligation de s'en acquitter dans les trente
jours dès l'approbation des comptes par l'assemblée, il ne fixe pas leur
montant total. Il affirme enfin que l'acte par lequel il a mis en nantissement
une cédule hypothécaire de 200'000 fr. en couverture des arriérés de charges
2008 et 2009 ne saurait être considéré comme une reconnaissance de dette. Il
allègue à cet égard, d'une part, qu'il n'y a pas reconnu "clairement" les
montants réclamés pour ces années-là, le nantissement ne visant pas un tel but,
et, d'autre part, que le bénéficiaire d'un droit de gage mobilier sur une
cédule hypothécaire n'est pas titulaire de la créance incorporée dans le titre.

2.1 Le Tribunal cantonal, se référant à une jurisprudence cantonale citée au
JdT 2008 II p. 29, a admis qu'en matière de charges de copropriété, la
production par le poursuivant des extraits du registre foncier relatifs à
l'existence de la copropriété et à la propriété de la part du poursuivi, ainsi
que du règlement d'administration de la copropriété et de la décision de
l'assemblée des copropriétaires de fixer le montant des charges et des acomptes
mensuels suffit à rendre vraisemblable l'existence d'une reconnaissance de
dette, sans nécessité d'avoir une signature du poursuivi.
Elle a jugé que la PPE avait, en l'occurrence, rendu vraisemblable la réalité
de sa créance en produisant les extraits du registre foncier,
BGE 139 III 297 S. 301
le règlement d'administration et d'utilisation du 13 septembre 2000 signé
notamment par le poursuivi, le décompte final des charges et frais communs de
rénovation pour les années 2008, 2009 et 2010, le décompte établi lors de
l'assemblée générale du 28 avril 2010, le tableau de répartition des frais et
les procès-verbaux d'approbation des comptes 2008, 2009 et 2010 par l'assemblée
des copropriétaires, dont les dernières décisions n'avaient pas fait l'objet de
contestations judiciaires. Elle a de plus souligné que le libellé de l'acte de
nantissement signé par les parties le 8 juillet 2009 confortait la réalité de
la reconnaissance de dette pour l'arriéré de charges 2008 et 2009, qui
s'élevait à 60'988 fr. 70 "à tout le moins".

2.2 La question de savoir dans quelle mesure un décompte de charges approuvé
par l'assemblée générale des propriétaires d'étages rapproché du règlement
d'administration et d'utilisation de la propriété par étages peut constituer
une reconnaissance de dette au sens de l'art. 82 al. 1 LP n'a jamais été
tranchée par le Tribunal fédéral. Des jurisprudences cantonales vont dans ce
sens, pour autant toutefois que le poursuivant produise les extraits du
registre foncier relatifs à l'existence de la copropriété et à la propriété de
la part du poursuivi, ainsi que le règlement d'administration et la décision de
l'assemblée des copropriétaires de fixer le montant des charges et des acomptes
mensuels (arrêt de la Cour de justice du canton de Genève ACJ/1278/00 du 14
décembre 2000 cité par FLORENCE KRAUSKOPF, La mainlevée provisoire: quelques
jurisprudences récentes, JdT 2008 II p. 23; RVJ 2004 p. 307). Certes, ainsi que
le relève le recourant, l'arrêt publié à la RVJ 2004 p. 307 dispose que le
décompte de la communauté des propriétaires d'étages ne représente pas à lui
seul un titre de mainlevée provisoire. La lecture des considérants laisse
toutefois apparaître que le Tribunal cantonal valaisan aurait pu en l'espèce
lever provisoirement l'opposition si d'autres documents, notamment le règlement
d'administration et le contrat constitutif de la propriété par étages ainsi
qu'un contrat de vente, avaient été produits, ce qui n'avait pas été le cas
devant le premier juge.

2.3 Cette pratique cantonale ne saurait être suivie.

2.3.1 Constitue une reconnaissance de dette au sens de l'art. 82 al. 1 LP
l'acte sous seing privé, signé par le poursuivi - ou son représentant -, d'où
ressort sa volonté de payer au poursuivant, sans réserve ni condition, une
somme d'argent déterminée, ou aisément déterminable, et échue (ATF 136 III 624
consid. 4.2.2 p. 626, ATF 136 III 627 consid. 2 p. 629 et la jurisprudence
citée).
BGE 139 III 297 S. 302
Une reconnaissance de dette peut aussi résulter d'un ensemble de pièces dans la
mesure où il en ressort les éléments nécessaires. Cela signifie que le document
signé doit clairement et directement faire référence, respectivement renvoyer,
aux documents qui mentionnent le montant de la dette ou permettent de le
chiffrer (parmi plusieurs: ATF 136 III 627 consid. 2 et 3.3 p. 629; ATF 132 III
480 consid. 4.1 p. 480/481 et les références citées). Une référence ne peut
cependant être concrète que si le contenu des documents auxquels il est renvoyé
est connu du déclarant et visé par la manifestation de volonté signée (ATF 136
III 627 consid. 3.3 p. 632; ATF 132 III 480 consid. 4.3 p. 482; cf. aussi: ATF
106 III 97 consid. 4 p. 99/100). En d'autres termes, cela signifie que le
montant de la dette doit être fixé ou aisément déterminable dans les pièces
auxquelles renvoie le document signé, et ce au moment de la signature de ce
dernier (cf. PETER STÜCHELI, Die Rechtsöffnung, 2000, p. 191; DANIEL STAEHELIN,
in Basler Kommentar, Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, vol. I, 2^
e éd. 2010, n° 26 ad art. 82 LP).
Plus particulièrement, le Tribunal fédéral a jugé qu'il était arbitraire de
refuser la mainlevée provisoire pour une créance de cotisation d'une
institution de prévoyance du personnel lorsque, dans la convention
d'affiliation, signée par le débiteur, le montant de celle-là était soumis à
l'adaptation périodique, légalement prévue, du salaire coordonné à l'AVS (ATF
114 III 71 critiqué par STAEHELIN, op. cit., n° 26 ad art. 82 LP). Si, dans ce
cas d'espèce, il a admis le caractère aisément déterminable du montant de la
dette, le motif en était qu'au moment de la signature de la convention
d'affiliation, les bases de calcul des adaptations périodiques de la cotisation
étaient clairement et légalement définies. Ce même raisonnement a fondé l'arrêt
publié aux ATF 116 III 62 (indexation d'une rente après divorce en fonction de
l'indice des prix à la consommation; à cet égard: STÜCHELI, op. cit., p. 191).
Si le Tribunal fédéral a pu, à l'occasion, reconnaître l'existence d'une
reconnaissance de dette alors même que le montant dû n'était ni fixé ni
déterminable au moment de la signature du contrat, il l'a fait - sous l'angle
restreint de l'arbitraire - dans le contexte très particulier d'un contrat par
lequel un établissement bancaire s'était obligé à payer à un commerçant les
marchandises fournies par ce dernier à des clients titulaires des cartes de
crédit qu'il avait émises (arrêt 5P.460/1992 du 25 février 1993 consid. 2, in
Rep 1994 p. 254).
BGE 139 III 297 S. 303

2.3.2 Au vu de ce qui précède, on ne saurait prononcer la mainlevée pour un
montant qui n'était pas déterminé ou aisément déterminable au moment où le
débiteur a apposé sa signature sur le document d'où résulte son engagement. Or,
si le règlement d'administration et d'utilisation signé par le copropriétaire
d'étages prévoit l'obligation générale de contribuer aux frais et charges
communs telle qu'elle résulte de l'art. 712h CC ainsi que les modalités de
paiement de cette contribution (cf. AMADEO WERMELINGER, La propriété par
étages, 2^e éd. 2008, p. 401), le montant de ceux-là et la répartition entre
les copropriétaires sont fixés ultérieurement sur la base d'un décompte annuel
et d'un plan de répartition qui doivent être approuvés par l'assemblée des
copropriétaires (art. 712m al. 1 ch. 4 CC).
Ainsi, en l'espèce, le règlement d'administration et d'utilisation de la PPE du
13 septembre 2000 signé par le poursuivi prévoit le principe de la contribution
du copropriétaire aux frais et charges communs et en fixe le mode de
répartition - proportionnellement à la valeur des parts d'étages - (art. 22 et
23), de même que les modalités de paiement (art. 24 à 27). Le montant de ces
dépenses pour chaque copropriétaire est toutefois arrêté d'année en année sur
la base d'un devis, d'un décompte et d'un plan de répartition qui doivent être
approuvés par l'assemblée des copropriétaires (art. 36). Si, au moment de la
signature du règlement d'administration et d'utilisation, le principe de la
dette pour les charges et frais communs était connu du recourant, le montant de
ceux-là n'était cependant ni déterminé ni aisément déterminable au sens défini
au considérant 2.3.1 (dans ce sens: STAEHELIN, op. cit., n° 141a ad art. 82 LP
).

2.4 Autre est la question de savoir si l'acte de nantissement du 8 juillet 2009
rapproché des comptes et décomptes de charges 2008 et 2009 approuvés par
l'assemblée générale permet de retenir l'existence d'une reconnaissance de
dette au sens défini ci-devant (supra, consid. 2.3.1). Il résulte de cet acte -
signé notamment par le recourant - que la cédule hypothécaire de 200'000 fr. a
été remise en nantissement "en couverture des arriérés de charges 2008 et 2009
ouverts auprès de la PPE", sa restitution étant prévue "dès paiement des
charges arriérées précitées". Au vu de ce libellé, il faut admettre que le
recourant a admis l'existence d'une créance envers la copropriété. De fait, le
nantissement ne peut être constitué que dans la mesure où la créance garantie
existe (sur les conditions matérielles de la constitution du nantissement et,
en particulier, sur la spécialité
BGE 139 III 297 S. 304
du nantissement quant à la créance garantie: PAUL-HENRI STEINAUER, Les droits
réels, tome III, 2^e éd. 1996, n^os 3079 ss).
Quant au montant de cette créance envers la copropriété, il peut être établi
par le rapprochement avec les décomptes de charges. Toutefois, conformément aux
principes développés ci-devant (supra, consid. 2.3.1), encore faut-il que
celles-là aient été déterminées ou aisément déterminables au moment de la
signature de l'acte de nantissement. Or, à cette date, seuls les comptes 2008
de la PPE avaient été acceptés à l'unanimité par l'assemblée des
copropriétaires du 24 juin 2009, décision que le recourant n'a pas attaquée.
Les comptes faisant état des arriérés et des charges au 31 décembre 2009
n'avaient pas encore été établis ni, a fortiori, approuvés. L'assemblée
générale ayant pour objet leur approbation s'est en effet tenue le 28 avril
2010. Il faut dès lors considérer qu'une reconnaissance de dette au sens défini
ci-devant (supra, consid. 2.3.1) ne peut résulter que du rapprochement de
l'acte de nantissement et du décompte de charges pour l'année 2008. Comme il
ressort de ce dernier que celles-là s'élevaient à 57'478 fr. 65, il y a lieu de
prononcer la mainlevée provisoire de l'opposition formée par le poursuivi à
concurrence de ce montant.