Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 139 III 1



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Urteilskopf

139 III 1

1. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit civil dans la cause A. SA contre
Communauté des copropriétaires par étage PPE B. (recours en matière civile)
5A_352/2012 du 27 novembre 2012

Regeste

Art. 712a ZGB; Einschränkungen des Nutzungsrechts des Stockwerkeigentümers.
Grenzen, welche die Stockwerkeigentümer einhalten müssen, wenn sie die freie
Nutzung der zu Sonderrecht ausgeschiedenen Teile vertraglich einschränken. Fall
einer reglementarischen Abänderung, welche die Einrichtung eines Kinderhorts in
Stockwerkanteilen verbietet (E. 4.3 und 4.4).

Sachverhalt ab Seite 2

BGE 139 III 1 S. 2

A. Le 12 mai 2006, la société A. SA a constitué la propriété par étages "B."
sur la parcelle n^o 26 de la Commune de C. Elle a ensuite procédé à la création
de soixante-trois appartements, septante-neuf places de parc intérieures, vingt
places de parc extérieures et six locaux destinés au secteur tertiaire.
Le même jour, elle a adopté un règlement d'administration et d'utilisation
(ci-après: le règlement).
La société A. SA est restée propriétaire de trois locaux au sein de la PPE: un
local avec affectation tertiaire/appartement au rez-de-chaussée du bâtiment A
(136/10'000) et deux locaux avec affectation tertiaire au rez-de-chaussée avec
terrasse du bâtiment B (85/10'000 et 190/10'000).
A son adoption, l'art. 10 du règlement ("Destination des lots") prévoyait:
"1. Sauf décision contraire de l'assemblée des propriétaires d'étages
conformément à l'al. 3 ci-dessous, les lots ne peuvent servir qu'à l'usage
auquel ils sont destinés. La destination actuelle est mixte, soit:
2. Habitation, local avec affectation tertiaire, locaux, ateliers. Le promoteur
de la construction, à défaut le copropriétaire d'un lot en nature de local avec
affectation tertiaire, de locaux ou d'ateliers pourra unilatéralement en
changer l'affectation à destination d'habitation, soit sans l'accord des autres
copropriétaires, à la condition d'obtenir les autorisations administratives
adéquates. Demeure réservée l'approbation des copropriétaires pour tous travaux
qu'impliqueraient (sic) une telle modification de l'affectation, touchant aux
parties communes.
3. Des affectations spéciales telles qu'un salon de jeu, un commerce érotique
ou un restaurant 'fast food' doivent faire l'objet d'une autorisation expresse.
[...]."
Lors de l'assemblée des copropriétaires du 3 novembre 2008, deux représentants
de la Commune de C. ont exposé aux copropriétaires présents le projet
d'ouverture d'une garderie dans les locaux appartenant à A. SA. Une majorité
des membres de la PPE s'est prononcée en défaveur de ce projet.
BGE 139 III 1 S. 3
Une assemblée générale extraordinaire s'est tenue le 17 novembre 2009. Selon le
ch. 18 du procès-verbal de dite assemblée, un comité de la PPE ainsi que
l'administrateur de cette dernière ont rencontré la Direction des Affaires
sociales et familiales de la ville de C. vers la fin de l'été 2009. A cette
occasion, la délégation des copropriétaires a rappelé la position exprimée par
l'assemblée au mois de novembre 2008, à savoir un refus de voir s'ouvrir une
garderie dans les lots en cours de finition. De son côté, la municipalité s'est
montrée disposée à effectuer certains aménagements si le projet se
concrétisait.
Une assemblée générale ordinaire a été convoquée le 5 mai 2010. Il ressort
notamment du procès-verbal de dite assemblée que la modification réglementaire
suivante a été adoptée à la double majorité (point 5):
"Art. 10: Destination des lots
1. Sauf décision contraire de l'assemblée des propriétaires d'étages
conformément à l'al. 3 ci-dessous, les lots ne peuvent servir qu'à l'usage
auquel ils sont destinés. La destination actuelle est mixte, soit:
2. Habitation, local avec affectation tertiaire, locaux, ateliers, à
l'exclusion de toute activité de garderie, pouponnière, pré- ou parascolaire ou
assimilé. Demeure réservée l'approbation des copropriétaires pour tous travaux
qu'impliquerait une telle modification de l'affectation, touchant aux parties
communes.
Les alinéas 3 et 4 de l'article 10 restent inchangés."

B. Par demande déposée le 7 juin 2010 devant le Tribunal civil de
l'arrondissement de l'Est vaudois, A. SA a conclu, entre autres, à l'annulation
du point 5 de la décision de l'assemblée générale ordinaire du 5 mai 2010 en
tant qu'elle concerne la modification des art. 10 du règlement et lui interdit
désormais l'installation d'une garderie dans les locaux lui appartenant.
L'intéressée sollicite ainsi que la teneur de cette disposition au 12 mai 2006
demeure inchangée.
Le Tribunal d'arrondissement a rejeté la demande par jugement du 17 mai 2011.
Statuant le 8 février 2012 sur appel de A. SA, la Cour d'appel civile du
Tribunal cantonal du canton de Vaud l'a rejeté et confirmé le jugement de
première instance.

C. Saisi d'un recours en matière civile de A. SA, le Tribunal fédéral l'a
rejeté en date du 27 novembre 2012.
(résumé)

Erwägungen

BGE 139 III 1 S. 4
Extrait des considérants:

4.

4.3

4.3.1 Aux termes de l'art. 712a CC, les parts de copropriété d'un immeuble
peuvent être constituées en propriété par étages, de manière que chaque
copropriétaire a le droit exclusif d'utiliser et d'aménager intérieurement des
parties déterminées d'un bâtiment (al. 1); le copropriétaire a le pouvoir
d'administrer, d'utiliser et d'aménager ses locaux dans la mesure où il ne
restreint pas l'exercice du droit des autres copropriétaires, n'endommage pas
les parties, ouvrages et installations communs du bâtiment, n'entrave pas leur
utilisation ou n'en modifie pas l'aspect extérieur (al. 2).
Le droit d'utilisation conféré par l'art. 712a al. 2 CC permet au propriétaire
d'utiliser ses parties exclusives comme il l'entend. Cette liberté est
présumée. Elle peut toutefois être limitée par des restrictions légales et des
restrictions conventionnelles (ATF 111 II 330 consid. 7; arrêts 5A_499/2010 du
20 décembre 2010 consid. 8.2 et les références; 5C.168/2003 du 17 février 2004
consid. 4.1, in Revue du notariat et du registre foncier [RNRF] 85/2004 p. 433
ss). Les propriétaires d'étages peuvent ainsi convenir de restrictions à leur
liberté d'utilisation de leurs parties exclusives dans l'acte constitutif de la
propriété par étages, dans le règlement prévu à l'art. 712g al. 3 CC, dans le
règlement de maison ou dans une décision ad hoc de la communauté (ATF 111 II
330 consid. 7; arrêts 5A_499/2010 précité consid. 8.2; 5C.168/2003 précité
consid. 4.2). Ils peuvent notamment prévoir que les locaux doivent être
utilisés dans un certain but, par exemple qu'il est interdit d'y exploiter un
commerce ou un restaurant (ATF 111 II 330 consid. 7; arrêts 5A_499/2010 précité
consid. 8.2 et les références; 5C.252/2003 du 18 mars 2004 consid. 2.2).

4.3.2 Les restrictions conventionnelles doivent respecter les limites générales
de l'ordre juridique (art. 2 et 27 CC, art. 19 s. CO; ATF 111 II 330 consid. 4;
5C.168/2003 précité consid. 4.2.1), ainsi que celles qui découlent de
l'institution même de la propriété par étages (arrêts 5A_499/2010 précité
consid. 8.2.1 et les références doctrinales; 5C.168/2003 précité consid. 4.2.1;
cf. ATF 111 II 330 consid. 8 et 9; AMÉDÉO WERMELINGER, La propriété par étages,
2^e éd. 2008, n^o 71 ad art. 712a CC): les intérêts divergents et convergents
des propriétaires d'étages doivent ainsi s'équilibrer, de façon que chacun
d'eux puisse exercer ses droits le plus librement possible, tout en
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permettant à la communauté de fonctionner comme une entité (ATF 111 II 330
consid. 7).
De graves restrictions au droit exclusif du propriétaire d'étage ne peuvent
cependant être prises qu'à l'unanimité (PASCAL WIRZ, Schranken der
Sonderrechtsausübung im Stockwerkeigentum, 2008, p. 176 et 195; cf. également
ARTHUR MEIER-HAYOZ, Berner Kommentar, 1988, n^os 55 et 59 ad art. 712a CC
notamment), ou du moins, avec l'accord du propriétaire concrètement concerné
par la restriction (ROLF H. WEBER, Die Stockwerkeigentümergemeinschaft, 1979,
p. 205 s. notamment).

4.3.3 Si les copropriétaires ont adopté des restrictions conventionnelles
admissibles, en particulier s'ils ont convenus de soumettre l'immeuble à une
certaine affectation, l'accord de tous les copropriétaires est nécessaire pour
un changement dans la destination de l'immeuble ou d'une part d'étage (art. 648
al. 2 CC; ATF 111 II 330 consid. 2 in fine; arrêts 5A_499/2010 précité consid.
8.2.2; 5C.168/2003 précité consid. 4.2.1). Le changement dans la destination de
la chose doit néanmoins être distingué de son changement d'utilisation qui,
selon l'art. 647b al. 1 CC, doit être pris à la majorité de tous les
copropriétaires, représentant en outre, leurs parts réunies, plus de la moitié
de la chose. Les art. 648 al. 2 et 647b al. 1 CC trouvent tous deux application
dans le cadre de la propriété par étages en vertu de l'art. 712g al. 1 CC.
Il y a changement de destination lorsque, soit par des mesures de fait, soit
par des mesures juridiques, l'usage et l'affectation économique de l'immeuble
en propriété par étages sont modifiés de façon profonde et significative. La
destination actuelle de l'objet est ainsi reléguée au second plan (arrêts
5A_428/2008 et 5A_429/2008 du 19 mars 2009 consid. 4.5.2, in RNRF 91/2010 p.
297 ss et les références; 5A_760/2011 du 18 mai 2012 consid. 4.3.3).
L'affectation de l'immeuble détenu en copropriété est à cet égard déterminante:
tant que subsiste le caractère global de l'immeuble, la transformation d'une
seule unité d'étage ne conduit pas à un changement d'affectation au sens de
l'art. 648 al. 2 CC (ATF 130 III 441 consid. 2.3 et 2.4, ATF 130 III 450
consid. 2.1; arrêts 5A_428/2008 et 5A_429/2008 précités consid. 4.5.2 et les
références).

4.4

4.4.1 Il convient avant tout de rappeler que les lots objets du droit exclusif
de la recourante n'ont actuellement aucune affectation: ils
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n'ont donc jamais été, et ne sont pas, aujourd'hui, destinés à des activités
pré- ou parascolaires. Dans ces circonstances, on ne saurait admettre que les
modifications réglementaires adoptées à la double majorité conformément au
règlement porteraient atteinte au droit exclusif de la recourante en se
référant à la protection de ses droits acquis (arrêt 5A_690/2011 du 10 janvier
2011 consid. 3.2 et 3.3).
Il ne peut en outre être tenu pour établi - bien que les parties ne paraissent
pas le contester formellement - que les aménagements envisagés par la
recourante auraient été autorisés par l'ancien règlement, la nécessité
d'obtenir une autorisation expresse pour certains types d'activité n'ayant en
effet pas un caractère exhaustif (art. 10 al. 3 du règlement).
Le nouveau règlement n'entraîne de surcroît aucun changement dans la
destination de l'immeuble lui-même en tant que celui-ci demeure affecté à
l'habitation ou à des activités du domaine tertiaire, dont le cercle a
simplement été restreint. Dès lors que la recourante peut encore parfaitement
destiner ses parts d'étages à l'exercice d'une large palette d'activités du
domaine tertiaire, on ne saurait retenir que la modification réglementaire
envisagée restreindrait gravement son droit exclusif et qu'elle ne pouvait en
conséquence être adoptée sans son consentement. Il faut au contraire conclure
que la double majorité, nécessaire pour adopter un changement dans
l'utilisation d'un lot, était suffisante (art. 47 let. h du règlement).

4.4.2 Cela dit, il convient de relever qu'il ressort du dossier cantonal, sans
que la Cour d'appel ne l'ait formellement constaté (art. 105 al. 2 LTF) que,
alors même que les enfants amenés à fréquenter la crèche ne devraient pas
utiliser le jardin au centre du complexe, la capacité de la crèche envisagée
est particulièrement importante, celle-ci pouvant en effet accueillir jusqu'à
51 enfants: 5 bébés, 14 trotteurs, 20 moyens et 12 écoliers (PV de l'assemblée
générale du 3 novembre 2008, p. 4). Il n'est pas non plus établi que les locaux
soient adaptés aux normes phoniques liées à l'activité d'une garderie (PV de
l'assemblée générale extraordinaire du 17 novembre 2009 ch. 18) et si
d'éventuels aménagements ont été évoqués (cf. communiqué de presse de la
municipalité), aucune garantie n'a été donnée afin qu'ils puissent être
concrètement réalisés. Dans ces circonstances, on ne saurait conclure que la
protection du droit exclusif de la recourante d'aménager ses parts d'étages
comme elle l'entend devrait l'emporter sur le droit des autres copropriétaires
à s'opposer aux immissions nécessairement générées par un établissement destiné
à recevoir un nombre d'enfants
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aussi conséquent. Les différents éléments de fait invoqués par la recourante
pour démontrer l'atteinte au noyau dur de son droit exclusif - préavis de la
Municipalité de C., conclusion d'un contrat de vente avec la commune, mise à
l'enquête publique - ne permettent pas, au demeurant, de faire apparaître la
décision prise comme portant une atteinte grave à son droit exclusif au sens de
l'art. 712a CC. L'intérêt évident des citoyens à bénéficier de nouvelles places
de crèche n'entre pas en considération sous cet angle.
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté sur ce point.