Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 134 I 269



Urteilskopf

134 I 269

32. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit social dans la cause Communauté
genevoise d'action syndicale et consorts contre Conseil d'Etat de la République
et canton de Genève (recours en matière de droit public)
8C_184/2008 du 3 octobre 2008

Regeste

Art. 9 und 49 Abs. 1 BV; Art. 356 ff. OR; Gesetzgebung des Kantons Genf in
Sachen Arbeitslosigkeit; Vernehmlassungsverfahren vor der Verabschiedung des
Ausführungsreglements; Minimallöhne für Solidaritätsbeschäftigungen ("emplois
de solidarité"); Gesamt- und Normalarbeitsverträge; abstrakte Normenkontrolle.
Art. 53 des Gesetzes des Kantons Genf in Sachen Arbeitslosigkeit: Konsultation
der Sozialpartner vor der Verabschiedung oder Abänderung der
Ausführungsbestimmungen. Die Verletzung dieser Bestimmung bei der
Verabschiedung des Ausführungsreglements vom 23. Januar 2008 zum Gesetz in
Sachen Arbeitslosigkeit stellt angesichts der konkreten Umstände keinen
genügend schweren Mangel dar, um die Aufhebung des Reglements in seiner
Gesamtheit zu bewirken (E. 3). Art. 45G des Gesetzes: Bestimmung der
Minimallöhne für Solidaritätsbeschäftigungen ("emplois de solidarité") auf dem
ergänzenden Arbeitsmarkt. Das Ausführungsreglement vom 23. Januar 2008 ist mit
dieser Bestimmung vereinbar und die Minimallöhne wurden im für diesen Zweck
vorgesehenen besonderen Verfahren festgelegt (E. 4 und 5). Vorrang des
Bundesrechts: Die in Art. 43 des Ausführungsreglements festgelegten
Minimallöhne widersprechen den die Gesamt- und Normalarbeitsverträge
betreffenden Art. 356 ff. und 359 ff. OR nicht (E. 6).

Sachverhalt ab Seite 270

BGE 134 I 269 S. 270

A. Le 11 novembre 1983, le Grand Conseil de la République et canton de Genève a
adopté la loi cantonale genevoise en matière de chômage (LMC/GE; RSG J 2 20).
Cette loi a été modifiée la dernière fois par la loi 9922 adoptée par le Grand
Conseil le 28 juin 2007. A la suite de l'aboutissement d'un référendum, la loi
modifiée a été adoptée en votation populaire le 16 décembre 2007. Elle est
entrée en vigueur le 1^er février 2008. Elle règle l'application dans le canton
de Genève de la législation fédérale du 25 juin 1982 sur l'assurance- chômage
obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité (LACI; RS 837.0). Elle vise
aussi, par des mesures cantonales, à favoriser le placement rapide et durable
des chômeurs dans le marché de l'emploi et à renforcer les compétences des
chômeurs par l'octroi de mesures d'emploi, de formation et de soutien à la
réinsertion. Elle institue pour des chômeurs sans perspective de réinsertion
rapide des possibilités de maintien en activité professionnelle afin de
prévenir leur marginalisation (art. 1 let. b, c et e LMC/GE). La loi contient
un nouveau chapitre VA du titre III, intitulé "Programme d'emplois de
solidarité sur le marché complémentaire de l'emploi". Ce chapitre contient les
dispositions suivantes:
Art. 45D Principe (nouveau)
^1 Un programme de création d'emplois sur le marché complémentaire de l'emploi
est institué.
^2 Il est destiné aux personnes qui ont épuisé leurs droits à
l'assurance-chômage sans que les mesures prévues dans la présente loi se soient
avérées fructueuses.
BGE 134 I 269 S. 271
^3 Le présent chapitre ne consacre pas un droit pour le chômeur d'obtenir une
mesure déterminée.
Art. 45E Organisation (nouveau)
^1 Le département organise la mise à disposition de ces emplois en mandatant à
cet effet des institutions privées ou associatives, à but non lucratif,
poursuivant des buts d'intérêt collectif et déployant des activités sur le
marché complémentaire de l'emploi.
^2 Les projets retenus doivent répondre à une utilité sociale et dégager, dans
la mesure du possible, des moyens financiers propres qui permettent de couvrir
tout ou partie de leurs coûts. Ils doivent viser à l'insertion professionnelle
des demandeurs d'emploi.
^3 Dans le choix des activités retenues, le département veille à éviter toute
concurrence avec les entreprises commerciales genevoises, en particulier celles
régies par des conventions collectives de travail.
^4 Le département demande le préavis du Conseil de surveillance du marché de
l'emploi sur les mandats attribués, les projets et les activités retenus.
Art. 45F Nombre d'emplois (nouveau)
^1 L'Etat fixe, dans le cadre de l'élaboration de son budget annuel,
l'enveloppe à disposition de ce programme et le nombre d'emplois de solidarité
qu'il devrait permettre de créer sur le marché complémentaire de l'emploi.
^2 Il consulte préalablement le Conseil de surveillance du marché de l'emploi.
Art. 45G Modalités et compensation financière (nouveau)
^1 Les bénéficiaires perçoivent de la part des institutions partenaires un
salaire dont le montant est au moins équivalent aux normes prévues par la loi
sur les prestations cantonales accordées aux chômeurs en fin de droit, du 18
novembre 1994, ou celles découlant de la loi sur l'aide sociale individuelle,
du 22 mars 2007.
^2 Le Conseil d'Etat détermine des salaires minimaux sur préavis du Conseil de
surveillance du marché de l'emploi.
^3 Les relations contractuelles entre les bénéficiaires et les institutions
partenaires sont régies pour le surplus par le contrat de travail signé par ces
derniers et, à titre supplétif, par les dispositions du titre dixième du code
des obligations.
^4 Le contrat de travail est à durée indéterminée et donne lieu au prélèvement
des cotisations sociales usuelles.
^5 L'Etat contribue au paiement du salaire versé par l'institution partenaire.
Cette contribution est déterminée par le département en tenant compte des
moyens financiers que l'institution dégage par son activité, conformément à
l'article 45E, alinéa 2, ainsi que de la situation personnelle de l'intéressé,
conformément à l'alinéa 1 du présent article.
BGE 134 I 269 S. 272
^6 La contribution de l'Etat fait l'objet d'une convention entre celui-ci et
l'institution concernée, qui précise les droits et obligations de chaque
partie. Cette contribution n'est pas soumise à la loi sur les indemnités et les
aides financières, du 15 décembre 2005.

B. Le 23 janvier 2008, le Conseil d'Etat de la République et canton de Genève a
adopté le règlement d'exécution de cette loi (règlement d'exécution de la loi
en matière de chômage [RMC/GE; RSG J 2 20.01]; ci-après: le règlement). Il est
paru dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève le
30 janvier 2008. L'art. 43 RMC/GE fixe le salaire mensuel brut de l'emploi de
solidarité. L'art. 44 RMC/GE prévoit, sous certaines conditions, le versement
d'une allocation complémentaire en faveur du bénéficiaire d'un emploi de
solidarité. Ces deux dispositions ont la teneur suivante:
Art. 43 Salaires
^1 Le salaire mensuel brut de l'emploi de solidarité est de:
a) 3'000 F pour une fonction ne requérant aucune formation spécifique;
b) 3'500 F pour une fonction conforme à la lettre a, mais occupée par un
titulaire du certificat fédéral de capacité ou d'un diplôme professionnel
équivalent;
c) 4'000 F pour une fonction spécialisée ou à responsabilités, dont l'exercice
requiert impérativement un certificat fédéral de capacité ou un diplôme
professionnel équivalent.
^2 Ces montants correspondent à un taux d'activité à plein temps sur la base de
40 heures hebdomadaires et 12 versements par an.
^3 L'office détermine le salaire adéquat après examen de l'emploi de solidarité
concerné, ainsi que du dossier de son bénéficiaire potentiel.
Art. 44 Allocation complémentaire
^1 Si le salaire perçu par le bénéficiaire d'un emploi de solidarité est
inférieur aux prestations qu'il percevrait en vertu de la loi sur les
prestations cantonales accordées aux chômeurs en fin de droit, du 18 novembre
1994, une allocation complémentaire lui est versée pour combler le différentiel
constaté.
^2 Cette allocation complémentaire n'est pas assimilée à un salaire et ne donne
pas lieu au prélèvement des cotisations sociales.
(...)

C. Par une écriture commune remise à la Poste le 29 février 2008, la Communauté
genevoise d'action syndicale (CGAS), Comedia, syndicat des médias, le Syndicat
interprofessionnel des travailleuses et travailleurs (SIT), le Syndicat des
services publics (SSP/
BGE 134 I 269 S. 273
VPOD), le Syndicat UNIA, ainsi que C. ont formé un recours en matière de droit
public au Tribunal fédéral contre le règlement précité, dont ils demandent
l'annulation. Le Conseil d'Etat a conclu au rejet du recours. Le Secrétariat
d'Etat à l'économie s'est également exprimé sur le recours.
Les parties ont maintenu leurs conclusions au terme d'un échange ultérieur
d'écritures.
Le recours a été rejeté.

Auszug aus den Erwägungen:

Extrait des considérants:

3.

3.1 Les recourants se plaignent d'une violation du principe de la séparation
des pouvoirs. Selon eux, le règlement contreviendrait à la loi cantonale en
matière de chômage aussi bien dans sa procédure d'adoption que dans son
contenu. S'agissant de la procédure d'adoption, ils font tout d'abord valoir
que le Conseil d'Etat a violé l'art. 53 LMC/GE en omettant la procédure de
consultation prévue par cette disposition. Ils reprochent en outre au Conseil
d'Etat de n'avoir pas respecté la procédure de préavis prévue par l'art. 45G
al. 2 LMC/GE s'agissant des salaires perçus par les bénéficiaires des emplois
de solidarité. A l'appui de ce dernier grief, les recourants invoquent, en plus
du principe de la séparation des pouvoirs, le droit à la liberté syndicale
garanti par l'art. 28 Cst.
Il convient d'examiner ensemble ces griefs, qui tous deux relèvent de la
procédure d'adoption du règlement contesté.

3.2 L'art. 53 LMC/GE, qui figurait dans la précédente version de la loi,
prévoit ceci: "Le Conseil d'Etat consulte les partenaires sociaux avant
l'adoption ou la modification des dispositions d'exécution de la présente loi."
Quant à l'art. 45G al. 2 LMC/GE, il prévoit que le Conseil d'Etat détermine des
salaires minimaux sur préavis du Conseil de surveillance du marché de l'emploi
(ci-après: CSME). Dans ses déterminations, le Conseil d'Etat admet avoir adopté
le règlement modifié sans une consultation formelle des partenaires sociaux
telle qu'elle est prévue à l'art. 53 LMC/GE. Il attribue cette omission au
souci de l'exécutif d'organiser le plus rapidement possible la mise en oeuvre
des emplois de solidarité dans l'intérêt des chômeurs et alors que le processus
législatif avait été bloqué pendant de nombreux mois en raison de la procédure
référendaire. En revanche, le Conseil d'Etat conteste le grief des recourants
BGE 134 I 269 S. 274
concernant la procédure de préavis prévue par l'art. 45G al. 2 LMC/GE. Selon
lui, cette procédure a été respectée.

3.3

3.3.1 De manière générale, la Constitution fédérale ne confère pas aux citoyens
le droit d'être entendus dans une procédure législative (ATF 123 I 63 consid.
2a p. 66). Une exception n'est admise que lorsque certaines personnes
(destinataires dits "spéciaux") sont touchées de façon sensiblement plus grave
que le plus grand nombre des destinataires "ordinaires", par exemple lorsqu'un
décret de portée générale ne touche qu'un très petit nombre de propriétaires (
ATF 119 Ia 141 consid. 5 p. 149). Le Tribunal fédéral a par ailleurs admis que
la liberté syndicale (art. 28 Cst.), si elle ne confère pas aux organisations
syndicales de la fonction publique le droit de participer au processus
législatif portant sur le statut du personnel, leur accorde néanmoins celui
d'être entendues sous une forme appropriée en cas de modifications législatives
ou réglementaires touchant de manière significative les conditions de travail
de leurs membres (ATF 129 I 113 consid. 3 p. 120 ss).
En l'espèce, on ne saurait considérer les organisations recourantes ou le
recourant C. comme étant gravement et spécialement touchés par l'acte attaqué.
D'autre part, celui-ci ne concerne pas le statut de la fonction publique, de
sorte que l'art. 28 Cst. ne saurait être invoqué dans le présent contexte. Les
recourants ne sauraient donc déduire un droit d'être entendus de la
Constitution fédérale. C'est uniquement au regard du droit cantonal (art. 53 et
art. 45G al. 2 LMC/ GE) qu'il convient d'examiner les griefs soulevés ici.

3.3.2 Le principe de la séparation des pouvoirs est garanti, au moins
implicitement, par toutes les Constitutions cantonales et représente un droit
constitutionnel dont peut se prévaloir le citoyen (ATF 130 I 1 consid. 3.1 p. 5
et les références). Ce principe garantit le respect des compétences établies
par la Constitution. Il appartient en premier lieu au droit public cantonal de
fixer les compétences des autorités (ATF 130 I 1 consid. 3.1 p. 5; ATF 128 I
113 consid. 2c p. 116 et les références).
Dans le cas particulier, il ne fait pas de doute que le Conseil d'Etat était
compétent pour édicter le règlement en cause (voir aussi infra consid. 4.2).
L'argument selon lequel l'autorité exécutive n'aurait pas consulté
préalablement les partenaires sociaux ou demandé un préavis au CSME n'a pas
trait à la compétence du Conseil d'Etat
BGE 134 I 269 S. 275
d'adopter le règlement litigieux. Il s'agit bien plutôt de savoir si l'autorité
compétente (le Conseil d'Etat) a respecté la procédure prévue à cet effet pour
l'adoption du règlement. Un tel grief ne ressortit donc pas au principe de la
séparation des pouvoirs, mais peut être soulevé en dénonçant une violation du
principe général de l'interdiction de l'arbitraire inscrit à l'art. 9 Cst. (ATF
133 I 178).

3.3.3 Ainsi qu'on l'a vu, la loi prévoit une double procédure de consultation,
préalable et spéciale, en définissant le cercle des destinataires. Pour
l'adoption ou la modification du règlement, le Conseil d'Etat est tenu de
consulter les "partenaires sociaux" (art. 53 LMC/ GE), ce par quoi il faut
entendre les organisations syndicales et patronales. Pour la détermination des
salaires en faveur des bénéficiaires des emplois de solidarité, le Conseil
d'Etat demande le préavis du CSME. Ce dernier est institué par les art. 12 ss
de la loi genevoise du 18 septembre 1992 sur le service de l'emploi et la
location de services (LSELS/GE; RSG J 2 05). Il a pour mission d'examiner les
problèmes d'application relatifs à la politique générale du marché du travail.
Font partie du Conseil cinq représentants de l'Etat, dont le conseiller d'Etat
en charge du département compétent, qui le préside, ainsi que cinq
représentants des employeurs et cinq représentants des travailleurs, nommés par
le Conseil d'Etat, sur proposition de l'Union des associations patronales
genevoises (UAPG) et de la (CGAS).

3.3.4 Il ressort d'un procès-verbal d'une séance du CSME du 12 octobre 2007
qu'à l'occasion de celle-ci, le conseiller d'Etat, chef du département de la
solidarité et de l'emploi, a manifesté sa volonté, avant la votation populaire
sur la loi en matière de chômage, de "démarrer les emplois de solidarité" au
début de l'année 2008. Il a indiqué que le règlement d'exécution de la loi, en
cours de préparation, serait présenté au CSME "pour validation". Un
représentant de la CGAS a alors répondu que, vu l'opposition des syndicats à la
nouvelle loi, la CGAS n'entendait pas s'associer à des travaux qui
anticiperaient la mise en oeuvre de celle-ci. En réponse à cette déclaration,
le conseiller d'Etat a précisé que la loi ne serait évidemment pas appliquée
avant la votation, mais qu'il convenait d'être prêt dans l'hypothèse où elle
serait acceptée par le peuple.

3.3.5 Après que la loi eut été adoptée en votation populaire le 16 décembre
2007, le CSME a été convoqué à une séance pour le 18 janvier 2008. Les membres
du Conseil on reçu une convocation datée
BGE 134 I 269 S. 276
du 14 janvier 2008 dans laquelle figurait l'ordre du jour. Le point 5 de
celui-ci était le suivant:
"Emplois de solidarité sur le marché complémentaire de l'emploi - consultation
CSME à teneur des art. 45E et 45F de la nouvelle loi cantonale en matière de
chômage."
Selon le procès-verbal de cette séance, le chef du département a rappelé que le
préavis du CSME était prévu par la loi et qu'il portait sur la nature des
emplois ainsi que sur les salaires. Il a indiqué que les emplois de solidarité
seraient mis en place de manière progressive dès le 1^er février 2008. Avec les
programmes d'emploi-formation, ils remplaceraient les emplois temporaires
cantonaux (contrats d'emplois temporaires conclus avec l'Etat en vue de
l'ouverture d'un nouveau délai-cadre d'indemnisation par l'assurance-chômage
fédérale). Le chef du département a distribué et commenté un projet relatif à
la fixation des salaires mensuels, à savoir 3'000 fr. pour une fonction ne
requérant aucune formation spécifique, 3'500 fr. pour une fonction occupée par
un titulaire d'un CFC de la branche concernée ou d'un diplôme professionnel
équivalent et 4'000 fr. pour une fonction spécialisée ou à responsabilités,
requérant impérativement un CFC de la branche ou un diplôme professionnel
équivalent. Les représentants de la CGAS ont regretté que le projet ne leur ait
pas été remis à l'avance. Ils ont estimé qu'il n'était pas possible de se
prononcer sur la question des salaires proposés sans une analyse technique
préalable de la "compatibilité" avec les usages sectoriels. Ils ont exprimé
l'avis que les trois niveaux de salaires proposés conduiraient à un dumping
salarial et à une concurrence avec le marché principal de l'emploi. En
conséquence, ils ont demandé la création d'un groupe de travail ad hoc chargé
de l'examen de ces questions. Le chef du département a rappelé qu'il avait
vainement proposé de traiter la question en octobre 2007. Finalement, le CSME a
donné son aval à la mise en place d'un groupe technique paritaire. La CGAS et
l'UAPG s'engageaient à désigner deux délégués jusqu'au 25 janvier 2008, pour
tenir séance. La mission du groupe était "d'inventorier les questions
d'application de la proposition de décision et de proposer des éventuelles
adaptations fondées sur les critères d'équité et de simplicité administrative,
dans un souci de prévention de dumping et de concurrence". Dans l'intervalle,
la proposition du Conseil d'Etat serait provisoirement applicable. Ce
dispositif a été adopté avec une abstention.
Selon les indications fournies par le Conseil d'Etat dans sa réponse au
recours, le "groupe technique" prévu a été convoqué par l'office
BGE 134 I 269 S. 277
cantonal de l'emploi, mais il n'a pas pu se réunir; en effet, les représentants
patronaux ont refusé de participer à ce groupe de travail en raison du présent
recours déposé entre temps par les organisations syndicales et la CGAS.

3.3.6 Il ressort de ce qui précède que les partenaires sociaux - au travers du
CSME - ont été informés de l'intention du Conseil d'Etat de mettre rapidement
sur pied les dispositions d'exécution de la loi modifiée en matière de chômage.
Par la suite, le CSME a bien été invité à donner un préavis sur la question des
salaires en faveur des bénéficiaires des emplois de solidarité. Ses membres ont
eu l'occasion de faire valoir leurs objections. Ils ont donné leur accord à la
mise en place d'un groupe de travail paritaire et accepté, provisoirement, les
propositions salariales du Conseil d'Etat. Dans ces conditions, on peut
admettre que la procédure de préavis prévue par l'art. 45G al. 2 LMC/GE a été
respectée, même si le groupe de travail paritaire n'a pas été en mesure de se
réunir pour formuler un préavis définitif. Un accord préalable du CSME n'est
pas exigé par la loi et serait du reste dépourvu de force contraignante à
l'égard de l'autorité (voir ATF 129 I 113 consid 3.1 p. 122). Le Conseil d'Etat
ne pouvait, sous peine de paralyser le processus législatif et réglementaire,
surseoir à la fixation des salaires selon l'art. 45G al. 2 LMC/GE.
Par ailleurs, la loi ne dit rien sur la manière dont le préavis requis doit
être donné. Contrairement à ce que soutiennent les recourants, le fait que le
Conseil d'Etat a soumis une grille de salaires au cours de la séance du CSME,
et non pas préalablement à celle-ci, ne vide pas de sa substance la procédure
de préavis prévue par la loi. L'essentiel, en effet, est que les membres du
CSME ont eu la possibilité de donner leur avis. Au reste, la réserve d'un
préavis définitif après l'entrée en vigueur du règlement, envisagée lors de la
séance du 18 janvier 2008, témoigne d'une certaine continuité dans la
consultation des partenaires sociaux et donc d'une flexibilité permettant au
besoin d'adapter après coup le montant des salaires en fonction des
recommandations éventuelles du CSME.
Le grief tiré d'une violation de l'art. 45G al. 2 LMC/GE n'est dès lors pas
fondé.

3.3.7 En ce qui concerne la procédure de consultation prévue par l'art. 53 LMC/
GE elle n'a pas été observée, ce qui n'est pas contesté. Le Conseil d'Etat, en
effet, était tenu de soumettre pour
BGE 134 I 269 S. 278
consultation au CSME, voire de manière plus générale aux organisations
syndicales et patronales, le projet de règlement (modifié) dans son ensemble.
Cette procédure préalable n'est pas laissée à la discrétion du Conseil d'Etat,
mais elle est obligatoire en vertu de la loi. Elle vise à améliorer l'acte en
augmentant les connaissances de l'autorité. Elle permet de s'assurer que
l'acte, une fois en vigueur, ne rencontrera pas de trop grandes difficultés
dans son application. Elle favorise aussi une meilleure acceptation de celui-ci
par les partenaires sociaux (voir, à propos de la procédure de consultation
prévue par l'art. 147 Cst., JEAN-FRANÇOIS AUBERT/PASCAL MAHON, Petit
commentaire de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril
1999, Zurich/Bâle/Genève 2003, n. 3 ad art. 147 Cst.). Il ne s'agit pas d'une
simple prescription d'ordre. Le fait que le législateur cantonal a prévu une
consultation spéciale des partenaires sociaux souligne l'importance qu'il y
attache. La procédure de modification du règlement est donc entachée
formellement d'une irrégularité.

3.3.8 Se pose dès lors la question de savoir quelles en sont les conséquences.
Des irrégularités formelles dans le déroulement d'un objet traité par un
parlement ou une autorité exécutive ne peuvent totalement être évitées. Sauf
exception, elles ne sauraient, pour des raisons tirées de la sécurité du droit,
remettre en cause la validité de l'acte. Cependant, les arrêtés cantonaux
(lois, règlements) peuvent être affectés de vices graves dans leur procédure
d'adoption. De tels vices peuvent entraîner l'annulation de l'acte en cause,
lorsqu'ils sont invoqués dans les délais en faisant usage d'un moyen de droit
disponible (voir ATF 133 I 178).
En l'espèce, le vice n'apparaît pas si grave qu'il doive conduire à
l'annulation du règlement dans son ensemble. Cette sanction serait
disproportionnée au regard des circonstances. Le règlement n'a pas été adopté à
l'insu des partenaires sociaux, qui ont eu la possibilité de se faire entendre
dès le mois d'octobre 2007 déjà. En outre, une consultation des partenaires
sociaux - par le biais du CSME - a eu lieu sur un point important et
controversé du règlement, intéressant de surcroît plus particulièrement ces
derniers, à savoir les modalités d'indemnisation des bénéficiaires des emplois
de solidarité. En octobre 2007, l'attention des partenaires sociaux a été
attirée sur le fait que le projet en cours leur serait présenté pour
"validation", ce
BGE 134 I 269 S. 279
qui faisait incontestablement référence à la procédure de consultation exigée
par l'art. 53 LMC/GE. S'ils estimaient que cette procédure devait encore être
mise en oeuvre, ils pouvaient le faire savoir au Conseil d'Etat à l'occasion de
la séance du 18 janvier 2008. On peut ainsi considérer qu'ils ont implicitement
renoncé à une détermination sur l'ensemble des modifications du règlement, pour
concentrer leur intérêt sur les questions salariales.

3.4 En conséquence, les conclusions des recourants tendant à l'annulation du
règlement en raison de vices dans sa procédure d'adoption sont mal fondées.

4.

4.1 Invoquant une violation du principe de la séparation des pouvoirs, les
recourants font valoir que l'art. 43 RMC/GE est contraire au contenu matériel
de l'art. 45G al. 2 LMC/GE. Cette disposition légale prévoit que le Conseil
d'Etat "détermine les salaires minimaux". Or, l'art. 43 RMC/GE fixe le salaire
mensuel brut de l'emploi de solidarité, selon les qualifications du
travailleur, à 3'000 fr., 3'500 fr. et 4'000 fr. Selon les recourants, ces
montants sont en réalité des salaires obligatoires et non des salaires plancher
comme l'exige la loi.

4.2 L'art. 130 de la Constitution genevoise (Cst./GE; RS 131.234) consacre
expressément le principe de la séparation des pouvoirs. Si le pouvoir
législatif est exercé par le Grand Conseil (art. 70 Cst./ GE), le pouvoir
exécutif et l'administration générale du canton sont confiés au Conseil d'Etat
(art. 101 Cst./GE). Selon l'art. 116 Cst./GE, le Conseil d'Etat a pour tâche de
promulguer les lois; il est chargé de leur exécution et prend à cet effet les
règlements et arrêtés nécessaires. Il ne peut ainsi disposer qu' intra legem et
non praeter legem: ses règlements peuvent établir des règles complémentaires de
procédure, préciser et détailler certaines dispositions de la loi et,
éventuellement, combler de véritables lacunes (ATF 130 I 140 consid. 5.1 p.
149; ATF 129 V 95 consid. 2.1 p. 97; ATF 124 I 127 consid. 3b p. 132 et les
références).

4.3 Le projet de loi en matière de chômage présenté par le Conseil d'Etat le 26
septembre 2006 prévoyait ceci à son art. 45G al. 1: "Le département fixe le
montant et les modalités de la rémunération accordée aux bénéficiaires du
programme." A son al. 3, il précisait que les relations contractuelles entre
les bénéficiaires et les institutions étaient régies pour le surplus par le
contrat de travail signé par ces derniers et, à titre supplétif, par les
dispositions du titre dixième du
BGE 134 I 269 S. 280
Code des obligations. Au cours de la procédure de consultation, certaines
institutions (Caritas, le Centre social protestant) ont fait valoir que le
projet soulevait sur ce point des difficultés, car lesdites institutions
pouvaient être amenées à conclure des contrats pour des emplois de solidarité
avec des salaires inférieurs à ceux fixés dans leur propre statut du personnel.
La Commission de l'économie chargée d'étudier le projet a alors proposé de
modifier la disposition en cause en prévoyant que le Conseil d'Etat fixerait
des salaires minimaux après consultation du CSME. Cette proposition a été
retenue dans la version définitive de l'art. 45G al. 2 LMC/GE.

4.4 En déléguant au Conseil d'Etat le pouvoir de fixer des salaires minimaux,
le législateur cantonal n'exige pas forcément que l'employeur accorde aux
bénéficiaires - ou à certains d'entre eux - des salaires plus élevés que les
salaires minimums prévus. Les motifs qui ont conduit la Commission de
l'économie à modifier le projet initial donnent à penser que le législateur a
voulu confier au Conseil d'Etat le pouvoir de fixer lui-même dans son règlement
d'exécution des normes minimales afin d'éviter que la fixation des salaires
soit laissée, comme prévu initialement, à l'appréciation du département. La
consultation du CSME - qui n'était pas prévue dans le projet initial - devait
également permettre au Conseil d'Etat de prendre en compte les préoccupations
des partenaires sociaux en matière salariale. Le terme "minimaux" peut être
compris en ce sens que le Conseil d'Etat est tenu de fixer des montants qui
représentent un salaire garanti pour les intéressés. Il ne signifie pas
nécessairement que les salaires doivent être individualisés ou déterminés de
cas en cas en fonction des normes salariales pratiquées par l'institution
partenaire. Au demeurant, en fixant trois paliers de rémunération, le Conseil
d'Etat a adopté un échelonnement qui permet déjà, en la relativisant, une
interprétation nuancée de la notion de salaires minimaux.

4.5 Dès lors, ici également, le grief tiré d'une violation de l'art. 45G al. 2
LMC/GE est mal fondé.

5.

5.1 Les recourants se prévalent encore à un autre titre du principe de la
séparation des pouvoirs. Ils font valoir que le règlement d'exécution, à ses
art. 43 et 44, prévoit un système différent de celui prévu à l'art. 45G de la
loi. Selon l'art. 44 al. 1 RMC/GE, la différence entre les salaires prévus et
le salaire minimal résultant de la législation sociale (art. 45G al. 1 LMC/GE)
fait l'objet d'une allocation
BGE 134 I 269 S. 281
complémentaire. L'art. 44 al. 2 RMC/GE prévoit que cette allocation
complémentaire n'est pas assimilée à un salaire et ne donne pas lieu à
prélèvement de cotisations sociales. Selon les recourants, cette réglementation
suppose donc que l'allocation complémentaire est une prestation sociale versée
par l'Etat. Ce système serait donc contraire à l'art. 45G al. 1 LMC/GE qui
exige que le salaire versé par l'institution partenaire (employeuse) doit
respecter les normes de la législation sociale. Il contreviendrait également à
l'art. 45G al. 4 LMC/GE, selon lequel le contrat de travail donne lieu au
prélèvement des cotisations sociale usuelles: de l'avis des recourants, cette
disposition de la loi exclut qu'une partie du salaire soit versée sous forme
d'allocations de l'Etat non soumises aux cotisations sociales.

5.2 L'art. 45G al. 1 LMC/GE prévoit que les bénéficiaires perçoivent de la part
des institutions partenaires un salaire dont le montant est au moins équivalent
aux normes prévues par la loi sur les prestations cantonales accordées aux
chômeurs en fin de droit ou par les normes de l'aide sociale. Son but est
d'accorder une rémunération qui soit au moins équivalente aux prestations de
l'aide sociale, sous peine de décourager les bénéficiaires potentiels de
prendre un emploi de solidarité (Rapport de la Commission de l'économie chargée
d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi en matière de
chômage). L'exigence posée à l'art. 45G al. 1 LMC/GE ne précise toutefois pas
ce qu'il faut entendre par "normes". Cette notion est sujette à interprétation.
L'aide sociale et les allocations accordées aux chômeurs en fin de droit
dépendent en effet pour une part de la situation individuelle des
bénéficiaires, en particulier de leur situation de famille et des dépenses à
leur charge. Cette composante individuelle est en revanche étrangère à la
notion de salaire, qui représente par définition la contrepartie pour un
travail fourni. Le Conseil d'Etat se devait donc d'adopter une solution qui se
concilie avec l'exigence d'une rémunération minimale et les paramètres
variables de l'aide sociale.

5.3 Selon la loi du 18 novembre 1994 sur les prestations cantonales accordées
aux chômeurs en fin de droit (LRMCAS/GE; RSG J 2 25), ces prestations sont
allouées aux personnes qui sont au chômage, qui ont épuisé leur droit aux
prestations de l'assurance-chômage (régime fédéral et cantonal; art. 1 LRMCAS/
GE) et dont le revenu annuel déterminant n'atteint pas le revenu minimum
cantonal d'aide sociale (art. 4 LRMCAS/GE). Le revenu minimum cantonal d'aide
sociale garanti aux chômeurs en fin de droit est de 15'734 fr.
BGE 134 I 269 S. 282
depuis le 1^er janvier 2007 (art. 3 LRMCAS/GE en corrélation avec le règlement
relatif à l'indexation des prestations cantonales accordées aux chômeurs en fin
de droit, du 29 novembre 2006 (RIPCFD/GE; RSG J 2 25.01). Il peut être
complété, dans les limites du barême de l'assistance publique, par des
allocations ponctuelles destinées à la prise en charge de certains frais, tels
que les frais de vêtements ou de maladie. Conformément à l'art. 3 al. 2 LRMCAS/
GE, le montant minimum (15'734 fr.) est multiplié par:
a) 1,46 s'il s'agit de deux personnes;
b) 1,88 s'il s'agit de trois personnes;
c) 2,20 s'il s'agit de quatre personnes;
d) 2,50 s'il s'agit de cinq personnes;
e) 0,30 par personne supplémentaire au-delà de cinq personnes.
Le salaire minimum de 3'000 fr. (36'000 fr. par année) prévu à l'art. 43 RMC/GE
est donc légèrement supérieur au revenu minimum cantonal d'aide sociale pour
quatre personnes selon l'art. 3 al. 2 LRMCAS/GE. On ne peut donc pas dire que
le Conseil d'Etat ait outrepassé ses pouvoirs en fixant un plancher qui est
plus proche des maxima que des minima à considérer au regard de la LRMCAS/ GE.
Le montant minimum garanti pour quatre personnes couvre une très large partie
des bénéficiaires potentiels. Il n'y aurait aucun sens à fixer des salaires
minimums en partant de situations personnelles plus ou moins exceptionnelles. A
ce propos d'ailleurs, le Conseil d'Etat indique dans sa réponse qu'aucun emploi
de solidarité mis en place avec les institutions partenaires n'a jusqu'à
présent donné lieu au paiement d'un complément prévu par l'art. 44 RMC/GE. Le
seul fait que le Conseil d'Etat a prévu dans cette disposition le versement
d'une allocation complémentaire, pour tenir compte de situations individuelles
tout à fait particulières, ne permet pas de conclure qu'il a restreint de
manière inadmissible la portée de la loi. Au demeurant, les recourants ne
précisent pas quel est le montant minimum qui devrait être garanti selon les
normes de l'aide sociale. Ici également le grief soulevé se révèle mal fondé.

6.

6.1 Les recourants font enfin valoir que les salaires fixés par le Conseil
d'Etat à l'art. 43 RMC/GE pourraient être plus bas que ceux prévus par les
conventions collectives de travail. Or, les salaires minimums prévus par les
conventions collectives sont impératifs dans la mesure où l'employeur et le
travailleur sont liés par une telle
BGE 134 I 269 S. 283
convention. De plus, lorsqu'une convention collective a fait l'objet d'un
arrêté d'extension, les dispositions normatives de la convention collective,
dont font partie les salaires minimaux, s'appliquent également aux employeurs
et travailleurs auxquels la convention est étendue. De même, les salaires
minimaux prévus par des contrats-types au sens de l'art. 360a CO sont également
impératifs. Aussi bien l'art. 43 RMC/GE devrait-il être annulé pour violation
du principe de la primauté du droit fédéral (art. 49 al. 1 Cst.).

6.2 L'art. 49 al. 1 Cst. fait obstacle à l'adoption ou à l'application de
règles cantonales qui éludent des prescriptions de droit fédéral ou qui en
contredisent le sens ou l'esprit, notamment par leur but ou par les moyens
qu'elles mettent en oeuvre, ou qui empiètent sur des matières que le
législateur fédéral a réglementées de façon exhaustive. Le principe de la force
dérogatoire du droit fédéral peut être invoqué en tant que droit
constitutionnel individuel. Le Tribunal fédéral examine avec un plein pouvoir
d'examen si la norme de droit cantonal est conforme au droit fédéral (ATF 134 I
125 consid. 2.1 p. 128; ATF 133 I 286 consid. 3.1 p. 290 et les références).

6.3

6.3.1 Il découle de l'art. 357 al. 1 CO que les clauses relatives notamment au
contenu des contrats individuels de travail n'ont en principe d'effet direct et
impératif qu'envers des employeurs et travailleurs qu'elles lient. De telles
clauses s'appliquent automatiquement, sans incorporation dans le contrat de
travail, et les parties ne peuvent y déroger contractuellement au détriment du
salarié (cf. GABRIEL AUBERT, Commentaire romand, n. 3 s. ad art. 357 CO). Ces
effets supposent que les deux parties soient liées. Tel est le cas si
l'employeur est personnellement partie à la convention, si l'employeur et le
travailleur sont membres d'une association contractante (art. 356 al. 1 CO), ou
encore si l'employeur et le travailleur ont fait une déclaration de soumission
volontaire au sens de l'art. 356b CO et ont obtenu le consentement des parties
(cf. ATF 123 III 129 consid. 3a p. 131; arrêt 4C.276/2004 du 12 octobre 2004).

6.3.2 La décision d'extension permet l'application d'une convention collective
de travail aux employeurs et aux travailleurs qui appartiennent à la branche
économique ou à la profession visée et ne sont pas liés par cette convention
(cf. art. 1 al. 1 de la loi fédérale du 28 septembre 1956 permettant d'étendre
le champ d'application de la convention collective du travail [LECCT; RS
221.215.311]). Pour
BGE 134 I 269 S. 284
savoir si une entreprise appartient à la branche économique ou à la profession
visée et entre, de ce fait, dans le champ d'application de la convention
étendue, il faut examiner de manière concrète l'activité généralement déployée
par l'entreprise en cause (arrêt 4P.49/2006 du 24 avril 2006, consid. 3.3).
Seule doit être prise en considération, dans le cadre de cet examen, l'activité
généralement exercée par l'employeur en question (arrêt 4C.409/1995 du 15 mai
1996, consid. 2b). Les entreprises visées par la déclaration d'extension
doivent offrir des biens ou des services de même nature que les entreprises qui
sont soumises contractuellement à la convention; il doit exister un rapport de
concurrence directe entre ces entreprises (arrêts 4C.45/ 2002 du 11 juillet
2002, consid. 2.1.2, et 4C.46/1995 du 11 octobre 1995, consid. 3a).

6.3.3 Enfin, conformément à l'art. 360a al. 1 CO, si, au sein d'une branche
économique ou d'une profession, les salaires usuels dans la localité, la
branche ou la profession font l'objet d'une sous-enchère abusive et répétée et
qu'il n'existe pas de convention collective de travail contenant des
dispositions relatives aux salaires minimaux pouvant être étendue, l'autorité
compétente peut édicter, sur proposition de la commission tripartite visée à
l'art. 360b, un contrat- type de travail d'une durée limitée prévoyant des
salaires minimaux différenciés selon les régions et, le cas échéant, selon les
localités, dans le but de combattre ou de prévenir les abus.

6.4 Comme cela ressort de l'art. 45E LMC/GE, les emplois de solidarité sont
créés sur le marché complémentaire de l'emploi. Ils doivent viser à l'insertion
professionnelle des demandeurs d'emploi. Dans le choix des activités retenues,
le département veille à éviter toute concurrence avec des entreprises
commerciales genevoises, en particulier celles régies par des conventions
collectives de travail. Les emplois proposés relèvent donc d'activités
délaissées par le marché ordinaire de l'emploi. Leur mise en oeuvre requiert le
concours de l'Etat par le biais de subventions. Le législateur genevois a voulu
empêcher tout risque de dumping salarial en évitant la création d'un rapport de
concurrence directe entre les institutions partenaires et l'économie dite
"primaire". L'éventualité que ces institutions entrent dans le même domaine
d'activité que des entreprises englobées dans une décision d'extension est donc
tout à fait théorique.

6.5 Par ailleurs, l'art. 45D al. 3 LMC/GE exclut de façon explicite un droit
pour le chômeur d'obtenir une mesure déterminée, par
BGE 134 I 269 S. 285
exemple un emploi dans l'institution de son choix. L'Etat choisit librement les
institutions partenaires. Le droit fédéral ne l'oblige pas à choisir une
institution partenaire qui, par hypothèse, serait soumise à une convention
collective. En outre, comme le relève le Conseil d'Etat dans sa réponse, les
particularités liées aux emplois de solidarité, qui présentent indiscutablement
une composante de formation, peuvent justifier de soumettre à un régime spécial
les emplois de solidarité en ce qui concerne le montant des salaires. Dans
cette perspective, il est loisible aux parties contractantes de modifier le
champ d'application personnel d'une convention collective de travail pour tenir
compte de ces particularités.

6.6 Intrinsèquement, les dispositions en matière de salaire adoptées par le
Conseil d'Etat n'apparaissent donc pas contraires au droit fédéral. Même si on
ne peut d'emblée exclure, dans un cas concret, que le salaire fixé par le
règlement soit inférieur au salaire minimum prévu dans une convention
collective (ou un contrat-type), le grief d'inconstitutionnalité ne peut pas
être retenu. En effet, si une norme semble compatible avec le droit fédéral, au
regard des circonstances ordinaires que le législateur devait considérer, le
juge ne l'annulera pas pour le seul motif qu'on ne peut exclure absolument
l'éventualité de son application contraire au droit à des cas particuliers. Il
ne le fera que si la perspective d'un contrôle concret ultérieur n'offre pas de
garantie suffisante au destinataire de la norme litigieuse (cf. arrêts 2C_218/
2007 du 9 octobre 2007, consid. 3; 2C_71/2007 du 9 octobre 2007, consid. 2.6;
cf., sous l'empire de l'OJ, ATF 129 I 12 consid. 3.2 p. 15; ATF 128 I 327
consid. 3.1 p. 334 s. et les arrêts cités). Or, tel n'est pas le cas en
l'espèce, dans la mesure où le bénéficiaire d'un emploi de solidarité a
toujours la possibilité de saisir le juge civil dans l'hypothèse où la
rémunération perçue ne serait pas conforme à une convention collective.

6.7 Le grief des recourants tiré de la primauté du droit fédéral doit donc
aussi être rejeté.