Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 134 II 207



Urteilskopf

134 II 207

25. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public dans la cause A. contre
Administration fiscale cantonale genevoise (recours en matière de droit public)
2C_648/2007 du 15 mai 2008

Regeste

Art. 13 Abs. 1 und Art. 14 StHG; Bewertungsvorschriften im Bereich der
Vermögenssteuer natürlicher Personen; Besteuerung einer zum Geschäftsvermögen
eines Selbständigerwerbenden gehörenden Liegenschaft; Genfer Gesetzgebung.
Zulässigkeit der Beschwerde in öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten gegen die
Entscheide gemäss Art. 73 Abs. 1 StHG (E. 1). Prüfungsbefugnis des
Bundesgerichts (E. 2). Verhältnis zwischen den Buchhaltungsvorschriften und dem
Steuerrecht (E. 3.3). Besteuerung der zum Geschäftsvermögen
Selbständigerwerbender gehörenden Liegenschaften zum Verkehrswert/Ertragswert
im Sinne von Art. 14 Abs. 1 StHG, unter Ausschluss des Buchwertes (E. 3.4 und
3.5); Spielraum der Kantone bei der Bewertung (E. 3.6); Vereinbarkeit der
einschlägigen Genfer Gesetzgebung mit dem Bundesrecht (E. 3.7-3.9).

Sachverhalt ab Seite 208

BGE 134 II 207 S. 208
A. est domicilié dans le canton de Genève où il exerce l'activité de régisseur
dans une agence immobilière exploitée en raison individuelle; il est à ce titre
astreint à tenir une comptabilité. Dans sa déclaration fiscale 2001, il a
notamment fait état d'un immeuble locatif relevant de sa fortune commerciale
qu'il a annoncé au fisc à sa valeur comptable au 31 décembre 2001,
correspondant à son prix d'acquisition d'un montant de 1'805'700 fr.
Par décision sur réclamation du 16 décembre 2004, l'Administration fiscale
cantonale du canton de Genève (ci-après: l'Administration cantonale ou le fisc)
a imposé l'immeuble susmentionné sur la fortune du contribuable pour un montant
de 1'965'706 fr., soit 160'006 fr. de plus que sa valeur comptable. A. a
recouru contre cette décision, en faisant valoir que l'immeuble litigieux
devait, comme élément de sa fortune commerciale, être imposé à la valeur
figurant au bilan de sa société. La Commission cantonale de recours en matière
d'impôts du canton de Genève (ci-après: la Commission de recours) l'a débouté
de ses conclusions le 7 mai 2007; en bref, elle a jugé que l'immeuble litigieux
devait, selon le droit cantonal applicable, être estimé à la valeur capitalisée
de l'état locatif annuel selon un taux déterminé chaque année par le Conseil
d'Etat.
Par arrêt du 9 octobre 2007, le Tribunal administratif du canton de Genève
(ci-après: le Tribunal administratif) a rejeté le recours formé par le
contribuable contre la décision précitée du 7 mai 2007 et a confirmé celle-ci.
BGE 134 II 207 S. 209
A. forme un recours en matière de droit public contre l'arrêt précité. II
soutient que la solution consacrée par le Tribunal administratif viole le droit
fédéral et cantonal pertinent et porte atteinte au principe de l'égalité entre
concurrents directs. Il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi
de la cause au fisc pour qu'il émette un nouveau bordereau imposant l'immeuble
litigieux à sa valeur comptable.
Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.

Auszug aus den Erwägungen:

Extrait des considérants:

1. Le présent recours est dirigé contre une décision en matière fiscale rendue
en dernière instance cantonale sur la base du droit public fédéral et cantonal;
il est dès lors en principe recevable comme recours en matière de droit public
au sens des art. 82 ss LTF (cf. en particulier les art. 82 let. a et 86 al. 1
let. d LTF), aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. La
contestation porte sur un objet réglé au titre 2, chapitre 4 de la loi fédérale
du 14 décembre 1990 sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des
communes (LHID; RS 642.14; ci-après: loi fédérale sur l'harmonisation fiscale;
cf. infra consid. 3.4), soit l'une des matières visées par l'art. 73 al. 1
LHID; le recours est dès lors également recevable comme recours en matière de
droit public en vertu de la disposition précitée (sur le rapport entre la loi
sur le Tribunal fédéral et l'art. 73 al. 1 LHID, cf. ATF 134 II 186 consid.
1.3).
Le recourant a manifestement qualité pour recourir (cf. art. 89 al. 1 LTF et 73
al. 2 LHID). Dans la mesure où il demande le renvoi de la cause au fisc pour
nouvelle décision, ses conclusions ont un caractère réformatoire. Le Tribunal
fédéral a toutefois jugé que de telles conclusions sont recevables, car l'art.
73 al. 3 LHID doit céder le pas devant l'art. 107 al. 2 LTF, qui confère au
Tribunal fédéral un pouvoir général de réforme quel que soit le recours
interjeté devant lui (cf. ATF 134 II 186 consid. 1.5).
Pour le surplus, formé en temps utile (cf. art. 100 al. 1 LTF) et dans les
formes requises (cf. art. 42 LTF), le recours est recevable.

2. Sous l'empire de l'ancienne loi d'organisation judiciaire (OJ; RO 3 p. 521),
les décisions cantonales de dernière instance portant sur une matière réglée
dans les titres 2 à 5 et 6, chap. 1 de la loi fédérale sur l'harmonisation
fiscale (soit le droit cantonal harmonisé) pouvaient faire l'objet d'un recours
de droit administratif au sens des art. 97 ss OJ, en vertu de l'art. 73 al. 1
LHID dans sa teneur en vigueur
BGE 134 II 207 S. 210
jusqu'au 31 décembre 2006 (RO 1991 p. 1256; cf. ATF 134 II 186 consid. 1.3).
Dans ce cadre, le Tribunal fédéral pouvait en principe examiner librement si le
droit cantonal harmonisé et son application par les instances cantonales
étaient conformes aux dispositions de la loi fédérale sur l'harmonisation
fiscale. Cependant, si le recours portait sur un point où cette loi laissait
une certaine marge de manoeuvre aux cantons, l'interprétation de la loi
cantonale n'était examinée que sous l'angle restreint de l'arbitraire, comme en
matière de recours de droit public au sens des art. 90 ss OJ (cf. ATF 131 II
710 consid. 1.2 p. 713; ATF 130 II 202 consid. 3.1 p. 205 ss; ATF 128 II 56
consid. 2b p. 60).
Les mêmes principes demeurent applicables pour le recours en matière de droit
public au sens des art. 82 ss LTF. En effet, l'art. 73 LHID constitue,
aujourd'hui comme hier, une norme spéciale destinée à permettre au Tribunal
fédéral non seulement de vérifier avec un plein pouvoir d'examen la conformité
de la législation cantonale à la loi fédérale sur l'harmonisation fiscale,
comme le permet d'ailleurs l'art. 95 LTF, mais encore de revoir librement
l'application du droit cantonal dans les domaines harmonisés, de manière à
assurer la concordance entre les droits cantonaux et la loi fédérale du 14
décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct (LIFD; RS 642.11). Ce n'est que dans
les matières que le législateur fédéral a laissées à l'appréciation des cantons
que le pouvoir d'examen du Tribunal fédéral se limite à l'arbitraire. Il
appartient alors au recourant d'invoquer et de motiver ses griefs conformément
à l'art. 106 al. 2 LTF, c'est-à-dire d'établir en quoi l'application du droit
cantonal viole le droit fédéral, qui comprend également le droit
constitutionnel.

3.

3.1 Le litige porte sur l'estimation fiscale, au titre de l'impôt sur la
fortune des personnes physiques de l'année 2001, d'un immeuble appartenant à la
fortune commerciale du recourant qui exerce l'activité de régisseur dans une
agence immobilière exploitée en raison individuelle (sur la notion de fortune
commerciale, cf. art. 8 al. 2 LHID; ATF 133 II 420 consid. 3 p. 421 ss et les
références citées).

3.2 Le recourant soutient que la valeur comptable de l'immeuble litigieux au 31
décembre 2001 est seule déterminante. Il invoque pêle-mêle toutes sortes de
dispositions du droit cantonal et fédéral dont on peine, pour certaines d'entre
elles, à cerner la pertinence par rapport à l'objet de la démonstration. En
particulier, il est sans importance que la détermination du bénéfice net
imposable des
BGE 134 II 207 S. 211
contribuables tenant une comptabilité en bonne et due forme doive s'effectuer,
en vertu de l'art. 3 al. 4 de la loi cantonale du 22 septembre 2000 sur
l'imposition des personnes physiques-impôt sur le revenu (LIPP- IV; RSG D 3
14), selon les règles applicables aux personnes morales, qui renvoient
notamment au compte de pertes et profits et à la notion " d'usage commercial "
(cf. art. 12 let. a, e et g de la loi cantonale du 23 septembre 1994 sur
l'imposition des personnes morales[LIPM; RSG D 3 15]). Ce renvoi à des normes
comptables se limiteen effet clairement, à teneur de la lettre de la loi
cantonale précitée, à la détermination du bénéfice net imposable des personnes
physiques tenant une comptabilité. La taxation des indépendants suppose en
effet, selon la loi fédérale sur l'harmonisation fiscale, de distinguer les
revenus provenant de la fortune commerciale des revenus provenant de la fortune
privée qui suivent des règles d'imposition différentes (cf. art. 7 al. 4 let.
b, art. 8 al. 1 et 2, art. 10 al. 1 let. c LHID). Mais une telle distinction
n'existe pas pour l'imposition de la fortune immobilière des indépendants (sur
ce point, cf. infra consid. 3.5). Le recourant ne peut donc rien déduire en sa
faveur de l'art. 3 al. 4 LIPP-IV et des autres normes cantonales qui concernent
l'imposition du revenu auxquelles il renvoie (cf. art. 3 al. 2 LIPP-IV; art. 12
let. j LIPM).

3.3 L'argument principal du recourant se résume ainsi: comme personne physique
tenue d'être inscrite au registre du commerce au sens de l'art. 934 al. 1 CO,
il a l'obligation, en vertu de l'art. 957 CO, de tenir correctement sa
comptabilité, dont il estime qu'elle lie le fisc. Or, l'art. 665 CO lui
interdirait d'inscrire au bilan un immeuble pour une valeur supérieure à son
prix d'acquisition. Aussi l'immeuble litigieux devrait-il être imposé à sa
valeur au bilan au 31 décembre 2001, de 1'805'700 fr., celle-ci correspondant
au prix d'acquisition de l'immeuble.
Il est exact qu'en l'absence de lacune matérielle ou d'irrégularité formelle
permettant de mettre en doute la force probante d'une comptabilité, celle-ci
bénéficie, en principe, d'une présomption d'exactitude à l'égard du fisc selon
la jurisprudence (cf. ATF 106 Ib 311 consid. 3c et 3d p. 315 ss). Cette
exigence de conformité aux règles comptables n'est toutefois à elle seule pas
suffisante pour lier l'autorité fiscale dans un cas d'espèce. Il faut encore
que la loi fiscale renvoie expressément aux valeurs comptables, comme c'est en
principe le cas pour estimer le bénéfice imposable des personnes morales (cf.
ATF 119 Ib 111 consid. 2c p. 114 s.; arrêts 2A.458/2002 du
BGE 134 II 207 S. 212
15 octobre 2004, consid. 4.1; 2A.157/2001 du 11 mars 2002, publié in StE 2002 B
72.13.1 n° 3, consid. 2b) et - sous certaines réserves (cf. art. 3 al. 4 in
fine LIPP-IV) - des indépendants (cf. ATF 132 I 175 consid. 2.2 p. 177 s.; ATF
106 Ib 311 consid. 3c et 3d p. 315 ss). Il convient dès lors d'examiner à la
lumière du droit fédéral et cantonal pertinent si un tel renvoi existe aussi en
matière d'imposition de la fortune immobilière des indépendants.

3.4 Réglé aux art. 13 et 14 LHID (titre 2, chapitre 4 de la loi), l'impôt sur
la fortune des personnes physiques a pour objet l'ensemble de la fortune nette
(art. 13 al. 1 LHID) qui se détermine selon les règles d'évaluation prévues à
l'art. 14 LHID; cette disposition a la teneur suivante:
1. La fortune est estimée à la valeur vénale. Toutefois, la valeur de rendement
peut être prise en considération de façon appropriée.
2. Les immeubles affectés à l'agriculture ou à la sylviculture sont estimés à
leur valeur de rendement (...).
3. Les biens immatériels et la fortune mobilière (à l'exception des
papiers-valeurs) qui font partie de la fortune commerciale du contribuable sont
estimés à la valeur déterminante pour l'impôt sur le revenu.

3.5 Selon la jurisprudence, les exceptions à la règle prévue à l'art. 14 al. 1
LHID sont énumérées de manière exhaustive à l'art. 14 al. 2 et 3 LHID (cf. ATF
128 I 240 consid. 3.1.1 p. 248; voir aussi rapport du groupe d'experts Cagianut
sur l'harmonisation fiscale, in Publications de la Chambre fiduciaire, Zurich
1994, vol. 128, p. 93). Par conséquent, les immeubles non affectés à
l'agriculture ou à la sylviculture doivent impérativement être estimés à leur
valeur vénale/de rendement au sens de l'art. 14 al. 1 LHID (art. 14 al. 2 LHID
a contrario; cf. BARBARA SRAMEK, in Marianne Klöti-Weber/Dave Siegrist/Dieter
Weber, Kommentar zum Aargauer Steuergesetz, 2^e éd., Berne 2004, n. 1 ad § 51),
même s'ils appartiennent à la fortune commerciale du contribuable (art. 14 al.
3 LHID a contrario; cf. RAINER ZIGERLIG/GUIDO JUD, in Martin Zweifel/Peter
Athanas, Kommentar zum schweizerischen Steuerrecht, vol. I/1, Bundesgesetz über
die Harmonisierung der direkten Steuern der Kantone und Gemeinden (StHG), 2^e
éd., Zurich 2002, n. 3 ad art. 14 LHID; SRAMEK, op. cit., n. 2 ad § 48 in
fine). Autrement dit, qu'un bien immobilier relève de la fortune privée ou
commerciale d'une personne physique est sans importance pour son estimation
sous l'angle de l'impôt sur la fortune (cf. FELIX RICHNER/WALTER FREI/STEFAN
KAUFMANN/HANS ULRICH MEUTER,
BGE 134 II 207 S. 213
Kommentar zum harmonisierten Zürcher Steuergesetz, Zurich 2006, n. 50 ad § 39;
implicitement en ce sens, cf. XAVIER OBERSON, Droit fiscal suisse, 3^e éd.,
Bâle 2007, n. 15 ss ad § 8; SRAMEK, op. cit., n. 5 ad § 51; HEINZ WEIDMANN/
BENNO GROSSMANN/RAINER ZIGERLIG, Wegweiser durch das st. gallische Steuerrecht,
6^e éd., Berne 1999, p. 214; WALTER RYSER/BERNARD ROLLI, Précis de droit fiscal
suisse [impôts directs], 4^e éd., Berne 2002, p. 405 s.).
Cette conséquence ne procède pas d'un oubli du législateur fédéral; il s'agit
au contraire d'un silence qualifié de sa part (cf. ZIGERLIG/JUD, loc. cit.;
JEAN-MARC RIVIER, Droit fiscal suisse, L'imposition du revenu et de la fortune,
Lausanne 1998, p. 508). Ce point est confirmé par la récente réforme de
l'imposition des entreprises approuvée en votation populaire le 24 février
2008: parmi les nouveautés introduites pour alléger la fiscalité des
entreprises de personnes, le législateur n'a en effet modifié les règles
d'évaluation de la fortune que sur un point particulier portant sur l'art. 14
al. 3 LHID; il a ainsi décidé que tous les biens mobiliers faisant partie de la
fortune commerciale d'un contribuable, y compris les papiers-valeurs, seraient
à l'avenir estimés à la valeur déterminante pour l'impôt sur le revenu, soit à
leur valeur comptable, en raison " de leur lien fonctionnel avec l'activité
commerciale de l'entreprise" (cf. Message du 22 juin 2005 concernant la loi
fédérale sur l'amélioration des conditions fiscales applicables aux activités
entrepreneuriales et aux investissements [loisur la réforme des entreprises
II], in FF 2005 p. 4469, 4585). En revanche, le législateur a écarté l'idée
d'étendre une telle règle d'évaluation aux biens immobiliers faisant partie de
la fortune commerciale d'un contribuable pour les motifs suivants: "En raison
des règles cantonales particulières régissant l'évaluation des immeubles, le
maintien de l'application de l'art. 14 al. 1 LHID dans le cadre de l'évaluation
des immeubles commerciaux se justifie pleinement. Les dispositions cantonales
d'évaluation des immeubles commerciaux prennent en compte l'affectation de ces
immeubles ainsi que l'ensemble des circonstances influant sur la valeur
immobilière" (Message précité, p. 4554).
Il découle de ce qui précède que, nonobstant son appartenance à la fortune
commerciale d'un contribuable, un bien immobilier doit être estimé conformément
à l'art. 14 al. 1 LHID, disposition qui ne comporte aucun renvoi à la valeur
comptable. Cette règle d'évaluation fiscale l'emporte donc sur les valeurs
déterminées selon les normes comptables reconnues. Contrairement à l'opinion du
recourant, l'autorité
BGE 134 II 207 S. 214
fiscale n'est dès lors pas liée par la valeur au bilan de l'immeuble litigieux
(cf. supra consid. 3.3). Il reste à examiner si la valeur vénale/de rendement
de cet immeuble retenue par l'autorité cantonale est conforme à l'art. 14 al. 1
LHID.

3.6 La loi fédérale sur l'harmonisation fiscale ne prescrit pas au législateur
cantonal une méthode d'évaluation précise pour déterminer cette valeur. Les
cantons disposent donc en la matière d'une marge de manoeuvre importante pour
élaborer et appliquer leur réglementation, aussi bien dans le choix de la
méthode de calcul applicable que pour déterminer, vu le caractère potestatif de
l'art. 14 al. 1, 2^e phrase LHID, dans quelle mesure le rendement doit être
pris en considération dans l'estimation. Il faut cependant préciser qu'à
l'exception des immeubles affectés à l'agriculture ou à la sylviculture (cf.
art. 14 al. 2 LHID), l'évaluation ne saurait se faire à l'aune du seul critère
du rendement, sans prise en compte de la valeur vénale du bien considéré (cf.
ATF 128 I 240 consid. 3.1.1 p. 248). Par ailleurs, la valeur de rendement ne
peut, le cas échéant, être prise en considération que de manière appropriée;
elle ne saurait justifier n'importe quel écart avec la valeur vénale (cf. ATF
124 I 145 consid. 6b p. 159 s.). Les cantons ne peuvent ainsi pas prévoir des
règles d'évaluation tendant de manière générale à une sur- ou sous-estimation
des immeubles, par exemple en instituant un abattement automatique de leur
valeur vénale pour en déterminer la valeur fiscale, ou en fondant l'imposition
sur un pour-cent de la valeur vénale (cf. ATF 131 I 291 consid. 3.2.2 p. 307
s.; ATF 128 I 240 consid. 3.2.3 et 3.2.4 p. 249 s.; ATF 124 I 145 consid. 6b et
6c p. 159 s.).

3.7 Le canton de Genève a concrétisé ces principes dans la loi sur l'imposition
des personnes physiques - impôt sur la fortune (LIPP-III; RSG D 3 13). L'art. 4
LIPP-III précise que la fortune mobilière et immobilière, établie au 31
décembre de l'année pour laquelle l'impôt est dû (al. 1), est en règle générale
estimée à sa valeur vénale (al. 2), sous réserve - outre les marchandises (al.
4) - des biens immatériels et de la fortune mobilière (à l'exception des
papiers-valeurs) qui sont estimés à la valeur déterminante pour l'impôt sur le
revenu s'ils font partie de la fortune commerciale du contribuable (al. 3). Les
immeubles situés dans le canton sont estimés d'après l'art. 7 LIPP-III qui pose
des principes d'évaluation différents selon le type d'immeuble considéré
(immeuble locatif [let. a]; immeuble servant exclusivement et directement à
l'exploitation d'un commerce [let. b]; immeuble servant à l'exploitation
agricole et sylvicole [let. c]; etc.).
BGE 134 II 207 S. 215
Aux termes de l'art. 7 let. a LIPP-III, la valeur des immeubles locatifs est
calculée en capitalisant l'état locatif annuel aux taux fixés chaque année par
le Conseil d'Etat, sur proposition d'une commission d'experts composée
paritairement de représentants de l'administration fiscale et de personnes
spécialement qualifiées en matière de propriétés immobilières et désignées par
le département. Les taux de capitalisation applicables sont établis sur la base
des transactions constatées sur le marché immobilier entre le 1^er janvier de
l'année précédent l'année fiscale et le 30 juin de l'année fiscale (art. 3 al.
1 du règlement d'application du 19 décembre 2001 de la loi sur l'imposition des
personnes physiques-impôt sur la fortune [RIPP-III; RSGD 3 13.01), sous réserve
d'exceptions ne concernant pas le cas d'espèce (cf. art. 3 al. 2 RIPP-III). Les
taux ainsi déterminés sont énoncés à l'art. 4 RIPP-III pour chaque catégorie
d'immeubles visée; il est également tenu compte de l'âge des immeubles qui
servent de logements (cf. art. 4 let. a et b RIPP-III).

3.8 Il apparaît ainsi que le principe général prévu à l'art. 14 al. 1 LHID
(estimation de la fortune à la valeur vénale/de rendement) a été transposé à
l'art. 4 al. 2 LIPP-III, le droit cantonal réservant en outre, dans la ligne
des exceptions énumérées à l'art. 14 al. 2 et 3 LHID, des règles fondées sur
d'autres principes d'évaluation pour les biens immatériels et la fortune
mobilière (à l'exception des papiers-valeurs) relevant de la fortune
commerciale (art. 4 al. 3 et 4 LIPP-III) ainsi que pour les immeubles servant à
l'exploitation agricole et sylvicole (art. 7 let. c LIPP-III).
En revanche, le législateur cantonal n'a pas fait de distinction, à l'art. 7
LIPP-III, entre l'estimation des immeubles selon que ceux-ci relèvent de la
fortune commerciale ou privée d'un contribuable. On ne saurait lui en faire
grief puisqu'une telle distinction n'est justement pas prévue par la loi
fédérale sur l'harmonisation fiscale qui contient un silence qualifié sur ce
point (cf. supra consid. 3.4-3.5). Le recourant y voit cependant une violation
du principe d'égalité entre concurrents directs déduit de la liberté économique
(art. 27 Cst.). Il estime en effet qu'une personne exerçant une activité
indépendante en raison individuelle, comme lui, est désavantagée en matière
d'impôt sur la fortune par rapport à une personne ayant choisi d'exercer la
même activité comme salarié au sein d'une société anonyme qui détiendrait les
immeubles en son nom et dont elle serait le propriétaire économique. L'argument
tombe à faux, la différence de traitement dénoncée étant précisément justifiée
par le fait que les
BGE 134 II 207 S. 216
contribuables visés ne se trouvent pas dans la même situation: la forme
juridique qui encadre leur activité est différente et emporte, en matière
d'imposition, des avantages et des inconvénients propres à chaque situation et
difficilement comparables; en particulier, au contraire du recourant,
l'actionnaire unique d'une société anonyme fait l'objet d'une double imposition
économique (cf. OBERSON, op. cit., n. 26 ss ad § 10). Pour le reste, la règle
spécifique prévue par le droit cantonal pour évaluer les immeubles locatifs
s'insère dans le cadre défini - largement - par l'art. 14 al. 1 LHID: le
principe de la capitalisation de l'état locatif inscrit à l'art. 7 let. a
LIPP-III renvoie en effet à la valeur de rendement, tandis que la prise en
considération, pour déterminer le taux de capitalisation applicable, des
transactions constatées sur le marché ou de l'âge des logements (cf. art. 7
let. a LIPP-III en liaison avec l'art. 3 al. 1 et 4 let. a et b RIPP-III) se
réfère à des critères qui relèvent plus particulièrement de la valeur vénale.

3.9 En résumé, telle qu'appliquée par les autorités précédentes, la législation
cantonale pertinente pour le cas d'espèce est conforme aux exigences posées par
la loi fédérale sur l'harmonisation fiscale, au contraire de l'interprétation
qu'en propose le recourant, qui ne trouve du reste aucun appui véritable dans
le texte de la loi. Pour le surplus, le recourant ne démontre ni même ne
prétend que le calcul effectué par le fisc serait entaché d'erreur ou que la
valeur fiscale finalement retenue serait objectivement supérieure à la valeur
vénale de l'immeuble au sens de l'art. 14 al. 1 LHID.