Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 134 II 10



Urteilskopf

134 II 10

2. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public dans la cause A.X. et B.X.
contre Service de la population du canton de Vaud (recours en matière de droit
public)
2C_42/2007 du 30 novembre 2007

Regeste

Art. 3 Anhang I FZA; zeitlicher und persönlicher Anwendungsbereich der
Bestimmungen des Abkommens über die Personenfreizügigkeit zum Familiennachzug;
EU-Bürger, dessen Ehepartner nicht Staatsangehöriger eines Vertragsstaates des
FZA ist. Das Abkommen ist auch für EU-Bürger anwendbar, die sich bei dessen
Inkrafttreten bereits in der Schweiz aufgehalten haben (E. 2). Eine Berufung
auf Art. 3 Anhang I FZA ist allerdings nicht möglich für Familienangehörige
eines EU-Bürgers, die im Zeitpunkt des Familiennachzuges weder Staatsangehörige
eines Vertragsstaates sind noch bereits rechtmässig in einem Vertragsstaat
wohnen: Tragweite dieser Einschränkung (E. 3.1 und 3.2) und Bestätigung der
Rechtsprechung (BGE 130 II 1), die entsprechend dem Urteil des EuGH vom 23.
September 2003 in der Rechtssache Akrich, C-109/2001, ergangen ist (E.
3.3-3.6). Prüfung eines auf Art. 7 Abs. 1 ANAG (mit Blick auf Art. 2 FZA
anwendbar) und Art. 8 EMRK gestützten Anspruchs auf Aufenthaltsbewilligung (E.
3.6 und 4.1). Im konkreten Fall kein Bewilligungsanspruch mit Blick auf die
Schwere der begangenen Delikte (namentlich eine vollendet versuchte Tötung) und
auf andere zu berücksichtigende Umstände; die in der Schweiz illegal oder im
Gefängnis oder als lediglich vorläufig geduldeter Ausländer verbrachten Jahre
sind bei der vorzunehmenden Interessenabwägung nicht massgebend (E. 4.2-4.4).

Sachverhalt ab Seite 11

BGE 134 II 10 S. 11
A.X., ressortissant libyen né en 1979, est entré en Suisse le 20 novembre 1991
avec sa mère et deux frères pour y rejoindre son père qui était arrivé dans
notre pays quelques mois plus tôt. Après différentes péripéties de procédure et
le rejet de leurs demandes d'asile, le prénommé et les membres de sa famille
ont finalement été autorisés, par décision du 22 octobre 1997, à demeurer en
Suisse au bénéfice d'une admission provisoire.
BGE 134 II 10 S. 12
Le 22 octobre 2000, après une nuit alcoolisée passée avec des amis, A.X. a
gravement blessé une personne avec un couteau lors d'une banale bousculade sur
la voie publique qui a dégénéré. Il a été arrêté par la police et placé en
détention préventive le même jour. A raison de ces faits, il a été condamné à
une peine de 5 ans de réclusion pour crime manqué de meurtre et infraction à la
législation fédérale sur les armes, sous déduction de 446 jours de détention
préventive; selon les constatations pénales, les événements se sont produits
alors que l'auteur n'avait pourtant fait l'objet d'aucune menace et d'aucune
provocation de la part de la victime, les juges parlant à cet égard d'acte
gratuit, de mobile égoïste et de mentalité inquiétante. Alors qu'il purgeait
encore sa peine, A.X. a été condamné à une peine complémentaire de 12 mois
d'emprisonnement, sous déduction de 19 jours de détention préventive effectués
du 1^er au 19 août 1999, pour tentative d'agression, rixe, lésions corporelles
simples qualifiées, complicité de contrainte et ivresse au volant; cette peine
sanctionnait des faits antérieurs à la première condamnation, en particulier
une violente opération de justice privée à laquelle l'intéressé avait pris part
dans la nuit du 30 au 31 juillet 1999, de concert avec ses deux frères et
d'autres complices, en vue de donner une leçon ou du moins d'intimider une
personne avec laquelle sa famille était en conflit.
A.X. a été libéré conditionnellement le 2 octobre 2004. Entre-temps, pendant sa
détention, il a été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour valable
jusqu'au 6 juillet 2002, apparemment à la suite d'une erreur de l'autorité
compétente. Par décision du 23 janvier 2004, le Service de la population du
canton de Vaud (ci-après: le Service de la population) a refusé de prolonger
cette autorisation au vu de la gravité des condamnations prononcées contre
l'intéressé. Sur recours, cette décision a été confirmée par le Tribunal
administratif du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal administratif) dans un
arrêt du 14 décembre 2004. Le 4 février 2005, le Tribunal fédéral a déclaré
irrecevable un recours formé contre l'arrêt précité du Tribunal administratif
(arrêt 2A.64/2005).
Le 14 février 2005, A.X. a épousé B.X., une ressortissante portugaise née en
1982, qui vit en Suisse depuis de nombreuses années au bénéfice d'un permis
d'établissement. Le 10 octobre 2005, A.X. a formé une demande d'autorisation de
séjour par regroupement familial fondée sur l'Accord du 21 juin 1999 entre la
Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne et ses Etats
membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP; RS
0.142.112.681; ci-après: Accord sur la libre circulation des personnes ou
Accord).
Par décision du 1^er mars 2006, le Service de la population a refusé à A.X.
l'octroi de toute autorisation de séjour au vu de ses antécédents pénaux. Saisi
d'un recours des époux A.X., le Tribunal administratif l'a rejeté, par arrêt du
26 janvier 2007, en retenant
BGE 134 II 10 S. 13
notamment que l'Accord sur la libre circulation des personnes n'était pas
applicable, car l'épouse était arrivée en Suisse avant son entrée en vigueur.
Les époux X. forment un recours en matière de droit public contre l'arrêt
précité du Tribunal administratif dont ils requièrent la réforme, sous suite de
frais et dépens, en ce sens qu'une autorisation de séjour CE/AELE soit octroyée
à A.X. avec effet au 14 février 2005 (date du mariage); à titre subsidiaire,
ils concluent à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause au
Tribunal administratif ou au Service de la population pour nouvelle décision
dans le sens de leur conclusion principale. Ils invoquent la violation aussi
bien de l'Accord sur la libre circulation des personnes que de l'art. 8 de la
Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du
4 novembre 1950 (CEDH; RS 0.101).
Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.

Auszug aus den Erwägungen:

Extrait des considérants:

2. Le Tribunal administratif a estimé que le recourant ne pouvait pas se
prévaloir de l'Accord sur la libre circulation des personnes, car son épouse
était déjà établie de longue date en Suisse lors de l'entrée en vigueur de ce
texte le 1^er juin 2002. Cette opinion est erronée. Le champ d'application
personnel et temporel de l'Accord ne dépend en effet pas du moment auquel un
ressortissant communautaire arrive ou est arrivé en Suisse, mais seulement de
l'existence d'un droit de séjour garanti par l'Accord au moment déterminant,
soit lorsque le droit litigieux - tel qu'en l'espèce le regroupement familial -
est exercé. Autrement dit, les ressortissants communautaires résidant déjà en
Suisse lors de son entrée en vigueur peuvent se prévaloir de l'Accord dès
qu'ils relèvent de l'une ou l'autre des situations de libre circulation prévues
à cet effet et qu'ils remplissent les conditions afférentes à leur statut (cf.
ATF 130 II 1 consid.
BGE 134 II 10 S. 14
3.4 p. 7 et les références citées). En l'espèce, du moment qu'elle exerce une
activité salariée, l'épouse du recourant peut, en principe, déduire de l'Accord
le droit à une autorisation de séjour (cf. art. 4 ALCP et les art. 2 et 6 ss
annexe I ALCP). Dans cette mesure, elle peut également, si les conditions en
sont réunies, exercer les "autres droits" découlant de son statut (cf. art. 7
let. d ALCP) et, en particulier, obtenir une autorisation de séjour en faveur
de son conjoint au titre du regroupement familial prévu à l'art. 3 par. 2 let.
a annexe I ALCP.

3.

3.1 Partie intégrante de l'Accord sur la libre circulation des personnes (cf.
art. 15 ALCP), l'art. 3 par. 1 et 2 annexe I ALCP règle le droit de séjour des
membres de la famille des ressortissants communautaires; il prévoit notamment
que, quelle que soit leur nationalité, leur conjoint a en principe le droit de
"s'installer" avec eux. Ce droit est calqué sur les art. 10 et 11 du Règlement
(CEE) 1612/68, si bien que, conformément à l'art. 16 par. 2 ALCP, son
interprétation doit se faire en tenant compte de la jurisprudence antérieure au
21 juin 1999 qui a été rendue en la matière par la Cour de justice des
Communautés européennes (ci-après: la Cour de justice ou CJCE; au sujet de la
prise en considération d'arrêts de la Cour de justice postérieurs à cette date,
cf. ATF 130 II 1 consid. 3.6 p. 9 ss, ATF 130 II 113 consid. 5.2 p. 119 s. et
les références citées).
S'inspirant d'une jurisprudence de la Cour de justice postérieure au 21 juin
1999 dans une affaire concernant l'art. 10 du Règlement (CEE) 1612/68 (arrêt du
23 septembre 2003, Akrich, C-109/01, Rec. 2003, p. I-9607, également reproduit
in: EuGRZ 2003 p. 607 ss), le Tribunal fédéral a précisé que l'art. 3 annexe I
ALCP n'est pas applicable lorsqu'au moment où le droit au regroupement familial
est exercé, le membre de la famille visé par la demande n'a pas la nationalité
d'un Etat membre et ne réside pas déjà légalement dans un Etat membre; en fait,
il serait plus exact, dans le cadre des relations entre la Suisse et l'Union
européenne, de parler de partie contractante (à l'Accord) que d'Etat membre;
autrement dit, l'exercice du droit prévu par la disposition précitée
présuppose, pour les ressortissants non communautaires, qu'ils puissent
justifier d'un séjour légal préalable dans une partie contractante (cf. ATF 130
II 1 consid. 3.6 p. 9 ss). Ne remplit notamment pas une telle condition
(préalable) l'époux étranger d'une ressortissante communautaire qui n'a jamais
résidé légalement dans une partie contractante et qui fait l'objet en Suisse,
au moment déterminant, d'une décision de refus d'autorisation de séjour entrée
en force assortie d'une mesure de renvoi du territoire suisse (cf. arrêts
2A.114/2003 du 23 avril 2004, consid. 3.3 et 2A.7/ 2004 du 2 août 2004, consid.
3.3); le fait qu'il ait bénéficié d'une admission provisoire ou que sa présence
ait été tolérée pendant un certain temps ne saurait, en principe, remplir la
condition du séjour légal préalable (arrêts précités; en ce sens, voir aussi:
RICHARD PLENDER, Quo vadis-, Nouvelle orientation des règles sur la libre
circulation des personnes suivant l'affaire Akrich, in Cahiers de droit
BGE 134 II 10 S. 15
européen 2004 p. 261 ss, 276; MATTHEW ELSMORE/PETER STARUP, Case C-1/05,
Yunying Jia v. Migrationsverket, Judgement of the Cour (Grand Chamber), 9
January 2007, in Common Market Law Review, vol. 44, juin 2007, p. 787 ss, 794).
Néanmoins, l'époux d'une ressortissante communautaire qui a contesté par la
voie d'un recours une décision refusant de prolonger une (première)
autorisation de séjour valablement délivrée en Suisse est réputé résider
légalement dans notre pays pendant toute la durée de la procédure contentieuse
et peut, à ce titre, en principe tirer pleinement avantage des droits prévus
par l'Accord (cf. arrêt 2A.94/2004 du 6 août 2004, consid. 2).

3.2 En l'espèce, A.X. a été mis au bénéfice, le 11 octobre 2001, d'une
autorisation de séjour valable jusqu'au 6 juillet 2002. Que l'octroi de cette
autorisation résultât apparemment d'une erreur n'est pas décisif pour décider
si le recourant résidait légalement en Suisse au moment - déterminant - de la
demande de regroupement familial: en effet, le permis en question n'a nullement
été révoqué et il n'apparaît pas non plus qu'il fût frappé de nullité absolue.
En revanche, il faut constater que le recours entrepris contre le refus de
prolonger cette première autorisation de séjour a été définitivement écarté par
le Tribunal fédéral (arrêt 2A.64/2005 du 4 février 2005). Depuis le 6 juillet
2002, le recourant est donc en Suisse au bénéfice d'une simple tolérance, qui
découle notamment de l'effet suspensif attaché aux différentes procédures qu'il
a engagées, jusqu'ici vainement, en vue d'obtenir la régularisation de sa
situation (recours contre le refus de prolongation de l'autorisation de séjour;
demande d'admission provisoire; demande d'autorisation de séjour au titre du
regroupement familial). Par ailleurs, sa demande de regroupement familial - ici
litigieuse - fondée sur l'art. 3 annexe I ALCP a été formée le 10 octobre 2005,
soit plusieurs mois après l'entrée en force - le 4 février 2005 - de la
décision refusant de prolonger son autorisation de séjour arrivée à échéance le
6 juillet 2002. Partant, le recourant ne saurait prétendre qu'il résidait
légalement en Suisse au moment déterminant, et il doit se laisser opposer les
conséquences de l'arrêt Akrich précité, à savoir que son éventuel droit à une
autorisation de séjour doit s'examiner à la lumière des seules dispositions du
droit interne et de l'art. 8 CEDH (cf. arrêt précité 2A.114/2003 du 23 avril
2004, consid. 3.3).

3.3 Le recourant remet cependant en cause les conséquences que le Tribunal
fédéral a tirées de l'arrêt Akrich précité. A ses yeux, ce précédent ne
viserait que le cas très particulier circonscrit par l'état
BGE 134 II 10 S. 16
de fait qui en est à l'origine et n'aurait ainsi pas pour effet de subordonner
de manière générale l'octroi d'une autorisation de séjour fondée sur l'art. 3
annexe I ALCP à la condition que les ressortissants de pays tiers, parents de
ressortissants communautaires, disposent au préalable d'un titre de séjour
délivré par une partie contractante. A l'appui de son point de vue, le
recourant se réfère, en réplique et sans y avoir été invité, à un récent arrêt
de la Cour de justice (du 9 janvier 2007, Yunying Jia contre Migrationsverket,
C-1/05), postérieur, comme l'arrêt Akrich, à l'entrée en vigueur de l'Accord
(sur cette particularité, cf. infra consid. 3.5.2).

3.4 Le contexte de l'affaire Jia (précitée) est le suivant: le 13 mai 2003,
Yunying Jia, ressortissante chinoise dont le fils vit en Suède avec son épouse
de nationalité allemande, est entrée dans ce pays au bénéfice d'un visa de
tourisme valable pendant 90 jours au maximum; le 7 août suivant, elle a demandé
un titre de séjour en se prévalant de son lien de parenté avec l'épouse de son
fils et de sa situation de dépendance économique par rapport à ce dernier.
L'autorité suédoise compétente a refusé de faire droit à cette demande, au
motif que la situation de dépendance économique invoquée n'était pas
suffisamment établie. Yunying Jia ayant fait appel de ce refus, l'autorité de
recours suédoise saisie a soumis à la Cour de justice différentes questions
destinées à éclaircir la portée de l'arrêt (précité) Akrich. Après les avoir
reformulées et réunies en une seule, la Cour de justice a répondu aux questions
posées de la manière suivante: "Le droit communautaire, eu égard à l'arrêt
Akrich, n'impose pas aux Etats membres de soumettre l'octroi d'un droit de
séjour à un ressortissant d'un pays tiers, membre de la famille d'un
ressortissant communautaire ayant fait usage de sa liberté de circulation, à la
condition que ce membre de la famille ait, au préalable, séjourné légalement
dans un autre Etat membre." Les juges ont en effet estimé que la condition de
séjour préalable telle que formulée dans l'arrêt Akrich ne pouvait pas être
transposée au cas de Yunying Jia, car il n'était reproché à cette dernière ni
de séjourner illégalement dans un Etat membre, ni de chercher à se soustraire
abusivement à l'emprise d'une réglementation nationale en matière
d'immigration. Au contraire d'Hacene Akrich, l'intéressée se trouvait
légalement en Suède lorsqu'elle a introduit sa demande et le droit suédois ne
s'opposait pas, dans sa situation, à l'octroi d'un droit de séjour de longue
durée en sa faveur (arrêt précité Jia, points 28-33).
BGE 134 II 10 S. 17
En disant que le droit communautaire "n'impose pas" aux Etats membres, dans les
circonstances de l'affaire Jia, de subordonner l'octroi d'un titre de séjour
aux ressortissants de pays tiers à la condition d'un séjour légal préalable
dans un (autre) Etat membre, la Cour de justice ne paraît pas - a contrario -
vouloir leur interdire de prévoir une telle exigence dans leur législation (sur
la pertinence d'une telle interprétation, cf. JEAN-YVES CARLIER, La libre
circulation des personnes dans l'Union européenne, in Journal des tribunaux,
Droit européen, 2007, p. 80 ss, 85; ELSMORE/STARUP, op. cit., p. 793 ss, 797).
C'est du reste apparemment ce qu'ont fait le Royaume-Uni et le Danemark à la
suite de l'arrêt Akrich (cf. ELSMORE/STARUP, op. cit., p. 800 s.; cf. HANSPETER
MOCK/FABRICE FILLIEZ, Libre circulation des personnes et regroupement familial:
à propos de la prise en compte de la jurisprudence de la Cour de Luxembourg par
le Tribunal fédéral, in RSDIE 2006 p. 237 ss, 248 ad note de bas de page n°
41). En toute hypothèse, les différences que la Cour de justice a mises en
évidence, dans l'affaire Jia, dans sa comparaison avec les faits à la base de
l'arrêt Akrich, laissent clairement entrevoir que les demandes de regroupement
familial précédées - comme en l'espèce - d'un séjour illégal dans un Etat
membre ou destinées à contourner une législation nationale en matière
d'immigration ne doivent pas bénéficier des avantages du droit communautaire
(cf. arrêt précité Jia, points 28-33 a contrario; ELSMORE/STARUP, op. cit., p.
796); cette analyse s'impose même dans l'approche restrictive - que défend le
recourant - consistant à envisager l'arrêt Akrich, à la lumière de l'affaire
Jia, comme un simple cas d'espèce qui ne poserait pas le séjour légal préalable
dans un Etat membre comme une condition générale prévue par le droit
communautaire pour bénéficier de ses facilités en matière de regroupement
familial (cf. ELEANOR SPAVENTA, Case C-109/01, Secretary of State for the Home
Department v. H. Akrich, judgment of the Full Court of 23 September 2003, in
Common Market Law Review, vol. 42, février 2005, p. 225 ss, spécialement p. 233
et 238; CARLIER, op. cit., p. 84 s.).

3.5 En réalité, les arrêts Akrich et Jia ne se laissent pas facilement
interpréter et font suite à une série de décisions rendues par la Cour de
justice où, dans des affaires à la croisée des ordres juridiques communautaire
et nationaux, les juges européens ont semblé partagés entre, d'une part, la
volonté de favoriser le plus possible l'objectif (communautaire) de libre
circulation des personnes à l'intérieur des Etats membres et, d'autre part, la
nécessité de respecter et
BGE 134 II 10 S. 18
préserver les prérogatives (nationales) des Etats membres en matière de
politique d'immigration. Bien que normalement distinctes, ces deux "logiques"
peuvent en effet se chevaucher dans certaines circonstances, notamment lorsque
le ressortissant d'un pays tiers, parent d'un citoyen de l'Union ayant fait
usage de sa liberté de circuler, demande à rejoindre ce dernier dans un Etat
membre au titre du droit communautaire (cf. EMMANUELLE BROUSSY/FRANCIS DONNAT/
CHRISTIAN LAMBERT, Droit de séjour et immigration, in L'actualité juridique -
Droit administratif [AJDA] p. 295 ss). Certains auteurs parlent à ce propos de
"dilemme" (cf. MONIQUE LUBY, Chronique de jurisprudence du Tribunal et de la
Cour de justice des Communautés européennes, in Journal du droit international
2004 p. 580, citant l'avocat général Geelhoed; PLENDER, op. cit., p. 268),
tandis que d'autres évoquent une "tension" entre les politiques nationales
d'immigration - toujours plus sévères - et les avancées de la libre circulation
(cf. MOCK/FILLIEZ, op. cit., p. 247). Dans l'arrêt Akrich, la Cour de justice
avait clairement pris position en faveur du respect des compétences nationales
des Etats membres en matière d'immigration, en affirmant que "le règlement 1612
/68 ne vise que la libre circulation à l'intérieur de la Communauté (mais) est
muet sur l'existence des droits d'un ressortissant d'un pays tiers, conjoint
d'un citoyen de l'Union, quant à l'accès au territoire de la Communauté" (point
49).
Cela étant, il n'y a pas de motif de revenir sur la jurisprudence publiée aux
ATF 130 II 1 dans la ligne de l'arrêt Akrich, et ce pour les raisons suivantes.

3.5.1 Premièrement, la portée de l'arrêt Jia n'est, comme on l'a vu, pas claire
(cf., à ce sujet, les trois interprétations proposées par ELSMORE/STARUP, op.
cit., p. 793 ss), et il n'est pas certain que, comme le soutient le recourant,
le cas Akrich soit dorénavant relégué au simple rang d'arrêt d'espèce (cf.
BROUSSY/DONNAT/LAMBERT, op. cit., p. 297). A ce jour, ce précédent fait du
reste toujours l'objet de demandes d'interprétation de la part des juridictions
nationales des Etats membres (cf. les conclusions présentées le 5 juillet 2007
par l'avocat général Mengozzi, dans l'affaire C-291/05, Minister voor
Vreemdelingenzaken en Integratie contre Rachel Nataly Geradina Eind, en
particulier les points 43-50).

3.5.2 Deuxièmement, indépendamment des problèmes d'interprétation que posent
les arrêts Akrich et Jia (notamment en relation avec le sens et la portée de la
condition du séjour légal préalable, cf. CARLIER,
BGE 134 II 10 S. 19
op. cit., p. 85; SPAVENTA, op. cit., p. 232 s.; ELSMORE/STARUP, op. cit., p.
792 ss), ceux-ci sont tous deux postérieurs à l'entrée en vigueur de l'Accord
sur la libre circulation des personnes. Le Tribunal fédéral n'est dès lors pas
tenu de les prendre en compte pour interpréter l'art. 3 annexe I ALCP (cf. art.
16 par. 2 ALCP a contrario). Il n'a d'ailleurs fait que se référer à l'arrêt
Akrich dans la cause publiée aux ATF 130 II 1. Et la même réserve vaut
évidemment pour les prochaines décisions que rendra la Cour de justice en la
matière, d'autant que les critiques émises contre la solution adoptée dans
l'arrêt Akrich tiennent, pour certaines d'entre elles, à des questions de
cohérence propres à l'ordre juridique communautaire, notamment par rapport au
statut de citoyen de l'Union européenne (cf. LUBY, op. cit., p. 581) ou par
rapport à de récents actes communautaires entrés en vigueur après l'arrêt
Akrich, comme la directive 2003/86/CE du Conseil, du 22 septembre 2003,
relative au droit au regroupement familial, ou la directive 2004/38/CE du
Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des
citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de
séjourner librement sur le territoire des Etats membres, modifiant le Règlement
(CEE) 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE,
73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE (cf.
ELSMORE/STARUP, op. cit., p. 796; MOCK/FILLIEZ, op. cit., p. 252 s.; pour un
aperçu de ces nouvelles règles, cf. ASTRID EPINEY/ANDREA FAEH, Zum
Aufenthaltsrecht von Familienangehörigen im europäischen Gemeinschaftsrecht, in
Annuaire du droit de la migration, 2005/2006, p. 49 ss).

3.5.3 Troisièmement, les règles en matière de regroupement familial ici
litigieuses sont calquées sur le Règlement (CEE) 1612/68 et visent, à l'avenant
de ce texte au plan des relations communautaires, à permettre et favoriser la
libre circulation des ressortissants des Etats membres de la Communauté
européenne et de la Suisse "sur le territoire des parties contractantes" (cf.
le préambule de l'Accord et son art. 1^er; ATF 130 II 1 consid. 3.3 p. 6, ATF
130 II 113 consid. 5.1 et 5.2 p. 118 ss). Ces règles ne sauraient dès lors
interférer dans la politique migratoire de la Suisse - en principe réglée par
le seul droit interne pour les ressortissants de pays tiers - au-delà de ce qui
est nécessaire à la réalisation de l'objectif de libre circulation poursuivi
par l'Accord. Or, la condition du séjour légal préalable telle qu'interprétée
par le Tribunal fédéral est conforme à la finalité de l'art. 3 annexe I ALCP
ou, pour reprendre la terminologie de la Cour de
BGE 134 II 10 S. 20
justice, ne prive pas cette norme de son "effet utile". Celle-ci tend en effet
à garantir aux ressortissants communautaires que les membres de leur famille,
même s'ils n'ont pas la nationalité d'une partie contractante, puissent les
accompagner en Suisse s'ils décident d'exercer les droits prévus par l'Accord
sur la libre circulation des personnes. En l'absence d'une telle garantie, les
ressortissants communautaires pourraient en effet être dissuadés d'exercer ces
droits, par crainte que la réglementation suisse en matière d'immigration ne
les sépare de leur famille (cf. ATF 130 II 113 consid. 7.1 p. 124 s. et 7.3 p.
126 et les références citées). Mais la situation se présente sous un jour
différent pour les membres de la famille d'un ressortissant communautaire qui,
au moment où celui-ci exerce son droit à la libre circulation, ne vivaient pas
déjà légalement avec lui dans une partie contractante; en effet, le
ressortissant communautaire placé dans une telle situation ne saurait alors
prétendre être dissuadé d'exercer sa liberté de circulation par la crainte de
perdre un avantage, dans la mesure où les membres de sa famille ayant la
nationalité d'un pays tiers n'ont de toute façon, au moment de la demande,
aucun droit de séjour dans quelque partie contractante que ce soit (cf. ATF 130
II 1 consid. 3.6.1 p. 9 s. et 3.6.3 p. 11 ss; PLENDER, op. cit., p. 280). Dans
cette mesure, l'interprétation de l'arrêt Akrich permet, sans trahir ni la
lettre ni l'esprit de l'Accord, de ménager les prérogatives de la Suisse en
matière de politique migratoire, en même temps que de tracer une limite claire
entre les situations relevant du seul droit interne (et de l'art. 8 CEDH) et
celles entrant dans le champ d'application de l'Accord (sur ces aspects
considérés du point de vue du droit communautaire, cf. BROUSSY/DONNAT/LAMBERT,
op. cit., p. 297).

3.5.4 Enfin, cette solution a également l'avantage d'éviter dans une large
mesure les situations de discrimination à rebours pouvant se présenter en
matière de regroupement familial: qu'elles émanent de citoyens suisses ou de
ressortissants communautaires, les demandes d'autorisations de séjour en faveur
de parents originaires de pays tiers qui ne résident pas déjà légalement dans
une partie contractante sont en effet traitées de la même manière, soit par
référence au droit interne et à l'art. 8 CEDH (cf. MOCK/FILLIEZ, op. cit., p.
238 s.; BROUSSY/DONNAT/LAMBERT, op. cit., p. 297). Or, l'objectif d'éviter la
discrimination à rebours fait partie des préoccupations du législateur suisse,
comme l'atteste la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers (LEtr; RO
2007 p. 5437), approuvée le 24 septembre
BGE 134 II 10 S. 21
2006 en votation populaire (FF 2006 p. 8953), qui entrera en vigueur - sous
réserve de quelques dispositions - le 1^er janvier 2008 (RO 2007 p. 5487).
Cette nouvelle loi (RS 142.20) vise en effet, en matière de regroupement
familial de parents originaires de pays tiers, à conférer aux ressortissants
suisses des droits analogues à ceux prévus pour les ressortissants
communautaires à l'art. 3 annexe I ALCP (cf. message du 18 mars 2002 concernant
la loi sur les étrangers, in FF 2002 p. 3469 ss, 3510; MINH SON NGUYEN, Le
regroupement familial dans la loi sur les étrangers et dans la loi sur l'asile
révisée, in Annuaire du droit de la migration, 2005/2006, p. 31 ss, 38 s.).
Afin de tenir compte des répercussions de l'ATF 130 II 1, les Chambres
fédérales ont même modifié le projet initial du Conseil fédéral et étendu aux
membres étrangers de la famille d'un ressortissant suisse qui souhaitent
obtenir un droit de séjour en Suisse la condition de justifier au préalable
"d'une autorisation de séjour durable délivrée par un Etat avec lequel la
Suisse a conclu un accord sur la libre circulation des personnes" (cf. art. 42
al. 2 LEtr; session de printemps du Conseil des Etats, 16 mars 2005, in BO 2005
CE p. 303 s. [proposition de la majorité de la Commission et intervention de
Trix Heberlein]; session d'automne du Conseil national, 28 septembre 2005, in
BO 2005 CN p. 1233 ss [proposition de la majorité de la Commission et
interventions de Geri Müller, Philipp Müller, et Serge Beck]). Autrement dit,
l'abandon de la jurisprudence précitée aurait pour conséquence - paradoxale -
de replacer les ressortissants suisses, à partir du 1^er janvier 2008, dans une
moins bonne situation que les citoyens communautaires quant au droit d'obtenir
une autorisation de séjour pour les membres étrangers de leur famille, en
violation de la volonté du législateur. C'est là une raison de plus qui
justifie de maintenir les conséquences tirées de l'arrêt Akrich à l'ATF 130 II
1.

3.6 En conséquence, l'art. 3 annexe I ALCP n'est, comme l'a jugé le Tribunal
administratif, mais pour d'autres motifs, pas applicable au recourant.
Cependant, compte tenu de la portée générale que revêt le principe de
non-discrimination inscrit à l'art. 2 ALCP, l'épouse portugaise du recourant,
qui est également partie à la présente procédure aux côtés de ce dernier, ne
doit pas être moins bien traitée que ne le serait l'épouse suisse d'un
ressortissant étranger. Or, l'art. 7 al. 1 de la loi fédérale du 26 mars 1931
sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE; RS 1 p. 113) ne prévoit
l'extinction du droit à l'autorisation de séjour accordée à l'époux étranger
d'une
BGE 134 II 10 S. 22
ressortissante suisse que s'il existe à son égard un "motif d'expulsion" (cf.
art. 7 al. 1 LSEE; RO 1991 p. 1042), tandis qu'en l'absence d'un titre de
séjour fondé sur l'Accord, comme en l'espèce, une simple infraction à "l'ordre
public" (cf. art. 17 al. 2 LSEE; RO 1991 p. 1042) est déjà susceptible
d'entraîner une telle conséquence pour l'époux étranger d'une ressortissante
communautaire au bénéfice d'un permis d'établissement (sur cette différence,
cf. ATF 122 II 385 consid. 3a p. 390; ATF 120 Ib 129 consid. 4a p. 130/131;
PHILIP GRANT, La protection de la vie familiale et de la vie privée en droit
des étrangers, thèse Genève 2000, p. 190/191). Il convient dès lors d'examiner
l'éventuel droit du recourant à l'octroi d'une autorisation de séjour à la
lumière des art. 7 al. 1 LSEE (RO 1991 p. 1042) et 8 CEDH (cf. arrêts 2A.325/
2004 du 25 août 2005, consid. 3.3 et 4; 2A.7/2004 du 2 août 2004, consid. 3.3
et 4.1; 2A.114/2003 du 23 avril 2004, consid. 4).

4.

4.1 Aux termes de l'art. 7 al. 1 (première phrase) LSEE (RO 1991 p. 1042), le
conjoint étranger d'un ressortissant suisse a droit à l'octroi et à la
prolongation d'une autorisation de séjour ou d'établissement; ce droit s'éteint
cependant lorsqu'il existe un motif d'expulsion (disposition précitée,
troisième phrase). D'après l'art. 10 al. 1 LSEE, l'étranger peut être expulsé
de Suisse ou d'un canton, notamment s'il a été condamné par une autorité
judiciaire pour crime ou délit (let. a; RS 1 p. 116) ou si sa conduite dans son
ensemble et ses actes permettent de conclure qu'il ne veut pas s'adapter à
l'ordre établi dans le pays qui lui offre l'hospitalité ou qu'il n'en est pas
capable (let. b; RO 1949 p. 227). Le refus d'octroyer une autorisation de
séjour ou d'établissement au conjoint étranger d'un ressortissant suisse (ou
communautaire) sur la base de l'une des causes énoncées à l'art. 10 LSEE (RO
1949 p. 227) suppose une pesée des intérêts en présence et l'examen de la
proportionnalité de la mesure (cf. art. 11 al. 3 LSEE [RO 1949 p. 227 s.]; ATF
116 Ib 113 consid. 3c p. 117). Pour apprécier ce qui est équitable, l'autorité
tiendra en particulier compte de la gravité de la faute commise par l'étranger,
de la durée de son séjour en Suisse et du préjudice qu'il aurait à subir avec
sa famille du fait de l'expulsion (art. 16 al. 3 RSEE; RO 1949 p. 243) -
respectivement du fait du refus d'accorder ou de prolonger une autorisation de
séjour ou d'établissement.
BGE 134 II 10 S. 23
La réglementation prévue par l'art. 8 CEDH est similaire: le droit au respect
de la vie familiale (par. 1) n'est en effet pas absolu, en ce sens qu'une
ingérence dans l'exercice de ce droit est possible selon l'art. 8 par. 2 CEDH,
pour autant que celle-ci soit "prévue par la loi et qu'elle constitue une
mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité
nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense
de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la
santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui". Il
y a donc également lieu ici de procéder à une pesée des intérêts en présence
(cf. ATF 125 II 633 consid. 2e p. 639; ATF 122 II 1 consid. 2 p. 5/6; ATF 120
Ib 129 consid. 4b p. 131, ATF 120 Ib 22 consid. 4a p. 24 s.).

4.2 Dans la pesée des intérêts, il faut en premier lieu tenir compte, en cas de
condamnation de l'étranger pour crime ou délit, de la gravité des actes commis
ainsi que de la situation personnelle et familiale de l'intéressé. La peine
infligée par le juge pénal est le premier critère servant à évaluer la gravité
de la faute et à peser les intérêts (cf. ATF 120 Ib 6 consid. 4c p. 15/16). Il
y a lieu ensuite d'examiner si l'on peut exiger des membres de la famille qui
ont un droit de présence en Suisse qu'ils suivent l'étranger dont
l'autorisation de séjour est refusée. Pour trancher cette question, l'autorité
compétente ne doit pas statuer en fonction des convenances personnelles des
intéressés, mais prendre objectivement en considération leur situation
personnelle et l'ensemble des circonstances. Si l'on ne peut pas exiger des
membres de la famille pouvant rester en Suisse qu'ils partent à l'étranger, cet
élément doit entrer dans la pesée des intérêts en présence mais n'exclut pas
nécessairement, en lui-même, un refus de l'autorisation de séjour (cf. ATF 122
II 1 consid. 2 p. 6; ATF 120 Ib 129 consid. 4b p. 131).

4.3 En l'espèce, les faits reprochés au recourant sont particulièrement graves
et ont du reste été lourdement sanctionnés d'une peine de cinq ans de réclusion
complétée d'une peine d'une année d'emprisonnement. Selon la jurisprudence
applicable au conjoint étranger d'un ressortissant suisse, une condamnation à
deux ans de privation de liberté constitue la limite à partir de laquelle, en
général, il y a lieu de refuser l'autorisation de séjour, du moins quand il
s'agit d'une demande d'autorisation initiale ou d'une requête de prolongation
d'autorisation déposée après un séjour de courte durée (ATF 130 II 176 consid.
4.1 p. 185; ATF 120 Ib 6 consid. 4b p. 14). Certes, le recourant est arrivé en
Suisse au mois d'octobre 1991, à l'âge de douze ans. Il apparaît cependant
qu'il n'a bénéficié que tardivement d'une première autorisation de séjour, soit
après août 2001, et que
BGE 134 II 10 S. 24
celle-ci lui a apparemment été délivrée par erreur; auparavant, il a résidé en
Suisse sans titre de séjour ou, à partir du mois d'octobre 1997, au bénéfice
d'une simple admission provisoire; par ailleurs, il a été arrêté et incarcéré
du 22 octobre 2000 au 2 octobre 2004. Bien que relativement importante dans
l'absolu, la durée de son séjour en Suisse doit dès lors être fortement
relativisée: les années passées dans l'illégalité, en prison ou au bénéfice
d'une simple tolérance ne sont en effet pas déterminantes dans la pesée des
intérêts (cf. ATF 130 II 493 consid. 4.6 p. 503, ATF 130 II 39 consid. 4 p.
43).
Quoi qu'il en soit, les peines infligées au recourant dépassent si largement la
limite (indicative) de deux ans fixée par la jurisprudence que seules des
circonstances tout à fait exceptionnelles seraient de nature à contrebalancer
la gravité des fautes reprochées. Or, l'on cherche en vain de telles
circonstances. Que l'intéressé se soit apparemment bien comporté depuis sa
libération conditionnelle n'est à cet égard pas décisif; c'est même le moins
que l'on pouvait attendre de lui. Par ailleurs, au contraire de la pratique en
cours pour les étrangers bénéficiant d'un titre de séjour fondé sur l'Accord,
le risque de récidive ne joue pas un rôle déterminant pour les mesures
d'éloignement prises sur la base du droit interne, mais ne constitue qu'un
facteur parmi d'autres dans la pesée des intérêts, où la gravité des actes
commis est, comme on l'a vu, le premier élément à prendre en considération.
BGE 134 II 10 S. 25
Au demeurant, le risque de récidive doit, en l'espèce, s'apprécier de manière
rigoureuse, car les faits reprochés sont graves (cf. ATF 120 Ib 6 consid. 4c p.
15/16). A cela s'ajoute que les antécédents pénaux du recourant incitent à la
plus grande réserve sur ce point. Il apparaît en effet qu'entre le mois de
septembre 1998 (tentative de contrainte) et le 22 octobre 2000 (date de son
incarcération), l'intéressé s'est rendu coupable de plusieurs infractions, dont
le degré de gravité est allé crescendo pour les principales, soit celles contre
la vie et l'intégrité corporelle. Par ailleurs, il faut relever que
l'infraction la plus grave, soit le crime manqué de meurtre, a été commise
alors que son auteur était déjà inculpé pour des faits qui lui vaudront par la
suite une année d'emprisonnement (notamment pour tentative d'agression, rixe et
lésions corporelles simples qualifiées) et qu'il avait alors déjà subi 19 jours
de détention préventive en août 1999 à raison de ces mêmes faits. En outre,
tant le contexte général et le mode opératoire des infractions reprochées
(violence et gravité des faits) que leur mobile (honneur; actes gratuits ou de
justice privée) jettent une lumière défavorable sur le recourant et le font
apparaître comme un individu dénué de sens moral, dangereux et prêt, selon les
termes des juges pénaux "en toute circonstance, à jouer du muscle".
Enfin, indépendamment même de ses crimes, le recourant ne semble pas s'être
intégré à la société suisse. En particulier, au plan professionnel, il n'a
apparemment pas été capable d'occuper durablement une place de travail lui
permettant de subvenir à ses besoins et les faits retenus au pénal laissent
entrevoir un mode de vie et des fréquentations peu recommandables; par
ailleurs, il n'a pas fourni de gages ou d'éléments concrets permettant de
penser que la situation avait notablement changé ou pouvait se retourner.
Certes, au plan familial, lorsque l'arrêt attaqué a été rendu, il était marié
depuis près d'une année, et l'on peut concevoir qu'il sera difficile pour son
épouse - également recourante - de le suivre à l'étranger, du moins s'il était
finalement amené à vivre en Libye après son départ de la Suisse. Au vu des
circonstances, cet obstacle n'apparaît cependant pas déterminant dans la pesée
des intérêts, d'autant que, nonobstant ses dénégations, son épouse ne pouvait
pas ignorer, au moment où elle s'est mariée, qu'il risquait de devoir quitter
la Suisse: en effet, il était alors sous le coup d'une décision de refus
d'autorisation de séjour rendue plus d'une année auparavant et entrée en force
définitive de chose jugée quelques jours avant la célébration du mariage (arrêt
du Tribunal fédéral 2A.64/2005 du 4 février 2005).

4.4 Dans ces conditions, l'intérêt public à l'éloignement du recourant
l'emporte sur son intérêt privé et celui de son épouse à ce qu'il puisse
demeurer en Suisse.