Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 132 III 414



Urteilskopf

132 III 414

  47. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile dans la cause Association des
Pharmacies du Canton de Genève et consorts contre A. SA et consorts (recours
en réforme)
  4C.363/2005 du 27 mars 2006

Regeste

  Unlauterer Wettbewerb; Werbekampagne im Zusammenhang mit einer
Vereinbarung über den Vertrieb von Medikamenten, geschlossen zwischen einer
Gruppe von Krankenversicherern und einer Gesellschaft, die Apotheken
betreibt.

  Prüfung der Rechtmässigkeit einer derartigen Werbekampagne im Hinblick auf
Art. 3 lit. b, e und h UWG (E. 4.1-4.3).

  Unzulässigkeit der aus der Unvereinbarkeit dieser Werbekampagne mit
kantonalem öffentlichem Recht abgeleiteten Rüge (E. 5).

  Zulässigkeit einer derartigen Vereinbarung unter dem Gesichtspunkt des
Bundesgesetzes über die Krankenversicherung? Frage offen gelassen (E. 6).

Sachverhalt

  A.

  A.a Le 24 mars 2000, l'art. 25 al. 2 de la loi fédérale du 18 mars 1994
sur l'assurance-maladie (LAMal; RS 832.10) a été modifié. Selon la lettre h
(nouvelle) de cette disposition, les prestations des pharmaciens lors de la
remise des médicaments prescrits principalement par les médecins font partie
des prestations dont les coûts sont pris en charge par l'assurance-maladie
obligatoire. Cette modification a introduit un nouveau mode de rémunération
des pharmaciens, en ce sens que leur revenu, anciennement basé sur un
pourcentage dégressif du prix maximum des médicaments fixé par l'Office
fédéral des assurances sociales (OFAS) dans la liste des spécialités, est
désormais fondé sur une "taxe-pharmacien" (vente, contrôle, conseil,
remplacement, etc.) et sur une "taxe-patient" (tenue du dossier,
vérification, etc.).

  La modification susmentionnée a entraîné l'adaptation de l'ordonnance du
27 juin 1995 sur l'assurance-maladie (OAMal; RS 832.102), en particulier des
dispositions sur la liste des spécialités fixant le prix public des
médicaments. Ainsi, l'art. 67 al. 1bis OAMal précise que le prix maximum se
compose du prix de fabrique et de la part relative à la distribution, les
prestations rémunérées par ce prix et cette part étant énumérées aux art.
1ter et 1quater OAMal. Le prix maximum des médicaments indiqué dans la liste
des spécialités ne comprend donc plus la remise des médicaments aux patients
puisque cette prestation est rémunérée séparément au moyen des taxes
précitées. En outre, l'art. 4a, introduit dans l'ordonnance du 29 septembre
1995 sur les prestations dans l'assurance obligatoire des soins en cas de
maladie (OPAS; RS 832.112.31), indique quelles sont les prestations fournies
par les pharmaciens que cette assurance prend en charge.

  La nouvelle réglementation offre une plus grande transparence en matière
de coûts des médicaments. Elle permet de faire une distinction claire entre
les conseils et le travail du pharmacien, d'une part, les coûts de
fabrication et de distribution des médicaments, d'autre part. Cette
distinction vise à casser le mécanisme qui récompense, par une marge
calculée en pour-cent, la remise d'un volume très important de médicaments
ou de médicaments particulièrement coûteux. L'introduction du nouveau
système de rémunération des pharmaciens devrait entraîner une diminution du
niveau des prix à charge de l'assurance-maladie obligatoire.

  A.b Le 30 janvier 2001, le Concordat des assureurs-maladie suisses et la
Société suisse des pharmaciens ont conclu une convention tarifaire,
applicable sur l'ensemble du territoire de la Confédération helvétique, qui
fixe les modalités de la rémunération des prestations fournies par les
pharmaciens conventionnés (ci-après: convention RBP), dans le cadre de
l'assurance-maladie obligatoire, lors de la remise de médicaments figurant
dans la liste des spécialités et soumis à ordonnance (catégories de remise A
et B). La convention prévoit notamment une taxe-pharmacien (art. 6) et une
taxe-patient (art. 7) de 4, respectivement 7, points de taxe, la valeur du
point de taxe étant fixée à 1 fr. 05 (art. 2 de l'annexe 1 à la convention).
Une convention additionnelle, signée le 12 juin 2001, institue un forfait
d'urgence (12 points tarifaires) et une surtaxe de nuit (20 points
tarifaires). La convention RBP met encore en oeuvre un mécanisme permettant
d'assurer la neutralité des coûts (art. 8 et annexe 3). Elle impose, enfin,
aux pharmaciens conventionnés le versement d'une contribution financière,
appelée montant de stabilisation des coûts (MSC; art. 10 al. 1 et annexe 2).

  Conformément à l'art. 46 al. 4 LAMal, les parties ont soumis la convention
RBP au Conseil fédéral qui l'a approuvée par décision du 20 février 2002.

  L'Association des Pharmacies du canton de Genève (ci-après: APCG), qui
regroupe quelque 120 membres, a adhéré à cette convention. A. SA, société
ayant son siège dans le canton de Vaud, exploite plusieurs pharmacies à
Genève. Membre de l'APCG jusqu'en 2000, elle a refusé d'adhérer à la
convention RBP.

  A.c Le 14 août 2001, A. SA a conclu une convention relative à la
distribution de médicaments avec la Conférence d'assureurs suisses maladie
et accident (V.). Cette convention lie toutes les pharmacies du groupe A.
ainsi que les assureurs membres de V. qui y ont adhéré expressément. Elle a
pour but de régler les conditions administratives et financières relatives à
la distribution directe ou indirecte des médicaments de la liste des
spécialités A et B, à la délivrance de médicaments en cas d'urgence et à
l'assistance prescrite lors de la prise d'un médicament (art. 2).

  S'agissant de la remise de médicaments de la liste des spécialités A et B
prescrits sur ordonnance, A. SA s'engage à appliquer le prix figurant dans
cette liste et à ne facturer aucune taxe-pharmacien ou taxe-patient, que le
médicament soit payé par l'assuré (système du

tiers garant) ou par l'assureur (système du tiers payant; art. 3 al. 1 let.
a et 5 al. 1 let. a). Lorsque l'assuré s'acquitte du médicament par
versement comptant, la taxe d'urgence, de nuit ou d'assistance n'est pas
perçue (art. 3 al. 1 let. b et c, art. 5 al. 1 let. b et c).

  De leur côté, les assureurs s'engagent à communiquer à tous leurs assurés,
deux fois par année, par les voies qu'ils jugeront utiles, les avantages
résultant de la convention de même que ceux procurés par la carte "..." de
A. SA (art. 6 al. 3 et 4) et à les informer de l'ouverture d'une nouvelle
pharmacie A. (art. 6 al. 5). L'art. 8 al. 2 de la convention prévoit encore
que les assureurs s'efforceront, individuellement, de renforcer leur
collaboration avec A. SA. C'est ainsi que des caisses-maladie ont accepté de
consentir à leurs assurés 10 % de rabais sur tous les produits achetés
auprès de cette société, à l'exception de ceux inscrits sur les listes A et
B des spécialités délivrées sur ordonnance; elles leur ont encore offert la
possibilité d'acquérir à un prix préférentiel la carte "..." de A. SA, qui
donne droit à un rabais permanent de 10 % et à d'autres rabais ponctuels sur
tout l'assortiment, à l'exclusion des médicaments remboursés par les
caisses-maladie.

  Ladite convention a été soumise à l'OFAS. Par courrier du 5 mars [recte: 8
avril] 2002, cet Office a indiqué que le Conseil fédéral n'avait pas à
l'approuver pour les deux motifs suivants: d'une part, le champ
d'application de la convention ne s'étend pas à toute la Suisse; d'autre
part, cette convention - en tant qu'elle prévoit que A. SA renonce aux taxes
prévues dans la convention RBP - ne constitue précisément pas une convention
tarifaire. Et l'OFAS de conclure qu'il n'y a en effet pas plus économique
pour le système d'assurance-maladie que des prestations qui sont fournies
gratuitement.

  A.d Le 14 août 2001, A. SA a annoncé sur son site Internet les avantages
que réservait la convention passée avec V., en les résumant sous la forme
d'un tableau récapitulatif selon les diverses caisses-maladie concernées.

  Celles-ci ont également diffusé ces informations sur leurs propres sites
Internet ainsi qu'au moyen de bulletins envoyés périodiquement à leurs
assurés. On peut y lire le texte suivant:

   "L'accord passé avec les pharmacies A., dont vous trouverez les adresses
    au verso, a été renouvelé et nous sommes heureux de continuer à vous
    offrir les privilèges qu'il vous appartient de découvrir en lisant ce
    document

    Pas de taxe sur les médicaments dans les Pharmacies A. pour les assurés
    de la Caisse-maladie [Nom de la caisse concernée]

    PHARMACIES A: Mode d'emploi

    Taxe dossier: 0.- (au lieu de 7.55)

    Taxe médicament: 0.- (au lieu de 4.30)

    Taxe de garde (18h30-21h00): 0.- (au lieu de 12.95)

    Surtaxe de nuit: 0.- (au lieu de 21.60)

    Taxe pour prise de médicaments: 0.- (au lieu de 10.80)

    Ainsi les conseils vous sont donnés gratuitement et sans rendez-vous
    dans les Pharmacies parfumeries A. Il en va de même pour le contrôle de
    vos médicaments et de votre tension artérielle.

    Un rabais de l0 % vous est octroyé sur les autres produits de santé,
    d'hygiène et de parfumerie proposés par les officines A. y compris les
    médicaments des listes C, D et E, non remboursables par [Nom de la
    Caisse-maladie concernée].

    (...)

    PHARMACIES DE GARDE: Ouvertes 7 jours sur 7, dimanche et jours fériés:

    Pas de taxe de garde (Fr. 12,95 TVA incl.) ou de surtaxe de nuit (Fr.
    21,60 TVA incl.)

    (...): 8h00-20h00, 7 jours sur 7

    (...): lu-sa 7h30-22h00 et di 9h30-12h30/15h00-18h30"

  Ces informations ont également été répercutées par la presse écrite.

  B.

  B.a Le 10 novembre 2004, l'APCG et trois autres pharmacies genevoises ont
introduit, devant la Cour de justice du canton de Genève, une action en
concurrence déloyale accompagnée d'une requête de mesures provisionnelles
visant à interdire à A. SA et aux assurances du groupe V., sous la menace
des peines prévues à l'art. 292 CP, de diffuser de la publicité vantant les
avantages de la convention conclue le 14 août 2001, en particulier les
exemptions de toute taxe de dossier, de médicament, de garde et de nuit.

  Par ordonnance du 9 décembre 2004, la Cour de justice a rejeté la requête
de mesures provisionnelles. Elle a néanmoins relevé que la dénomination
"pharmacie de garde" était trompeuse, dans la mesure où elle laissait
entendre que les pharmacies du groupe A. SA étaient intégrées dans le
système de garde organisé à Genève, alors que tel n'était pas le cas.
Cependant, il lui est apparu disproportionné d'interdire à titre
provisionnel tout envoi de nouvelle publicité en raison de cette seule
inexactitude.

  Sur le fond, les demanderesses ont pris notamment les conclusions
suivantes:

   "- constater le caractère illicite de la publicité des défenderesses
    [telle que reproduite ci-dessus sous lettres Ad];

    - constater le caractère illicite de la publicité des défenderesses dans
    la mesure où cette publicité est envoyée personnellement par les caisses
    à leurs assurés;

    - interdire aux défenderesses toutes publicités contenant les
    indications suivantes [telles que reproduites ci-dessus sous lettres
    Ad];

    - interdire aux assurances du groupe V. de faire de la publicité pour A.
    SA par l'envoi de documents par courrier traditionnel, télécopie,
    courrier électronique ou par tout autre moyen à leurs assurés;

    - interdire aux défenderesses la distribution des cartes-clients
    octroyant des rabais sur les médicaments (Cartes ... et ...)."

  Les demanderesses n'ont pas sollicité l'ouverture d'enquêtes.

  Dans leur réponse, les défenderesses ont conclu au déboutement intégral
des demanderesses. Elles ont contesté le caractère déloyal de leurs
agissements, insistant sur l'exactitude des informations diffusées.
S'agissant de la dénomination "pharmacie de garde", elles ont contesté toute
volonté de tromper le public mais ont déclaré avoir été "sensibles" à l'avis
exprimé dans l'ordonnance de mesures provisionnelles; dès lors, elles ont
décidé de retirer avec effet immédiat toute référence dans leur publicité à
la notion de "pharmacie de garde".

  B.b Le 25 janvier 2005, l'APCG a dénoncé A. SA auprès du Pharmacien
cantonal genevois.

  Par courrier du 25 février, le Pharmacien cantonal a informé A. SA de sa
position concernant les différents points de la dénonciation, précisant que
sa compétence était limitée aux pratiques qui seraient contraires à la loi
genevoise du 11 mai 2001 sur l'exercice des professions de la santé, les
établissements médicaux et diverses entreprises du domaine médical (LPS; RSG
K 3 05) et ce dans le cadre de sa mission de police sanitaire visant au
respect de la santé publique. S'agissant du terme "pharmacie de garde", il a
relevé que cette appellation était trompeuse, mais que, en raison de sa
suppression, il renonçait à prendre une sanction. Quant à une éventuelle
collusion, interdite par l'art. 15 LPS, il a estimé que le grief n'était pas
fondé puisque les assureurs-maladie incriminés ne sont pas des
professionnels de la santé au sens de la LPS. En ce qui concerne

les aspects relevant de la publicité, le Pharmacien cantonal a constaté que
les griefs invoqués (infraction aux art. 16 LPS et 18 du règlement
d'exécution de cette loi, du 25 juillet 2001 [RLPS; RSG K 3 05.01])
faisaient déjà l'objet de la demande soumise à la Cour de justice. Aussi
a-t-il suspendu la procédure administrative jusqu'à droit connu sur cette
demande.

  Désormais, A. SA utilise la dénomination "pharmacie de service" ou
"pharmacie à votre service" pour désigner les officines ouvertes au-delà des
heures habituelles de service. Cet horaire particulier est indiqué sur les
supports publicitaires.

  B.c Lors de l'audience de plaidoiries du 21 juin 2005, les parties n'ont
pas sollicité de mesures probatoires et elles ont persisté dans leurs
précédentes conclusions.

  Statuant par arrêt du 16 septembre 2005, la Chambre civile de la Cour de
justice a rejeté la demande.

  C.- Parallèlement à un recours de droit public, qui a été rejeté, dans la
mesure où il était recevable, par arrêt séparé de ce jour, les demanderesses
ont déposé un recours en réforme. Elles y invitent le Tribunal fédéral à
annuler l'arrêt cantonal, puis à faire droit aux conclusions qui ont été
soumises aux premiers juges.

  Les défenderesses concluent au rejet intégral du recours, dont elles
mettent en doute la recevabilité.

  Le Tribunal fédéral a rejeté le recours en réforme, dans la mesure où il
était recevable.

Auszug aus den Erwägungen:

                        Extrait des considérants:

Erwägung 3

  3.

  3.1  En vertu de l'art. 2 LCD (RS 241), est déloyal et illicite tout
comportement ou pratique commercial qui est trompeur ou qui contrevient de
toute autre manière aux règles de la bonne foi et qui influe sur les
rapports entre concurrents ou entre fournisseurs et clients. La clause
générale de l'art. 2 LCD est concrétisée par la liste d'exemples figurant
aux art. 3 à 8 LCD. Il ressort de cette clause que seul peut être qualifié
de déloyal un comportement qui est objectivement apte à influencer le jeu de
la concurrence ou le fonctionnement du marché (ATF 126 III 198 consid. 2c/aa
et les arrêts cités). Au demeurant, il n'est plus nécessaire de faire appel
à la clause générale si le comportement reproché tombe sous le coup de l'une
des dispositions spéciales précitées, raison pour laquelle il convient

de commencer par examiner l'applicabilité de ces dernières (cf. ATF 122 III
469 consid. 8). Toutefois, il faut garder à l'esprit que celles-ci
n'embrassent pas tous les comportements déloyaux possibles et imaginables,
de sorte qu'un comportement donné peut mériter ce qualificatif même s'il
n'entre pas dans leurs prévisions (cf. ATF 122 III 469 consid. 9a p. 484 s.;
116 II 365 consid. 3b p. 368).

  3.2  Dans leur recours en réforme, les demanderesses font valoir que la
campagne publicitaire litigieuse est illicite, car les méthodes de publicité
utilisées par les défenderesses tombent sous le coup de l'art. 3 LCD à
plusieurs titres et constituent, de surcroît, un comportement déloyal, au
sens de l'art. 2 LCD, vis-à-vis des autres pharmaciens en général et
d'elles-mêmes en particulier.

  Toujours selon les demanderesses, la convention liant les défenderesses
constitue un accord tarifaire déguisé, qui n'a pas été approuvé par
l'autorité administrative compétente. En signant cette convention, les
défenderesses auraient adopté un comportement déloyal, proscrit par l'art. 2
LCD, qui procure à A. SA un avantage concurrentiel illicite sur ses
concurrents.

  Il y a lieu d'examiner ce qu'il en est. Pour ce faire, on suivra, par
souci de simplification, l'ordre dans lequel les demanderesses ont développé
leurs moyens en vue de démontrer le bien-fondé des reproches ainsi formulés
par elles à l'encontre des défenderesses.

Erwägung 4

  4.  Dans un premier groupe de moyens, les demanderesses cherchent à
démontrer que la campagne publicitaire incriminée serait illicite au regard
de l'art. 3 LCD.

  4.1
  4.1.1  Les demanderesses invoquent, tout d'abord, l'art. 3 let. b LCD. De
manière singulière, elles ne citent même pas le texte de cette disposition,
ni n'indiquent, avec un tant soit peu de précision, les comportements qui y
sont proscrits. Aussi la recevabilité de ce grief est-elle déjà douteuse du
point de vue de sa motivation (cf. art. 55 al. 1 let. c OJ). Sous cette
réserve, les critiques formulées par les intéressées n'apparaissent pas
fondées pour les raisons indiquées ci-après.

  4.1.2  Agit de façon déloyale, au sens de l'art. 3 let. b LCD, celui qui
donne des indications inexactes ou fallacieuses sur lui-même, son
entreprise, sa raison de commerce, ses oeuvres, ses prestations, ses prix,
ses stocks, ses méthodes de vente ou ses affaires ou qui, par de telles
allégations, avantage des tiers par rapport à leurs concurrents.

  Une indication inexacte n'est pas conforme à la réalité, alors qu'une
indication fallacieuse n'est pas nécessairement fausse en elle-même, mais
peut induire en erreur. Pour tomber sous le coup de l'art. 3 let. b LCD,
encore faut-il que les indications en cause soient propres à influencer la
décision du client. Déterminer si une publicité est inexacte ou fallacieuse
est une question de droit que le Tribunal fédéral revoit librement. Est
décisif le sens que le lecteur non averti attribue de bonne foi à la
publicité; pour ce faire, le juge se fondera sur l'expérience générale de la
vie et les circonstances particulières du cas (arrêt 4C.59/1992 du 15
décembre 1992, consid. 2 et les références).

  4.1.3  Selon les demanderesses, la cour cantonale a souligné à juste titre
le caractère trompeur de la mention "pharmacies de garde", utilisée par les
défenderesses. Cependant, ajoutent-elles, c'est à tort, "comme on l'a vu",
qu'elle a refusé de faire droit à leurs conclusions en constatation du
caractère illicite et en interdiction de l'utilisation de ladite mention.
Cette dernière remarque ne constitue pas un grief en bonne et due forme,
dans la mesure où les demanderesses n'indiquent pas où elles ont expliqué
pourquoi le rejet desdites conclusions serait contraire au droit fédéral
(art. 55 al. 1. let. c OJ).

  4.1.4  Les demanderesses s'en prennent ensuite à différents termes
utilisés dans la publicité incriminée. En relation avec ces termes, elles
reprochent à la Cour de justice de n'avoir pas examiné le point de savoir si
des clients d'autres pharmacies - surtout des assurés de V. - sont incités,
de manière trompeuse, à se rendre chez A. SA plutôt que dans une autre
officine. Tel serait le cas, à leur avis, dès lors qu'un "véritable édifice
mensonger" aurait été mis en place pour attirer à tout prix les assurés en
masse chez A. SA.

  4.1.4.1  La première expression fustigée par les demanderesses - à savoir
"informations à conserver" - ne figure pas dans les constatations de la cour
cantonale, auxquelles la juridiction fédérale de réforme doit se tenir (art.
63 al. 2 OJ). Il n'y a donc pas lieu de s'y arrêter. Au demeurant, le terme
"information" ne recouvre pas nécessairement des renseignements à caractère
officiel, mais peut aussi s'appliquer à des communications relevant de la
publicité. Son utilisation, en tant que telle, n'est ainsi ni inexacte ni
fallacieuse.

  4.1.4.2  Les demanderesses s'en prennent ensuite à différents termes
utilisés par les défenderesses dans le passage suivant de leur texte
publicitaire: "L'accord passé avec les pharmacies A., dont

vous trouverez les adresses au verso, a été renouvelé et nous sommes heureux
de continuer à vous offrir les privilèges qu'il vous appartient de découvrir
en lisant ce document".

  A suivre les demanderesses, le terme "renouvelé" serait trompeur puisque
l'accord en question continue à déployer ses effets du seul fait qu'il n'a
pas été dénoncé. Quant au verbe "continuer", il conforterait le mensonge
initial en établissant un lien de causalité entre la poursuite de la
politique de privilèges conduite par les signataires de l'accord et le
renouvellement de celui-ci. Enfin, l'expression "en lisant ce document"
mettrait indûment en relation tous les privilèges mentionnés dans le
document publicitaire avec ledit accord, alors que deux seulement des
privilèges consentis aux assurés résulteraient de ce dernier.

  En argumentant de la sorte, les demanderesses paraissent vouloir jouer sur
les mots. Force est pourtant d'admettre, avec la cour cantonale, que le
texte litigieux n'est pas de nature à tromper le lecteur: il informe
celui-ci que, lorsqu'il se rendra dans l'une des officines de A. SA, il
bénéficiera, comme cela a été le cas jusqu'ici, des avantages mentionnés
dans le document publicitaire qu'il a sous les yeux. Ce même lecteur ne se
souciera guère de savoir si ces avantages résultent du renouvellement plutôt
que de l'absence de dénonciation de l'accord qui en constitue le fondement;
il ne cherchera pas davantage à déterminer si les privilèges qu'on lui
indique dans le bulletin d'information périodique découlent tous de l'accord
auquel se réfère le texte correspondant. En réalité, le destinataire de la
publicité litigieuse n'attachera guère d'importance aux termes contestés par
les demanderesses, car l'essentiel pour lui sera de pouvoir jouir
effectivement des privilèges qui lui sont offerts.

  4.1.4.3  L'expression "Pas de taxe sur les médicaments dans les pharmacies
A." ne trouve pas non plus grâce aux yeux des demanderesses, au motif que,
par cet amalgame trompeur entre le prix des médicaments proprement dit et la
rémunération du pharmacien, la publicité contestée ferait croire que, dans
les officines A. SA., le client paie son médicament moins cher que dans les
autres officines.

  A vrai dire, le lecteur non averti, à l'aune duquel doit être examinée
l'expression litigieuse, ne se préoccupera sans doute pas des composantes du
prix du médicament qu'il entend acheter. Ce qui compte pour lui, c'est le
prix total du médicament. Or, ce prix-là sera effectivement

moins élevé si le pharmacien renonce à percevoir la taxe destinée à
rémunérer son travail intellectuel. Considérée de ce point de vue,
l'expression précitée ne revêt, dès lors, pas un caractère inexact ou
fallacieux.

  4.1.4.4  Les demanderesses critiquent aussi les trois expressions
suivantes, relatives aux taxes que A. SA s'engage à ne pas percevoir:
"Pharmacie A.: mode d'emploi Taxe de garde (18h30-21h): 0.- (au lieu de
12.95). Surtaxe de nuit (21h-7h): 0.- (au lieu de 21.60). Taxe pour prise de
médicaments sous surveillance: 0.- (au lieu de 10.80)". S'agissant de la
première, elles font valoir que A. SA n'est pas en droit de percevoir cette
taxe - laquelle n'est du reste pas mentionnée dans la convention du 14 août
2001 - lorsqu'elle n'est pas affiliée à un service de garde. Quant aux deux
autres taxes, A. SA aurait omis de préciser qu'elle ne renonce à les
percevoir qu'en cas de paiement comptant.

  Quoi qu'en disent les demanderesses, la taxe de garde est bel et bien
prévue dans la susdite convention, mais sous l'appellation "taxe d'urgence"
(art. 5 al. 1 let. b); elle vise à rémunérer l'exécution d'une ordonnance
médicale en dehors des heures de travail usuelles, en cas d'urgence (cf.
art. 4a al. 1 let. b OPAS). Les intéressées ne démontrent pas en quoi la
perception d'une telle taxe serait nécessairement liée à l'affiliation à un
service de garde, ainsi qu'elles le soutiennent. Pour le surplus,
l'indication publicitaire controversée n'est ni inexacte ni fallacieuse si
A. SA ne perçoit effectivement pas la taxe ad hoc lorsqu'elle remet des
médicaments entre 18h30 et 21h. Or, rien ne permet d'affirmer qu'il n'en
irait pas ainsi.

  Pour ce qui est des deux autres taxes contestées - à savoir la taxe de
nuit et la taxe pour prise de médicaments sous surveillance, dénommée "taxe
d'assistance" dans la convention (art. 5 al. 1 let. c) -, il est vrai que A.
SA ne renonce à les percevoir qu'en cas de versement comptant du prix du
médicament. Toutefois, le simple fait de ne pas le préciser dans sa
publicité ne suffit pas à justifier l'application de l'art. 3 let. b LCD,
s'agissant de taxes qui ont trait à la remise de médicaments dans des
situations spéciales, soit entre 21h et 7h ou lorsque le médecin a prescrit
l'assistance du pharmacien pour la prise du médicament.

  4.1.4.5  Le texte publicitaire controversé contient également le passage
suivant: "Ainsi les conseils vous sont donnés gratuitement et sans
rendez-vous dans les pharmacies-parfumeries A."

  A cet égard, les demanderesses observent que les législations cantonales
sur la profession imposent à tout pharmacien d'être présent dans son
officine, de sorte que la prise d'un rendez-vous ne se pratique dans aucune
officine.

  Cette dernière affirmation, sans doute exacte, invite à relativiser la
portée du terme "rendez-vous" critiqué par les demanderesses. Il va, en
effet, de soi que ce terme n'aura qu'un impact minime sur le lecteur et
qu'il ne sera pas propre à influencer sa décision d'acquérir des médicaments
auprès de A. SA plutôt que dans d'autres officines, dès lors que ce lecteur
ne peut pas ignorer que des conseils lui seront dispensés sans rendez-vous,
par un pharmacien diplômé, aussi bien dans celles-ci que dans celle-là.

  Il est vrai que présenter une prestation usuelle comme sortant de
l'ordinaire peut être déloyal suivant les circonstances. Toutefois, dans le
cas concret, il n'en va pas ainsi, eu égard au fait que le terme incriminé
n'aura guère d'influence sur le lecteur du texte publicitaire, lequel
attachera à coup sûr beaucoup plus d'importance à la gratuité des conseils
du pharmacien, que lui fait miroiter la phrase où figure le terme en
question, qu'à la possibilité d'obtenir ces conseils sans rendez-vous.

  4.1.4.6  A. SA a renoncé à utiliser la dénomination "pharmacie de garde",
considérée comme trompeuse par la Cour de justice et le pharmacien cantonal.
Désormais, elle se sert des expressions "pharmacie de service" ou "pharmacie
à votre service" pour désigner les officines ouvertes au-delà des heures
habituelles de service. Cet horaire particulier est indiqué sur les supports
publicitaires.

  Selon les demanderesses, la mention "pharmacie de service" serait tout
aussi mensongère et trompeuse que "pharmacie de garde" puisqu'elle emprunte
la notion de "service de garde" de la section du RLPS.

  Ainsi formulé, le grief en question ne suffit pas à démontrer le caractère
trompeur de la dénomination critiquée. La référence au RLPS n'est déjà pas
pertinente, étant donné que le terme "garde" ne figure dans aucune des deux
nouvelles appellations utilisées par A. SA. De plus, l'indication, dans les
supports publicitaires, des heures d'ouverture des pharmacies est de nature
à réduire la portée de la dénomination, quelle qu'elle soit, qui la précède,
car l'essentiel pour l'assuré qui lit le texte controversé ne réside pas
tant dans le nom donné à une pharmacie ouverte au-delà des heures
habituelles de

service que dans l'horaire adopté par cette pharmacie. A cela s'ajoute,
selon les constatations des juges précédents, d'une part, que la nouvelle
désignation ne crée pas de confusion avec le service de tournus que connaît
le canton de Genève et, d'autre part, que la question est aujourd'hui
définitivement réglée pour l'autorité administrative de contrôle.

  4.1.5  Sous lettre E.C, les demanderesses reprennent l'argument relatif à
l'amalgame que la cour cantonale aurait fait entre le prix des médicaments
et le prix des prestations du pharmacien. Cet argument ayant déjà été réfuté
plus haut (cf. consid. 4.1.4.3), il n'y a pas lieu d'y revenir. Quant à la
seule affirmation, faite dans ce contexte, du caractère dénigrant de la
publicité incriminée, elle ne saurait remplacer la motivation exigée pour
que la juridiction fédérale de réforme puisse entrer en matière sur le moyen
pris de la violation de l'art. 3 let. a LCD que les demanderesses soulèvent
incidemment dans le même passage de leur acte de recours.

  4.2  Les demanderesses font encore grief à la cour cantonale d'avoir violé
les règles du droit fédéral régissant la publicité comparative en ne
sanctionnant pas, sous l'angle de la concurrence déloyale, la pratique
publicitaire des défenderesses.

  4.2.1  A la différence d'autres pays, la Suisse a toujours considéré la
publicité comparative comme étant en principe licite. Ce type de publicité
favorise, en effet, la transparence des marchés, sert à l'information du
public et fournit au consommateur la possibilité de faire le choix le plus
avantageux pour lui. Encore faut-il qu'une telle publicité respecte les
principes généraux de la loyauté commerciale. Consacrant une jurisprudence
constante du Tribunal fédéral, l'art. 3 let. e LCD lui assigne, en
conséquence, des limites afin qu'il en aille ainsi. Aux termes de cette
disposition, agit de façon déloyale celui qui compare, de façon inexacte,
fallacieuse, inutilement blessante ou parasitaire sa personne, ses
marchandises, ses oeuvres, ses prestations ou ses prix avec celles ou ceux
d'un concurrent ou qui, par de telles comparaisons, avantage des tiers par
rapport à leurs concurrents (ATF 129 III 426 consid. 3.3.1 et les
références).

  Selon la jurisprudence et la doctrine, à l'instar d'autres méthodes
publicitaires, la comparaison doit être objective, véridique et réaliste.
Une comparaison est inexacte lorsqu'elle repose sur des données fausses.
Cela suffit à lui conférer un caractère déloyal. Mais une comparaison qui
s'appuie sur des données véridiques peut également

revêtir un tel caractère, si ces données sont imprécises, secondaires ou
incomplètes et qu'elles sont propres à susciter des erreurs auprès d'une
partie non négligeable du public. Au demeurant, on ne comparera que ce qui
est comparable. Cela vaut en particulier pour les comparaisons de prix,
lesquelles ne sont admissibles que lorsqu'elles portent sur des quantités et
qualités identiques; elles doivent, en outre, respecter les dispositions de
l'ordonnance du 11 décembre 1978 sur l'indication des prix (OIP; RS 942.211;
art. 16 ch. 1 let. c et ch. 5). Pour prévenir les conclusions erronées que
le public pourrait en tirer, il conviendra d'indiquer, au besoin, les
fondements arithmétiques de la comparaison des prix (arrêt cité, ibid.).

  Pour déterminer si une publicité comparative contient des indications
inexactes ou fallacieuses, le juge doit se placer du point de vue du
destinataire. Ce qui importe, c'est le sens que le lecteur est fondé de
bonne foi à donner à la publicité selon l'expérience de la vie et les
circonstances du cas particulier. Il s'agit d'un acheteur suisse moyen, non
professionnel et normalement doué. Dès que cet acheteur type risque d'être
trompé ou induit en erreur, la démarche du concurrent est déloyale; la
preuve que ce risque s'est concrétisé n'est pas exigée (arrêt cité, consid.
3.1.1, p. 435 et les références).

  La publicité dite superlative constitue une forme de publicité
comparative. Elle se caractérise par le fait que son auteur compare ses
propres prestations non pas uniquement avec celles de tel ou tel concurrent
déterminé, mais avec les prestations de l'ensemble de la concurrence. Dans
la mesure où il contient des données concrètes et objectivement vérifiables,
ce genre de publicité tombe sous le coup de l'art. 3 let. e LCD; ces données
doivent donc être exactes. Il en va ainsi du prix (arrêt cité, consid.
3.1.2, p. 435 et les références).

  4.2.2  Dans une argumentation des plus brèves, les demanderesses
reprochent à la cour cantonale de n'avoir examiné que la mention "0 fr. au
lieu de ...", en recherchant simplement si le consommateur reçoit
effectivement ce qui lui est annoncé, au lieu de tenir compte du contexte
publicitaire d'ensemble, slogans et amalgames compris, dans lequel cette
mention a été utilisée par les défenderesses.

  Selon les demanderesses, le raisonnement de la Cour de justice, dont le
recours de droit public aurait déjà démontré l'arbitraire à un autre titre,
aurait dû conduire cette autorité à admettre la violation

alléguée de l'art. 3 let. e LCD. En effet, pour l'assuré qui a atteint le
montant de sa franchise, "0.- au lieu de 7 fr. 55" est rigoureusement faux
dès lors que, comme le 90 % du prix du médicament, y compris les prestations
du pharmacien, lui sera remboursé, ce sera "0 fr. au lieu de 75 centimes".
Contrairement à ce que pensent les juges genevois, il ne s'agit pas d'un
point secondaire puisque les publicités incriminées jouent sur l'économie
réalisée par le consommateur-patient qui achète ses médicaments dans une
pharmacie A. SA.

  Les demanderesses dénient, par ailleurs, toute objectivité à la publicité
incriminée dans la mesure où celle-ci ne nomme pas les concurrents auxquels
A. SA se compare, concurrents dont certains, telles les pharmacies W.,
pratiquent eux aussi l'exonération partielle des taxes.

  4.2.3  Tel qu'il est présenté, le moyen examiné laisse fortement à désirer
du point de vue de sa motivation. Ainsi, les demanderesses ne précisent pas
quel est le "contexte publicitaire" dont les premiers juges auraient dû
tenir compte. Elles n'indiquent pas davantage où ni comment elles sont
censées avoir démontré, dans leur recours de droit public, que
l'argumentation de la cour cantonale serait entachée d'arbitraire "à un
autre titre". Semblable affirmation est du reste démentie par le fait que
ledit recours a été rejeté dans la mesure où il était recevable. Quant à
l'assertion relative à la pratique suivie par d'autres pharmacies, en
particulier la pharmacie W., elle ne correspond à aucune des constatations
faites dans l'arrêt attaqué. Quoi qu'il en soit, le moyen en question ne
suffit pas à établir la violation de l'art. 3 let. e LCD imputée à la Cour
de justice.

  Les juges genevois se sont attachés à démontrer, dans un premier temps,
que la mention litigieuse, considérée au regard du système tarifaire
applicable à la rémunération des pharmaciens suisses, n'a rien de trompeur.
Cette appréciation juridique n'est pas critiquée par les demanderesses.

  Quant à l'objection des demanderesses, liée au problème de la franchise,
ces mêmes magistrats, loin de l'escamoter, l'ont au contraire examinée avec
soin et l'ont écartée par des motifs qui ne méconnaissent nullement les
principes jurisprudentiels sus-indiqués. Il ne leur a pas échappé que, pour
l'assuré qui a dépassé le montant de sa franchise, l'affirmation "0 fr. au
lieu de 7 fr. 55" n'est plus entièrement

exacte puisque la somme de 7 fr. 55 lui sera remboursée à concurrence de 90
% par sa caisse-maladie. Cependant, ils ont admis, avec raison, que
l'impression générale pour le client reste celle d'un système de prestations
gratuites auprès des officines A. SA, tandis que les mêmes prestations sont
payantes auprès des pharmacies conventionnées. Cet avis est d'autant plus
sensé que la tendance actuelle notoire d'un grand nombre d'assurés à
augmenter le montant de leur franchise, afin de réduire les effets de la
hausse continuelle des primes de l'assurance-maladie obligatoire, a pour
conséquence d'accroître la fréquence des cas dans lesquels l'assuré
n'atteindra pas le montant de sa franchise ou ne l'atteindra que tard dans
l'année déterminante.

  4.3  A suivre les demanderesses, la Cour de justice aurait encore violé
l'art. 3 let. h LCD en ne sanctionnant pas la publicité agressive des
défenderesses.

  Selon l'art. 3 let. h LCD, agit de façon déloyale celui qui entrave la
liberté de décision de la clientèle en usant de méthodes de vente
particulièrement agressives. La disposition citée ne vise que les méthodes
de vente agressives, à l'exclusion des méthodes de publicité agressives
(arrêt 6S.357/2002 du 18 décembre 2002, consid. 3.1 non publié à l'ATF 129
IV 49; KAMEN TROLLER, Manuel du droit suisse des biens immatériels, tome II,
2e éd., n. 6.8 p. 964; CARL BAUDENBACHER, Lauterkeitsrecht, Bâle 2001, n. 25
ss ad art. 3 let. h LCD; MARIO M. PEDRAZZINI/FEDERICO A. PEDRAZZINI,
Unlauterer Wettbewerb, UWG, 2e éd., p. 155, n. 7.09 et p. 161, n. 7.34). Cet
état de choses semble avoir échappé aussi bien à la cour cantonale qu'aux
deux parties.

  Dans ces conditions, la tentative des demanderesses de démontrer le
caractère agressif de la publicité des défenderesses, en vue d'établir
l'existence d'une violation de l'art. 3 let. h LCD, était d'emblée vouée à
l'échec. Point n'est, dès lors, besoin d'examiner si les allégations
formulées à cet égard dans l'acte de recours, qui ne se limitent d'ailleurs
pas aux seules constatations souveraines des juges cantonaux, justifieraient
de qualifier de particulièrement agressive ladite publicité.

  Il s'ensuit le rejet du moyen.

  4.4  Les demanderesses se plaignent enfin de la violation de l'art. 3 let.
f LCD, disposition qui interdit de pratiquer des prix d'appel. Force est
toutefois de constater d'emblée qu'elles n'ont pris aucune conclusion,

en tête de leur recours en réforme, en relation avec un tel grief, qu'il
s'agisse de constater le caractère prétendument illicite de la pratique
fustigée ou de la faire interdire. Partant, elles n'ont pas d'intérêt à ce
que le Tribunal fédéral tranche une question qui ne déboucherait de toute
façon sur aucune décision concrète de sa part, quelle que soit la solution
qu'il lui donnerait.

Erwägung 5

  5.

  5.1  Sous le titre "l'illicéité de la campagne incriminée au regard de
l'art. 2 LCD", les demanderesses exposent longuement, toujours sur un mode
appellatoire caractérisé, en quoi ladite campagne violerait les dispositions
du droit public cantonal, soit les art. 16, 17 et 18 RLPS, interprétées à la
lumière de la jurisprudence fédérale en la matière (ATF 123 I 201; SJ 1998
p. 120) et des règles posées dans le projet de loi fédérale sur les
professions médicales universitaires. Elles tentent ensuite de démontrer que
la législation genevoise en matière de publicité dans le domaine de la santé
est compatible avec le droit fédéral déterminant, bien qu'elle soit plus
restrictive que celui-ci, resp. que la législation vaudoise correspondante,
plus libérale selon l'interprétation qu'en font les défenderesses, viole le
principe de la force dérogatoire du droit fédéral.

  5.2  Sauf exceptions n'entrant pas en ligne de compte en l'espèce, le
recours en réforme ne permet pas de dénoncer la violation du droit cantonal
(cf. art. 43 al. 1 et 55 al. 1 let. c in fine OJ). Il en va ainsi même
lorsqu'il s'agit d'examiner l'interprétation de normes de ce droit ayant une
incidence sur l'application du droit fédéral soumis à l'examen de la
juridiction fédérale de réforme (cf. ATF 117 II 286 consid. 4c et les arrêts
cités; GEORG MESSMER/HERMANN IMBODEN, Die eidgenössischen Rechtsmittel in
Zivilsachen, p. 70, n. 49; ALAIN WURZBURGER, Les conditions objectives du
recours en réforme au Tribunal fédéral, thèse Lausanne 1964, p. 67, n. 98;
PETER MÜNCH, Prozessieren vor Bundesgericht, 2e éd., p. 134 note de pied
105; voir aussi: JEAN-FRANÇOIS POUDRET, Commentaire de la loi fédérale
d'organisation judiciaire, n. 1.2 ad art. 65 OJ; WILHELM BIRCHMEIER,
Bundesrechtspflege, n. 3 ad art. 65 OJ).

  Il suit de là que tous les arguments avancés par les demanderesses à
l'effet de démontrer que la Cour de justice aurait mal appliqué ou mal
interprété le droit sanitaire genevois sont irrecevables. Peu importe, dès
lors, de savoir si ce droit - et encore moins le droit vaudois, dont il
n'est pas question dans l'arrêt attaqué - viole ou non le

principe de la force dérogatoire du droit fédéral. L'opinion émise au
considérant 2.3 de l'arrêt attaqué, quant aux rapports entre le droit privé
fédéral et le droit public cantonal en ce qui concerne la publicité
comparative est du reste pertinente, quoi qu'en disent les demanderesses. On
ne voit pas, au demeurant, qu'il soit possible de la confronter à une
législation qui n'est pas encore en vigueur, comme le voudraient ces
dernières.

Erwägung 6

  6.  Dans la dernière partie de leur acte de recours, les demanderesses
expliquent, en se fondant sur un avis de droit, pour quelles raisons la
convention conclue le 14 août 2001 par A. SA et V. violerait la LAMal.

  6.1  Les premiers juges, invités à statuer sur ce point, ne sont pas
entrés en matière car il leur est apparu sans rapport avec l'objet du débat
ouvert devant eux. "En effet, soulignent-ils, il n'est pas contesté que les
pharmacies du groupe A. SA ne perçoivent pas de taxe de dossier, de
médicament, de garde et de nuit auprès de leurs clients, ce qu'annonce la
publicité litigieuse. Dès lors que la réalité à laquelle est confronté le
client - à savoir l'exemption de taxe - est conforme au contenu de la
publicité qu'il reçoit, la question de la validité de l'accord passé entre
A. SA et V. est sans pertinence".

  A ce sujet, les demanderesses affirment avoir démontré, dans leur recours
de droit public, "que c'est de manière arbitraire que la Cour de justice n'a
pas examiné la question de la validité de la convention des défenderesses".
Pareille affirmation ne correspond pas à la réalité. Plus précisément, il
est certes exact que les intéressées ont formulé un grief de ce chef dans
leur recours de droit public. Cependant, dans son arrêt relatif audit
recours, la Cour de céans a constaté l'irrecevabilité d'un tel grief, en
vertu de l'art. 84 al. 2 OJ, au motif que le point de savoir si la question
de la validité de la convention était pertinente ou non pour trancher le
différend relevait du droit (consid. 4.3.3). Or, force est de constater que
les demanderesses ne discutent pas cette question dans le passage
présentement examiné de leur recours en réforme, puisqu'elles se contentent
d'y exposer en quoi la convention litigieuse serait illicite. Le motif pour
lequel la cour cantonale a refusé d'analyser la validité de celle-ci demeure
ainsi intact; les demanderesses n'expliquent pas en quoi il serait contraire
au droit fédéral (cf. art. 55 al. 1 let. c OJ) et la Cour de céans ne voit
de toute façon pas en quoi il le serait.

  Cela étant, du moment que les demanderesses n'ont pas établi l'existence
d'un lien de cause à effet entre la conclusion de la convention

incriminée et le comportement déloyal qu'elles imputent aux défenderesses,
il n'y a pas lieu d'examiner la question de la compatibilité de ladite
convention avec la LAMal.

  6.2  Force est de souligner, au demeurant, que les demanderesses n'ont pas
pris de conclusion visant à constater le caractère illicite de la convention
du 14 août 2001 et à interdire aux défenderesses de mettre en oeuvre le
système de distribution de médicaments qui y est prévu. Dès lors, même si
elle avait examiné la validité de cette convention au regard du droit public
fédéral et qu'elle ait exprimé le même avis que les demanderesses à ce
sujet, la Cour de céans, faute de conclusions ad hoc, n'aurait pu ni
constater l'illicéité de l'accord litigieux dans le dispositif du présent
arrêt ni interdire aux défenderesses d'exécuter cet accord.

  6.3  On relèvera, pour terminer, qu'il paraît quelque peu artificiel de
vouloir faire trancher par le juge civil, sous le couvert de l'application
de la loi sur la concurrence déloyale, un problème qui ressortit
essentiellement, sinon exclusivement, au droit des assurances sociales.