Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 131 IV 32



131 IV 32

5. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale dans la cause X.
contre Ministère public du canton de Vaud (pourvoi en nullité)

    6S.124/2004 du 10 novembre 2004

Regeste

    Art. 292 StGB; Ungehorsam gegen amtliche Verfügungen.

    Die mit einer Strafdrohung versehene Anordnung des Betreibungsamtes
gegenüber einem Dritten, dem das Amt die Verwaltung eines Grundstücks
übertragen hat, ist keine Verfügung im Sinne von Art. 292 StGB, und diese
Bestimmung ist daher insoweit nicht anwendbar (E. 3).

Sachverhalt

    A.- X. est administrateur unique de la société "Fiduciaire et Gérance
X. SA". Cette société s'est vu confier par l'Office des poursuites
d'Yverdon-Orbe la gérance légale d'un immeuble. Malgré plusieurs
lettres et appels téléphoniques, X. ou sa société n'ont jamais fourni
à l'office des poursuites les renseignements sollicités sur la gérance
ainsi que sur la comptabilité relative aux encaissements et paiements
effectués. Par courrier du 27 septembre 2002, l'office des poursuites a
fixé à "Fiduciaire et Gérance X. SA" un ultime délai au 4 octobre 2002
pour transmettre la comptabilité relative à l'immeuble saisi, pour verser
les loyers nets encaissés depuis fin mars 2002 et pour remettre les baux
à loyer, le tout sous la menace des peines d'arrêts et d'amende prévus
à l'article 292 CP. X. ne s'étant pas exécuté, une plainte a été déposée
le 16 octobre 2002.

    B.- Par jugement du 10 octobre 2003, le Tribunal de police de
l'arrondissement de l'Est vaudois a condamné X. pour insoumission à une
décision de l'autorité à 20 jours d'arrêts avec sursis pendant un an.

    C.- Le 8 décembre 2003, la Cour de cassation pénale du Tribunal
cantonal vaudois a rejeté le recours formé par X. contre ce jugement,
qu'elle a confirmé.

    La cour cantonale a estimé en premier lieu que la commination
adressée à la société était valable pour ses organes et que X., qui
est l'administrateur unique de la société, était le seul destinataire
possible de la commination. Elle a en outre admis que les exigences
contenues dans la lettre comminatoire étaient suffisamment précises et les
conséquences exposées de manière satisfaisante puisque la teneur intégrale
de l'art. 292 CP y était reproduite. Enfin, comme X. intervenait sur la
base d'un mandat, il n'était pas à assimiler à un fonctionnaire ou une
autorité de poursuite et le moyen de contrainte réservé à l'art. 292 CP
lui est à l'évidence applicable.

    D.- X. se pourvoit en nullité contre cet arrêt. Invoquant une
violation de l'art. 292 CP, il conclut, avec suite de frais et dépens,
à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité
cantonale pour qu'elle statue à nouveau.

Auszug aus den Erwägungen:

                          Extrait des considérants:

Erwägung 3

    3.  L'application de l'art. 292 CP suppose notamment que l'auteur ne
se soit "pas conformé à une décision à lui signifiée".

    La définition de la décision au sens de l'art. 292 CP est la même
que celle qui a été développée en droit administratif (RIEDO, Basler
Kommentar II, n. 36 ad art. 292). Il doit donc s'agir d'une décision
concrète de l'autorité, prise dans un cas particulier et à l'égard d'une
personne déterminée et qui a pour objet de régler une situation juridique
de manière contraignante (voir RIEDO, op. cit., n. 37; HÄFELIN/ MÜLLER,
Allgemeines Verwaltungsrecht, 4e éd., p. 178 n. 854). La décision a pour
objet de régler la situation d'administrés en tant que sujets de droit et
donc, à ce titre, distincts de la personne étatique ou, en d'autres termes
extérieurs à l'administration. On oppose dans ce contexte la décision à
l'acte interne, ou d'organisation, qui vise des situations à l'intérieur
de l'administration (MOOR, Droit administratif II, 2e éd., n. 2.1.2.3,
p. 164). Deux critères permettent de déterminer si on a affaire à une
décision ou à un acte interne. D'une part l'acte interne n'a pas pour
objet de régler la situation juridique d'un sujet de droit en tant que
tel et d'autre part le destinataire en est l'administration elle-même,
dans l'exercice de ses tâches. Ainsi, un acte qui affecte les droits et
obligations d'un fonctionnaire en tant que sujet de droit, par exemple
la fixation de son salaire, d'indemnités diverses ou encore de sanctions
disciplinaires, est une décision. En revanche, un acte qui a pour objet
l'exécution même des tâches qui lui incombent en déterminant les devoirs
attachés au service, tel que la définition du cahier des charges ou
des instructions relatives à la manière de trancher une affaire, est un
acte interne juridique (voir ATF 121 II 473, p. 478 s.; MOOR, op. cit.,
loc. cit.; HÄFELIN/MÜLLER, op. cit., p. 181 n. 867 et les références
citées).

    Lorsque la commination n'est pas une décision, telle qu'elle vient
d'être définie, mais un acte interne, ce sont les mesures disciplinaires
ou autres moyens de contrainte ressortissant aux règles régissant les
rapports internes qui s'appliquent (ATF 124 III 170 consid. 6, p. 175
et l'arrêt cité; RIEDO, op. cit., n. 46 ad art. 292 CP; CORBOZ, Les
infractions en droit suisse, volume II, Berne 2002, n. 4 ad art. 292 CP;
PETER STALDER, Ungehorsam gegen amtliche Verfügungen, thèse Zurich 1990,
p. 75; WALTER EIGENMANN, Die Androhung von Ungehorsamsstrafen durch den
Richter, thèse Zurich 1964, p. 18; SCHWANDER, Von den Ungehorsamsdelikten,
ZSGV 1950 p. 417).

    Peut demeurer ouverte la question de savoir si les sanctions prévues
par l'art. 292 CP peuvent être appliquées s'agissant d'un acte adressé par
une collectivité publique à une autre collectivité publique (cf. HEINRICH
ANDREAS MÜLLER, Der Verwaltungszwang, thèse Zurich 1975, p. 141 s.).

    En l'espèce, la commination adressée au recourant avait pour objet la
fourniture de renseignements et de pièces comptables relatifs à des travaux
de gérance qu'il effectuait sur la base d'un contrat de gérance légale qui
lui avait été confié par l'office des poursuites et faillites. Le contenu
d'un tel mandat est déterminé de manière précise et détaillée par les
dispositions sur la gérance (art. 17 et 18 de l'ordonnance du Tribunal
fédéral du 23 avril 1920 sur la réalisation forcée des immeubles [ORFI;
RS 281.42]), qui prévoient notamment que celle-ci comprend la commande
et le paiement de petites réparations, le renouvellement des assurances
usuelles, la résiliation des baux, la rentrée des loyers au besoin par
voie de poursuites, de sorte que l'on se trouve dans un domaine qui fait
l'objet d'une réglementation détaillée de droit public. Ainsi, le tiers
chargé de la gérance légale doit être considéré comme un auxiliaire de
l'office, dont le mandat est régi pour l'essentiel par le droit fédéral
de la poursuite (ATF 129 III 400 consid. 1.2 et 1.3). Par ailleurs,
on peut encore noter qu'il doit être considéré également comme un
auxiliaire susceptible d'engager la responsabilité du canton en vertu
de l'art. 5 al. 1 LP (AMONN/WALTHER, Grundriss des Schuldbetreibungs-
und Konkursrechts, 7e éd., Berne 2003, § 5 n. 11).

    Dans ces circonstances, il y a lieu d'admettre que la commination
litigieuse avait trait à l'exécution de tâches administratives et
constituait ainsi un acte interne et non une décision au sens de l'art. 292
CP, qui ne peut donc trouver application, l'un des éléments constitutifs
de cette disposition n'étant pas réalisé.

    Il faut encore noter que l'exclusion de la possibilité de réprimer en
application de l'art. 292 CP un comportement comme celui du recourant n'a
pas pour conséquence de lui assurer l'impunité. En effet, ainsi que cela
a été relevé, un tel comportement dans le cadre de relations internes est
à sanctionner par la mise en oeuvre de règles disciplinaires. En matière
de poursuite pour dettes et faillite, celles-ci sont régies par l'art. 14
al. 2 LP. Le critère déterminant pour la soumission au droit disciplinaire
étant l'accomplissement de tâches de droit public attribuées par le droit
fédéral de l'exécution forcée à des autorités ou organes que les cantons
doivent instituer et organiser (GILLIÉRON, Commentaire de la loi fédérale
sur la poursuite pour dettes et la faillite, n. 24 ad art. 14 LP), cette
disposition est applicable au recourant, qui a agi en tant qu'auxiliaire
de l'office des poursuites et faillites.

    Dès lors que la condamnation du recourant en application de l'art. 292
CP procède d'une violation du droit fédéral, le pourvoi doit être admis.