Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 131 III 87



131 III 87

11. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile dans la cause A. contre Banque
X. ainsi que Cour de justice du canton de Genève (recours de droit public)

    5P.289/2004 du 1er novembre 2004

Regeste

    Art. 9 BV und Art. 80 Abs. 1 SchKG; definitive Rechtsöffnung, Eintritt
der Rechtskraft.

    Eintritt der Rechtskraft bei einem kantonal letztinstanzlichen
Entscheid, der vorfrageweise eine Sachfrage beurteilt und als Nebenfolge
die Verfahrenskosten festsetzt (E. 3).

Sachverhalt

    Statuant le 28 février 2002 dans le cadre d'une action en
responsabilité, le Tribunal de première instance de Genève a notamment
rejeté la demande de la Banque X. en paiement de 611'688 fr. dirigée
contre D. et A., pour le motif que leur responsabilité d'administrateurs
ne pouvait être engagée.

    Saisie d'un appel de la banque, la Cour de justice a annulé ce jugement
le 14 mars 2003. Elle a en bref considéré que D. et A. avaient violé leurs
devoirs d'administrateurs en omettant d'agir conformément à l'art. 725
al. 1 CO et commis ainsi une faute engageant leur responsabilité. Ne
disposant toutefois pas des éléments suffisants pour déterminer la quotité
du dommage encouru par l'appelante, elle a renvoyé la cause au tribunal
pour instruction. Dans son dispositif, elle a condamné solidairement les
prénommés aux dépens de première instance et d'appel, lesquels comprenaient
une indemnité globale de procédure de 40'000 fr. valant participation
aux honoraires d'avocat de la banque. Le bordereau d'état de frais taxé
par la Cour de justice pour cette procédure s'est élevé à 69'367 fr. 20.

    Cet arrêt n'a pas fait l'objet d'un recours au Tribunal fédéral.

    Le 6 janvier 2004, la Banque X. a fait notifier à A. un commandement
de payer, poursuite no x, la somme de 69'367 fr. 20. Le poursuivi y a
fait opposition.

    Par jugement du 24 février 2004, le Tribunal de première instance de
Genève a rejeté la requête de mainlevée définitive présentée par la banque.

    Sur appel de cette dernière, la 1re Section de la Cour de justice a,
le 17 juin 2004, annulé ce jugement et levé définitivement l'opposition.

    Le recours de droit public formé par A. contre cet arrêt a été admis
dans la mesure de sa recevabilité et l'arrêt attaqué annulé.

Auszug aus den Erwägungen:

                          Extrait des considérants:

Erwägung 3

    3.  Le recourant reproche à la Cour de justice d'avoir arbitrairement
considéré que l'arrêt du 14 mars 2003 le condamnant notamment aux dépens
de première instance et d'appel constitue un jugement exécutoire au sens
de l'art. 80 al. 1 LP et, partant, d'être tombée dans l'arbitraire en
prononçant la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement
de payer la somme de 69'367 fr. 20.

    3.1  Selon l'autorité cantonale, le Tribunal de première instance a
violé l'art. 80 al. 1 LP en refusant de prononcer la mainlevée définitive
de l'opposition. Se référant à la jurisprudence publiée aux ATF 122 I
39, la Cour de justice a jugé en bref que la question litigieuse implique
l'examen de la nature de la décision principale, soit de l'arrêt de la Cour
de justice du 14 mars 2003, qui tranche - en l'admettant - la question
du principe de la responsabilité des deux administrateurs. Qualifiant
celui-là de "décision partielle ou interlocutoire", en ce sens que le
juge a statué "sur une question de droit qui, pour la solution du litige,
n'a qu'un caractère préliminaire", elle a considéré qu'un tel prononcé
aurait pu faire l'objet d'un recours en réforme au Tribunal fédéral sans
attendre la décision finale, dès lors que la question de la responsabilité
des administrateurs aurait pu donner lieu à un procès séparé - par le
biais d'une action en constatation de droit - et revêtait un caractère
préjudiciel pour les conclusions qui subsistaient, à savoir l'action en
responsabilité. A défaut pour les anciens administrateurs d'avoir utilisé
cette voie de droit, l'arrêt du 14 mars 2003 était devenu définitif à
l'échéance du délai de recours, tant sur le principe de la responsabilité
que sur le prononcé accessoire sur les dépens.

    3.2  Selon l'art. 80 al. 1 LP, le créancier qui est au bénéfice
d'un jugement exécutoire peut requérir du juge la mainlevée définitive
de l'opposition. Est exécutoire au sens de cette disposition le prononcé
qui a non seulement force exécutoire, mais également force de chose jugée
(Rechtskraft), c'est-à-dire qui est devenu définitif, parce qu'il ne peut
plus être attaqué par une voie de recours ordinaire qui, par la loi, a un
effet suspensif (STAEHELIN, Basler Kommentar, n. 7 ad art. 80 LP). L'entrée
en force de chose jugée d'une décision cantonale de dernière instance -
dont fait partie le prononcé accessoire sur les dépens (qui pourrait être
modifié en cas de réforme sur le fond; cf. art. 159 al. 6 OJ; ATF 85 II
286 consid. 4 p. 291) - se détermine exclusivement au regard du droit
fédéral (ATF 126 III 261 consid. 3b p. 264 et les références citées).

    3.3  Le prononcé qui tranche une question préalable de fond -
en l'occurrence le principe de la responsabilité des administrateurs -
constitue, selon le Tribunal fédéral, un jugement préjudiciel - et non un
jugement partiel (sur cette notion: ATF 129 III 25 consid. 1.1 p. 27; 124
III 406 consid. 1a p. 409; 123 III 140 consid. 2 p. 141) -, que cela soit
dit expressément dans le dispositif ou que le renvoi de la cause figurant
dans ce dernier se borne, comme en l'espèce, à renvoyer aux motifs de
l'arrêt (ATF 127 III 433 consid. 1b/bb p. 436 et les références citées;
124 III 406 consid. 1a p. 409; sur ces notions, voir aussi ATF 116 II
80 consid. 2b p. 82 et la jurisprudence mentionnée).

    Selon l'art. 50 al. 1 OJ, le recours en réforme est ouvert
exceptionnellement contre une décision préjudicielle lorsqu'une décision
finale peut ainsi être provoquée immédiatement et que la durée et les
frais de la procédure probatoire seraient si considérables qu'il convient
de les éviter en autorisant le recours immédiat au Tribunal fédéral. Ce
régime particulier n'a toutefois qu'un caractère facultatif (art. 48 al. 3
OJ). Il ne saurait donc empêcher la partie qui le préfère - ou qui estime
que les conditions du recours immédiat ne sont pas réalisées - d'attendre
le prononcé de la décision finale avant de recourir au Tribunal fédéral
(ATF 127 III 351 consid. 1a p. 352-353). S'il est fait usage de cette
liberté, la décision préjudicielle entre en force de chose jugée avec le
jugement final. D'ailleurs, ce n'est que dans l'hypothèse où le Tribunal
fédéral a statué au fond sur la question préjudicielle, en application
de l'art. 50 OJ, que celle-ci jouit de la force jugée selon l'art. 38 OJ
(ATF 122 III 254 consid. 2a p. 255; 118 II 91 consid. 1b p. 92).

    Cela étant, l'autorité cantonale ne pouvait dès lors considérer -
sans arbitraire (sur cette notion: ATF 128 I 177 consid. 2 p. 182)
- que le recourant devait former un recours en réforme et que, faute
de l'avoir interjeté, l'arrêt du 14 mars 2003 était devenu définitif à
l'échéance du délai de recours au Tribunal fédéral, tant sur le principe
de la responsabilité que sur le prononcé accessoire sur les dépens, et
valait ainsi titre de mainlevée définitive au sens de l'art. 80 al. 1 LP.