Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 131 III 511



131 III 511

66. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile dans la cause X. contre neuf
banques et consorts (recours en réforme)

    4C.380/2004 du 31 mai 2005

Regeste

    Art. 116, 126 und 196 IPRG; anwendbares Recht.

    Bestimmung des anwendbaren Rechts im Fall, dass Garantien von einem
Vertreter abgegeben werden, dessen Vertretungsbefugnis vom Vertretenen
bestritten wird (E. 2).

    Art. 33 Abs. 3 OR; Art. 3 ZGB; Missbrauch der Vertretungsmacht;
guter Glaube Dritter.

    Die Handlungen eines Vertreters, der auf der Grundlage der
Bevollmächtigung handelt, können für den Vertretenen auch bei Vorliegen
eines Vollmachtsmissbrauchs verbindlich sein. Von Dritten zu verlangende
Aufmerksamkeit in einer solchen Situation (E. 3).

    Bankgarantien; Unterscheidung zwischen selbständiger und akzessorischer
Garantie; Rechtsmissbrauch.

    Von einem Gemeinwesen abgegebene Zusicherungen, die im beurteilten Fall
Bankgarantien entsprechen. Unterschiede zwischen einer selbständigen und
einer akzessorischen Garantie und Kriterien, welche diese Unterscheidung
ermöglichen. Einzig ein Rechtsmissbrauch des Begünstigten kann dazu führen,
dass die selbständige Garantie nicht beansprucht werden kann (E. 4).

    Art. 44 Abs. 1 OR; Ermässigung der Ersatzpflicht.

    Art. 44 Abs. 1 OR ist nicht anwendbar, wenn der Garant in Erfüllung
einer selbständigen Garantie bezahlt (E. 5).

Sachverhalt

    De 1979 à 1989, A. a été Consul de l'État X. à Genève. Son épouse
était la nièce du Président de X. au moment des faits.

    Par décret du 27 mai 1983, le Président de X. a conféré à A. le rang
d'Ambassadeur en mission spéciale.

    Selon délégation particulière du 22 mai 1986, le Ministre des
finances de X. a indiqué qu'en sa qualité d'Ambassadeur en mission
spéciale, A. avait été chargé d'effectuer toutes démarches pouvant
contribuer à l'accélération du processus de développement économique du
pays et qu'ainsi, il était le représentant autorisé du gouvernement de
X. disposant du pouvoir de signer des documents liés à l'exécution des
programmes et des projets de développement du pays d'intérêt national.

    D'après une résolution de 10 octobre 1986, le Ministre des finances,
confirmant la délégation particulière du 22 mai 1986, a chargé A. de signer
pour le Ministre précité ou pour le gouvernement de X. les documents requis
par le financement des opérations destinées au développement social et
économique du pays.

    En 1986 C. SA, une société de droit X. a conclu avec une société
italienne un contrat portant sur la construction, dans l'État X. d'une
usine de conserves de fruits pour un prix de 25 millions US$, qui a été
augmenté par la suite. En 1987, E. SA, une autre société de droit X.,
a aussi conclu un contrat avec une entreprise italienne en vue de la
construction d'une usine de produits pharmaceutiques pour un prix initial
de 50 millions DM, qui a lui aussi été augmenté.

    Il était prévu que C. SA et E. SA paieraient le prix par versements
effectués au moyen d'un emprunt bancaire dont le financement serait
organisé par la banque N., une société anonyme de droit suisse. Hormis
la garantie octroyée par Y., un organisme étatique italien assurant les
risques à l'exportation, les contrats stipulaient que X. garantirait tous
les paiements dus par C. SA et par E. SA.

    Selon deux contrats du 31 mai 1986 et du 23 mars 1987 dénommés "Notes
Financing Agreements" (ci-après: NFA), soumis au droit suisse, la banque N.
s'est engagée respectivement envers C. SA et E. SA à organiser un emprunt
par le biais d'effets de change, qui s'élevait à 40 millions CHF pour
la première et à 42 millions DM pour la seconde société. Par avenants
du 4 décembre 1986 et du 12 février 1988, des crédits supplémentaires
se montant à 6,7 millions CHF et à 12,8 millions DM ont été octroyés,
aux mêmes conditions à C. SA et à E. SA.

    Les 5 juin 1986 et 1er septembre 1987, A. a signé deux documents
intitulés "Garantie de X." selon lesquels il agissait en qualité de
représentant de X., dûment habilité par décret présidentiel et délégation
particulière du Ministre des finances en vue de garantir, au nom de l'État
X., les crédits consentis à C. SA et à E. SA par un groupe de banques
détenant les billets à ordre ou bénéficiaires de ceux-ci et ayant pour
agent la banque N. Ces documents prévoyaient que la garantie accordée était
régie par le droit suisse, que X. acceptait irrévocablement la compétence
des tribunaux suisses et renonçait à son immunité de juridiction. A teneur
de ces documents, A. a notamment déclaré :

    "donner aux Banques et aux Détenteurs de Billets à Ordre la Garantie

      solidaire, inconditionnelle et irrévocable de X. concernant

      l'ensemble des engagements pris par C. SA/E. SA dans la convention

      "NFA" en principal, intérêts et tous accessoires.  (...)

      En conséquence du présent engagement, le Garant s'oblige à verser

      aux Banques ou Détenteurs de Billets à Ordre, à première demande

      exprimée par l'Agent, qu'il s'agisse d'une échéance normale ou

      anticipée, tous montants dus par C. SA/E. SA et impayés par lui."

    La garantie du 1er septembre 1987 contenait en plus la clause suivante:

    "Cette garantie doit être considérée et interprétée comme un (sic)

      garantie bancaire et le Garant ne peut soulever aucune exception

      ou objection de quelque nature ou à quelque titre que cela soit."

    Ces documents ont été complétés par des avenants, signés par A. et
destinés à augmenter les montants garantis. Il était précisé que le
signataire agissait en qualité du représentant de X. en vertu du décret
présidentiel du 27 mai 1983 et de la résolution du Ministre des finances
du 10 octobre 1986.

    Il a été retenu que A. a remis ces garanties à la banque N., qui a
également reçu une communication du décret présidentiel du 27 mai 1983,
de la délégation particulière du Ministre des finances du 22 mai 1986 et
de sa confirmation du 10 octobre 1986.

    Le 14 juin 1988, C. SA a émis un billet à ordre en vue du paiement
de diverses livraisons destinées à l'usine de conserves et un autre pour
les intérêts. Ces documents portaient un tampon de l'Ambassade de X. en
Suisse et contenaient un aval signé par A., indiquant que X. garantissait
le paiement à l'échéance.

    La banque N. a organisé le financement des crédits par le biais de
plusieurs banques, qui ont versé les montants prévus. En revanche E. SA et
C. SA n'ont pas procédé au remboursement des prêts aux échéances prévues
et X. a contesté la validité de son engagement.

    Le 30 décembre 1987, A. a été condamné, par la Cour suprême de X.,
à sept ans de prison pour usage de faux et utilisation abusive de ses
fonctions officielles. Il ressort de cette procédure que A. était
le président de E. SA et de C. SA et possédait, avec son épouse,
la quasi-totalité des actions de ces entreprises. En élaborant des
documents falsifiés, A. cherchait à bénéficier des crédits accordés à
des entreprises qu'il contrôlait grâce à des garanties de X. établies
de manière frauduleuse pour tromper les banques dispensatrices de
crédit. Selon la Cour suprême, X. n'avait valablement accordé aucune
garantie pour les opérations financières entre E. SA et C. SA d'une
part et les banques, d'autre part. Le 23 avril 1997, X. a déposé une
plainte pénale auprès du Procureur général du canton de Genève. A. a été
inculpé d'escroquerie et de faux dans les titres pour avoir fait croire
au représentant des banques finançant les crédits accordés à E. SA et
à C. SA qu'il pouvait valablement engager X. comme garant des prêts. La
procédure pénale a été classée le 22 mai 2001.

    Les banques prêteuses ont déposé une demande auprès des autorités
judiciaires genevoises. Statuant sur incidents, la Cour de céans a, dans un
arrêt du 20 août 1998 publié partiellement aux ATF 124 III 382, considéré
notamment que X. ne pouvait opposer son immunité de juridiction et que la
prorogation de for signée par le Consul dans les actes de garantie liait X.

    Le Tribunal de première instance a débouté les banques de l'intégralité
de leurs conclusions, alors que la Cour de justice, admettant l'appel
des banques, a condamné X. à leur verser les sommes correspondant aux
montants remis en prêt.

    Contre l'arrêt de la Cour de justice, X. interjette un recours en
réforme au Tribunal fédéral.

Auszug aus den Erwägungen:

                          Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.  La cause revêt à l'évidence des aspects internationaux, de sorte
que le Tribunal fédéral, saisi d'un recours en réforme, doit vérifier
d'office et avec un plein pouvoir d'examen le droit applicable (ATF 131
III 153 consid. 3).

    2.1  Cette question suppose tout d'abord de qualifier les actes
juridiques litigieux à l'origine des prétentions invoquées par les
demanderesses, à savoir les garanties émises par le Consul au nom de la
défenderesse entre juin 1986 et mars 1988, avant d'examiner la validité
de la clause les soumettant au droit suisse. Cette qualification doit
se faire en fonction du droit suisse, en tant que lex fori (ATF 129 III
738 consid. 3.4; 128 III 295 consid. 2a p. 398). Les garanties émises en
l'espèce correspondent à des garanties bancaires, comme l'indique du reste
expressément la garantie du 1er septembre 1987. Selon le droit suisse,
les garanties bancaires sont considérées comme des contrats innommés
(TERCIER, Les contrats spéciaux, 3e éd., Zurich 2003, n. 6309; THÉVENOZ,
Commentaire romand, n. 36 ad art. 111 CO). La nature contractuelle
de ces actes rend donc en principe possible une élection de droit
(AMSTUTZ/VOGT/WANG, Commentaire bâlois, n. 5 ad art. 116 LDIP).

    Comme les garanties émises au nom de la défenderesse sont antérieures à
l'entrée en vigueur de la LDIP, le 1er janvier 1989, encore faudrait-il se
demander si, en vertu de l'art. 196 al. 2 LDIP, la validité de l'élection
de droit doit être envisagée sous l'angle de l'ancien droit (LRDC;
RO 1890-92 p. 337) ou de la LDIP. La question n'a cependant pas à être
tranchée, faute d'intérêt pratique, dès lors que le droit international
privé suisse n'a pas été modifié quant à la possibilité de conclure une
élection de droit et aux effets de celle-ci. Ainsi, une élection de droit
valablement conclue sous l'ancien droit le demeure en regard de la LDIP
(JAMETTI GREINER/GEISER, Commentaire bâlois, n. 43 ad art. 196 LDIP).

    En l'espèce, il n'est pas douteux que le garant a proposé expressément
de soumettre les garanties litigieuses au droit suisse. Reste à déterminer
si cette clause a été acceptée. A nouveau, il n'y a pas lieu de déterminer
si le silence des demanderesses doit être envisagé sous l'ancien ou
le nouveau droit, dès lors que, sous l'empire de la LRDC, le droit
suisse admettait déjà qu'une manifestation de volonté puisse être tacite
(cf. art. 1 al. 2 CO). Il se trouve que les demanderesses ont reçu ces
garanties sans protester et les ont fait valoir dès que les conditions en
étaient remplies, acceptant ainsi tacitement ces engagements. L'élection
de droit a donc été valablement conclue, de sorte que les garanties
litigieuses sont régies par le droit suisse (cf. art. 116 al. 1 LDIP;
pour l'ancien droit, ATF 79 II 295 consid. 1).

    2.2  Le litige concerne aussi le point de savoir si la défenderesse est
liée, à l'égard des demanderesses, par les actes de son représentant. Selon
les règles de qualification du for, soit du droit suisse, cette question
relève des effets externes de la représentation (CHAPPUIS, Commentaire
romand, n. 3 ad art. 32 CO). Il découle de l'art. 126 al. 2 LDIP que
les conditions auxquelles les actes du représentant lient le représenté
sont régies par le droit de l'État de l'établissement du représentant ou,
à défaut, par le droit de l'État dans lequel le représentant déploie son
activité prépondérante dans le cas d'espèce.

    Il n'est pas certain qu'un consulat à Genève puisse être assimilé à
un établissement au sens de l'art. 126 al. 2 LDIP (cf. sur cette notion,
WATTER, Commentaire bâlois, n. 36 ad art. 126 LDIP). Peu importe puisqu'il
ressort des faits que le Consul a exercé son activité prépondérante de
représentant en Suisse, ce qui entraîne l'application du droit suisse en
matière de représentation.

    La solution ne serait du reste pas différente si l'on appliquait
l'ancien droit en admettant que le moment déterminant est celui où
les pouvoirs ont été exercés et que ceux-ci ont fini de déployer leurs
effets au 1er janvier 1989 (cf. art. 196 al. 1 LDIP). En effet, sous
l'empire de la LRDC, la jurisprudence admettait que les effets externes
de la représentation étaient régis par la loi du pays dans lequel le
représentant a exercé son pouvoir (ATF 100 II 200 consid. 4 p. 207).

    Par conséquent, c'est à juste titre que la cour cantonale a appliqué
le droit suisse à la présente cause.

Erwägung 3

    3.  En premier lieu, la défenderesse invoque une violation des
dispositions de droit fédéral en matière de représentation prévues aux art.
32 ss CO. Elle reproche en substance à la cour cantonale d'avoir retenu
que la banque N. pouvait de bonne foi considérer que A. était à même de
l'engager, alors que les éléments du dossier, révélés notamment par la
procédure pénale genevoise, établiraient l'inverse.

    3.1  A. a signé les garanties litigieuses en indiquant agir pour le
compte de la défenderesse. Lorsque le représentant agit au nom d'autrui,
les droits et obligations dérivant de l'acte accompli passent directement
au représenté dans trois cas de figure: premièrement si le représentant
disposait des pouvoirs suffisants à cet effet en vertu du droit public,
de la loi ou de la volonté du représenté, ce que les éléments contenus dans
l'arrêt attaqué ne permettent pas d'affirmer; deuxièmement si le représenté
ratifie l'acte accompli en son nom (art. 38 CO), ce que n'a manifestement
pas fait la défenderesse. Il reste donc le troisième cas de figure qui
tend à protéger le tiers qui se fie de bonne foi aux pouvoirs qui lui
sont communiqués (art. 33 al. 3, 34 al. 3 et 37 CO; cf. sur ce point,
CHAPPUIS, op. cit., n. 4 et 10 ad art. 32 CO) et qui vise l'hypothèse où
le représentant, excédant les limites que lui avait fixées le représenté,
abuse des pouvoirs qui lui sont accordés (cf. ATF 119 II 23 consid. 3b).

    3.2  La défenderesse se prévaut précisément de l'existence d'un tel
abus, reprochant à la cour cantonale d'avoir admis qu'elle était liée,
alors que le Consul l'aurait engagée à garantir les opérations découlant
de la construction des deux usines en agissant dans son propre intérêt
et de façon délictueuse.

    La question de savoir si le représenté peut être considéré comme
lié envers les tiers par les actes abusivement accomplis en son nom
par le représentant doit être tranchée en regard de l'art. 33 al. 3 CO
(CHAPPUIS, op. cit., n. 31 ad art. 33 CO), disposition qui règle le cas
de la procuration externe apparente (ATF 120 II 197 consid. 2a). Selon cet
article, si les pouvoirs ont été portés par le représenté à la connaissance
d'un tiers, leur étendue est déterminée envers ce dernier par les termes
de la communication qui lui a été faite. Le tiers est protégé, dans la
mesure où le représenté se trouve engagé envers lui, bien que les pouvoirs
ne couvraient pas l'acte accompli (cf. ATF 120 II 197 consid. 2). Cette
protection est cependant subordonnée à deux conditions, à savoir une
communication des pouvoirs par le représenté au tiers et la bonne foi de
ce dernier (CHAPPUIS, op. cit., n. 19 ad art. 33 CO).

    3.2.1  Il est admis que la communication des pouvoirs par le représenté
peut s'exprimer au moyen d'une procuration fournie par le représentant
au tiers (ATF 77 II 138 consid. 1 p. 142; CHAPPUIS, op. cit., n. 23 ad
art. 33 CO; GAUCH/SCHLUEP/SCHMID/REY, Schweizerisches Obligationenrecht,
AT I, 8e éd., Zurich 2003, n. 1394). La portée de la communication doit
être examinée avant tout selon le principe de la confiance (ATF 99 II 39
consid. 1 p. 42; WATTER, Commentaire bâlois, n. 31 ad art. 33 CO). L'idée
est que celui qui laisse créer l'apparence d'un pouvoir de représentation
se trouve lié par les actes accomplis en son nom (arrêt du Tribunal fédéral
4C.276/1999 du 21 octobre 1999, publié in SJ 2000 I p. 198, consid. 3c;
ATF 124 III 418 consid. 1c p. 421; 99 II 39 consid. 1 et 3).

    En l'occurrence, la défenderesse ne conteste pas, à juste titre,
qu'une telle communication a bien eu lieu. Les pouvoirs attribués à
A. résultaient de plusieurs actes, à savoir d'un décret du Président
de X. du 27 mai 1983 lui conférant le rang d'Ambassadeur en mission
spéciale, d'une délégation particulière du Ministre des finances du 22
mai 1986 le chargeant, en sa qualité d'Ambassadeur en mission spéciale,
d'effectuer toutes démarches pouvant contribuer à l'accélération du
processus de développement économique du pays et le désignant comme
représentant autorisé du gouvernement de X. disposant du pouvoir de
signer des documents liés à l'exécution des programmes et des projets de
développement du pays d'intérêt national. Cette délégation particulière
a été confirmée, par une résolution du 10 octobre 1986 du Ministre des
finances chargeant le Consul de signer, pour le Ministre ou le gouvernement
de X., les documents requis par le financement des opérations destinées au
développement social et économique du pays. Ces documents du gouvernement
X., destinés à démontrer vis-à-vis des tiers les pouvoirs conférés à
A. et dont l'arrêt attaqué ne retient pas qu'ils auraient été faux, ce
que n'allègue d'ailleurs pas la défenderesse, ont été remis à la banque
N., l'agent des demanderesses. Force est donc de constater qu'il y a eu
communication des pouvoirs de représentation accordés par la défenderesse
à son Consul de Genève, dont il a été révélé par la suite que ceux-ci
n'étaient pas propres à couvrir les garanties litigieuses conclues
ultérieurement au nom de la défenderesse.

    3.2.2  Il reste à examiner si la bonne foi de l'agent des sociétés
demanderesses peut être retenue, ce qui est contesté dans le recours. Sur
le plan juridique, seule la bonne foi du tiers permet de pallier le défaut
du pouvoir de représentation (ATF 120 II 197 consid. 2b/cc p. 202; 99 II
39 consid. 1 p. 42). La bonne foi est présumée, conformément à l'art. 3
al. 1 CC, ce qui signifie que ce n'est pas la bonne, mais la mauvaise foi
qui doit être prouvée. Ainsi, la partie qui a la charge de cette preuve
peut soit détruire la présomption de bonne foi en démontrant que la partie
adverse connaissait le vice juridique et, par conséquent, qu'elle était de
mauvaise foi, soit admettre cette présomption, mais établir, en conformité
de l'art. 3 al. 2 CC, que l'autre partie ne peut pas se prévaloir de sa
bonne foi, parce que celle-ci n'est pas compatible avec l'attention que les
circonstances permettaient d'exiger d'elle (cf. ATF 119 II 23 consid. 3a).
Il appartient au juge d'apprécier, dans chaque cas particulier, en tenant
compte de l'ensemble des circonstances, la mesure de l'attention qui peut
être exigée du tiers (ATF 119 II 23 consid. 3c/aa p. 27).

    Selon la jurisprudence rendue en matière commerciale, en cas de simple
dépassement des pouvoirs de représentation, seuls des doutes sérieux sur
les réels pouvoirs du représentant peuvent conduire à nier la bonne foi du
tiers contractant; en cas d'abus, des doutes d'une intensité relativement
faible suffisent. Ainsi, lorsque le représentant abuse de ses pouvoirs,
l'art. 3 al. 2 CC doit s'appliquer sans restriction. Les exigences
quant à l'attention requise du tiers s'en trouvent ainsi augmentées;
une négligence même légère peut déjà faire perdre le droit d'invoquer
la bonne foi, en particulier lorsque le tiers conclut l'affaire en ne
prêtant pas attention à des indices objectifs d'abus, laissant entrevoir
que le représentant agit contre les intérêts du représenté (ATF 119 II
23 consid. 3c/aa p. 27 et les références citées). Il n'y a pas lieu de se
demander si cette approche stricte de la bonne foi du tiers dans les cas
d'abus du pouvoir de représentation en matière commerciale, critiquée par
une partie de la doctrine, parce qu'elle impose au tiers une attention plus
élevée en raison de faits qui lui échappent complètement (cf. CHAPPUIS,
Abus du pouvoir de représentation: le fondé de procuration devenu organe,
PJA 1997 p. 689 ss, 696 et les références citées; KOLLER, Schweizerisches
Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, vol. I, Berne 1996, n. 1400), doit
être maintenue, dès lors que, de toute manière, comme il le sera démontré
ci-après, les faits tels que constatés ne permettent pas de retenir que
la défenderesse ait démontré que la banque N. et, par voie de conséquence,
les demanderesses, auraient agi de manière négligente.

    Pour apprécier l'attention requise de l'agent des demanderesses,
il convient en premier lieu de se référer aux considérations émises par
la Cour de céans lorsqu'elle s'est prononcée, le 20 août 1998, sur la
compétence ratione loci des autorités judiciaires suisses (cf. ATF 124
III 382). Dans ce contexte, elle a examiné les pouvoirs de représentation
de A., afin de déterminer si celui-ci avait pu valablement engager la
défenderesse en signant les contrats de garantie contenant une clause de
prorogation de for en faveur des tribunaux suisses. Rappelant la portée
et la signification des relations consulaires du point de vue du droit
international public (cf. ATF 124 III 382 consid. 4c), le Tribunal fédéral
a considéré que les opérateurs économiques qui avaient été en relation
d'affaires avec A. pouvaient légitimement partir de l'idée qu'en sa qualité
de Consul de X. à Genève, celui-ci était dûment habilité à traiter avec
eux, de sorte que la défenderesse devait assumer les pouvoirs, à tout le
moins apparents, créés en faveur de celui dont il affirmait à présent
qu'il était un falsus procurator (ATF 124 III 382 consid. 4c/cc p. 391
s.). Lorsqu'elle a statué sur le fond, la cour cantonale a réexaminé la
question et a confirmé cette appréciation, soulignant qu'il n'existait
aucun fait dont la connaissance aurait été acquise après l'arrêt du
Tribunal fédéral du 20 août 1998 qui démontrerait que les opérateurs
économiques en contact avec A. auraient légitimement dû éprouver des
doutes quant à ses pouvoirs. Au contraire, le décret présidentiel et les
résolutions du Ministre des finances portant sur les pouvoirs du Consul de
X. à Genève avaient été remis au directeur de la banque N., qui ne pouvait
être que conforté sur la capacité de A. d'engager la défenderesse. Cette
dernière n'avait en outre nullement allégué que les demanderesses ou la
banque N. auraient été informées de ce que les engagements signés par le
Consul pourraient ne pas respecter la législation de X. Enfin, il ne faut
pas oublier qu'il est courant qu'un État offre des garanties de paiement
dans le cadre de contrats internationaux conclus en vue de promouvoir
le développement économique du pays (cf. LEBOULANGER, Les contrats entre
États et entreprises étrangères, Paris 1985, p. 36 s. et 115 s). Compte
tenu de l'ensemble de ces circonstances, on ne voit pas que la banque N.,
qui agissait pour le compte des demanderesses, ait fait preuve de légèreté
et soit passée à côté d'indices objectifs d'abus en considérant, sur la
base des documents officiels qui lui avaient été communiqués, que le Consul
pouvait valablement engager X. et conclure les garanties litigieuses.

    3.2.3  Il convient encore de prendre position sur l'argumentation de
la défenderesse, selon laquelle la cour cantonale aurait admis à tort la
bonne foi de la banque N. et aurait méconnu le fait que le Consul avait
abusé des pouvoirs reçus de X., dans la mesure où il avait agi dans son
propre intérêt d'une manière délictueuse.

    S'agissant de la mauvaise foi proprement dite, il ne ressort pas des
constatations cantonales - qui lient le Tribunal fédéral (art. 63 al. 2 OJ)
- que la banque N. connaissait l'infidélité du représentant ou les liens
de celui-ci avec les sociétés C. SA et E. SA, ni même qu'elle ait reçu la
moindre information dont elle devait nécessairement inférer que le Consul
poursuivait des intérêts personnels ou s'écartait des instructions reçues.
Dès lors, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en s'en tenant
à la présomption de l'art. 3 al. 1 CC et en constatant que la mauvaise
foi n'était pas établie.

    Il faut ensuite se demander si la banque N. est déchue du droit
d'invoquer sa bonne foi, parce que celle-ci est incompatible avec
l'attention que les circonstances permettaient d'exiger d'elle (art. 3
al. 2 CC; HONSELL, Commentaire bâlois, n. 33 s. ad art. 3 CC). Pour dire
si la banque N. a manqué à l'attention commandée par les circonstances,
on peut prendre en considération, même si elle n'est pas directement
applicable, la convention de diligence des banques suisses, dans la
mesure où il peut être admis que ce texte reflète les règles usuelles
dans la branche. Cette convention, qui relève du droit privé et ne lie
que les établissements bancaires qui y ont adhéré (cf. ATF 109 lb 146
consid. 3a p.153), a été conclue initialement en 1977, avant d'être
reconduite cinq fois depuis lors, la dernière version étant entrée en
vigueur le 1er juillet 2003 (NOBEL, Schweizerisches Finanzmarktrecht,
2e éd., Berne 2004, n. 6 p. 403 s.; LOMBARDINI, Droit bancaire suisse,
Zurich 2002, p. 658 n. 15). Dès le début, la convention a prévu des règles
sur l'identification des clients (NOBEL, op. cit., n. 6 et 8 p. 404;
cf. aussi EMCH/RENZ, Das Schweizerische Bankgeschäft, 3e éd., Thoune
1984, p. 123 s.). Indépendamment de la convention, il est d'usage qu'une
banque, avant d'octroyer un crédit à un client, s'efforce d'en vérifier
la solvabilité; s'agissant d'une personne morale à l'étranger, on peut
aussi s'attendre à ce que la banque cherche, au moins dans une certaine
mesure, à en déterminer les ayants droit économiques (cf. LOMBARDINI,
op. cit., p. 527 et 660 ss). On peut donc considérer que l'attention
commandée par les circonstances implique d'identifier avec un certain
soin le partenaire économique.

    Il n'est toutefois pas nécessaire d'approfondir cette question. En
effet, il ne ressort pas de l'arrêt cantonal que la banque N. (ou les
banques demanderesses) ait omis une vérification usuelle dans la branche
et encore moins que cette vérification lui aurait permis de constater que
les sociétés C. SA et E. SA, comme le soutient la défenderesse, étaient
en définitive sous la maîtrise économique du Consul. Ainsi, l'argument
selon lequel la banque N. (ou les banques demanderesses) aurait manqué
à l'attention commandée par les circonstances (au sens de l'art. 3 al. 2
CC) ne trouve aucune assise dans les faits constatés souverainement par
la cour cantonale.

    Au demeurant, c'est au représenté (et non au cocontractant) qu'il
incombe en première ligne, dans son propre intérêt, de bien choisir et
surveiller son représentant, en s'interrogeant, le cas échéant, sur ses
liens et intérêts économiques.

    Par conséquent, rien dans les faits ne permet d'admettre que la
banque N. et, par voie de conséquence, les demanderesses auraient été
de mauvaise foi ou que la défenderesse serait parvenue à établir que la
banque N. ou les demanderesses auraient agi de manière négligente.

    En retenant que la défenderesse était liée par les garanties du 5 juin
1986, du 1er septembre 1987 et par leurs avenants, établis en son nom
par le Consul, ainsi que par l'aval apposé sur les billets à ordre émis
le 14 juin 1988, la cour cantonale n'a donc pas violé le droit fédéral.

    3.3  Il convient de préciser que la défenderesse tend à démontrer la
mauvaise foi de la banque N. en se fondant sur des éléments ne figurant
pas dans l'arrêt entrepris, de sorte que ses critiques tombent à faux. En
outre, dans la mesure où elle reproche à la cour cantonale de s'être
écartée des faits ressortant en particulier de la procédure pénale,
elle présente une argumentation relevant de l'appréciation des preuves,
à invoquer impérativement dans un recours de droit public (ATF 131 III
153 consid. 6.5; 130 III 321 consid. 5).

Erwägung 4

    4.  La défenderesse reproche également aux juges d'avoir mal appliqué
le droit fédéral en assimilant les garanties signées par A. à des garanties
bancaires indépendantes, payables à première demande, qui devaient être
honorées sitôt l'appel du bénéficiaire. Elle soutient en particulier qu'en
sa qualité d'État, elle ne pouvait conclure d'engagements indépendants
correspondant à des garanties bancaires, ce d'autant qu'il n'existait aucun
rapport entre elle-même et le donneur d'ordre, à savoir les sociétés C. SA
et E. SA. De plus, les engagements émis ne pouvaient déployer aucun effet,
car ils dépendaient des obligations de base, soit des contrats conclus
par C. SA et E. SA. Or, ces derniers étaient entachés de nullité, car
ils avaient été signés par des personnes non habilitées à engager ces
deux sociétés.

    4.1  Les garanties ne sont pas l'apanage des banques. Le garant peut
être toute personne, physique ou morale, qui se porte garante (cf. TEVINI
DU PASQUIER, Commentaire romand, n. 35 ad art. 111 CO). Contrairement
à ce qu'affirme la défenderesse, des collectivités publiques, comme la
Confédération ou un canton, peuvent parfaitement conclure en leur nom des
garanties indépendantes (cf. GUGGENHEIM, La garantie bancaire principale
et accessoire [ci-après: La garantie bancaire], in Liber Amicorum A. F.
Schnitzer, Genève 1979, p. 165 ss, 172; LEBOULANGER, op. cit., p. 116). Le
fait que la défenderesse soit un État n'est donc pas un obstacle à la
qualification retenue par la cour cantonale.

    Quant aux relations avec les donneurs d'ordre, il est vrai qu'en
matière de garanties bancaires, il existe en général un contrat de
mandat entre ceux-ci et la banque (arrêt du Tribunal fédéral 4C.81/
1996 du 7 novembre 1996, publié in SJ 1997 p. 245, consid. 4b; TEVINI DU
PASQUIER, op. cit., n. 35 ad art. 111 CO). Toutefois, le litige n'oppose
en l'espèce pas les deux sociétés donneuses d'ordre à la défenderesse,
mais concerne les engagements émis par cette dernière à l'égard des
bénéficiaires. Selon le principe de l'autonomie de la garantie, lorsqu'il
s'agit de définir les obligations du garant vis-à-vis du bénéficiaire,
peu importe le contenu des relations entre le donneur d'ordre et le garant
(BÜSSER, Einreden und Einwendungen der Bank als Garantin gegenüber dem
Zahlungsanspruch des Begünstigten, thèse Fribourg 1997, p. 360). Même
si le garant agit à l'initiative du donneur d'ordre, ce dernier n'est
pas partie au rapport entre le garant et le bénéficiaire, de sorte que
c'est avant tout le contenu de l'engagement pris par le garant qui est
déterminant pour établir l'étendue de ses obligations (cf. LOMBARDINI, op.
cit., p. 297 n. 32). Par conséquent, il n'y a pas lieu de se pencher
plus avant sur les relations existant entre la défenderesse et C. SA,
ainsi que E. SA s'agissant de qualifier les garanties émises par la
défenderesse vis-à-vis des demanderesses en qualité de bénéficiaires.

    4.2  Les garanties bancaires peuvent se définir, de manière générale
comme la promesse unilatérale de la banque d'assurer la disponibilité d'une
certaine somme d'argent pour le cas où le bénéficiaire en ferait la demande
selon sa convention avec le donneur d'ordre (TEVINI DU PASQUIER, op. cit.,
n. 36 ad art. 111 CO). Il faut distinguer principalement entre deux types
de garanties, la garantie indépendante ou principale et la garantie dite
accessoire (GUGGENHEIM, Les contrats de la pratique bancaire [ci-après:
Les contrats], 4e éd., Genève 2000, p. 340; THÉVENOZ, Les garanties
indépendantes devant les tribunaux suisses, in Journée 1994 de droit
bancaire et financier, Berne 1994, p. 167 ss, 169). Dans le premier
cas, la banque assure la prestation promise au créancier comme telle,
indépendamment du contenu et de la validité de l'obligation découlant du
rapport de base entre le bénéficiaire et le donneur d'ordre (cf. arrêt
du Tribunal fédéral 4C.19/1988 du 25 juillet 1988, publié in SJ 1988
p. 550, consid. 1a), alors que, lorsque la garantie est accessoire,
la banque lie son obligation de paiement éventuelle à l'inexécution du
contrat de base entre le donneur d'ordre et le bénéficiaire (GUGGENHEIM,
Les contrats, p. 332; ZOBL, Die Bankgarantie im schweizerischen Recht,
in Personalsicherheiten, Berne 1997, p. 23 ss, 33). En présence d'une
garantie indépendante, le garant ne pourra soulever les exceptions ou
objections pouvant résulter de la relation juridique entre le bénéficiaire
de la garantie et son débiteur (contrat de base). Le bénéficiaire pourra
rechercher le garant dès que les conditions posées par le texte de la
garantie seront remplies (GUGGENHEIM, Les contrats, p. 341; ZOBL, op. cit.,
p. 26) et il pourra obtenir la prestation également dans l'hypothèse où la
dette du débiteur principal n'a pas été valablement contractée ou s'est
éteinte par la suite (DOHM, Les garanties bancaires dans le commerce
international, Berne 1986, p. 57 n. 71). Ainsi, le garant sera tenu de
payer le bénéficiaire, même s'il a été trompé par le donneur d'ordre
(LOMBARDINI, op. cit., p. 303 n. 49). Quant à la garantie dépendante ou
accessoire, ses effets sont assimilés à ceux du cautionnement (art. 492
ss CO), de sorte que l'obligation de paiement du garant dépendra
de la relation contractuelle de base entre le donneur d'ordre et le
bénéficiaire. Le garant pourra donc faire valoir les exceptions tirées
du rapport de base (GUGGENHEIM, La garantie bancaire, p. 167 et 171) et
si la dette principale est nulle, la garantie ne déploiera pas d'effets
(cf. DOHM, op. cit., p. 58 n. 72).

    4.3  La distinction entre garantie principale et accessoire est
délicate (GUGGENHEIM, Les contrats, p. 347; DOHM, op. cit., p. 58
n. 74). Si la réelle et commune intention des parties ne peut être
établie, il convient d'interpréter l'engagement du garant conformément
au principe de la confiance (art. 18 al. 1 CO), en se fondant en premier
lieu sur le texte de la garantie (cf. ATF 113 II 434 consid. 2c p. 437
s.; 111 II 284 consid. 2). La jurisprudence a mis en évidence certains
critères permettant de différencier ces deux catégories de garantie,
précisant qu'il faut toujours apprécier l'engagement dans son ensemble
(ATF 117 III 76 consid. 6b p. 78 s.). Ainsi, le fait que la garantie ait
été émise par une banque constitue un indice en faveur d'un engagement
autonome (ATF 113 II 434 consid. 2c p. 438); il en va de même lorsque
l'engagement se rapporte à un contrat international (arrêt 4C.19/1998
précité, publié in SJ 1988 p. 550, consid. 1b in fine); la référence
au contrat de base ne permet pas à elle seule de conclure à l'existence
d'un engagement accessoire (DOHM, op. cit., p. 60 n. 77), car la garantie
indépendante n'est jamais totalement séparée du contrat de base, puisque,
même dans ce cas, le bénéficiaire doit au moins alléguer l'inexécution
(GUGGENHEIM, Les contrats, p. 347); quant à l'expression selon laquelle le
garant s'est engagé "irrévocablement", elle n'est pas non plus à elle seule
déterminante, dès lors qu'il s'agit d'une formule usuelle de la pratique
bancaire et qu'elle ne saurait toujours être comprise dans le sens d'une
renonciation à opposer les exceptions ou objections découlant du rapport
de base (ATF 117 III 76 consid. 6b p. 78); le fait que le garant se soit
engagé à payer "à première demande" (cf. sur cette notion ATF 119 II 132
consid. 5a/aa) constitue un indice en faveur de l'existence d'une garantie
indépendante (ATF 117 III 76 consid. 6b p. 79); enfin, si la renonciation
du garant à opposer "une quelconque exception ou objection" ne constitue
pas nécessairement, selon la jurisprudence, une raison d'opter en faveur
d'une garantie indépendante (ATF 113 II 434 let. d p. 440), la doctrine
lui attribue une portée décisive (ATF 117 III 76 consid. 6b p. 78 s. et
la doctrine citée).

    4.4  En l'espèce, les engagements en cause consistent en deux
déclarations de la défenderesse datant des 5 juin 1986 et 1er septembre
1987, complétées chacune par un avenant. Selon ces documents intitulés
"Garantie de X.", la défenderesse déclare garantir en son nom les montants
des crédits accordés à C. SA et à E. SA par un groupe de banques (les
demanderesses) ayant pour agent la banque N. La garantie est donnée aux
banques et aux détenteurs de billets à ordre. Les contrats de financement
conclus le 31 mai 1986 entre C. SA et la banque N. et, le 23 mars 1987,
entre E. SA et la banque N. (rapports de base) sont mentionnés. Quant
à la portée de la garantie, il est indiqué que celle-ci est solidaire,
inconditionnelle et irrévocable en relation avec l'ensemble des engagements
pris par C. SA et E. SA. La défenderesse s'engage en outre à verser les
montants dus "à première demande".

    Si l'on cumule ces différents indices, ajouté au fait que ces garanties
ont été émises dans le cadre de contrats internationaux, tout porte à
admettre l'existence de garanties indépendantes. Cette appréciation est
encore corroborée par la clause figurant dans la garantie du 1er septembre
1987 qui stipule qu'elle doit être considérée et interprétée comme une
garantie bancaire, le garant n'étant pas en droit de soulever d'exception
ou d'objection de quelque nature que ce soit. Examinant la nature des
actes émis par la défenderesse, la Cour de céans, dans son arrêt du 20
août 1998, avait du reste déjà relevé qu'ils étaient similaires à ceux
régulièrement assumés par des établissements bancaires ou par d'autres
particuliers (ATF 124 III 382 consid. 4b p. 390).

    Par conséquent, en qualifiant ces engagements, sur la base des
principes posés en matière bancaire, de garanties indépendantes à première
demande, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral.

    4.5  Dès lors qu'il n'est pas contesté que les demanderesses n'ont
pas reçu le remboursement des sommes mises à disposition dans le cadre
de l'emprunt en faveur de C. SA et de E. SA et que la banque N. en a
informé la défenderesse, cette dernière est tenue, en vertu des garanties
indépendantes qu'elle a émises, de s'acquitter des montants résultant de
ces engagements vis-à-vis des demanderesses.

    Compte tenu de leur caractère autonome, ces garanties lient la
défenderesse indépendamment de la validité des contrats de base, soit en
l'occurrence des engagements financiers conclus entre C. SA et E. SA avec
la banque N., en tant qu'agent des banques demanderesses. La défenderesse
ne peut donc se prévaloir du fait que ces contrats seraient nuls, car
ils auraient été signés par des personnes non habilitées à engager C. SA
et E. SA.

    4.6  Seul un abus de droit de la part des demanderesses, en tant que
bénéficiaires, pourrait rendre l'appel à la garantie indépendante inopérant
(LOMBARDINI, op. cit., p. 313 n. 88; GUGGENHEIM, Les contrats, p. 358). Le
refus de paiement d'une garantie au motif que l'appel du bénéficiaire à
la garantie est abusif est toutefois exceptionnel (LOMBARDINI, op. cit.,
p. 315 n. 94; ZOBL, op. cit., p. 44). Le fait que l'appel à la garantie
indépendante puisse ne pas être justifié sous l'angle des rapports entre
le donneur d'ordre et le bénéficiaire ou qu'un litige existe entre eux
quant à l'exécution du contrat les liant n'est pas suffisant (LOMBARDINI,
op. cit., p. 314 n. 91; ZOBL, op. cit., p. 42 s.).

    En l'espèce, l'arrêt attaqué ne contient pas d'élément concret
permettant d'en conclure que l'appel à la garantie de la part des
demanderesses serait abusif. La défenderesse n'invoque du reste pas
expressément un abus de droit. Elle indique seulement que la banque
N. aurait été de mauvaise foi, mais elle se fonde à ce sujet sur des faits
qui n'ont pas été constatés par la cour cantonale, de sorte qu'il n'y a pas
lieu d'en tenir compte. Quant aux développements concernant le caractère
manifestement faussé de tout le processus d'appel de fonds présentés dans
le recours, ils ne méritent pas davantage que la Cour de céans s'y arrête,
dès lors qu'il s'agit de critiques purement appellatoires dans lesquelles
la défenderesse présente sa propre version des événements, en faisant
abstraction de la décision entreprise, ce qui n'est pas admissible.

Erwägung 5

    5.  En dernier lieu et à titre subsidiaire, la défenderesse reproche à
la cour cantonale de n'avoir pas examiné la réduction des prétentions des
demanderesses en application de l'art. 44 al. 1 CO, comme elle l'avait
requis dans le cadre de la procédure d'appel. Elle estime à cet égard
que les demanderesses n'auraient pas accompli tout ce qui était en leur
pouvoir pour limiter leur préjudice, en raison du comportement de A. et
de la négligence de la banque N.

    L'art. 44 al. 1 CO permet au juge de réduire les dommages-intérêts,
ou même n'en point allouer, notamment lorsque la victime n'a pas pris
toutes les mesures commandées par les circonstances pour diminuer son
dommage (WERRO, Commentaire romand, n. 26 ad art. 44 CO). Il ressort
toutefois très clairement du texte de l'art. 44 CO que cette disposition
ne s'applique qu'en cas de versement de dommages-intérêts, qu'ils soient
délictuels ou contractuels (art. 99 al. 3 CO).

    Or, comme l'ont relevé pertinemment les demanderesses, lorsque le
garant paie la garantie indépendante, il exécute sa propre obligation
et ne verse pas des dommages-intérêts (DOHM, op. cit., p. 56 s. n. 70;
LOMBARDINI, op. cit., p. 289 n. 3). Dans ces circonstances, l'art. 44
al. 1 CO ne peut entrer en considération, de sorte que le grief est
dépourvu de tout fondement.

    Dans ces circonstances, le recours doit être rejeté (...).