Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 128 V 102



128 V 102

20. Arrêt dans la cause Office de l'assurance-invalidité pour le canton
de Vaud contre A. et Tribunal des assurances du canton de Vaud

    I 510/00 du 29 avril 2002

    Art. 19 al. 2 let. c et al. 3 LAI; art. 8ter al. 2 RAI: Liste des
mesures de nature pédago-thérapeutique.

    L'art. 8ter al. 2 RAI, qui contient une liste exhaustive des mesures
de nature pédago-thérapeutique nécessaires pour compléter l'enseignement
spécialisé, est conforme à la loi et à la Constitution.

Regeste

    Art. 19 cpv. 2 lett. c e cpv. 3 LAI; art. 8ter cpv. 2 OAI: Elenco
dei provvedimenti di natura pedagogico-terapeutica. L'art. 8ter
cpv. 2 OAI, che contempla un elenco esaustivo dei provvedimenti di
natura pedagogico-terapeutica necessari per completare l'insegnamento
specializzato è conforme a legge e Costituzione.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Le litige porte sur le point de savoir si l'intimé, dont il est
constant qu'il a droit à partir du 1er juin 1996 à la prise en charge
de la musicothérapie comme mesure de nature pédago-thérapeutique, n'y
a plus droit depuis le 1er janvier 1997, date de l'entrée en vigueur de
l'art. 8ter RAI.

Erwägung 2

    2.- Des subsides sont alloués pour la formation scolaire spéciale des
assurés éducables qui n'ont pas atteint l'âge de 20 ans révolus mais qui,
par suite d'invalidité, ne peuvent suivre l'école publique ou dont on ne
peut attendre qu'ils la suivent. La formation scolaire spéciale comprend
la scolarisation proprement dite ainsi que, pour les mineurs incapables
ou peu capables d'assimiler les disciplines scolaires élémentaires,
des mesures destinées à développer soit leur habileté manuelle, soit
leur aptitude à accomplir les actes ordinaires de la vie ou à établir
des contacts avec leur entourage (art. 19 al. 1 LAI).

    Selon l'art. 19 al. 2 let. c LAI, ces subsides comprennent des
indemnités particulières pour des mesures de nature pédago-thérapeutique
qui sont nécessaires en plus de l'enseignement de l'école spéciale, telles
que des cours d'orthophonie pour les assurés atteints de graves difficultés
d'élocution, l'enseignement de la lecture labiale et l'entraînement
auditif pour les assurés durs d'oreille, la gymnastique spéciale destinée
à développer la motricité des assurés souffrant de troubles des organes
sensoriels ou d'une grave débilité mentale.

    Aux termes de l'art. 19 al. 3 LAI, le Conseil fédéral précisera
les conditions nécessaires selon l'art. 19 al. 1 LAI pour l'octroi des
subsides et en fixera le montant. Il édictera des prescriptions sur
l'octroi de subsides correspondants pour des mesures dispensées à des
enfants invalides d'âge préscolaire, notamment pour la préparation à
la formation scolaire spéciale, ainsi que pour des mesures en faveur
d'enfants invalides qui fréquentent l'école publique.

Erwägung 3

    3.- Sur la base de cette délégation législative, le Conseil fédéral
a réglementé les mesures de formation scolaire spéciale aux art. 8 ss RAI
(Ordonnance du 25 novembre 1996, en vigueur depuis le 1er janvier 1997).
L'art. 8ter al. 1 RAI dispose que l'assurance prend à sa charge les
frais d'exécution des mesures de nature pédago-thérapeutique qui sont
nécessaires pour compléter l'enseignement spécialisé. L'art. 9 al. 1
RAI dispose que l'assurance prend à sa charge les frais d'exécution des
mesures de nature pédago-thérapeutique qui sont nécessaires pour permettre
à l'assuré de participer à l'enseignement de l'école publique. L'art. 10
al. 1 RAI dispose que l'assurance prend à sa charge les frais d'exécution
des mesures de nature pédago-thérapeutique qui sont nécessaires en âge
préscolaire pour la préparation à la fréquentation de l'école spéciale
ou de l'école publique.

    Selon l'art. 8ter al. 2 RAI, les mesures comprennent:

      a. la logopédie pour les assurés selon l'art. 8 al. 4 let. e RAI;

      b. l'entraînement auditif et l'enseignement de la lecture labiale

      pour

    les assurés selon l'art. 8 al. 4 let. c RAI;

      c. les mesures nécessaires à l'acquisition et à la structuration du

    langage pour les assurés selon l'art. 8 al. 4 let. a RAI;

      d. la gymnastique spéciale destinée à développer la motricité

      perturbée

    pour les assurés selon l'art. 8 al. 4 let. a, b et c RAI.

Erwägung 4

    4.- Interprétant la disposition litigieuse, les premiers juges ont été
d'avis que la liste des mesures de nature pédago-thérapeutique énumérées
à l'art. 8ter al. 2 RAI est exemplative, comme l'était celle figurant à
l'art. 8 al. 1 let. c RAI (ATF 121 V 14 consid. 3b, 114 V 24 consid. 2b),
dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 1996. Subsidiairement,
ils ont considéré que le nouveau texte de l'ordonnance était contraire
à la loi.

    Ce jugement s'avère toutefois contraire à la jurisprudence. En effet,
selon l'arrêt M. du 23 septembre 1999 (VSI 2000 p. 232), l'art. 8ter
al. 2 RAI contient une énumération exhaustive des mesures de nature
pédago-thérapeutique prises en charge par l'assurance-invalidité pour
compléter l'enseignement spécialisé. Il en va de même de l'énumération
de mesures de l'art. 9 al. 2 RAI (arrêt O. du 2 septembre 1999; VSI 2000
p. 74).

    Il ressort, au moins implicitement de ces deux arrêts, que ces
dispositions nouvelles, introduites le 1er janvier 1997, entrent dans le
cadre de la délégation de compétence donnée au Conseil fédéral.

Erwägung 5

    5.- La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre. Selon la
jurisprudence, il n'y a lieu de déroger au sens littéral d'un texte clair
par voie d'interprétation que lorsque des raisons objectives permettent de
penser que ce texte ne restitue pas le sens véritable de la disposition en
cause. De tels motifs peuvent découler des travaux préparatoires, du but
et du sens de la disposition, ainsi que de la systématique de la loi. Si le
texte n'est pas absolument clair, si plusieurs interprétations de celui-ci
sont possibles, il convient de rechercher quelle est la véritable portée
de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit
notamment des travaux préparatoires, du but de la règle, de son esprit,
ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose ou encore de sa relation
avec d'autres dispositions légales (ATF 126 II 80 consid. 6d, 126 III
104 consid. 2c, 126 V 58 consid. 3, 105 consid. 3 et les références).

    Qu'il s'agisse du texte français ("telles que"), allemand ("wie")
ou italien ("come"), le sens littéral de l'art. 19 al. 2 let. c LAI
est clair. Cette disposition légale énumère de manière exemplative les
mesures de nature pédago-thérapeutique qui sont nécessaires en plus de
l'enseignement de l'école spéciale (ATF 114 V 24 consid. 2b; VSI 2000
p. 204 consid. 2).

    Ce sens littéral dégagé correspond d'ailleurs à la volonté du
législateur, lors de la révision de la LAI par la novelle du 5 octobre
1967, d'énumérer dans la loi les mesures de nature pédago-thérapeutique
(message du Conseil fédéral relatif à un projet de loi modifiant la loi
sur l'assurance-invalidité, du 27 février 1967, FF 1967 I 700).

    Mais, comme ni la loi, ni l'ordonnance ne définissent la notion de
mesures de nature pédago-thérapeutique, la liste figurant à l'art. 19
al. 2 LAI permet aussi d'en déterminer le contenu.

Erwägung 6

    6.- Comme l'art. 8ter al. 2 RAI contient une liste exhaustive des
mesures de nature pédago-thérapeutique (cf. VSI 2000 p. 232), il faut
examiner si cette disposition réglementaire est conforme à la loi ou à
la Constitution.

    a) Le Tribunal fédéral des assurances examine en principe librement la
légalité des dispositions d'application prises par le Conseil fédéral. En
particulier, il exerce son contrôle sur les ordonnances (dépendantes)
qui reposent sur une délégation législative. Lorsque celle-ci est
relativement imprécise et que, par la force des choses, elle donne au
Conseil fédéral un large pouvoir d'appréciation, le tribunal doit se
borner à examiner si les dispositions incriminées sortent manifestement
du cadre de la délégation de compétence donnée par le législateur à
l'autorité exécutive ou si, pour d'autres motifs, elles sont contraires
à la loi ou à la Constitution. A cet égard, une norme réglementaire
viole l'art. 8 al. 1 Cst. lorsqu'elle n'est pas fondée sur des motifs
sérieux et objectifs, qu'elle est dépourvue de sens et d'utilité ou
qu'elle opère des distinctions juridiques que ne justifient pas les
faits à réglementer. Dans l'examen auquel il procède à cette occasion,
le juge ne doit toutefois pas substituer sa propre appréciation à celle
de l'autorité dont émane la réglementation en cause. Il doit au contraire
se borner à vérifier si la disposition litigieuse est propre à réaliser
objectivement le but visé par la loi, sans se soucier, en particulier,
de savoir si elle constitue le moyen le mieux approprié pour atteindre
ce but (ATF 127 V 7 consid. 5a, 126 II 404 consid. 4a, 573 consid. 41,
126 V 52 consid. 3b, 365 consid. 3, 473 consid. 5b et les références).

    b) La délégation législative à l'art. 19 al. 3 LAI donne à l'autorité
exécutive la compétence de fixer le montant des subsides et de fixer les
conditions de détail pour l'octroi de subsides en faveur de la formation
scolaire spéciale (message du Conseil fédéral relatif à un projet de
loi sur l'assurance-invalidité ainsi qu'à un projet de loi modifiant
celle sur l'assurance-vieillesse et survivants, du 24 octobre 1958, FF
1958 II 1288). Relativement imprécise, elle donne au Conseil fédéral un
large pouvoir d'appréciation, ce que confirment les travaux parlementaires
(BO 1967 CN 439 [Weibel, rapporteur]; [Wyler, rapporteur]).

    Ayant reçu la compétence de préciser les conditions nécessaires
pour l'octroi des subsides et d'en fixer le montant, le Conseil fédéral a
également compétence pour préciser au préalable quelles sont les mesures de
nature pédago-thérapeutique qui entrent en considération. L'établissement
d'une liste n'est ainsi pas critiquable au regard des principes rappelés
ci-dessus. Par ailleurs le fait que cette liste soit exhaustive ne permet
pas, par ce seul fait, de conclure à l'illégalité du procédé dès lors
qu'apparaît aussi nécessaire un tri entre les mesures les plus diverses
envisagées, y compris celles qui ne remplissent pas tous les critères
pédagogiques et thérapeutiques.

    Enfin, on ne saurait considérer que l'art. 8ter al. 2 RAI sorte
manifestement du cadre de la délégation de compétence donnée par le
législateur à l'autorité exécutive. En réalité, le procédé relève plutôt
d'un excès de pouvoir négatif dans la mesure où le Conseil fédéral n'aurait
pas fait usage de tout son pouvoir (ATF 116 V 310 consid. 2, 111 V 248
consid. 2b; RCC 1991 p. 94 consid. 2; PIERRE MOOR, Droit administratif,
vol. I: Les fondements généraux, 2ème édition, Berne 1994, p. 376 no
4.3.2.3). Le problème est dès lors de savoir dans quelle mesure le juge
peut l'y contraindre.

    Or l'intervention du juge à l'égard des ordonnances se limite aux cas
où elles sortent manifestement du cadre de la délégation de compétence,
surtout lorsque, comme en l'espèce, la délégation est imprécise. En
retenant, suite à la liste exemplative de la loi, quatre mesures de
nature pédago-thérapeutique nécessaires pour compléter l'enseignement
spécialisé dont la prise en charge aura lieu, la disposition précitée
de l'ordonnance n'est pas contraire à la loi. Par ailleurs, le problème
de la constitutionnalité ne paraît pas se poser en l'espèce, le fait que
la musicothérapie ait pu représenter dans un cas d'espèce une mesure au
sens de l'art. 19 al. 2 let. c LAI et de l'ancien art. 8 al. 1 let. c
RAI (ATF 114 V 28 ss consid. 3b et 4) ne signifiant pas pour autant que
l'art. 8ter al. 2 RAI opère des distinctions juridiques que ne justifient
pas les faits à réglementer.

    Enfin, il ne faut pas perdre de vue qu'il y a lieu, en principe,
de traiter de la même manière les dispositions de l'ordonnance établies
à la suite de la délégation contenue à l'art. 19 al. 3 LAI. Or, dans
un arrêt K. du 29 avril 2002, destiné à la publication, (I 395/00), le
Tribunal fédéral des assurances a considéré que l'art. 9 al. 2 RAI qui
contient une liste exhaustive des mesures de nature pédago-thérapeutique
nécessaires pour permettre à l'assuré de participer à l'enseignement
de l'école publique est conforme à la délégation législative et à la
Constitution fédérale.

Erwägung 7

    7.- La musicothérapie ne figure pas dans la liste exhaustive des
mesures de nature pédago-thérapeutique énumérées à l'art. 8ter al. 2
RAI. Il s'ensuit que l'intimé n'a plus droit à la prise en charge de la
musicothérapie depuis le 1er janvier 1997, date de l'entrée en vigueur de
cette disposition réglementaire. En conséquence, le jugement attaqué et
la décision administrative litigieuse doivent être réformés en ce sens
que l'intimé a droit à la prise en charge de la musicothérapie jusqu'au
31 décembre 1996.

Erwägung 8

    8.- (Dépens)