Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 128 I 295



128 I 295

29. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public dans la cause
Association suisse des annonceurs et consorts contre Grand Conseil du
canton de Genève (recours de droit public)

    2P.207/2000 du 28 mars 2002

Regeste

    Art. 8, 9, 16, 17, 26, 27, 36, 49 Abs. 1, 93, 105, 118 Abs. 2 lit. a
BV; Art. 2 und 3 BGBM; Gesetz des Kantons Genf vom 9. Juni 2000 über die
Werbung; abstrakte Normenkontrolle.

    Die Genfer Bestimmung, welche das Anbringen von Werbung für Tabak und
für Getränke mit einem Alkoholgehalt von mehr als 15 Volumenprozenten auf
öffentlichem Grund sowie auf privatem Grund verbietet, der vom öffentlichen
Grund her einsehbar ist, verstösst nicht gegen:

    - den Grundsatz des Vorrangs des Bundesrechts, und zwar sowohl
hinsichtlich der Gesetzgebungskompetenzen des Bundes im Bereich des
Alkohols, der Lebensmittel sowie von Radio und Fernsehen (E. 3) als auch
hinsichtlich derjenigen im Bereich des Binnenmarktes (E. 4);

    - die Pressefreiheit sowie die Meinungs- und Informationsfreiheit,
soweit die geschäftsmässige Werbung in den Schutzbereich dieser Grundrechte
fällt (E. 5a);

    - die Wirtschaftsfreiheit (E. 5b);

    - die Eigentumsgarantie (E. 6);

    - das Rechtsgleichheitsgebot und das Willkürverbot (E. 7).

    Vereinbarkeit mit der Eigentumsgarantie und der Wirtschaftsfreiheit
von kantonalen Bestimmungen, welche die Werbung auf privatem Grund, soweit
von öffentlichem Grund her einsehbar, der Kontrolle durch die öffentliche
Gewalt unterstellt (E. 8), sowie des Verbots von Werbung auf fensterlosen
Gebäudefassaden (E. 9).

Sachverhalt

    Le 9 juin 2000, le Grand Conseil de la République et canton de Genève
a adopté la loi sur les procédés de réclame (ci-après: LPR/GE), publiée
dans la Feuille d'Avis Officielle du canton de Genève du vendredi 16 juin
2000 pour permettre l'exercice du droit de référendum.

    Cette loi comprend notamment les dispositions suivantes:

      "Art. 2

       Sont considérés comme des procédés de réclame au sens de la

       présente loi

    tous les moyens graphiques, plastiques, éclairés, lumineux, sonores,

    olfactifs ou autres, perceptibles depuis le domaine public, dans un

    but direct ou indirect de publicité, de promotion d'activités
culturelles

    ou sportives, de prévention ou d'éducation.

       Art. 3 al. 1 Sont soumis aux dispositions de la présente loi et

       à ses

    dispositions d'application tous les procédés de réclame, perceptibles

    depuis le domaine public, qu'ils soient situés sur le domaine public ou

    privé.

       Art. 4

    L'apposition, l'installation, l'utilisation ou la modification

    d'un procédé de réclame est soumise à l'octroi préalable d'une

    autorisation.

       Art. 8 al. 2 Les procédés de réclame sur les façades borgnes des

       bâtiments sont en

    principe interdits.

       Art. 9 al. 2 L'affichage, sous quelque forme que ce soit, de

       publicité en faveur du

    tabac et des alcools de plus de 15 volumes pour 100 sur le domaine
public,

    sur le domaine privé visible du domaine public, est interdit. Il en
est de

    même à l'intérieur et aux abords des bâtiments ou lieux publics,
propriété

    de l'Etat, des communes, de collectivités publiques ou de fondations de

    droit public.

       Art. 24 al. 1 Les communes peuvent établir un concept directeur

       des procédés de

    réclame visant tant le domaine public que le domaine privé."

    Par arrêté du 28 juillet 2000, constatant qu'aucune demande de
référendum n'avait été présentée, le Conseil d'Etat genevois a promulgué
la loi en question et fixé son entrée en vigueur au 20 octobre 2000.

    Agissant le 11 septembre 2000 par la voie du recours de droit public,
l'Association suisse des annonceurs, l'Association suisse de publicité
extérieure, la Fédération romande de publicité et de communication,
Naville S.A., la Société générale d'affichage, la Fédération suisse des
spiritueux, Bacardi-Martini (Suisse) S.à.r.l., Bols-Cynar-Ballantine's AG,
Emil Ebneter & Co. AG, Moët Hennessy (Suisse) SA, Perisem SA, Seagram
(Schweiz) AG, United distillers and vintners S.A., la Communauté de
l'industrie suisse de la cigarette, la Fédération suisse des négociants
en tabacs-journaux - section de Genève -, British-American Tobacco S.A.,
JT International AG et Philip Morris S.A. demandent, avec suite de frais
et dépens, au Tribunal fédéral d'annuler les art. 2, 3 al. 1, 4, 8 al. 2,
9 al. 2 et 24 al. 1 LPR/GE. Ils invoquent la violation des principes de la
primauté du droit fédéral (art. 49 al. 1 Cst.), de la liberté économique
(art. 27 Cst.), de la liberté d'information et de la liberté de presse
(art. 16 et 17 Cst.), de la garantie de la propriété (art. 26 Cst.),
de l'interdiction de l'arbitraire (art. 9 Cst.) et du droit à l'égalité
(art. 8 Cst.).

    Le Tribunal fédéral a rejeté le recours en tant que recevable.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Extrait des considérants:

    II. Art. 9 al. 2 LPR/GE

Erwägung 3

    3.- a) Les recourants affirment que l'art. 9 al. 2 LPR/GE serait
contraire au principe de la primauté du droit fédéral (art. 49 al. 1
Cst.). Selon eux, cette disposition tend à réglementer une matière
déjà régie par le droit fédéral, en particulier l'art. 42b de la loi
fédérale du 21 juin 1932 sur l'alcool (Lalc; RS 680) pour ce qui est de la
limitation de la publicité pour les boissons alcooliques, l'art. 18 al. 5
de la loi fédérale du 21 juin 1991 sur la radio et la télévision (LRTV;
RS 784.40), l'art. 15 al. 1 de l'ordonnance du 6 octobre 1997 sur la radio
et la télévision (ORTV; RS 784.401) et les art. 3 al. 3, 48 al. 1 let. l et
60 de la loi fédérale du 9 octobre 1992 sur les denrées alimentaires et les
objets usuels (LDAl; RS 817.0). Ils ajoutent que, sur la base des art. 105
Cst. (art. 32bis aCst.) et 122 Cst. (recte: art. 118 al. 2 let. a Cst. et
art. 69bis aCst.), la Confédération dispose d'une compétence législative
étendue, voire exhaustive, en ce qui concerne la réglementation de la
vente et des réclames en matière d'alcool et de tabac. Par conséquent,
les cantons ne pourraient légiférer dans ces domaines. Ils soulignent
qu'au niveau fédéral, le législateur a introduit des limitations sans
opter pour un régime de prohibition absolue. Les motifs justifiant de ne
pas interdire totalement la publicité en faveur de l'alcool et du tabac
auraient déjà été pris en compte par les autorités fédérales, qui auraient
expressément autorisé une certaine publicité en raison du caractère licite
que présente le commerce de boissons distillées et des produits du tabac,
d'une part, et de l'importance de la publicité en matière d'information
du public d'autre part. Ils rappellent l'existence d'un accord passé le
24 août 1992 entre la Communauté de l'industrie suisse de la cigarette
et la Commission suisse pour la loyauté en publicité, qui règle d'une
façon rigoureuse la publicité en faveur du tabac.

    Tous les recourants sont légitimés à invoquer la violation du principe
de la primauté du droit fédéral, ce que ne conteste pas le Grand Conseil
genevois.

    b) Ce principe constitutionnel fait obstacle à l'adoption ou à
l'application de règles cantonales qui éludent des prescriptions de droit
fédéral ou qui en contredisent le sens ou l'esprit, notamment par leur
but ou par les moyens qu'elles mettent en oeuvre, ou qui empiètent sur des
matières que le législateur fédéral a réglementées de façon exhaustive (ATF
127 I 60 consid. 4a et les arrêts cités; ULRICH HÄFELIN/WALTER HALLER,
Schweizerisches Bundesstaatsrecht - Die neue Bundesverfassung -, 5e éd.,
Zurich 2001, n. 1185 à 1187). L'existence ou l'absence d'une législation
fédérale exhaustive constitue donc le critère principal pour déterminer
s'il y a conflit avec une règle cantonale. Il faut toutefois souligner que,
même si la législation fédérale est considérée comme exhaustive dans un
domaine donné, une loi cantonale peut subsister dans le même domaine si
la preuve est rapportée qu'elle poursuit un autre but que celui recherché
par la mesure fédérale (ANDREAS AUER/GIORGIO MALINVERNI/MICHEL HOTTELIER,
Droit constitutionnel suisse, vol. I, Berne 2000, n. 1031, p. 364). Cela
a par exemple conduit le Tribunal fédéral à considérer que, dans la
mesure où une loi cantonale renforçait l'efficacité de la réglementation
fédérale, le principe de la force dérogatoire n'était pas violé (ATF 91
I 17 consid. 5). Il résulte par ailleurs de la jurisprudence plus récente
que, même si, en raison du caractère exhaustif de la législation fédérale,
le canton ne peut plus légiférer dans une matière, il n'est pas toujours
privé de toute possibilité d'action (ZBl 96/1995 p. 457, 1P.574/1993,
consid. 6). Ce n'est que lorsque la législation fédérale règle de manière
très complète et exhaustive un domaine particulier que le canton n'est plus
du tout compétent pour adopter des dispositions complémentaires, quand
bien même celles-ci ne contrediraient pas le droit fédéral ou seraient
même en accord avec celui-ci (HÄFELIN/HALLER, op. cit., n. 1185; PETER
SALADIN, in Commentaire de la Constitution de la Confédération suisse,
Bâle/Berne/Zurich, n. 25 ad art. 2 disp. trans. aCst.).

    C'est à la lumière de ces principes qu'il convient d'examiner la
portée des dispositions fédérales, respectivement cantonales en cause,
afin de déterminer si le canton de Genève était ou non compétent pour
édicter des règles en matière de publicité en faveur de l'alcool et du
tabac sans empiéter sur les compétences de la Confédération.

    c) Il ressort du message du Conseil d'Etat et des débats du Grand
Conseil genevois que la loi sur les procédés de réclame a été conçue
pour mieux garantir la sécurité routière, pour protéger les sites,
l'esthétique des lieux et l'ordre public (cf. Mémorial des séances du
Grand Conseil 1999, p. 4909). Elle vise à réglementer l'utilisation à
des fins commerciales de l'ensemble du territoire cantonal, qu'il soit
public ou privé. A noter que, du point de vue de la sécurité routière,
les restrictions en matière de publicité - qu'elle soit placée sur le
domaine public ou privé - sont (déjà) réglées d'une façon exhaustive
par la législation fédérale concernant la circulation routière (ATF 128
I 3 consid. 3e/cc). En ce qui concerne plus particulièrement l'art. 9
al. 2 LPR/GE, cette disposition vise également à protéger la santé de la
population - et surtout des jeunes - du danger d'une consommation excessive
d'alcool et de tabac (cf. Mémorial des séances du Grand Conseil 2000,
p. 858 ss, 1328 ss).

    aa) S'agissant de l'interdiction de la publicité en faveur de l'alcool
et du tabac sur le domaine public, il faut rappeler que, selon l'art. 664
al. 1 CC, les biens du domaine public étant soumis à la haute police de
l'Etat sur le territoire duquel ils se trouvent, les cantons peuvent en
réglementer l'usage qui en est fait par les privés. Ainsi, ils sont en
principe libres de décider par qui et à quelles conditions le domaine
public peut être utilisé. La jurisprudence n'a en effet reconnu aux
administrés qu'un droit conditionnel à l'usage accru du domaine public à
des fins commerciales (ATF 101 Ia 473 consid. 5; 104 Ia 172 consid. 3; 108
Ia 135 consid. 3; 119 Ia 445 consid. 1a/bb et 121 I 279 consid. 2a). Cela
est d'autant plus vrai en l'espèce que la mise en place de procédés
publicitaires sur le domaine public requiert un usage privatif de celui-ci,
dès lors qu'elle implique une activité d'une certaine importance, durable
et qui exclut toute utilisation semblable par des tiers (RENÉ RHINOW/BEAT
KRÄHENMANN, Schweizerische Verwaltungsrechtsprechung, Ergänzungsband,
Bâle 1990, n. 119 B II, p. 360). Cela dit, on doit admettre que l'Etat
n'est, en principe, pas obligé d'autoriser l'usage accru (voire privatif)
du domaine public afin que des privés puissent faire de la publicité pour
des produits dont il cherche à limiter la consommation pour des raisons
de santé publique.

    bb) S'agissant de l'interdiction de la publicité pour l'alcool et le
tabac sur le domaine privé, il faut d'emblée remarquer que la proximité
du domaine public peut justifier que soient imposées à ses riverains
des obligations spécifiques, soit sous la forme de restrictions à
leurs prérogatives de propriétaires, soit sous la forme de prestations,
sur leur terrain même, voire sur le domaine public (PIERRE MOOR, Droit
administratif, vol. III, Berne 1992, p. 309). Dans certains cas, l'Etat
peut donc imposer des limitations à l'utilisation de la propriété privée,
afin de protéger le domaine public et de garantir une utilisation du
domaine public conforme à sa destination. En l'espèce, les motifs qui
justifient selon le Grand Conseil genevois l'extension de la restriction
en cause à une partie du domaine privé seront examinés ultérieurement.

    d) Comme on vient de le voir, l'art. 9 al. 2 LPR/GE poursuit un but de
santé publique. Or, la protection de la santé publique est une tâche qui
relève en principe du domaine de compétence des cantons (FF 1997 I 338;
ERWIN MURER, Wohnen, Arbeit, soziale Sicherheit und Gesundheit, in Daniel
Thürer/Jean-François Aubert/Jörg Paul Müller (éd.), Droit constitutionnel
suisse, Zurich 2001, § 62, n. 22; PETER SALADIN, Das Recht auf Werbung
und seine öffentlichrechtlichen Schranken, thèse Berne 1969, p. 189-190
et p. 213 [ci-après: Das Recht auf Werbung]). La Constitution fédérale
réserve toutefois à la Confédération certaines compétences dans ce domaine.

    aa) L'art. 105 Cst. donne à la Confédération le pouvoir de légiférer
en matière d'alcool obtenu par distillation; elle doit tenir compte des
effets nocifs qui découlent de la surconsommation d'alcool. Ce mandat,
motivé par la protection de la santé, était déjà prévu par l'ancienne
Constitution à l'art. 32bis al. 2 (FF 1997 I 319; SALADIN, Das Recht auf
Werbung, op. cit., p. 191). La Confédération a donc le devoir de soumettre
le commerce de boissons distillées à toutes les restrictions qui s'avèrent
nécessaires pour en diminuer la consommation, même en matière de publicité
(FF 1979 I 108). Le législateur fédéral a fait usage de cette compétence,
en édictant l'art. 42b Lalc qui limite la publicité en faveur des boissons
distillées.

    bb) L'art. 118 Cst. règle les compétences de la Confédération en
matière de protection de la santé. La doctrine parle à ce propos d'une
"fragmentarische Rechtssetzungskompetenz des Bundes" en matière de
santé publique: la Confédération n'aurait la compétence d'édicter des
dispositions pour protéger la santé que dans les domaines exhaustivement
cités à l'al. 2 de cette disposition constitutionnelle (HÄFELIN/HALLER,
op. cit., n. 1086). A l'intérieur de ces domaines, elle dispose d'une
"compétence globale dotée d'un effet dérogatoire subséquent" (FF 1997
I 338). Elle peut notamment légiférer sur l'utilisation des denrées
alimentaires ainsi que des agents thérapeutiques, des stupéfiants, des
organismes, des produits chimiques et des objets qui peuvent présenter un
danger pour la santé (art. 118 al. 2 let. a Cst.). Le législateur fédéral
a fait usage des compétences dont il dispose en la matière pour édicter,
entre autres réglementations, la loi sur les denrées alimentaires, qui
concerne aussi le tabac et les boissons alcooliques (art. 3 al. 3 LDAl;
FF 1989 I 871). Le champ d'application de cette loi s'étend même au
domaine de la réclame en faveur de denrées alimentaires et d'objets
usuels (art. 2 al. 2 let. b LDAl; FF 1989 I 874). Le législateur a
délégué au Conseil fédéral le pouvoir de restreindre les possibilités de
réclame en faveur des boissons alcooliques, des articles de tabac et des
articles pour fumeurs pour autant que la loi ne règle pas elle-même cette
question (FF 1989 I 886; art. 60 LDAl). Dans son message du 9 mars 1992
concernant les initiatives populaires "pour la prévention des problèmes
liés au tabac" et "pour la prévention des problèmes liés à l'alcool",
le Conseil fédéral avait soumis aux Chambres un contre-projet prévoyant
la révision des art. 13 LDAl et 42b Lalc, dans le but d'introduire, voire
de renforcer les limitations en matière de publicité pour l'alcool et le
tabac (FF 1992 II 1141 ss, p. 1171 ss). Tant le Conseil des Etats que le
Conseil national avaient refusé d'entrer en matière sur le contre-projet du
gouvernement. Ces deux initiatives ayant été rejetées en votation populaire
le 28 novembre 1993, le Conseil fédéral a dû faire usage de sa compétence
transitoire établie par l'art. 60 LDAl pour édicter des limitations en
matière de publicité en faveur de l'alcool (art. 24 de l'ordonnance du
1er mars 1995 sur les denrées alimentaires [ODAl; RS 817.02]) et du tabac
(art. 15 de l'ordonnance du 1er mars 1995 sur le tabac et les produits
du tabac [OTab; RS 817.06]).

    cc) L'interdiction de la publicité à la télévision et à la radio
pour le tabac et l'alcool, prévue par les art. 18 al. 5 LRTV et 15 al. 1
ORTV, repose aussi sur des motifs relevant de la santé publique, mais ne
concerne que les réclames diffusées par ces médias (FF 1987 III 707). La
compétence de la Confédération en matière de législation sur la radio et
la télévision ainsi que sur les autres formes de diffusion de production
et d'information ressortissant aux télécommunications publiques repose
sur l'art. 93 al. 1 Cst.

    e) Il résulte de ce qui précède que le droit fédéral prévoit une série
de mesures préventives dans la lutte contre l'alcoolisme et le tabagisme,
qui incluent aussi des limitations en matière de publicité, dont le but est
clairement de protéger la santé publique et la jeunesse de la consommation
excessive de certains produits (FF 1979 I 60, 62 et 69; FF 1989 I 886; FF
1992 II 1154 ss). Les articles 93, 105 et 118 Cst. ne confèrent toutefois
pas à la Confédération une compétence législative complète et exhaustive
en matière de publicité pour le tabac et l'alcool. Elle ne dispose en
effet dans ce domaine que d'une compétence très ponctuelle, étroitement
liée aux objectifs de santé publique que le législateur fédéral s'est
proposé de poursuivre en réglementant la production et le commerce de
l'alcool, l'utilisation des denrées alimentaires et le secteur de la
radiotélévision. Dans ces conditions, on ne saurait considérer que les
compétences fédérales éparses résultant des normes mentionnées excluent
complètement celles, plus générales, des cantons en matière de politique
sanitaire et de réglementation de l'utilisation du domaine public et
privé. En outre, comme l'a justement souligné le Grand Conseil genevois,
le fait que la Confédération a adopté des dispositions en matière de
publicité ne signifie pas que les cantons ne peuvent pas légiférer du
tout dans ce même domaine, y compris dans les hypothèses qu'elle n'a pas
réglementées. Dans le cadre de cet enchevêtrement de compétences entre
la Confédération et les cantons, ces derniers jouissent donc encore de la
faculté d'édicter des dispositions en matière de publicité pour l'alcool
et le tabac, pour autant - bien entendu - que celles-ci n'entravent
pas les buts que le législateur fédéral a voulu poursuivre en édictant
les art. 42b Lalc, 24 ODAl, 15 OTab, 18 al. 5 LRTV et 15 al. 1 ORTV
(cf. RAINER J. SCHWEIZER, Homogenität und Vielfalt im schweizerischen
Staatsrecht, in Daniel Thürer/Jean-François Aubert/Jörg Paul Müller
(éd.), Droit constitutionnel suisse, Zurich 2001, § 10, n. 11). Tel
n'est évidemment pas le cas de l'art. 9 al. 2 LPR/GE qui tend plutôt
à renforcer l'efficacité des mesures préventives déjà adoptées par la
Confédération en vue de limiter la consommation d'alcool et de tabac.

    f) Dans la mesure où l'art. 9 al. 2 LPR/GE se limite à réglementer
l'emplacement sur la voie publique, ainsi que sur la propriété privée
qui est visible depuis celle-ci, des procédés de réclame pour l'alcool
et le tabac sans entraver les objectifs poursuivis par le droit fédéral,
mais, au contraire, en renforçant la prévention dans la lutte contre le
tabagisme et l'alcoolisme, on ne saurait dire qu'elle viole le principe
de la force dérogatoire du droit fédéral.

Erwägung 4

    4.- a) Les recourants affirment que l'art. 9 al. 2 LPR/GE serait
contraire à ce dernier principe également parce qu'il introduit une règle
incompatible avec la loi fédérale du 6 octobre 1995 sur le marché intérieur
(LMI; RS 943.02). Selon eux, la possibilité de faire de la publicité
en faveur de produits dont la commercialisation est licite entre dans le
champ d'application de cette loi de sorte qu'elle ne saurait être entravée
par des dispositions limitées au territoire d'un seul canton.

    b) L'art. 1er al. 1 LMI définit l'objet de cette loi; il garantit
l'accès libre et non discriminatoire au marché afin de pouvoir exercer une
activité lucrative sur tout le territoire suisse. L'activité lucrative
protégée par cette réglementation doit être entendue au sens large et
englobe toute activité visant l'obtention d'un gain et bénéficiant de
la protection de la liberté du commerce et de l'industrie (art. 1 al. 3
LMI). Y sont compris tous les actes concernant l'exercice d'une activité
économique déterminée (choix de l'activité lucrative ou de la profession,
choix des moyens matériels, formation des relations d'affaires, etc.) dans
le cadre du marché intérieur (FF 1995 I 1241 et 1242). Doctrine et
jurisprudence admettent que la liberté du commerce et de l'industrie
(actuellement: liberté économique) comprend entre autres le droit
de faire de la publicité pour des marchandises ou pour des services
(ATF 118 Ib 356 consid. 4c; SALADIN, Das Recht auf Werbung, op. cit.,
p. 97 ss; RENÉ RHINOW, in Commentaire de la Constitution fédérale de la
Confédération suisse, Bâle/Zurich/Berne, n. 84 ad art. 31 aCst.). Il n'y a
donc apparemment aucune raison valable d'exclure les activités de publicité
du champ d'application de la loi fédérale sur le marché intérieur (dans
ce sens: VINCENT MARTENET/CHRISTOPHE RAPIN, Le marché intérieur suisse,
Berne 1999, p. 11 et 12).

    c) L'art. 2 al. 1 LMI fixe le principe du libre accès au marché, selon
lequel toute personne a le droit d'offrir des marchandises, des services et
des prestations de travail sur tout le territoire suisse si l'exercice de
l'activité lucrative en question est autorisé dans le canton ou la commune
où elle a son siège ou son établissement. Ce principe n'est pas absolu,
puisqu'il peut être restreint au lieu de destination de la prestation,
sous certaines conditions prévues par la loi (art. 3 LMI).

    aa) Avant de vérifier si ces conditions sont remplies dans le cas
d'espèce, il faut se demander si la règle prévue par l'art. 9 al. 2
LPR/GE constitue effectivement une restriction au libre accès au marché
au sens de l'art. 3 LMI. Ni la loi fédérale sur le marché intérieur,
ni les travaux législatifs ne précisent comment il faut interpréter ce
terme. La doctrine n'a pas non plus approfondi la question. A première
vue, on pourrait admettre qu'il y a restriction du libre accès au marché
chaque fois qu'un acte normatif règle, en le limitant d'une façon directe
ou indirecte, le commerce de marchandises, services ou prestations de
travail. Toutefois, une conception trop large de la notion en question
pourrait avoir des effets qui vont au-delà de ceux recherchés par la loi.

    bb) À ce propos, il peut être utile d'examiner à titre comparatif
quelle est la situation prévalant en droit européen dans le domaine
de la libre circulation des marchandises et des services. Il faut en
effet rappeler que le principe du libre accès au marché (art. 2 LMI)
et ses limitations (art. 3 LMI) constituent la transposition en droit
suisse de certaines dispositions du droit communautaire, en particulier
de l'art. 28 (ex art. 30) du Traité instituant la Communauté européenne
(TUE) - qui interdit les restrictions quantitatives à l'importation, ainsi
que toute mesure d'effet équivalent, entre Etats membres -, de l'art. 30
TUE (ex art. 36) - qui en règle les exceptions - et de la jurisprudence
"Cassisde-Dijon" développée pour la première fois à partir de ces normes
par les juges européens dans l'arrêt de la CJCE du 20 février 1999,
Rewe-Zentral AG contre Bundesmonopolverwaltung für Branntwein (120/78,
Rec. 1979, p. I-649 ss). En vertu de cette jurisprudence, sous réserve
d'exigences impératives relevant de l'intérêt public, un produit mis sur
le marché dans un Etat membre conformément aux règles de cet Etat peut
circuler librement dans tout le marché commun (FF 1995 I 1217 ss). Or,
dans un premier temps, la Cour de justice des Communautés européennes
admettait avec une certaine facilité l'existence de mesures ayant un effet
restrictif sur les échanges, au sens de l'art. 28 TUE, en reconnaissant,
par exemple, un tel effet à des normes légales nationales ou régionales
qui interdisaient certaines formes de publicité (cf. à ce sujet les
arrêts de la CJCE du 7 mars 1990, GB-INNO-BM, C-362/88, Rec. 1990,
p. I-667 ss, et du 25 juillet 1991 Aragonesa de Publicidad Exterior SA,
C-1/90, Rec. 1991, p. I-4151 ss). A la suite des critiques exprimées par
une partie de la doctrine - qui lui reprochait d'interpréter d'une façon
trop large les notions de "restriction quantitative de l'importation"
et de "mesures d'effet équivalent", prévues par l'art. 28 TUE -, la Cour
a précisé sa jurisprudence en la matière dans l'arrêt du 24 novembre
1993 Keck et Mithouard (C-276/91, Rec. 1993, p. I-6097). Elle a affirmé
que l'application à des produits en provenance d'autres Etats membres de
dispositions nationales qui limitent ou interdisent certaines modalités
de vente n'était pas apte à entraver directement ou indirectement,
actuellement ou potentiellement, le commerce entre Etats membres, pourvu
que les dispositions en question s'appliquent à tous les opérateurs
concernés et qu'elles affectent de la même manière, en droit comme en fait,
la commercialisation des produits nationaux et des produits en provenance
d'autres Etats membres (Rec. 1993, p. I-6131, point 16; cf. aussi HENNING
GRUB, in Carl Otto Lenz (éd.), EG-Vertrag, 2e éd., Köln 1999, n. 14 ad art.
153; ASTRID EPINEY, in Christian Callies/Matthias Ruffert (éd.), Kommentar
des Vertrages über die Europäische Union und des Vertrages zur Gründung
der Europäischen Gemeinschaft, Leuchterhand 1999, § 27-30 ad art. 28
TUE). Les juges communautaires ont ensuite qualifié de modalité de vente,
compatible avec l'art. 28 TUE, l'interdiction faite aux pharmaciens du
Baden-Württemberg de faire de la publicité, en dehors de l'officine,
pour les produits pharmaceutiques (arrêt du 15 décembre 1993, Hünermund,
C-292/92, Rec. 1993, p. I-6787). Dans cette décision, il a été précisé
que l'art. 28 TUE a pour objectif de garantir la libre circulation des
marchandises, afin de constituer un marché unique et intégré, en éliminant
les mesures nationales qui, de quelque façon que ce soit, créent un
obstacle ou même de simples difficultés dans les mouvements de produits,
et non pas d'interdire les mesures les plus disparates afin d'assurer la
plus forte expansion possible du commerce (Rec. 1993, p. I-6814).

    cc) Le message du 23 novembre 1994 du Conseil fédéral ayant fait
explicitement allusion aux principes développés par la Cour de Justice
de Luxembourg dans l'arrêt Keck et Mithouard (FF 1995 I 1220), on peut
se demander si ceux-ci ne sont pas applicables par analogie aussi dans
le cadre de la loi fédérale sur le marché intérieur. Dans l'affirmative,
il faudrait alors admettre que l'art. 9 al. 2 LPR/GE, qui introduit une
limitation quant aux modalités de promotion de certains produits (tabac
et alcool), ne pourrait que difficilement être considéré comme une règle
restreignant le libre accès au marché au sens de l'art. 3 LMI. Certains
auteurs semblent nier (avec des arguments discutables) l'application
par analogie de la jurisprudence Keck et Mithouard à l'interprétation
de la loi fédérale sur le marché intérieur (MARTENET/RAPIN, op. cit.,
p. 20). Cette question peut rester indécise en l'espèce, car, même en
admettant que l'art. 9 al. 2 LPR/GE constitue une restriction au principe
du libre accès au marché, les conditions posées par l'art. 3 LMI pour y
déroger sont remplies. En particulier, il faut constater que, selon cette
disposition, de telles restrictions, pour être légitimes, doivent être
applicables de la même façon aux offreurs locaux, être indispensables à
la préservation d'intérêts publics prépondérants et répondre au principe
de la proportionnalité (art. 3 al. 1 let. a-c LMI). Les deux premières
conditions sont réalisées en l'espèce, dès lors que l'art. 3 al. 2 let. a
LMI reconnaît un intérêt public prépondérant à la protection de la vie
et de la santé de l'être humain qui, comme on l'a vu, est l'un des buts
principaux visés par la disposition attaquée et que celle-ci s'applique
sans discrimination à tous les offreurs, sans égard à leur domicile ou à
leur siège. Plus problématique est par contre la question de savoir si la
réglementation répond aussi au principe de la proportionnalité (art. 3
al. 2 let. c LMI). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, lorsque
le principe de la proportionnalité est appliqué dans le cadre de la loi
sur le marché intérieur, il doit être apprécié plus spécifiquement au
regard des buts poursuivis par cette loi, tels qu'ils sont expressément
mentionnés à l'art. 1 al. 2 LMI. Selon cette disposition, la loi vise
en particulier à faciliter la mobilité professionnelle et les échanges
économiques en Suisse, à soutenir les efforts des cantons visant à
harmoniser les conditions d'autorisation d'accès au marché, à accroître la
compétitivité de l'économie suisse et à renforcer la cohésion économique
de la Suisse. La liberté d'accès au marché, telle qu'elle ressort de
cette loi, a ainsi une portée constitutive positive. En conséquence,
la liberté d'accès au marché est l'un des moyens visant à réaliser le
marché intérieur unique. Autrement dit, pour que la loi sur le marché
intérieur puisse atteindre ses buts, le principe de proportionnalité doit
être appliqué strictement aux restrictions posées par un canton à l'égard
d'offreurs externes respectant la réglementation en vigueur dans leur
propre canton (ATF 125 I 474 consid. 3). Il faut donc se demander s'il se
justifie qu'un canton puisse édicter des dispositions plus restrictives
que celles adoptées par la Confédération en matière de publicité pour
l'alcool et pour le tabac, en contribuant ainsi à la fragmentation du
marché publicitaire suisse de ces produits.

    Force est de constater à cet égard que la limitation prévue par
l'art. 9 al. 2 LPR/GE n'empêche pas en soi de faire de la réclame pour
l'alcool et le tabac, mais tend à ce que les supports publicitaires ne
soient pas posés sur le domaine public ou privé, là où ils sont visibles
de tout le monde. Cette disposition introduit donc une interdiction,
dont la portée reste limitée. Au demeurant, même si les autres cantons
suisses ou la Confédération ont déjà adopté des normes visant à protéger
les biens concernés par l'art. 9 al. 2 LPR/GE, on ne voit pas comment
celles-ci pourraient atteindre le même niveau de protection de la
population voulu par le législateur genevois qui est seul compétent pour
régler l'utilisation de l'ensemble du domaine public et privé, visible du
domaine public. Il découle de là que la mesure est conforme au principe
de la proportionnalité, tel qu'il a été défini par la jurisprudence.

    d) Les conditions prévues par l'art. 3 al. 1 let. a-c LMI étant
remplies, l'art. 9 al. 2 LPR/GE ne contrevient pas à la loi sur le marché
intérieur.

Erwägung 5

    5.- Les recourants contestent la compatibilité de l'art. 9 al. 2 LPR/GE
avec la liberté économique (art. 27 Cst.), la liberté de la presse (art. 17
Cst.), ainsi que la liberté d'opinion et d'information (art. 16 Cst.).

    a) Selon la jurisprudence, l'affichage à but commercial n'entre
en principe pas dans le champ de protection de la liberté de la presse
et de la liberté d'opinion et d'information (ATF 125 I 417 consid. 3a;
100 Ia 445 consid. 6 concernant encore l'ancienne Constitution). Seules
les opinions dont le contenu est de nature idéale jouissent en effet
de la protection accordée par ces libertés constitutionnelles: toute
expression qui vise des buts commerciaux rentre en revanche dans le champ
d'application de la liberté économique (ATF 125 I 417 consid. 3a; JÖRG
PAUL MÜLLER, Grundrechte in der Schweiz, 3e éd., Berne 1999, p. 204 et
253). Une exception à cette règle subsiste quand le message publicitaire
poursuit non seulement des objectifs économiques, mais aussi des intérêts
publics (MÜLLER, op. cit., p. 205). Dans ces cas, la liberté d'opinion
et d'information est toutefois touchée seulement si le caractère idéal
du message publicitaire est prépondérant par rapport à son caractère
commercial (cf. ATF 120 Ib 150 consid. 2c/bb; 101 Ib 178 consid. 4c). En
l'espèce, on ne voit pas que la disposition attaquée puisse concerner les
libertés mentionnées. Il est en effet difficilement concevable que des
procédés publicitaires en faveur de produits tels que l'alcool et le tabac
puissent aussi poursuivre la défense d'intérêts publics. De toute façon,
les considérations émises ci-après pour la liberté économique vaudraient
également pour ces garanties constitutionnelles.

    Par contre, les recourants ont certainement le droit de faire valoir la
violation, par l'art. 9 al. 2 LPR/GE, de la liberté économique, laquelle,
comme il a déjà été exposé, comprend également le droit de faire de la
publicité (ATF 123 I 201 consid. 2b et la jurisprudence citée; SALADIN,
Das Recht auf Werbung, p. 97).

    b) A l'instar d'autres libertés publiques, la liberté économique
n'est pas absolue. L'art. 36 Cst. prévoit en effet que les restrictions
des droits fondamentaux doivent reposer sur une base légale (al. 1),
être justifiées par un intérêt public prépondérant (al. 2) et, selon le
principe de la proportionnalité, se limiter à ce qui est nécessaire à la
réalisation des buts d'intérêt public poursuivis (al. 3). L'essence de
ces droits fondamentaux est en outre inviolable (al. 4).

    aa) Les recourants contestent en premier lieu l'existence d'une base
légale suffisante. A tort, car la lettre de l'art. 9 al. 2 LPR/GE est
claire dans sa formulation et compréhensible tant pour les autorités
qui doivent l'appliquer que pour les administrés. Il est vrai que
la disposition prête à interprétation, en particulier quant à la
portée à attribuer au terme d'"affichage". Cela n'a toutefois rien
d'exceptionnel. Bien au contraire, le législateur, qui doit régler un
nombre indéfini et abstrait de situations, est en effet obligé d'utiliser
une terminologie, dont la portée doit être précisée par les autorités
chargées de l'application de la loi. Or, comme le souligne à juste titre
le législatif genevois dans ses observations au recours, le seul fait que
la norme doive être interprétée n'autorise pas encore à l'invalider, dans
le cadre d'un contrôle abstrait, en raison de sa prétendue imprécision.
L'art. 9 al. 2 LPR/GE ne portant au demeurant pas d'atteinte grave à
la liberté économique des recourants, on ne saurait poser des exigences
trop sévères quant à la précision de sa formulation (sur la question du
degré de précision de la base légale cf. ATF 125 II 417 consid. 6c et la
jurisprudence citée).

    bb) Les recourants contestent aussi l'existence d'un intérêt
public suffisant à justifier une pareille restriction à leurs libertés
constitutionnelles. Ce grief n'est pas fondé. La protection de la santé
de la population, qui est le but principal poursuivi par l'art. 9 al. 2
LPR/GE, constitue sans aucun doute un objectif d'intérêt public qui
justifie la limitation de droits fondamentaux, tels que la liberté
économique. Le fait que ce but ne soit pas explicitement mentionné
à l'art. 1 LPR/GE, qui fixe les objectifs poursuivis par la loi, n'y
change rien.

    cc) Les recourants affirment encore que l'art. 9 al. 2 LPR/GE
violerait le principe de la proportionnalité. A cet égard, ils cherchent
principalement à démontrer l'inexistence d'un lien entre la publicité
pour l'alcool et le tabac et la consommation de ces produits. Pareille
argumentation rappelle l'objection qui avait été soulevée par les milieux
du commerce et de l'industrie dans la procédure de consultation entamée
par le Département fédéral des finances et des douanes le 9 novembre 1973
dans le but d'introduire dans la législation fédérale des limitations en
matière de publicité pour les boissons distillées. Dans son message du 11
décembre 1978 concernant la modification de la loi fédérale sur l'alcool,
le Conseil fédéral avait considéré à ce propos qu'une telle objection
"minimise l'efficacité de la publicité. Le but de toute publicité est
pourtant, au premier chef, de promouvoir les ventes et d'augmenter le
chiffre d'affaires. Des milliards de francs ne seraient pas dépensés chaque
année à des fins publicitaires, si ce but n'était pas atteint. Or, si la
vente de boissons distillées s'accroît, la consommation augmente également"
(FF 1979 I 82). Cet argument, valable aussi en matière de publicité pour
le tabac, conserve toute sa valeur en l'espèce. Il faut en outre souligner
que, lorsque l'évaluation d'une mesure dépend de connaissances techniques
controversées, le Tribunal fédéral n'admet une violation du principe
de proportionnalité que si l'inaptitude de cette mesure à atteindre le
résultat recherché paraît manifeste (ZBl 92/1991 p. 25, 2P.279/1989,
consid. 3d). Tel n'est toutefois pas le cas en l'espèce. En effet, on ne
saurait admettre que le fait de limiter la publicité pour l'alcool et le
tabac sur le domaine public ainsi que sur le domaine privé visible par le
public soit une mesure complètement inapte à limiter la consommation de ces
produits. Il n'est donc pas nécessaire d'examiner plus avant les effets
de la publicité sur la consommation d'alcool et de tabac. Pour le reste,
il faut relever que la restriction découlant de l'art. 9 al. 2 LPR/GE ne
porte aucune atteinte disproportionnée aux intérêts des recourants. Etant
donné que l'Etat de Genève entend mener une politique cohérente de lutte
contre le tabagisme et l'alcoolisme sur tout son territoire, on ne voit pas
quelle autre mesure moins incisive pourrait être prise pour atteindre les
objectifs visés. L'extension de la restriction litigieuse à une partie
de la propriété privée se justifie pour éviter que les buts poursuivis
par le parlement genevois ne soient éludés, en plaçant la publicité hors
du domaine public, là où elle pourrait néanmoins facilement être vue par
le public. De surcroît, l'atteinte envisagée par l'art. 9 al. 2 LPR/GE à
la liberté économique des recourants est limitée. Les conséquences d'une
telle restriction concernent en effet de la même façon tous les concurrents
actifs dans les mêmes branches. Le Grand Conseil genevois a également
souligné à bon droit qu'un seul support publicitaire (l'affichage) est
en l'espèce interdit et qu'il ne l'est qu'à certains endroits (domaine
public et domaine privé visible depuis le domaine public).

    dd) L'interdiction prévue par l'art. 9 al. 2 LPR/GE ne porte pas
non plus atteinte à l'essence des libertés invoquées. En effet, elle ne
limite que très partiellement la possibilité pour les recourants de faire
connaître au public leurs produits et n'empêche pas leur commercialisation.

    c) Par conséquent, en édictant l'art. 9 al. 2 LPR/GE, le Grand Conseil
genevois n'a pas violé l'art. 27 Cst., pas plus du reste que les art. 16
et 17 Cst., pour autant que, comme on vient de le voir (consid. 5a),
ces dispositions soient effectivement applicables en l'espèce.

    6.- Les recourants affirment que l'art. 9 al. 2 LPR/GE ne respecterait
pas la garantie de la propriété, protégée par l'art. 26 Cst.

    a) La garantie de la propriété s'étend - outre à la propriété des
biens meubles et immeubles - aux droits réels restreints, aux droits
contractuels, aux droits de la propriété intellectuelle, à la possession,
ainsi qu'aux droits acquis des citoyens face à la collectivité (GEORG
MÜLLER, in Commentaire de la Constitution de la Confédération suisse,
Bâle/Zurich/Berne, n. 2 ad art. 22ter aCst.). Les titulaires de la garantie
de la propriété sont donc les personnes physiques et morales de droit
privé, détentrices de ces droits, c'est-à-dire les propriétaires, les
titulaires de servitudes, les locataires, les possesseurs, les auteurs, les
concessionnaires, etc. (GEORG MÜLLER, op cit., n. 21 ad art. 22ter aCst.).

    Or, sur ce point, il résulte du dossier que l'entreprise Perisem
SA est titulaire d'un droit de superficie sur le bien-fonds duquel
sont édifiés les bâtiments dans lesquels elle exerce ses activités. On
peut donc admettre qu'elle est fondée à se prévaloir de la garantie de
la propriété et qu'elle peut se plaindre de l'art. 9 al. 2 LPR/GE sous
cet angle. Selon le Grand Conseil genevois, aucun des autres recourants
n'aurait démontré être légitimé à invoquer la garantie constitutionnelle en
cause. A tort. Dans le cadre d'un recours contre un acte normatif cantonal,
la qualité pour agir se détermine à partir de la possibilité virtuelle
d'être un jour touché dans ses intérêts juridiquement protégés par les
dispositions attaquées (sur ce sujet, cf. ATF 102 Ia 201 consid. 3). On
ne peut donc pas exclure que les entreprises, du moins celles qui ont
leur siège dans le canton de Genève, pourraient à l'avenir être touchées
en tant que propriétaires par l'interdiction de publicité en question,
suite à l'acquisition de droits réels sur le territoire cantonal.

    b) Sur le fond, le grief doit être rejeté pour des motifs identiques
à ceux qui ont déjà été exposés ci-devant (cf. consid. 5b/aa). L'art. 9
al. 2 LPR/GE constitue une base légale suffisamment précise aussi pour
restreindre le droit à la propriété. Au demeurant, il ne touche que de
manière limitée les possibilités d'exploitation des biens-fonds privés, qui
restent en principe libres d'accueillir de la publicité pour tout produit,
sauf le tabac et les boissons avec un taux d'alcool supérieur à 15 volumes
pour cent. La limitation de la garantie de propriété que comporte l'art. 9
al. 2 LPR/GE, visant à protéger la santé publique, est justifiée par un
intérêt public prépondérant. Ce but pourrait être facilement éludé si
l'interdiction prévue par cette disposition ne concernait pas aussi la
propriété privée visible depuis le domaine public. Par ailleurs, on a déjà
vu que des riverains du domaine public peuvent se voir imposer certaines
règles et obligations destinées à protéger les qualités du domaine public
ou une utilisation de celui-ci conforme à sa destination. A noter encore
qu'en ce qui concerne les procédés de réclame dits "pour compte propre",
c'est-à-dire les procédés dont l'emplacement est connexe ou en rapport
avec les entreprises, les produits, les prestations de services ou les
manifestations pour lesquels ils font de la réclame, la loi prévoit aux
art. 18 ss des règles spéciales, qui devraient en tout cas permettre
aux maisons actives dans le commerce du tabac et de l'alcool de poser
leurs propres marques sur les bien-fonds qu'elles occupent. Cela permet
de relativiser les conséquences que la disposition attaquée peut avoir
sur le droit de propriété des recourants.

    c) En édictant l'art. 9 al. 2 LPR/GE, le Grand Conseil genevois n'a
par conséquent pas non plus violé l'art. 26 Cst.

Erwägung 7

    7.- a) Les recourants affirment encore que l'art. 9 al. 2 LPR/GE
serait contraire au principe de l'égalité de traitement (art. 8 Cst.) et
violerait l'interdiction de l'arbitraire (art. 9 Cst.).

    Ce dernier grief ne remplit toutefois pas les exigences de motivation
posées par la jurisprudence relative à l'art. 90 al. 1 OJ, en vertu de
laquelle, dans un recours pour arbitraire fondé sur l'art. 9 Cst., les
recourants ne peuvent se contenter de critiquer les dispositions attaquées
comme ils le feraient dans une procédure d'appel où l'autorité de recours
peut revoir librement l'application du droit. Ils doivent préciser en quoi
la réglementation en cause serait arbitraire, ne reposerait sur aucun motif
sérieux et objectif, apparaîtrait insoutenable ou heurtant gravement le
sens de la justice. Or, les recourants ne parviennent pas à expliquer
pour quelles raisons la disposition attaquée devrait être considérée
comme insoutenable au point d'apparaître arbitraire (sur cette notion,
cf. ATF 127 I 60 consid. 5a et les arrêts cités). De toute manière,
ce grief se confond avec les autres griefs soulevés, dont celui de la
violation de l'égalité de traitement, qui sera examiné ci-après.

    b) Un arrêté de portée générale est contraire au principe de
l'égalité au sens de l'art. 8 Cst. lorsqu'il établit des distinctions
juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard
de la situation de fait à réglementer ou lorsqu'il omet de faire des
distinctions qui s'imposent au vu des circonstances, c'est-à-dire lorsque
ce qui est semblable n'est pas traité de manière identique et ce qui
est dissemblable ne l'est pas de manière différente; cela suppose que le
traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation
de fait importante (ATF 127 I 185 consid. 5 et la jurisprudence citée).

    c) aa) Selon les recourants, la disposition querellée est
discriminatoire, puisqu'elle ne vise pas, excepté l'affichage, les médias
les plus importants en matière de publicité pour l'alcool et le tabac. Ils
reprochent au législateur genevois de ne pas avoir démontré que le support
même du message publicitaire, selon qu'il relève de l'affichage ou des
médias, commanderait que la publicité soit totalement interdite dans le
premier cas, tout en demeurant possible dans le second.

    Cet argument est mal fondé. La publicité sur la voie publique
ou visible depuis celle-ci, quel que soit son support, concerne
sans distinction toute personne qui fait usage du domaine public. La
publicité diffusée à travers les médias est par contre plus ciblée.
Elle ne touche en principe que les catégories de public auxquelles le
média concerné s'adresse. Certes, il se trouve davantage de publicité
en faveur de l'alcool et du tabac dans les journaux, les magasins ou au
cinéma que sur la route, les places ou les murs des immeubles publics
ou privés. Ce dernier procédé de diffusion de la publicité s'adresse
toutefois à un cercle illimité de personnes et constitue donc un
important moyen de transmission du message commercial. De surcroît, il
faut tenir compte du fait que la presse est un moyen de communication qui
ne peut pas être arrêté aux frontières cantonales, raison pour laquelle,
dans ce domaine, une interdiction de réclame valable uniquement sur le
territoire d'un seul canton serait pratiquement très difficile, voire
impossible, à faire respecter. En ce qui concerne les autres médias,
tels que la radio et la télévision, il faut rappeler que les cantons
n'ont pas la compétence d'édicter des règles sur la publicité, étant
donné que l'art. 93 Cst. réserve ce domaine au législateur fédéral. En
ce sens, l'interdiction sélective prévue par l'art. 9 al. 2 LPR/GE,
en tant qu'elle est fondée sur des raisons objectives et sérieuses,
ne peut pas être considérée comme discriminatoire.

    bb) Selon les recourants, l'art. 9 al. 2 LPR/GE contrevient d'une
autre manière encore au principe de l'égalité de traitement en ce qu'il
interdit l'affichage de publicité en faveur des alcools de plus de 15
volumes pour cent, alors que la publicité en faveur de boissons avec un
taux d'alcool inférieur est autorisée.

    La distinction prévue par l'art. 9 al. 2 LPR/GE pourrait cacher
une mesure destinée à favoriser les producteurs et les commerçants de
vin et de bière qui ne sont pas soumis à l'interdiction de faire de la
publicité. Il est vrai que même en droit fédéral les restrictions prévues
par l'art. 42b Lalc ne touchent que les boissons avec un taux d'alcool
supérieur à 15 pour cent du volume. Cette distinction résulte toutefois
de l'art. 105 Cst., qui ne donne à la Confédération la possibilité de
légiférer qu'en matière de boissons distillées, au sens de l'art. 2
Lalc, et ne lui permet pas d'intervenir sur les alcools légers (cf. FF
1979 I 82 et 83). Le législatif genevois a expliqué que son choix a été
déterminé par le caractère intrinsèquement plus dangereux pour la santé des
alcools forts. Cette justification repose sur des motifs objectivement
soutenables. Il n'est pas contesté que plus la teneur en alcool d'une
boisson est élevée, plus sa consommation peut avoir des effets dangereux
pour la santé. En outre, la forte chute des prix qui s'est produite durant
ces dernières années dans le domaine des alcools distillés rend ce genre de
produits encore plus facilement accessibles aux consommateurs et conduit
à reconnaître un intérêt accru à en freiner la consommation. Dans ces
conditions, une intervention de l'Etat visant à limiter la demande des
alcools forts ne peut pas être considérée comme contraire au principe de
l'égalité de traitement, du seul fait qu'elle n'imposerait pas les mêmes
restrictions pour la publicité des alcools légers.

    III. Art. 2, 3 al. 1, 4 et 24 al. 1 LPR/GE

Erwägung 8

    8.- Le régime légal institué par les art. 2, 3 al. 1, 4 et 24 al.
1 LPR/GE soumet au contrôle de l'administration les procédés de réclame
placés tant sur le domaine public que sur le domaine privé visible depuis
le domaine public. Les recourants ne contestent pas le contrôle des
procédés de réclame situés sur le domaine public, jugeant que ce domaine
relève de la gestion des biens de l'Etat au sens de l'art. 664 al. 1
CC. Ils critiquent en revanche le contrôle des procédés publicitaires
situés sur le domaine privé. Ils se prévalent à ce propos de la garantie
de la propriété et de la liberté économique.

    a) Pour les motifs déjà exposés ci-dessus (cf. consid. 6a), la société
Perisem SA et les recourants qui ont leur siège dans le canton de Genève
sont en principe légitimés à faire valoir la violation de la garantie de
la propriété. Quant au grief tiré de la violation de la liberté économique,
tous les recourants disposent certainement de la qualité pour agir.

    b) aa) Sur le fond, les arguments des recourants sont mal fondés
et doivent être rejetés. Le régime d'autorisation introduit par les
dispositions litigieuses ne comporte aucune atteinte grave aux deux
garanties constitutionnelles invoquées; elles doivent en effet être
considérées comme suffisamment précises et claires. En particulier,
le contenu de l'art. 2 LPR/GE, qui définit le concept de "procédé de
réclame", n'est pas vague au point de ne pas respecter l'exigence d'une
base légale claire, découlant de l'art. 36 al. 1 Cst. Au surplus, les
art. 1, 3 et 4 du règlement d'application de la loi sur les procédés de
réclame du 11 octobre 2000 précisent encore le sens de certaines notions
prévues par l'art. 2 LPR/GE. Pour le reste, il incombera aux autorités
chargées de l'application de la loi et, le cas échéant, à la jurisprudence
de clarifier la portée de cette disposition, car on ne peut exiger du
législateur qu'il définisse jusque dans les moindres détails des notions
qui sont au demeurant suffisamment précises.

    bb) Les dispositions litigieuses poursuivent des buts dignes de
protection. En effet, la nécessité de réglementer l'affichage publicitaire
- et plus généralement les procédés de réclame - a été reconnue depuis
longtemps par la jurisprudence dans son principe, pour des raisons de
sécurité du trafic et de protection du paysage et des sites urbains
(ATF 100 Ia 445 consid. 5b; 60 I 268 consid. 2a). Dans le droit fil
de cette jurisprudence, le Tribunal fédéral a récemment considéré que,
pour atteindre ces objectifs, il faut tenir compte de tous les procédés
de réclame perceptibles du domaine public, indépendamment du fait qu'ils
soient placés sur un bien-fonds public ou privé (ATF 128 I 3 consid.
3e/bb). Au niveau fédéral, par exemple, l'obligation prévue par l'art. 100
OSR (RS 741.21) d'obtenir une autorisation pour poser des réclames le
long des routes concerne aussi bien le domaine public que le domaine
privé. Une réglementation limitée au seul domaine public ne serait
donc que très partielle et ne permettrait pas de réaliser les buts que
le législateur s'est proposé d'atteindre en limitant la publicité en
faveur de l'alcool et du tabac. En particulier, il s'agit d'éviter que
la réglementation applicable au domaine public en matière de procédés
de réclame ne puisse être vidée de son sens par le simple déplacement du
procédé publicitaire sur une propriété privée voisine du domaine public
et visible depuis celui-ci.

    cc) S'agissant des modalités mises en oeuvre pour atteindre de tels
objectifs, le Tribunal fédéral a pendant longtemps considéré comme
compatible avec la Constitution l'institution de monopoles de droit
d'affichage sur le domaine public et privé (ATF 100 Ia 445 consid. 5c). La
jurisprudence en la matière a cependant été modifiée tout récemment. Dans
la mesure où il touche la propriété privée, un tel monopole représente
une atteinte disproportionnée à la liberté économique. Le Tribunal
fédéral a jugé que l'obligation d'obtenir une autorisation, dont l'octroi
est subordonné au respect de normes de droit matériel, suffisait pour
réaliser les buts d'intérêt public poursuivis par une loi en matière
d'affichage de publicité (ATF 128 I 3 consid. 3e/cc). Tel est bien le
cas en l'espèce: le législateur genevois ayant opté pour l'introduction
d'un système d'autorisation des procédés de réclame, celui-ci se révèle
ainsi compatible avec le principe de proportionnalité.

    dd) En édictant les art. 2, 3 al. 1, 4 et 24 al. 1 LPR/GE, le
législateur genevois n'a donc pas violé les art. 26 et 27 Cst.

    IV. Art. 8 al. 2 LPR/GE

Erwägung 9

    9.- Les recourants contestent aussi la constitutionnalité de l'art. 8
al. 2 LPR/GE, en vertu duquel les procédés de réclame sur les façades
borgnes des bâtiments sont en principe interdits.

    a) aa) Ils font tout d'abord valoir la violation de la garantie de la
propriété (art. 26 Cst.). Les recourants, et en particulier les entreprises
qui ont leur siège dans le canton de Genève, sont en principe légitimés
à soulever un tel grief. Même si aucun d'entre eux n'a pu démontrer être
titulaire de droits réels ou personnels sur des façades borgnes dans le
canton de Genève, il n'est pas exclu qu'un jour ils pourraient acquérir
de tels droits et être ainsi touchés dans leurs intérêts juridiquement
protégés par la disposition attaquée.

    bb) Sur le fond, le grief doit être rejeté. L'art. 8 al. 2 LPR/GE,
adopté surtout pour des raisons d'ordre esthétique et urbanistique, est
fondé sur une base légale suffisante, dont le contenu est justifié par
un intérêt public digne de protection. Il s'agit en effet de préserver
le paysage urbain de la prolifération de la publicité sur les murs
des immeubles. Les façades borgnes des bâtiments se prêtent en effet
à accueillir des procédés publicitaires de très grande dimension ayant
un fort impact sur le décor urbain. La restriction en cause respecte en
outre le principe de proportionnalité, puisque l'atteinte qu'elle porte au
droit de propriété est limitée et qu'elle prévoit une interdiction apte
à atteindre le but poursuivi. En plus, l'art. 8 al. 2 LPR/GE ne prévoit
pas une interdiction absolue, mais sa formulation laisse aux autorités
la possibilité d'accorder des dérogations.

    b) Les recourants soutiennent que cette norme violerait aussi la
liberté économique. Le grief, recevable, doit être rejeté pour des raisons
analogues à celles qu'on vient d'exposer. A cela s'ajoute qu'à l'instar de
ce que souligne l'intimé, la disposition transitoire de l'art. 42 LPR/GE,
qui fixe une période de deux à cinq ans pour éliminer les procédés de
réclame existants et non conformes à la nouvelle loi, permet d'éviter
que, dans certains cas particuliers, le principe de la proportionnalité
ne soit violé.