Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 128 IV 225



128 IV 225

34. Extrait de l'arrêt de la Chambre d'accusation dans la cause
X. contre Procureur général du canton de Genève et Ministère public de
la Confédération

    8G.46/2002 du 25 juin 2002

Regeste

    Art. 340bis StGB und Art. 260 BStP; neue Zuständigkeiten des Bundes
gemäss der "Effizienzvorlage"; Gesuch des Beschuldigten. Übergangsrecht.

    Die Anklagekammer entscheidet Konflikte über die Frage, ob die
Bundes- oder die kantonalen Strafverfolgungsbehörden zuständig sind,
in Anwendung von Art. 260 BStP; die Art. 18bis Abs. 3 und 105bis BStP
sind nicht anwendbar. Die Gesuche auf diesem Gebiet werden behandelt wie
ein interkantonal streitiger Gerichtsstand (Art. 351 StGB und 264 BStP;
E. 2.1-2.3).

    Da besondere Übergangsbestimmungen fehlen, gilt die allgemeine Regel
von Art. 171 Abs. 1 OG (E. 3.2).

    Eine neue Anzeige muss mit einem früheren Verfahren, mit dem sie in
tatsächlicher Hinsicht zusammenhängt, vereinigt werden, ohne dass dies
zu einer Änderung der Zuständigkeit führen würde (E. 3.3).

    Ein Abweichen vom gesetzlichen Gerichtsstand gemäss der Rechtsprechung
zu den Art. 351 StGB und 264 BStP bleibt vorbehalten (E. 3.4).

Sachverhalt

    A.- Au début du mois de novembre 1997, une procédure pénale a été
ouverte à Genève pour blanchiment d'argent. Dans le cours de cette
procédure, X. a été inculpé de blanchiment d'argent, de défaut de vigilance
en matière d'opérations financières et de soustraction d'objets mis sous
main de l'autorité (art. 305bis, 305ter et 289 CP).

    L'inculpé a contesté la compétence des autorités genevoises et suisses
en se fondant sur l'art. 340bis CP (en vigueur dès le 1er janvier 2002)
ainsi que sur les art. 3 et 6 CP. Le Juge d'instruction genevois s'est
déclaré compétent le 28 janvier 2002. Contre cette décision, l'inculpé
a saisi la Chambre d'accusation du canton de Genève d'un recours le 7
février 2002.

    Le Procureur général de la Confédération, le Procureur général du
canton de Genève, le Juge d'instruction genevois chargé de l'enquête et
la partie civile (une société étrangère en liquidation) ont déposé des
observations; ils ont demandé que la compétence des autorités genevoises
soit reconnue.

    Le 10 avril 2002, l'inculpé a obtenu la suspension de l'instruction
de son recours devant l'autorité cantonale, afin de pouvoir saisir la
Chambre d'accusation du Tribunal fédéral d'une plainte.

    B.- Le 25 avril 2002, l'inculpé a saisi la Chambre de céans d'une
plainte (art. 105bis PPF [RS 312.0]) contre l'omission du Procureur
général de la Confédération de se saisir de la procédure en question.

    D'après le plaignant, il ressortirait des modifications du CP et de
la PPF, introduites à la suite de l'adoption du "Projet d'efficacité" (RO
2001 p. 3071 ss) , que dans le domaine visé par le nouvel art. 340bis CP,
le Ministère public de la Confédération devrait reprendre immédiatement
l'instruction des procédures pendantes dans les cantons et qu'il ne
saurait renoncer à cette compétence, même en période transitoire.

    C.- Dans ses observations du 13 mai 2002, le Ministère public de la
Confédération (abrégé MPC) conclut au rejet de la plainte en tous points,
dans la mesure où elle est recevable, sous suite de frais et dépens. Selon
lui, pour l'essentiel, il y aurait une lacune proprement dite de la
loi en ce sens qu'une réglementation transitoire a été omise par le
législateur. Vu les travaux préparatoires et le but d'efficacité visé,
il s'imposerait de combler cette lacune en n'obligeant pas le Ministère
public, dont les moyens sont encore limités, à reprendre séance tenante
les quelque 90 procédures actuellement instruites par les autorités
cantonales. Au demeurant, on ne discernerait pas en quoi l'inculpé serait
lésé par cette solution, à moins qu'il n'ait des visées dilatoires.

    D.- Le Procureur général du canton de Genève a également présenté des
observations. Il conclut au rejet de la plainte dans la mesure où elle
est recevable. Il fait état d'un accord conclu avec le MPC aux termes
duquel les procédures en cours au 1er janvier 2002 restent traitées par
les cantons. Il souligne que le risque de conflit négatif est ainsi exclu.

    E.- Le second échange d'écritures n'a pas apporté d'éléments
déterminants.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Extrait des considérants:

Erwägung 1

    1.  Selon l'art. 340bis CP (en vigueur dès le 1er janvier 2002,
RO 2001 p. 3071), sont soumises à la juridiction fédérale notamment les
infractions aux art. 305bis et 305terCP, si les actes punissables ont
été commis pour une part prépondérante à l'étranger, ou si les actes
punissables ont été commis dans plusieurs cantons sans qu'il y ait de
prédominance évidente dans l'un d'entre eux. D'après l'art. 18bis PPF
(en vigueur dès le 1er janvier 2002, RO 2001 p. 3072), dans les cas où
la compétence du MPC découle de l'art. 340bis CP, le MPC a la faculté de
déléguer aux autorités cantonales le jugement, mais non pas l'instruction
de l'affaire, sauf pour les cas simples.

    En l'espèce, au stade où se trouvent les investigations du Juge
d'instruction genevois, on ne saurait exclure d'emblée que l'affaire puisse
réunir les conditions prévues à l'art. 340bis CP, ce qui fonderait en
principe la compétence fédérale.

Erwägung 2

    2.  Il faut en premier lieu déterminer quelle est la disposition légale
qui confère à la Chambre d'accusation du Tribunal fédéral la compétence
de connaître du présent litige.

    2.1  L'art. 18 al. 4 PPF auquel renvoie l'art.  18bis al. 3 PPF (en
vigueur tous deux dès le 1er janvier 2002, RO 2001 p. 3072 ss) prévoit
la compétence de la Chambre de céans en cas de conflit entre le MPC et
les autorités cantonales au sujet de la délégation et de la jonction des
affaires. Ici cependant, le MPC n'a pas pris de décision de délégation
ou de jonction. L'art. 18 al. 4 PPF ne s'applique donc pas à la plainte
de l'inculpé.

    2.2  Le plaignant et le MPC se réfèrent à l'art.  105bis al. 2 PPF
aux termes duquel les opérations et les omissions du procureur général
peuvent faire l'objet d'une plainte devant la Chambre d'accusation,
plainte soumise à la procédure prévue aux art. 214 à 219 PPF; l'art. 217
PPF (en vigueur dès le 1er janvier 2002, RO 2001 p. 3312) prévoit un
délai de 5 jours pour porter plainte.

    Dans le cas du plaignant, le MPC a refusé de se saisir de l'affaire,
certes sans décision formelle, mais il paraît artificiel de qualifier
d'omission sa prise de position. De plus, l'absence de décision formelle
ne constitue pas une lacune imputable aux autorités concernées; comme
dans les conflits de compétence portant sur le for intercantonal, les
autorités ne sont pas tenues, en règle générale, d'attirer l'attention des
parties sur leur droit de saisir la Chambre de céans ni de leur impartir
un délai à cet effet. Il appartient à celles-ci de suivre le déroulement
de la procédure et de soulever une éventuelle question de compétence le
plus tôt possible (voir SCHWERI, Interkantonale Gerichtsstandsbestimmung
in Strafsachen, Berne 1987, p. 164 n. 510).

    Ainsi, faute d'une décision formelle avec indication d'un délai de
recours, la voie prévue à l'art. 105bis PPF est impraticable ici.

    2.3  Aux termes de l'art. 260 PPF (en vigueur dès le 1er janvier 2002,
RO 2001 p. 3073), la Chambre d'accusation du Tribunal fédéral tranche les
litiges entre le Procureur général de la Confédération et les autorités
cantonales de poursuite pénale portant sur la compétence d'enquêter
en matière de criminalité économique et de crime organisé au sens de
l'art. 340bis du code pénal. Cette disposition est calquée sur l'art. 264
PPF, en vigueur depuis le 1er janvier 1945, d'après lequel la Chambre
de céans désigne le canton qui a le droit et le devoir de poursuivre et
de juger s'il y a contestation entre les autorités de différents cantons
ou si l'inculpé conteste la juridiction d'un canton. Certes, l'art. 260
PPF ne mentionne pas ce droit de l'inculpé, mais on doit admettre qu'il
s'agit d'une lacune proprement dite de la loi; en effet, s'agissant de
l'art. 18 al. 4 PPF - voir consid. 2.1 ci-avant -, le message sur le
"Projet d'efficacité" (FF 1998 p. 1271) mentionnait expressément les
inculpés comme titulaires d'un droit de plainte (voir BÄNZIGER/LEIMGRUBER,
Le nouvel engagement de la Confédération dans la poursuite pénale,
Commentaire succinct du "Projet d'efficacité", Berne 2001, n. 88 ad art. 18
PPF). Or, si l'inculpé est habilité à déposer une plainte au sujet de la
délégation ou de la jonction d'une affaire par le MPC, il doit en aller
de même face à un conflit de compétence au sens de l'art. 260 PPF et
cela comme en matière de conflits intercantonaux prévus à l'art. 264 PPF
en liaison avec l'art. 351 CP. Les inculpés doivent pouvoir contester la
compétence des cantons ou de la Confédération, cela même en présence d'un
accord entre les autorités. Sur ce point, une application par analogie
de l'art. 264 PPF et de la jurisprudence qui en découle (ATF 69 IV 189;
120 IV 146 consid. 1, 282 consid. 2) s'impose.

    Cette solution conduit à considérer que la plainte de l'inculpé doit
être traitée comme une plainte au sujet du for, non soumise à un délai
précis, mais qu'il faut déposer dans un laps de temps raisonnable à partir
du moment où l'inculpé a connaissance des éléments nécessaires (ATF 120
IV 146 consid. 1). En l'espèce, l'acte du plaignant, mis à la poste le 25
avril 2002, répond à ces exigences. La plainte est à cet égard recevable.

Erwägung 3

    3.  Le plaignant fait valoir que l'art. 340bis CP serait d'application
immédiate faute de dispositions transitoires, qu'en matière de procédure et
de for il n'y aurait pas de rétroactivité, que l'absence de dispositions
transitoires serait voulue par le législateur afin que les spécialistes
de la Confédération assurent sans délai une conduite centralisée dans
les domaines complexes visés et que le refus par le MPC de sa compétence
violerait l'art. 30 al. 1 Cst. ainsi que les exigences de la CEDH (RS
0.101) quant au jugement par un tribunal établi par la loi.

    3.1  Il est incontesté que des dispositions transitoires spécifiques
pour les nouvelles compétences de la Confédération dans les domaines du
crime organisé et de la criminalité économique (RO 2001 p. 3071 ss et 3308
ss) font défaut. Le MPC en explique le motif; le Message du Conseil fédéral
ne prévoyait pas de droit transitoire car seule une compétence fédérale
facultative était proposée. Cela aurait permis au MPC de reprendre les
cas en fonction des ressources disponibles; des dispositions transitoires
n'étaient donc pas nécessaires.

    Cependant, les propositions du Conseil fédéral ont été sensiblement
modifiées par le Parlement et la compétence obligatoire en matière
de crime organisé fut imposée. La Conseillère fédérale en charge du
dossier a d'ailleurs déclaré devant le Conseil national que, compte
tenu de l'extension des tâches du Procureur général de la Confédération,
il ne pourrait dans une première phase exercer ses compétences qu'avec
retenue, que des exigences plutôt élevées seraient posées pour les cas de
juridiction obligatoire et que le projet ne serait totalement opérationnel
qu'après quelques années (BO 1999 CN 2409).

    La question de savoir si l'absence de dispositions transitoires
constitue une lacune proprement dite de la loi, ou si le législateur a
considéré que l'art. 260 PPF permettait de fixer les règles nécessaires via
la jurisprudence de la Chambre de céans, peut demeurer ouverte. Dans un cas
comme dans l'autre, il appartient à la Chambre de céans de se prononcer.

    3.2  Selon l'art. 171 al. 1 OJ, les anciennes dispositions en matière
de compétence et de procédure restent applicables aux affaires portées
avant le 1er janvier 1945 devant le Tribunal fédéral ou dont le délai de
recours a commencé à courir avant cette date. Il est possible de déduire
de cette disposition une règle générale (voir arrêts 4C.229/2000 du 27
novembre 2001, consid. 1a et 4C.145/1994 du 12 février 2002, consid. 1a;
POUDRET/SANDOZ, Commentaire OJ, vol. V, Berne 1992, art. 171 OJ n. 1);
cette règle générale est exprimée également à l'art. 197 al. 1 LDIP
(RS 291) entré en vigueur en 1989.

    En cas de modification de la répartition des tâches entre les
juridictions cantonales et la juridiction fédérale, cette règle générale,
qui repose largement sur des considérations d'économie de procédure,
prévoit que les affaires pendantes au moment de l'entrée en vigueur du
nouveau droit restent soumises à la compétence de l'autorité compétente
selon l'ancien droit. Pour l'application de la loi sur l'efficacité,
il faut déduire de cette règle générale que l'ancienne réglementation
sur la compétence prévaut si la procédure pénale a été ouverte avant le
1er janvier 2002.

    3.3  Les considérations qui précèdent ne signifient pas qu'il
suffirait de déposer une nouvelle plainte ou une nouvelle dénonciation,
après le 31 décembre 2001, pour obtenir le transfert d'une procédure
déjà en cours devant l'autorité cantonale. Lorsqu'il y a une connexité
résultant des faits de la cause, la nouvelle procédure doit être jointe
à l'ancienne sans que cela provoque une modification de compétence qui
irait à l'encontre du principe de l'économie de procédure.

    3.4  Demeure cependant réservée une dérogation exceptionnelle au for
légal, que la Chambre de céans pourrait admettre selon la jurisprudence
découlant notamment des art. 351 CP et 264 PPF (voir ATF 123 IV 23;
SCHWERI, op. cit., p. 130 n. 383 ss). Or, en l'espèce, on ne discerne
aucun motif sérieux, au sens de la jurisprudence relative à l'art. 351 CP,
en liaison avec l'art. 264 PPF, propre à imposer le transfert du dossier
au MPC.

    3.5  La solution retenue ici, mieux que celle préconisée par le
plaignant, doit permettre de respecter l'exigence de célérité formulée
par l'art. 6 par. 1 CEDH. En effet, le transfert de dossiers volumineux
à une autre autorité, qui devrait en reprendre entièrement l'étude,
aurait un effet dilatoire contraire à l'intérêt public et à celui du
prévenu. La recherche de l'efficacité est d'ailleurs également à l'origine
des nouvelles dispositions légales entrées en vigueur le 1er janvier 2002.

    3.6  Ainsi, une application de la règle générale de l'art. 171 al. 1
OJ, faute d'autres dispositions transitoires, et l'absence de motifs
sérieux imposant une dérogation au for légal, conduisent à considérer
que le MPC n'a pas violé le droit fédéral en déclinant sa compétence.

Erwägung 4

    4.  En conclusion, les modifications de compétence découlant de
l'adoption de l'art. 340bis CP n'imposent pas le transfert immédiat au MPC
des procédures pendantes devant les autorités cantonales. Le plaignant
n'est pas lésé par cette solution qui ne le prive pas d'un tribunal
établi par la loi au sens de l'art. 30 al. 1 Cst. et de la CEDH; elle
ne donne pas non plus une portée rétroactive au nouveau droit. Dès lors,
la plainte doit être rejetée.