Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 127 I 92



127 I 92

11. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 13 novembre 2000 dans
la cause G. et la S.I. X. contre la Banque Y. et T. (recours de droit
public) Regeste

    Art. 87 OG; Teilentscheid.

    Aus Gründen der Prozessökonomie Zulässigkeit einer staatsrechtlichen
Beschwerde gegen einen Teilentscheid, der endgültig die Frage des gegen
einen der passiven Streitgenossen gerichteten Anspruchs regelt, obwohl
diesbezüglich auch getrennt hätte Klage erhoben werden können (E. 1).

Sachverhalt

    A.- Dans le cadre d'une opération immobilière mise en place par le
notaire T., la banque Y. a accordé un prêt de deux millions à G. et à la
société immobilière X.

    La banque a remis la somme prêtée au notaire, qui a fait un usage
contesté des fonds obtenus.

    G. et la SI X. ont intenté une action en paiement à l'encontre de
la banque Y. et du notaire T. Les parties ont décidé de limiter, dans
un premier temps, la procédure à la question de la responsabilité de la
banque. Celle-ci a été retenue en première instance, alors que la cour
cantonale a considéré, dans un arrêt du 23 juin 2000, que la banque ne
devait pas répondre du dommage que prétendaient avoir subi G. et la SI
X., tout en renvoyant la cause à l'autorité de première instance pour
suite d'instruction.

    Contre cet arrêt, G. et la SI X. interjettent un recours de droit
public au Tribunal fédéral.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Extrait des considérants:

Erwägung 1

    1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et avec une pleine cognition
la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 126 I 81 consid. 1,
207 consid. 1 et les arrêts cités).

    a) Selon l'art. 87 OJ, dans sa teneur au 8 octobre 1999 entrée en
vigueur le 1er mars 2000 (RO 2000 p. 417), le recours de droit public
est recevable contre les décisions préjudicielles et incidentes sur la
compétence et sur les demandes de récusation, prises séparément; ces
décisions ne peuvent être attaquées ultérieurement (al. 1); le recours
de droit public est recevable contre d'autres décisions préjudicielles et
incidentes prises séparément s'il peut en résulter un préjudice irréparable
(al. 2); lorsque le recours de droit public n'est pas recevable en vertu
de l'al. 2 ou qu'il n'a pas été utilisé, les décisions préjudicielles et
incidentes peuvent être attaquées avec la décision finale.

    Dans le cas d'espèce, l'action est intentée contre deux défendeurs -
la banque et le notaire - qui forment une consorité simple. Sur le plan
cantonal, il a été décidé de limiter dans un premier temps la procédure
à l'un des deux consorts passifs, à savoir la banque, et l'action dirigée
contre celle-ci a été, du moins implicitement, rejetée en seconde instance
par l'arrêt attaqué. La procédure cantonale ne peut ainsi se poursuivre
qu'à l'encontre du notaire.

    Le rejet de l'action envers l'un des deux consorts constitue une
décision partielle. Selon une acception générale, une telle décision a un
caractère final (du point de vue de la banque), mais elle ne met pas fin à
l'instance, car le procès n'est pas encore terminé envers l'autre partie
(cf. BERNARD CORBOZ, Le recours immédiat contre une décision incidente,
in SJ 1991 p. 621).

    b) Ce n'est qu'en matière de recours de droit administratif qu'une
telle décision est considérée comme finale (cf. ATF 107 Ib 341 consid. 1;
CORBOZ, op. cit., p. 623). S'agissant du recours de droit public,
la jurisprudence assimile les sentences partielles à des décisions
incidentes au sens de l'art. 87 OJ (cf. ATF 123 I 325 consid. 3b, qui se
fonde sur l'ATF 116 II 80 consid. 2b, critiqué - sous l'angle du droit
de l'arbitrage - par JEAN-FRANÇOIS POUDRET, La recevabilité du recours
au Tribunal fédéral contre la sentence partielle de l'art. 188 LDIP,
in JdT 1990 I p. 354 ss; du même auteur, La recevabilité du recours au
Tribunal fédéral contre une sentence partielle, in BullASA 1990 p. 237 ss,
et Remarques au sujet des articles 190 et 191 LDIP, in BullASA 1992 p. 79
s.; cf. également GABRIELLE KAUFMANN-KOHLER, Art. 190 et 191 LDIP: Les
recours contre les sentences arbitrales, in BullASA 1992 p. 64 ss, 73 ss;
ANTON HEINI, Anmerkungen zu art. 186-189, in BullASA 1992 p. 52 ss, 56 s.).

    En matière de recours en réforme, le jugement partiel n'est pas non
plus considéré comme une décision finale visée par l'art. 48 OJ, bien
que la pratique le distingue des décisions préjudicielles ou incidentes
(ATF 124 III 406 consid. 1a). Le recours immédiat contre les sentences
partielles est ainsi soumis à un régime particulier (ATF 124 III 406
consid. 1a; 123 III 140 consid. 2a et les références citées), dicté par
des motifs d'économie de procédure (cf. ATF 117 II 349 consid. 2a; 107
II 349 consid. 2 p. 353).

    Lorsqu'un jugement partiel fait à la fois l'objet d'un recours de
droit public et d'un recours en réforme, il convient de s'en tenir à la
jurisprudence selon laquelle, si la voie du recours en réforme est ouverte,
le recours de droit public sera également considéré comme recevable, même
en l'absence de dommage irréparable au sens de l'art. 87 OJ (cf. ATF 117
II 349 consid. 2b p. 351 par analogie).

    c) Dans l'hypothèse où une décision partielle n'est attaquée que par
la voie du recours de droit public, l'application de l'art. 87 OJ impose
de résoudre la question du préjudice irréparable. Selon la jurisprudence
relative à l'ancien article 87 OJ dont il n'y a pas lieu de se départir
sous l'empire du nouveau droit (cf. ATF 126 I 207 consid. 2), il faut,
pour qu'un préjudice puisse être qualifié d'irréparable, qu'il cause un
inconvénient de nature juridique. Tel est le cas lorsqu'une décision finale
même favorable au recourant ne le ferait pas disparaître entièrement,
en particulier lorsque la décision incidente contestée ne peut plus être
attaquée avec la décision finale, rendant ainsi impossible le contrôle
constitutionnel par le Tribunal fédéral (ATF 118 II 369 consid. 1; 116
Ia 446 consid. 2; WALTER KÄLIN, Das Verfahren der staatsrechtlichen
Beschwerde, 2e éd., Berne 1994, p. 342 et les références citées). En
revanche, un dommage de pur fait, tel que la prolongation de la procédure
ou un accroissement des frais de celle-ci, n'est pas considéré comme
irréparable (ATF 123 I 325 consid. 3c p. 328 s.; 122 I 39 consid. 1a/bb
p. 42). Un jugement partiel portant sur une question matérielle ne remplira
en pratique quasiment jamais les exigences liées au préjudice irréparable,
dès lors qu'il est par définition possible de l'attaquer avec la décision
mettant fin au litige. En l'occurrence, l'arrêt entrepris qui concerne la
banque pourrait encore être remis en cause par le biais d'un recours contre
la décision finale relative au notaire. Or, la seule perte de temps n'est
pas déterminante au regard de l'art. 87 OJ. En outre, la situation des
recourants sur le plan juridique ne se péjore en tout cas pas, puisque le
litige peut faire l'objet d'un recours en réforme. Dans cette hypothèse
en effet, le jugement partiel n'entre pas en force de chose jugée tant
que le jugement final (qui porte sur tout le litige) est encore pendant
et que, partant, la voie du recours en réforme à son encontre est ouverte
(cf. art. 48 al. 3 OJ en rapport avec l'art. 54 al. 2 OJ). Par conséquent,
si l'on s'en tenait strictement à l'art. 87 OJ, le recours devrait être
déclaré irrecevable.

    d) Une telle solution n'est pourtant pas satisfaisante, car elle ne
tient pas compte des particularités d'une décision partielle qui, comme
en l'espèce, met définitivement fin à l'action dirigée contre l'un des
consorts, alors que cette action aurait aussi pu être formée séparément. Il
semble difficilement concevable d'exiger de la banque qu'elle attende une
décision finale qui ne la concerne plus et dont elle ignore quand et de
quelle manière (par jugement, transaction ou retrait) elle sera rendue,
ce qui influence également sa possibilité de recourir.

    Dans ces circonstances, il n'y a pas de raison que le principe de
l'économie de la procédure, qui est sous-jacent à l'admission, dans
certaines circonstances, du recours en réforme immédiat à l'encontre
de décisions partielles (cf. supra let. c), ne prévale pas aussi
lorsqu'une telle décision ne fait l'objet que d'un recours de droit
public. La jurisprudence s'est du reste déjà fondée sur l'économie de
la procédure pour déroger à la condition du dommage irréparable exigée
par l'art. 87 OJ (cf. ATF 115 Ia 311 consid. 2a; 94 I 199 consid. 1a;
87 I 172 consid. 2), ces derniers temps surtout en relation avec des
questions liées à l'organisation des tribunaux (cf. ATF 124 III 134
consid. 2a). Il convient ainsi d'admettre que ce principe, associé à
celui de la proportionnalité et de l'intérêt bien compris des parties,
justifie qu'un recourant puisse, à certaines conditions, déposer tout de
suite un recours de droit public à l'encontre d'une décision partielle,
sans attendre la décision finale (cf. ATF 115 Ia 311 consid. 2a; 94 I
199 consid. 1a). Ainsi, lorsque l'on est, comme en l'espèce, en présence
d'un jugement partiel rendu dans le cadre d'un cumul subjectif d'actions
dirigées contre des défendeurs liés par un rapport de consorité simple
et qui tranche définitivement le sort de la prétention contre l'un des
consorts passifs, il y a lieu, pour éviter la situation insatisfaisante
évoquée ci-dessus, d'entrer en matière sur le recours de droit public,
sans se demander si la décision attaquée entraîne un préjudice irréparable.

    e) Interjeté en temps utile compte tenu des féries (art. 34 al. 1
let. b et 89 al. 1 OJ) et dans la forme prévue par la loi (art. 90 al. 1
OJ), le présent recours est donc recevable.