Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 125 I 166



125 I 166

17. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 3 mars 1999 dans
la cause G. et consorts contre Tribunal administratif du canton de Genève
(recours de droit public) Regeste

    Art. 4 BV und Art. 9 Abs. 1 des Genfer Verwaltungsverfahrensgesetzes;
überspitzter Formalismus; Ungültigkeit eines von einem beruflich ungenügend
qualifizierten Vertreter eingereichten Rekurses.

    Es ist nicht willkürlich, einen patentierten Geschäftsagenten, welcher
über keinerlei Erfahrung im Baupolizeiwesen und in der Raumplanung verfügt,
nicht als beruflich zur Vertretung von Parteien in diesen Rechtsgebieten
qualifizierten Vertreter zuzulassen (E. 2b/bb).

    Eine Norm des kantonalen Verfahrensrechts, welche die Parteivertretung
im Verwaltungsverfahren Anwälten und anderen, für die zu vertretende
Sache beruflich qualifizierten Vertretern vorbehält, ist nicht überspitzt
formalistisch (E. 3b).

    Aus dem Verbot des überspitzten Formalismus lässt sich im Prinzip nicht
ableiten, dass einem Rechtssuchenden, der einen zur Parteivertretung nicht
Befugten mit der Wahrung seiner Interessen beauftragt hat, eine Nachfrist
zur Behebung des Mangels eingeräumt werden muss. Es ist allerdings nicht
ausgeschlossen, dass sich unter besonderen Umständen ein solcher Anspruch
ergeben kann (E. 3d).

Sachverhalt

    Agissant par l'intermédiaire de l'agent d'affaires breveté B., G. et
consorts ont recouru sans succès auprès de la Commission cantonale de
recours en matière d'installations diverses contre la décision prise le
6 octobre 1997 par le Département cantonal des travaux publics octroyant
à la société en nom collectif J. l'autorisation préalable de construire
un immeuble de cinq logements avec places de parc sur les parcelles nos
xxx de la commune de C.

    G. et consorts, représentés par l'agent d'affaires breveté X.,
ont recouru contre la décision de cette autorité auprès du Tribunal
administratif du canton de Genève. Invité à se déterminer sur sa qualité de
«mandataire professionnellement qualifié pour la cause dont il s'agit», au
sens de l'art. 9 al. 1 de la loi genevoise sur la procédure administrative
du 12 septembre 1985 (LPA/GE), X. a transmis au Tribunal administratif
les informations relatives à sa formation professionnelle.

    Considérant que, de par sa formation et ses compétences, X. ne
disposait pas des qualifications requises pour agir comme mandataire
professionnellement qualifié dans une cause relevant de la police des
constructions et de l'aménagement du territoire, le Tribunal administratif
a déclaré le recours irrecevable par arrêt du 3 novembre 1998.

    Le Tribunal fédéral a partiellement admis le recours de droit public
formé par G. et consorts, dans la mesure où il était recevable.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extraits des considérants:

Erwägung 2

    2.- Les recourants prétendent qu'en considérant qu'ils n'étaient pas
représentés par un mandataire professionnellement qualifié, l'autorité
intimée aurait fait preuve d'arbitraire et violé, par rapport aux autres
justiciables assistés d'un avocat, leur droit à l'égalité de traitement
dans le choix de leur mandataire.

    a) Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une règle
ou un principe juridique clair et indiscuté ou lorsqu'elle contredit d'une
manière choquante le sentiment de la justice ou de l'équité. Le Tribunal
fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale
de dernière instance que si elle est insoutenable ou en contradiction
évidente avec la situation de fait, si elle a été adoptée sans motif
objectif ou en violation d'un droit certain; par ailleurs, il ne suffit
pas que les motifs de la décision attaquée soient insoutenables, encore
faut-il que celle-ci soit arbitraire dans son résultat (ATF 124 I 247
consid. 5 p. 250 et les arrêts cités).

    Il y a inégalité de traitement lorsque, sans motifs sérieux,
deux décisions soumettent deux situations de fait semblables à des
règles juridiques différentes; les situations comparées ne doivent pas
nécessairement être identiques en tous points, mais leur similitude doit
être établie en ce qui concerne les éléments de fait pertinents pour
la décision à prendre. Le droit à l'égalité de traitement découlant de
l'art. 4 Cst. consiste donc à traiter de manière identique ce qui est
semblable et de manière différente ce qui est dissemblable (ATF 124 II
193 consid. 8d/aa p. 213; 123 I 1 consid. 6a p. 7, 19 consid. 3b p. 23,
112 consid. 10b p. 141 et les arrêts cités).

    b) L'art. 9 al. 1 LPA/GE dispose que les parties, à moins qu'elles ne
doivent agir personnellement ou que l'urgence ne le permette pas, peuvent
se faire représenter par un conjoint, un ascendant ou un descendant majeur,
respectivement par un avocat ou par un autre mandataire professionnellement
qualifié pour la cause dont il s'agit.

    aa) Les avocats bénéficient ainsi de par la loi d'une présomption
de fait quant à leur aptitude à représenter efficacement les intérêts
des parties dans les procédures administratives; tel n'est pas le cas
en revanche des agents d'affaires qui ne disposent pas d'une formation
juridique aussi complète et qui doivent établir leurs connaissances dans
le domaine en cause pour être admis à procéder, sans que la différence de
traitement réservée entre ces deux professions constitue une inégalité
prohibée par l'art. 4 Cst. (cf. ATF 43 I 34 consid. 3 p. 40). Le grief
émis à ce titre est donc infondé.

    bb) L'arrêt attaqué échappe au surplus au grief d'arbitraire en tant
qu'il dénie à X. le droit de représenter les recourants.

    L'aptitude à agir comme mandataire professionnellement qualifié devant
le Tribunal administratif doit être examinée de cas en cas, au regard de
la cause dont il s'agit, ainsi que de la formation et de la pratique de
celui qui entend représenter une partie à la procédure (cf. Archives 53
p. 165 consid. 1c/bb p. 168; ATF 114 Ia 34 consid. 2c p. 38; 105 Ia 67
consid. 7 p. 76).

    Dans le cas présent, X. a agi au nom des recourants en qualité d'agent
d'affaires, par quoi l'on entend avant tout celui qui, par profession, agit
en qualité de mandataire des parties auprès des offices des poursuites ou
des faillites au sens de l'art. 3 de la loi genevoise du 2 novembre 1927
réglementant la profession d'agents d'affaires. S'il déclare avoir déjà
procédé devant les commissions cantonales de recours en matière fiscale et
en matière de séjour et d'établissement des étrangers, il ne prétend pas
bénéficier d'une formation ou d'une pratique quelconque dans le domaine
de la police des constructions et de l'aménagement du territoire qui
permettrait de le tenir pour un mandataire professionnellement qualifié, au
sens de l'art. 9 al. 1 LPA/GE. Même si l'affaire ne soulevait apparemment
pas de questions de procédure complexes ou de problèmes particuliers
du point de vue de l'aménagement du territoire et de la protection
de l'environnement, qui auraient justifié le recours à un avocat, on
ne saurait reprocher au Tribunal administratif de se montrer exigeant
quant à la preuve de la qualification requise d'un mandataire aux fins
de représenter une partie devant lui, dans l'intérêt bien compris de
celle-ci et de la bonne administration de la justice (cf. ATF 114 Ia 34
consid. 2c p. 38).

    Sur le vu des indications fournies par X., le Tribunal administratif
n'a pas versé dans l'arbitraire en lui déniant la qualité de mandataire
professionnellement qualifié dans les causes relevant de la police des
constructions et de l'aménagement du territoire.

Erwägung 3

    3.- Les recourants reprochent également au Tribunal administratif
d'avoir fait preuve d'un formalisme excessif et violé leur droit à la
protection de la bonne foi en déclarant leur recours irrecevable parce
qu'il aurait été formé par une personne inapte à les représenter, sans
leur avoir donné l'occasion de corriger le vice.

    a) Selon la jurisprudence, il y a formalisme excessif, constitutif
d'un déni de justice formel prohibé par l'art. 4 Cst., lorsque la stricte
application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne
de protection, devient une fin en soi et complique de manière insoutenable
la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès
aux tribunaux. L'excès de formalisme peut résider soit dans la règle de
comportement imposée au justiciable par le droit cantonal, soit dans la
sanction qui lui est attachée. Le Tribunal fédéral examine librement ce
grief (ATF 121 I 177 consid. 2b/aa p. 179 et les références citées). En
tant qu'il sanctionne un comportement répréhensible de l'autorité dans
ses relations avec le justiciable, l'interdiction du formalisme excessif
poursuit le même but que le principe de la bonne foi déduit de l'art. 4
Cst. A cet égard, il commande à l'autorité d'éviter de sanctionner par
l'irrecevabilité les vices de procédure aisément reconnaissables qui
auraient pu être redressés à temps, lorsqu'elle pouvait s'en rendre compte
assez tôt et les signaler utilement au plaideur (ATF 124 II 265 consid. 4a
p. 270; 120 V 413 consid. 5a p. 417/418 et la jurisprudence citée).

    b) Le justiciable qui n'a pas de connaissances juridiques suffisantes
doit s'en remettre entièrement à son mandataire, sans pouvoir véritablement
le contrôler; il existe ainsi un intérêt public certain à le protéger
contre le risque de mandater une personne incompétente qui, notamment par
des erreurs procédurales, pourrait le priver de la possibilité de faire
valoir ses droits en justice (ATF 114 Ia 34 consid. 2b et c p. 37 et la
jurisprudence citée). L'art. 9 al. 1 LPA/GE, qui réserve la représentation
des parties en procédure administrative aux avocats et aux «autres
mandataires professionnellement qualifiés pour la cause dont il s'agit»,
vise précisément à protéger le justiciable contre un tel risque et ne
consacre donc pas un formalisme excessif prohibé par l'art. 4 Cst. (ATF
114 Ia 34 consid. 3 p. 40; 99 V 120 consid. 3c p. 124). Cela n'exclut
toutefois pas que la sanction de l'irrecevabilité du recours attachée à
la violation de cette exigence tombe sous le coup de cette interdiction.

    c) Se fondant sur sa pratique relative à l'art. 29 al. 2 OJ (cf. ATF
107 IV 68 consid. 1 et 2 p. 69/70), le Tribunal fédéral a considéré qu'un
recours déposé par une personne qui n'avait pas qualité pour représenter
une partie n'était pas entaché d'un vice de forme susceptible d'être
réparé après l'échéance du délai de recours, mais qu'il devait plutôt
être considéré comme nul, de sorte que les tribunaux cantonaux étaient en
principe libres, sous l'angle restreint de l'interdiction du formalisme
excessif déduit de l'art. 4 Cst., de ne pas accorder au justiciable qui
mandate une personne non habilitée à le représenter aux fins de déposer
un recours un délai supplémentaire après l'expiration du délai de recours
pour corriger le vice (Archives 55 p. 609 consid. 5c p. 616 et l'arrêt
non publié du 26 mars 1981 dans la cause Keusch, cité aux Archives 53
p. 165 consid. 1c/aa p. 167).

    Il n'y a pas lieu de remettre en cause cette jurisprudence que le
Tribunal fédéral a confirmée dans un arrêt du 5 février 1988 paru aux
ATF 114 Ia 34 consid. 3 p. 40, concernant l'irrecevabilité d'un recours
formé par une fiduciaire devant le Tribunal administratif bernois contre
une décision de la Commission des recours en matière fiscale du canton
de Berne.

    d) Le principe selon lequel l'interdiction du formalisme excessif
ne comprend pas l'obligation d'octroyer un délai supplémentaire au
justiciable qui a mandaté une personne non habilitée à le représenter
pour lui permettre de corriger le vice n'exclut cependant pas qu'un tel
délai soit imparti en présence de circonstances particulières.

    C'est ainsi que le Tribunal fédéral des assurances a considéré que,
dans une procédure cantonale en matière d'assurances sociales que le
législateur a voulue la plus simple possible pour les parties, l'intérêt du
recourant à ne pas être privé d'une voie de droit l'emportait manifestement
sur l'intérêt à éviter la légère prolongation de la procédure qu'impliquait
l'octroi d'un bref délai supplémentaire pour lui permettre de réparer
le vice entachant un recours introduit par un représentant qui n'était
pas titulaire du brevet d'avocat, comme l'exigeait en principe le code
de procédure civile applicable à titre subsidiaire; il a par conséquent
admis le recours pour formalisme excessif et renvoyé la cause à l'autorité
inférieure afin qu'elle impartisse un bref délai au recourant pour corriger
ce vice (ATF 99 V 120 consid. 3c p. 124).

    Le Tribunal fédéral a pour sa part vu une circonstance propre à
renoncer à sanctionner le vice tenant à une représentation inadéquate
du justiciable par l'irrecevabilité du recours dans le fait que le droit
cantonal ne définissait pas clairement le cercle des personnes habilitées
à représenter un contribuable en qualité de conseiller fiscal devant
l'autorité cantonale de recours dans les litiges en matière fiscale; il
a considéré que l'on ne pouvait raisonnablement contraindre le recourant
à faire appel à un autre mandataire autorisé afin de parer au risque
que les qualifications professionnelles requises soient déniées à son
conseiller fiscal et que le recours soit déclaré irrecevable pour ce motif;
si l'autorité cantonale de recours entendait limiter la représentation
aux conseillers fiscaux «particulièrement qualifiés», elle devait alors
impartir un bref délai au recourant pour choisir un représentant répondant
à ces exigences (Archives 53 p. 165 consid. 1c/cc p. 168/169). De même,
il a tenu pour choquant le refus d'entrer en matière sur un recours émanant
d'un conseiller fiscal qui n'était pas titulaire du brevet d'avocat et qui
s'était fié de bonne foi à une pratique constante des autorités fiscales et
partagée par la doctrine dominante, selon laquelle les cantons n'étaient
pas fondés à réserver aux avocats brevetés le droit de représenter le
contribuable dans les procédures de recours relatives à l'impôt fédéral
direct, dont il n'avait pas lieu de supputer la modification (Archives
55 p. 609 consid. 5d p. 616). Enfin, dans un arrêt non publié du 16
mai 1986 dans la cause T. contre Tribunal administratif du canton des
Grisons, il a vu un comportement contraire à la bonne foi dans le refus de
l'autorité de recours de voir un mandataire qualifié dans le conseiller
fiscal choisi par le contribuable alors que l'autorité de réclamation
n'avait émis aucun doute sur la capacité à le représenter.

    On se trouve précisément dans ce dernier cas de figure en l'espèce. La
Commission cantonale de recours a en effet admis que les recourants soient
représentés devant elle par un agent d'affaires breveté sans exiger de
ce dernier qu'il fasse la preuve de ses connaissances particulières dans
le domaine considéré; dans la mesure où la représentation des parties
devant le Tribunal administratif est soumise aux mêmes conditions, les
recourants pouvaient de bonne foi considérer que la qualité de mandataire
professionnellement qualifié serait reconnue à X. L'irrecevabilité du
recours formé par G. et consorts consacre ainsi, dans les circonstances
particulières du cas, un formalisme excessif qu'aucun intérêt ne justifie.
L'arrêt attaqué doit dès lors être annulé pour ce motif, sans qu'il
soit nécessaire d'examiner les autres griefs tirés d'une application
arbitraire du droit cantonal de procédure. La cause sera renvoyée au
Tribunal administratif pour qu'il impartisse un bref délai aux recourants
afin qu'ils procèdent personnellement ou par l'intermédiaire d'un avocat ou
d'un autre mandataire professionnellement qualifié, conformément d'ailleurs
à la pratique de la Cour de justice du canton de Genève en matière de
baux et loyers (cf. BERTOSSA/GAILLARD/GUYET/SCHMIDT, Commentaire de la
loi de procédure civile genevoise, vol. III, n. 2 ad art. 429 et n. 3
ad art. 430).