Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 125 II 238



125 II 238

23. Extrait de l'arrêt de la Ie Cour de droit public du 8 avril 1999
dans la cause Z. et B. contre Chambre d'accusation du canton de Genève
(recours de droit administratif) Regeste

    Art. 67a IRSG; unaufgeforderte Übermittlung von Informationen und
Beweismitteln.

    Die unaufgeforderte Übermittlung von Informationen und
Beweismitteln gemäss Art. 67a IRSG stellt eine Rechtshilfemassnahme
dar (E. 4), welche nicht direkt mit Beschwerde angefochten werden kann
(E. 5). Eine richterliche Überprüfung der unaufgeforderten Õbermittlung
ist jedoch möglich, soweit die Beschwerde gegen die Schlussverfügung im
Rechtshilfeverfahren offen steht, in welchem Auskünfte oder Beweismittel
unaufgefordert übermittelt wurden (E. 6a und b). Die unaufgeforderte
Übermittlung im Sinne von Art. 67a IRSG - die informell erfolgen kann -
muss jedoch in allen Fällen mit einer schriftlichen Mitteilung an die
Behörden des ausländischen Staates verbunden werden; eine Kopie dieser
Mitteilung sowie das Protokoll gemäss Art. 67a Abs. 6 IRSG müssen in allen
Fällen unverzüglich dem Bundesamt für Polizeiwesen als Aufsichtsbehörde
übermittelt werden (E. 6c und d). Die Personen, über welche Informationen
übermittelt wurden, können diese Mitteilungen weder separat anfechten
noch deren Zustellung verlangen (E. 6e).

Sachverhalt

    Le 6 mars 1998, l'Office fédéral de la police a transmis au Juge
d'instruction genevois une demande d'entraide judiciaire, datée du
13 janvier 1998, présentée par le Procureur général de la République
d'Ukraine pour les besoins d'une procédure pénale ouverte dans cet Etat
pour malversation de biens appartenant à l'Etat ou à la collectivité par
appropriation ou détournement de pouvoir, délit réprimé par l'art. 84
du Code pénal ukrainien, mis en relation avec les art. 165 et 166 de la
même loi.

    Selon l'exposé des faits joint à la demande, S., avec la complicité
de P. et de O., aurait détourné un montant de 890'893 USD dans le cadre
de l'exécution d'un contrat liant l'administration de l'Etat requérant à
la société suisse G. La demande tendait à l'audition des dirigeants de G.,
ainsi qu'à la remise de documents relatifs à la transaction litigieuse.

    La procédure d'exécution de cette demande a été désignée sous la
rubrique CP/57/1998.

    L'Office fédéral a transmis au Juge d'instruction genevois une demande
complémentaire, datée du 14 février 1998. Celle-ci indiquait notamment
que l'enquête avait permis de révéler que le ressortissant ukrainien K.,
soupçonné de blanchiment d'argent, était l'ayant droit de G.. La demande
complémentaire tendait à la saisie, auprès de la banque A., de documents
relatifs au compte noxxxx, ainsi qu'à l'identification et à la saisie de
tous autres comptes bancaires ouverts en Suisse aux noms de S., O. et K.

    Le 6 mars 1998, le Procureur général du canton de Genève a ordonné
l'ouverture d'une information pénale en vue de déterminer si des délits
de blanchissage (art. 305bis CP) ou de défaut de vigilance en matière
d'opérations financières (art. 305ter CP) avaient été commis à Genève en
relation avec les faits mentionnés dans la demande d'entraide ukrainienne.

    Dans le cadre de cette procédure, désignée sous la rubrique P/2489/98,
le Juge d'instruction a ordonné, le 17 mars 1998, la saisie auprès de
la banque A. de tous les documents relatifs au compte noxxxx et de tous
autres comptes ouverts aux noms de S., de P. et de K.

    Les investigations conduites par le Juge d'instruction lui ont permis
de découvrir l'existence de huit comptes ouverts auprès de la banque
A. aux noms des sociétés B., W., E., Z. et C. dont K. est l'ayant droit.

    Le dossier de la procédure P/2489/98 contient une note du Juge
d'instruction, non datée, relatant la visite, le 27 mars 1998, de Dimitro
Mykolaiovitch Moltchanov, Juge d'instruction à Kiev. A cette occasion,
le Juge d'instruction a confirmé au Juge Moltchanov qu'il était chargé
de l'exécution des demandes d'entraide ukrainiennes et qu'une procédure
pénale avait été ouverte à Genève à l'encontre de K. La note indique en
outre ce qui suit:
      «En application de l'art. 67a EIMP, le Juge lui a précisé que

    l'instruction

    de la procédure genevoise avait permis de saisir des montants
importants

    susceptibles d'être d'origine délictueuse. Il a fourni à M. Moltchanov

    les références des sociétés offshore au nom desquelles avaient
été ouverts

    auprès de la Banque A. les comptes concernés non mentionnés dans les

    requêtes d'entraide et dont K. apparaissait comme ayant droit
économique:

    - B.

    - W.

    - E.

    - Z.

    - B.
      Le Juge a indiqué à M. Moltchanov que ces informations ne valaient
      pas

    officiellement moyens de preuve, mais étaient destinées à permettre aux

    autorités ukrainiennes de délivrer - si elles le jugeaient utile - une

    commission rogatoire complémentaire aux fins d'obtenir toutes
informations

    sur ces comptes.»

    L'Etat requérant a complété sa demande les 7 mars, 31 mars, 7 avril,
21 avril, 30 avril, 13 mai, 21 juillet et 26 juillet 1998.

    Le 23 novembre 1998, la Chambre d'accusation du canton de Genève a
déclaré irrecevable le recours formé par Z. et B. contre la transmission
spontanée d'informations du 27 mars 1998.

    Le Tribunal fédéral a rejeté le recours de droit administratif formé
par Z. et B. contre cette décision.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Extrait des considérants:

Erwägung 1

    1.- b) La question de savoir si le Juge d'instruction a rédigé
sur-le-champ ou seulement un mois plus tard la note (non datée) relatant
son entretien du 27 mars 1998 avec le Juge Moltchanov, ne détermine en
rien le sort de la présente procédure (cf. ci-dessous consid. 6f). Il
n'y a pas lieu de s'y arrêter.

Erwägung 2

    2.- a) L'entraide judiciaire entre la Confédération suisse et la
République d'Ukraine est régie en premier lieu par la Convention européenne
d'entraide judiciaire en matière pénale (CEEJ; RS 0.351.1), conclue à
Strasbourg le 20 avril 1959 et entrée en vigueur le 20 mars 1967 pour la
Suisse et le 9 juin 1998 pour l'Ukraine. Dans le domaine du blanchiment,
le juge d'instruction a agi uniquement sur la base de l'art. 67a EIMP,
comme l'indique le compte-rendu de sa communication du 27 mars 1998,
la Convention no141 n'étant pas encore entrée en vigueur pour l'Ukraine
à cette époque. En outre, la seule question à trancher est celle de
l'aménagement des voies de droit en matière de transmission spontanée
d'informations; cet examen, touchant à la procédure en Suisse, se fait
exclusivement au regard des prescriptions du droit interne (cf. art. 3
al. 1 CEEJ), soit l'EIMP et l'OEIMP (art. 12 al. 1 EIMP).

Erwägung 4

    4.- Les recourantes reprochent à la Chambre d'accusation d'avoir violé
l'art. 80e EIMP, mis en relation avec l'art. 67a EIMP, en déclarant le
recours cantonal irrecevable.

    La Chambre d'accusation, s'appuyant à cet égard sur les directives
de l'Office fédéral de la police (8ème édition, 1998), a considéré que la
transmission spontanée de renseignements selon l'art. 67a EIMP n'était pas
assimilable à un acte d'entraide ordonné à la demande de l'Etat requérant,
mais à une demande suisse présentée à l'étranger; aucune voie de recours
ne serait dès lors ouverte contre la transmission spontanée, celle-ci ne
constituant en outre ni une décision de clôture au sens de l'art. 80e let.
a EIMP, ni une décision incidente au sens de l'art. 80e let. b EIMP. Les
recourantes contestent ce point de vue, en soutenant que la transmission
spontanée d'informations devrait être assimilée à une décision de clôture
de la procédure d'entraide (art. 80d EIMP), voire à une décision incidente
antérieure, pouvant l'une et l'autre faire l'objet d'un recours au sens
de l'art. 80e EIMP.

    a) L'art. 67a EIMP a la teneur suivante:
      «1. L'autorité de poursuite pénale peut transmettre spontanément
      à une

    autorité étrangère des moyens de preuve qu'elle a recueillis au cours
de sa

    propre enquête, lorsqu'elle estime que cette transmission:
      a. Est de nature à permettre d'ouvrir une poursuite pénale, ou
      b. Peut faciliter le déroulement d'une enquête en cours.  2. La
      transmission prévue au 1er alinéa n'a aucun effet sur la procédure

    pénale en cours en Suisse.
      3. La transmission d'un moyen de preuve à un Etat avec lequel
      la Suisse

    n'est pas liée par un accord international requiert l'autorisation de

    l'office fédéral.
      4. Les 1er et 2e alinéas ne s'appliquent pas aux moyens de preuve qui

    touchent au domaine secret.
      5. Des informations touchant au domaine secret peuvent être
      fournies si

    elles sont de nature à permettre de présenter une demande d'entraide
à la

    Suisse.
      6. Toute transmission spontanée doit figurer dans un procès-verbal.»

    La transmission spontanée d'informations et de moyens de
preuve s'écarte fondamentalement du principe de base de l'entraide
internationale en matière pénale, selon lequel l'Etat requis n'agit
qu'à la demande de l'Etat requérant (ANDREAS HAFFTER, Internationale
Zusammenarbeit in Strafsachen im Spannungsfeld zwischen Denunziation
und Verbrechensbekämpfung: Zur Problematik der spontanen Rechsthilfe
(Art. 67a IRSG), PJA 1999, p. 116 ss, 117). En transmettant spontanément
des renseignements à l'Etat étranger, l'autorité de poursuite pénale
sort du rôle passif dans lequel la cantonne la procédure ordinaire
de l'entraide en lui permettant d'agir alors même qu'elle n'est pas -
ou pas encore - saisie d'une demande étrangère (cf. HAFFTER, op.cit.,
p. 117; RUDOLF WYSS, Die Revision der Gesetzgebung über die internationale
Rechtshilfe in Strafsachen, RSJ 1997, p. 33 ss). Elle peut ainsi envisager
une communication spontanée d'informations et de moyens de preuve dès
l'instant où elle s'aperçoit, dans le cours de ses investigations,
que celles-ci présentent des ramifications internationales ou que les
renseignements recueillis seraient de nature à intéresser les autorités
pénales d'un Etat étranger. La transmission spontanée d'informations et
de moyens de preuve est envisageable comme forme soit complémentaire,
soit anticipée, de la coopération internationale en matière pénale. Elle
est complémentaire lorsque l'Etat requis, parallèlement à l'exécution de
la demande, livre spontanément à l'Etat requérant, en vue de favoriser sa
procédure, des renseignements dont la remise n'avait pas spécifiquement
été demandée. Elle est anticipée lorsqu'elle appelle la présentation,
par l'Etat destinataire, d'une demande d'entraide. Dans les deux cas
de figure, le but recherché est d'éviter que des renseignements utiles
à une procédure pénale étrangère demeurent inexploités, faute d'avoir
été portés à la connaissance des autorités de l'Etat compétent pour
réprimer l'infraction découverte à l'étranger (cf. le Rapport explicatif
de la Convention no 141, n. 38 et le commentaire de l'art. 10 de cette
Convention par Hans G. Nilsson, in: ANDREA DE GUTTRY/FABRIZIO PAGANI (ed),
La cooperazione tra gli Stati in materia di confisca dei proventi di reato
e lotta al riciclaggio, Milan, 1993, p. 231 ss, 247; PAOLO BERNASCONI,
Rogatorie penali italo-svizzere, Milan, 1997, p. 99/100, 252-254; ROBERT
ZIMMERMANN, La coopération judiciaire internationale en matière pénale,
Berne, 1999, no 237/238).

    b) Quelle que soit sa forme, la transmission spontanée d'informations
et de moyens de preuve constitue désormais l'un des moyens admissibles de
l'entraide prêtée par la Suisse à l'étranger. A cet effet, l'art. 67a
EIMP a été inséré dans la troisième partie de la loi régissant les
«autres actes d'entraide», c'est-à-dire l'entraide au sens strict ou,
selon l'ancienne terminologie, la «petite entraide» ou l'«entraide
accessoire». De même, l'art. 10 de la Convention no141 fait partie de la
section 2 du chapitre III de cette Convention, consacrée à l'«entraide aux
fins d'investigations». Voir dans la transmission spontanée d'informations
et de moyens de preuve une forme de demande suisse à l'étranger, comme
le fait l'Office fédéral (Directives relatives à l'entraide judiciaire
internationale en matière pénale, 8ème éd. 1998, ch. 1.2.5) et, à sa
suite, la Chambre d'accusation, procède d'une erreur de perspective: le
but principal de la transmission spontanée d'informations et de moyens
de preuve est de favoriser le développement de la procédure pénale à
l'étranger; elle sert au premier chef les intérêts de l'Etat destinataire
des renseignements communiqués. En donnant spontanément des informations,
la Suisse agit à l'instar d'un Etat requis, à cette différence près
qu'elle est ou bien pas encore saisie d'une demande étrangère, ou bien -
comme en l'espèce - saisie d'une demande ne visant pas spécifiquement
les informations à remettre spontanément. Sous ce dernier aspect,
contrairement à ce que soutiennent les recourantes en jouant sur le sens
du mot «spontané», le dépôt antérieur d'une demande d'entraide n'exclut
pas ipso facto la possibilité d'une transmission spontanée ultérieure
d'informations aux autorités de l'Etat requérant.

    Le Juge d'instruction ne s'est d'ailleurs pas mépris sur le fondement
de son intervention, puisqu'il s'est référé expressément à l'art. 67a EIMP.

Erwägung 5

    5.- Le point de savoir si la transmission spontanée de moyens de
preuve et d'informations au sens de l'art. 67a EIMP peut faire l'objet
d'un recours n'est tranché expressément par aucune disposition de la
loi, dont le sens et la portée doivent être déterminés par la voie de
l'interprétation.

    a) La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre. Toutefois,
si le texte n'est pas absolument clair, si plusieurs interprétations de
celui-ci sont possibles, il faut alors rechercher quelle est la véritable
portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer,
soit notamment les travaux préparatoires, le but et l'esprit de la règle,
les valeurs sur lesquelles elle repose, ainsi que sa relation avec d'autres
dispositions légales (ATF 124 II 193 consid. 5a p. 199, 5c p. 200, 241
consid. 3 p. 245/246, 265 consid. 3a p. 268, 373 consid. 5 p. 376; 124
V 185 consid. 3a p. 189; 123 II 595 consid. 4a p. 600/601, et les arrêts
cités). Pour rendre la décision répondant de manière optimale au système
et au but de la loi, le Tribunal fédéral utilise, de manière pragmatique,
une pluralité de méthodes, sans fixer entre elles un ordre de priorité (ATF
123 II 464 consid. 3a p. 468; 121 III 219 consid. 1d/aa p. 224-226). Les
travaux préparatoires ne sont pas à eux seuls déterminants; ils peuvent
être utiles pour éclaircir le sens d'une norme imprécise ou se prêtant à
plusieurs interprétations plausibles, mais contradictoires. Plus la loi
est récente, moins il sera possible de s'écarter de la volonté clairement
affirmée du législateur, notamment pour donner à la loi une portée qui lui
a été refusée lors des débats parlementaires (ATF 124 V 185 consid. 3a p.
189/190).

    b) L'art. 67a EIMP s'inspire directement de l'art. 10 de la Convention
no141, à teneur duquel, sans préjudice de ses propres investigations
ou procédures, un Etat peut, sans demande préalable, transmettre à un
autre Etat des informations sur des «instruments» et des «produits»,
tels que définis par l'art. 1er de la Convention, lorsqu'il estime que
la communication de ces informations pourrait aider l'Etat destinataire
à engager ou à mener à bien des investigations ou des procédures, ou
lorsque ces informations pourraient aboutir à la présentation d'une
demande d'entraide par cet Etat.

    L'art. 67a EIMP représente l'une des principales innovations de la
novelle du 6 octobre 1996 (HAFFTER, op.cit., p. 117; PIERRE-DOMINIQUE
SCHUPP, La révision de la loi fédérale sur l'entraide internationale en
matière pénale, RPS 1997 p. 180 ss, 194/195). Conformément au principe de
faveur (cf. ATF 123 II 134 consid. 1a p. 136; 122 II 140 consid. 2 p. 142,
373 consid. 1a p. 375), l'art. 67a EIMP vise à donner une base légale à la
transmission spontanée d'informations et de moyens de preuve par la Suisse
à tous les Etats qui ne lui sont pas liés par un traité contenant une
norme équivalente. La transmission spontanée d'informations et de moyens
de preuve est cependant soumise à des conditions strictes, à peine de voir
éludées les règles de l'entraide, spécialement celles protégeant le domaine
secret. L'art. 67a EIMP - disposition potestative («Kann-Vorschrift») -
doit être utilisé avec réserve; son but n'est pas d'encourager la délation,
ni de permettre un flux incontrôlé d'informations vers l'étranger (Message
du 29 mars 1995, FF 1995 III p. 1 ss, 25). Le souci de prévenir tout
risque d'abus à cet égard, constamment présent à l'esprit du législateur
(cf., lors des débats relatifs à la révision de l'EIMP du 6 octobre 1996,
les interventions des Conseillers nationaux Sandoz, Schmid, Engler et de
Dardel, BO 1995 CN 2638-2640, du Conseiller fédéral Koller, BO 1995 CN
2641, ainsi que celle du Conseiller aux Etats Küchler, BO 1996 CE 229), a
amené l'Assemblée fédérale à assortir la transmission spontanée de moyens
de preuve (al. 1), d'une série de restrictions. Selon la première, cette
mesure ne produit aucun effet sur la procédure pénale en cours en Suisse
(al. 2), qu'elle ne paralyse ni ne suspend; selon la deuxième restriction,
la transmission de moyens de preuve à un Etat qui n'est pas lié à la Suisse
par un accord international est soumis à l'approbation de l'Office fédéral
(al. 3); troisièmement, est prohibée la transmission de moyens de preuve
touchant au domaine secret (al. 4), celle-ci ne pouvant intervenir que
dans le cadre de l'exécution d'une demande d'entraide ordinaire (Message du
Conseil fédéral du 29 mars 1995, FF 1995 III p. 1 ss, 25). Est permise en
revanche la transmission d'informations touchant au domaine secret, pour
autant qu'elle soit de nature à permettre la présentation d'une demande
d'entraide à la Suisse (al. 5; l'art. 10 de la Convention no141 ne fait pas
cette distinction entre moyens de preuve et informations). La communication
de ce type d'informations vise ainsi uniquement à anticiper l'entraide.
Enfin, toute transmission doit faire l'objet d'un procès-verbal (al. 6).

    c) Au cours des débats parlementaires ayant conduit à la révision du
6 octobre 1996, la commission du Conseil national avait proposé d'amender
l'al. 1 de l'art. 67a EIMP en vue de limiter la transmission spontanée
aux seuls cas graves et de portée internationale (cf. BO 1995 CN 2637
et les interventions des Conseillers nationaux Engler, rapporteur de
langue allemande, BO 1995 CN 2639, et de Dardel, rapporteur de langue
française, BO 1995 CN 2639/2640), d'une part, et de biffer l'al. 4 de
l'art. 67a EIMP proposé par le Conseil fédéral (BO 1995 CN 2637), d'autre
part. Le Conseiller national Schmid avait proposé de biffer l'al. 5
de cette disposition (BO 1995 CN 2637, 2638/2639). Quant à Mme Sandoz,
elle avait proposé de maintenir les al. 4 et 5 du projet gouvernemental,
tout en lui adjoignant un nouvel al. 6 exigeant, pour chaque transmission,
l'établissement d'un procès-verbal (BO 1995 CN 2637/2638). Dans un premier
temps, la proposition de la commission parlementaire relative à l'al. 1 de
l'art. 67a EIMP avait trouvé le soutien du Conseil national (BO 1995 CN
2641), alors que les al. 4 et 5 étaient adoptés dans la version proposée
par le Conseil fédéral, et l'al. 6 ajouté selon l'amendement présenté par
Mme Sandoz (BO 1995 CN 2642). Le Conseil national a modifié ultérieurement
sa position relative à l'art. 67a al. 1, pour adopter en fin de compte le
texte présenté initialement sur ce point par le Conseil fédéral (BO 1995
CN 2652). Le Conseil des Etats s'est rallié sans discussion au texte issu
des débats du Conseil national (BO 1996 CE 229).

    d) La loi ne limite pas les moyens de la transmission spontanée au sens
de l'art. 67a EIMP. Le législateur a non seulement renoncé à édicter toute
prescription de forme dans ce domaine, mais a même envisagé la possibilité
de communications les plus informelles - téléphoniques ou verbales
(cf. les prises de position du Conseiller national Schmid, BO 1995 CN
2638, et du Conseiller fédéral Koller, BO 1995 CN 2641). D'un autre côté,
le législateur a cherché à prévenir, dans toute la mesure du possible, le
risque de voir éludées les normes régissant l'entraide par la transmission
incontrôlée et informelle de renseignements, en particulier ceux touchant
au domaine secret. A cette fin, il a distingué la transmission de moyens de
preuve et celle des informations (cf. ci-dessus consid. 5b). A aucun stade
des travaux préparatoires, il n'a été fait mention dans ce contexte de la
possibilité d'un contrôle judiciaire direct de la transmission spontanée
d'informations, ce qui explique que le législateur n'a pas désigné
expressément la transmission spontanée comme objet de recours selon l'art.
80e EIMP. Il a ainsi vu en elle un acte d'entraide matériel spécifique,
soumis à aucune condition de forme particulière, hormis l'établissement
d'un simple procès-verbal pour toute transmission spontanée. L'intervention
de Mme Sandoz, à l'origine de l'introduction de l'al. 6 de l'art. 67a EIMP,
est éclairante sur ce point: le procès-verbal vise simplement à conserver
une «trace» de la transmission (BO 1995 CN 2638/2639). Ce document permet
ainsi à l'Office fédéral - outre le cas spécial de l'art. 67a al. 3
EIMP - d'exercer sa fonction de surveillance des autorités d'exécution
(art. 3 OEIMP; cf. ci-dessous consid. 6c). Si la transmission impliquait
le prononcé d'une décision au sens formel - avec toutes les conséquences
qui s'ensuivent sous l'angle du droit d'être entendu -, l'établissement
d'un procès-verbal constituerait une mesure vide de sens, l'Office fédéral
étant partie à la procédure d'entraide soit comme autorité de surveillance,
soit comme autorité habilitée à recourir (art. 80h let. a EIMP).

Erwägung 6

    6.- L'impossibilité de recourir directement contre la transmission
spontanée selon l'art. 67a EIMP n'a toutefois pas pour conséquence de
priver de toute protection judiciaire les personnes au sujet desquelles
des informations ont été transmises spontanément aux autorités étrangères.

    a) Si la transmission spontanée d'informations a pour effet, comme en
l'espèce, d'amener les autorités de l'Etat destinataire à compléter une
demande d'entraide préexistante, la personne touchée dispose de la faculté
de soulever le grief de la violation de l'art. 67a EIMP dans le cadre
d'un éventuel recours formé contre la décision de clôture de l'entraide
(cf. par exemple l'arrêt non publié E. du 24 février 1998, consid. 2) -
pour autant, naturellement, qu'elle ait qualité pour le faire et puisse se
prévaloir à cette fin d'un intérêt digne de protection. En cas de constat
de violation de l'art. 67a EIMP dans ce contexte, en raison d'un défaut
d'autorisation de l'Office fédéral, ou de la transmission de moyens de
preuve touchant au domaine secret, ou encore de l'absence de procès-verbal
(art. 67a al. 3, 4 et 6 EIMP), l'autorité d'exécution pourrait être
invitée à tenter d'obtenir la restitution des pièces communiquées à tort
ou, à tout le moins, l'engagement de l'Etat destinataire de ne pas les
utiliser dans sa procédure pénale. Une telle démarche serait toutefois
superflue s'il apparaissait, après coup, que les conditions de l'entraide
étaient de toute manière remplies ou lorsqu'on peut s'attendre, dans un
proche avenir, à une décision positive quant à l'octroi de l'entraide
(cf. arrêt non publié R. du 7 novembre 1996, consid. 3d/cc).

    b) Si la transmission spontanée d'informations par l'autorité suisse ne
conduit pas à la présentation d'une demande d'entraide de la part de l'Etat
destinataire, la personne touchée ne pourra faire valoir aucun intérêt
juridique, au sens de l'art. 80h let. b EIMP, justifiant l'intervention
du juge suisse de l'entraide.

    c) En interprétant l'art. 67a EIMP selon la méthode téléologique
restrictive (cf. ATF 121 III 219 consid. 1d/aa p. 324-326) - dont
l'application est en l'espèce la plus appropriée (cf. l'art. 1 al. 2 et
3 CC) compte tenu de la clarté des travaux préparatoires et du caractère
récent de la loi -, il convient de souligner que si le législateur a voulu
faire de la transmission spontanée d'informations un moyen efficace de
la coopération internationale en matière pénale, il n'a pas voulu pour
autant abandonner les mécanismes traditionnels de l'entraide judiciaire,
s'agissant notamment du respect des formes de la procédure et de la
protection des droits fondamentaux (consid. 5b-d ci-dessus). Prolongeant
selon ce double objectif la volonté du législateur dans un sens qui
renforce l'efficacité de la norme, l'art. 67a EIMP doit être compris
comme exigeant que la transmission spontanée d'informations doit dans tous
les cas faire l'objet d'une communication écrite aux autorités de l'Etat
destinataire (dans ce sens aussi: HAFFTER, op.cit., p. 121, et ZIMMERMANN,
op.cit., no237 in fine), cette communication devant de surcroît être portée
dans tous les cas à la connaissance de l'Office fédéral. Immédiatement et
directement averti de toutes les communications spontanées, celui-ci sera
en mesure d'exercer effectivement sa tâche de surveillance des autorités
d'exécution, fédérales et cantonales (art. 3 OEIMP). Si, dans ce cadre,
l'Office fédéral devait constater des abus, il lui incomberait d'intervenir
auprès de l'autorité concernée. Cette surveillance lui permettra aussi
de mesurer précisément - d'un point de vue quantitatif et qualitatif -
les effets du nouvel instrument d'entraide prévu par l'art. 67a EIMP.

    d) Concrètement, l'autorité suisse chargée de la poursuite pénale
pourra transmettre spontanément des informations et des moyens de preuve
en application de l'art. 67a EIMP - aux conditions fixées par cette norme
-, y compris de manière informelle. Elle devra toutefois, à chaque fois,
communiquer à l'autorité étrangère une relation écrite des renseignements
transmis. L'exigence d'une communication écrite s'impose en vue d'assurer
la protection optimale des droits des parties à la procédure étrangère,
laquelle doit respecter les principes de procédure fixés par la CEDH et le
Pacte ONU II (art. 2 let. a EIMP). Ainsi, la personne accusée à l'étranger
- ou tout autre partie à cette procédure - pourra, en consultant le
dossier pénal contenant la relation écrite de la transmission spontanée,
connaître l'origine et le contenu des informations recueillies grâce
à la collaboration des autorités suisses. Elle pourra, le cas échéant
et selon les formes du droit étranger, s'opposer à l'utilisation de
renseignements qui auraient été obtenus de manière illégale. L'autorité
suisse communiquant spontanément des informations à l'étranger établira
sur-le-champ le procès-verbal visé à l'art. 67a al. 6 EIMP, qu'elle
transmettra dans tous les cas à l'Office fédéral avec la copie de la
note remise aux autorités étrangères, rendant ainsi visible la mention
transmission spontanée.

    e) Les personnes au sujet desquelles des informations sont transmises
spontanément en application de l'art. 67a EIMP - ou de toute autre norme
analogue contenue dans un traité - ne sauraient en revanche prétendre
pouvoir recourir contre ces communications. Une telle intervention dans
la procédure d'entraide irait à l'encontre de la volonté du législateur
et du but de la loi. Elle comporterait de surcroît un risque élevé
d'abus lorsque, comme en l'espèce, ce n'est pas la personne accusée dans
la procédure pénale étrangère qui entend s'opposer à la transmission
spontanée, mais des tiers. Il n'est pas davantage nécessaire d'exiger de
l'autorité d'exécution communiquant spontanément des renseignements et
des moyens de preuve selon l'art. 67a EIMP, qu'elle notifie aux personnes
concernées une copie de la communication écrite transmise aux autorités
étrangères: une telle mesure irait au-delà de ce qui est nécessaire pour
la protection de ces personnes et reviendrait en fin de compte à leur
accorder le droit de recourir contre la transmission spontanée, ce que
la loi leur a précisément refusé.

    f) En l'espèce, la Chambre d'accusation n'a pas violé le droit fédéral
en estimant que la communication du 27 mars 1998, faite dans le cadre de
la procédure P/2489/98, n'était pas attaquable en l'état pour violation
de l'art. 67a EIMP. Un tel grief pourrait tout au plus être soulevé à
l'appui d'un recours dirigé contre une décision de clôture de la procédure
d'entraide désignée sous la rubrique CP/57/98, pour autant que les autres
conditions de recevabilité soient remplies. Quant au Juge d'instruction,
on ne saurait lui reprocher de n'avoir pas consigné sous une forme écrite
les renseignements communiqués oralement le 27 mars 1998, ni transmis le
procès-verbal à l'Office fédéral, ces exigences ne lui étant pas opposables
à cette époque.