Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 123 IV 184



123 IV 184

28. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 8 septembre
1997 dans la cause H. contre A. et Procureur général du canton de Genève
(pourvoi en nullité) Regeste

    Art. 270 Abs. 1 BStP; Beschwerdelegitimation des Geschädigten.

    Bedingungen, unter welchen der Geschädigte zur Nichtigkeitsbeschwerde
gegen einen Einstellungsbeschluss legitimiert ist (E. 1b).

    Wenn ein falsches Zeugnis in einem Zivilprozess keinen Einfluss auf das
Urteil hatte, ist der vermeintlich Geschädigte durch den strafrechtlichen
Einstellungsbeschluss auch nicht in seinen Zivilforderungen betroffen
(E. 1c).

Sachverhalt

    H. et G. ont entretenu une liaison de 1983 à 1989. Pendant cette
période, plusieurs biens immobiliers furent acquis au nom d'H. à Annecy
(F), à Aubonne (VD) et à Porto-Cervo (I); H. obtint un prêt hypothécaire
de 250'000 fr. garanti par l'appartement d'Aubonne. Elle a signé, les 27
décembre 1984 et 20 février 1989, deux documents qui attestent qu'elle
a agi à titre fiduciaire pour le compte de G.

    Au cours de l'été 1989, H. et G. se sont séparés. G. a déclaré qu'il
résiliait le contrat de fiducie et, n'obtenant pas les restitutions qu'il
réclamait, il a déposé une demande devant le juge civil.

    Il a justifié le rapport fiduciaire en expliquant qu'il avait à
l'époque vendu à son frère sa part dans le garage qu'il exploitait et
qu'il disposait ainsi de fonds importants; étant en instance de divorce,
il souhaitait que les biens acquis au moyen de ces fonds échappent à
son épouse; le contrat de fiducie devait aussi permettre à sa nouvelle
compagne, s'il décédait en premier, de jouir des biens sans avoir à payer
de droits de succession.

    Durant la procédure, H. a tout d'abord prétendu que G. lui avait fait
don des biens immobiliers; par la suite, elle a soutenu qu'elle les avait
achetés de ses propres deniers. Selon elle, le contrat de fiducie était
fictif et ne devait être utilisé que si elle décédait en premier, pour
permettre à son compagnon de devenir propriétaire des biens sans payer de
droits de succession. Selon sa version, la reconnaissance de fiducie du 20
février 1989 devait être déposée en mains d'un avocat, mais elle n'y est
jamais parvenue, parce que H. l'aurait remise à A., qui aurait trahi sa
confiance. A. a contesté avoir reçu une telle mission. Par jugement du 12
novembre 1992, le Tribunal de Première instance de Genève a condamné H. à
restituer à G. tous les biens immobiliers, ainsi que le montant de 250'000
fr. correspondant au prêt hypothécaire obtenu sur l'immeuble d'Aubonne.

    Statuant sur appel le 21 septembre 1993, la Cour de justice genevoise
a confirmé le jugement attaqué, considérant que la déclaration de fiducie
reflétait la commune intention des parties.

    Par arrêt du 15 mars 1994, le Tribunal fédéral a rejeté le recours
en réforme déposé par H., estimant que la déclaration de fiducie était
claire et dépourvue de conditions.

    Ayant appris que H. avait vendu les immeubles d'Aubonne et de
Porto-Cervo, G. a déposé contre elle une plainte pénale pour gestion
déloyale et abus de confiance. La procédure pénale a été suspendue jusqu'à
droit jugé sur l'action civile. Il n'est pas allégué qu'un jugement ait
été rendu dans cette procédure.

    Le 4 juillet 1996, H. a déposé plainte pénale contre A. pour faux
témoignage en raison des déclarations qu'il avait faites dans la procédure
civile. Par ordonnance du 2 août 1996, le Procureur général du canton de
Genève a classé cette plainte.

    Le 25 novembre 1996, H. a déposé une seconde plainte pénale contre
A. pour faux témoignage en raison d'autres déclarations faites dans la
procédure civile. Par ordonnance du 28 novembre 1996, le Procureur général
a classé cette plainte.

    Statuant par deux ordonnances rendues le 9 mai 1997, la Chambre
d'accusation de la Cour de justice genevoise a rejeté les recours
formés par H. contre ces deux décisions de classement. Elle a estimé en
substance que les déclarations prétendument fausses de A. n'avaient pas
joué de rôle dans la décision civile, que la recourante H. revenait sur
une version des faits qu'elle n'était jamais parvenue à prouver et que,
tenant compte également du temps écoulé, le classement des plaintes était
justifié en opportunité.

    H. se pourvoit en nullité à la Cour de cassation pénale du Tribunal
fédéral. Elle fait valoir pour l'essentiel que si les déclarations
litigieuses de A. n'avaient pas joué de rôle dans la décision civile,
l'autorité cantonale aurait dû appliquer l'art. 307 al. 3 CP, et non pas
classer la procédure; par ailleurs, elle soutient que les dépositions
de A. étaient de nature à exercer une certaine influence sur la décision
du juge de croire une des versions en présence plutôt que l'autre. Elle
conclut à l'annulation des décisions attaquées avec suite de dépens et
sollicite par ailleurs l'assistance judiciaire.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- a) Le pourvoi en nullité, qui a un caractère cassatoire
(art. 277ter al. 1 PPF), ne peut être formé que pour violation du
droit fédéral, à l'exception de la violation directe d'un droit de rang
constitutionnel (art. 269 PPF). Il n'est pas ouvert pour se plaindre de
l'appréciation des preuves et des constatations de fait qui en découlent
(ATF 113 IV 17 consid. 3 p. 22).

    La Cour de cassation n'est pas liée par les motifs invoqués, mais
elle ne peut aller au-delà des conclusions du recourant (art. 277bis
PPF). En revanche, sous réserve de la rectification d'une inadvertance
manifeste, elle est liée par les constatations de fait de l'autorité
cantonale (art. 277bis al. 1 PPF). Il ne peut être présenté de griefs
contre celles-ci, ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 273
al. 1 let. b PPF). Dans la mesure où le recourant s'écarte de l'état
de fait contenu dans la décision attaquée, il n'est pas possible d'en
tenir compte (ATF 121 IV 18 consid. 2b/bb p. 23, 131 consid. 5b p. 137,
185 consid. 2b p. 190/191; 119 IV 202 consid. 2b p. 206).

    b) La recourante, qui n'invoque que des intérêts patrimoniaux, n'a
pas la qualité de victime au sens de l'art. 2 LAVI (RS 312.5), de sorte
qu'elle ne peut invoquer l'art. 8 al. 1 let. c LAVI (cf. ATF 120 IV 44
consid. 2a et b p. 49). Sa qualité pour se pourvoir en nullité est donc
régie par l'art. 270 al. 1 PPF.

    Selon cette disposition, le lésé ne peut se pourvoir en nullité que
s'il était déjà partie à la procédure auparavant et dans la mesure où la
sentence peut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles.

    Il est certain que la recourante a participé à la procédure auparavant,
puisqu'elle a provoqué, par ses recours, les décisions attaquées (ATF
121 IV 207 consid. 1a p. 210; 120 IV 38 consid. 2b p. 40; 119 IV 339
consid. 1d/bb p. 343). On ne saurait lui reprocher de ne pas avoir pris
de conclusions civiles sur le fond, puisque la procédure n'a pas été
menée jusqu'à un stade qui aurait permis de le faire (ATF 122 IV 139
consid. 1 p. 141; 120 IV 44 consid. 4a p. 52, 90 consid. 1a/aa p. 92,
94 consid. 1a/aa p. 95, 154 consid. 3a/aa p. 157). Il reste à examiner si
la recourante est lésée par l'infraction qu'elle allègue (sur la notion de
lésé: cf. ATF 120 IV 38 consid. 2a p. 40; 119 IV 339 consid. 1d/aa p. 342
et les arrêts cités) et si les décisions pénales attaquées sont de nature à
exercer une influence négative sur le jugement de l'action civile qu'elle
fait valoir ou entend faire valoir à raison de cette infraction.

    Comme le pourvoi est dirigé contre des ordonnances de non-lieu
(art. 268 ch. 2 PPF; sur cette notion: cf. ATF 122 IV 45 consid. 1c p. 46
et les arrêts cités), il faut se fonder sur les allégués de celui qui se
prétend lésé pour dire s'il l'est ou non (ATF 120 IV 38 consid. 2a p. 40;
119 IV 339 consid. 1d/aa p. 342).

    Pour dire si la décision attaquée est de nature à exercer une
influence négative sur le jugement des prétentions civiles que la
recourante entendrait faire valoir contre la personne visée en raison
du faux témoignage allégué, il faut tout d'abord déterminer en quoi
consistent ces prétentions civiles. Lorsque la partie recourante n'a
pas pris de conclusions civiles, il lui appartient d'indiquer, dans son
mémoire, quelles prétentions elle entend faire valoir sur le plan civil
et en quoi celles-ci peuvent être touchées par la décision attaquée
(ATF 122 IV 139 consid. 1 p. 141; 120 IV 44 consid. 8 p. 57; 119 IV 339
consid. 1d/cc p. 344).

    Comme il n'appartient pas au lésé de se substituer au Ministère
public ou d'assouvir une soif de vengeance (cf. B. CORBOZ, Le pourvoi en
nullité interjeté par le lésé, SJ 1995 p. 143), la jurisprudence entend
se montrer restrictive et stricte dans l'admission de la qualité pour se
pourvoir en nullité et la Cour de cassation n'entre en matière que s'il
ressort de façon suffisamment précise du pourvoi que les conditions de
l'art. 270 al. 1 PPF sont réalisées.

    Un pourvoi du lésé est exclu s'il n'a pas ou plus de prétentions
civiles (ATF 121 IV 317 consid. 3a p. 323) ou encore s'il n'évoque qu'une
créance future éventuelle.

    c) Lorsque l'infraction en cause protège en première ligne l'intérêt
collectif - comme c'est le cas de l'art. 307 CP -, les particuliers ne
sont considérés comme des lésés que si leurs intérêts privés ont été
effectivement touchés par les actes en cause, de sorte que leur dommage
apparaît comme la conséquence directe de l'acte dénoncé (ATF 120 Ia 220
consid. 3b p. 223 et les arrêts cités). Ne sont des prétentions civiles,
au sens de l'art. 270 al. 1 PPF, que celles qui sont susceptibles de faire
l'objet de conclusions civiles prises dans le cadre de la procédure pénale
(ATF 122 IV 139 consid. 3b p. 143).

    En l'espèce, la recourante fait valoir principalement que si les
déclarations litigieuses du témoin n'ont pas exercé d'influence sur le
jugement civil, l'autorité cantonale aurait dû appliquer l'art. 307 al. 3
CP, et non pas classer la procédure. Elle perd cependant de vue la question
de sa qualité pour se pourvoir en nullité. Si les déclarations litigieuses
n'ont pas eu d'influence, on ne voit pas qu'il puisse exister un lien de
causalité entre elles et un préjudice dont la recourante pourrait demander
réparation en prenant des conclusions civiles dans la procédure pénale. La
recourante ne peut pas être lésée par le faux témoignage allégué et elle ne
peut avoir une prétention civile en réparation de ce chef que si ce faux
témoignage a eu des conséquences dommageables pour elle. Dans la mesure
où les déclarations prétendument fausses n'ont exercé aucune influence
sur le jugement civil rendu en défaveur de la recourante, il n'y a pas
de lien de causalité entre le prétendu faux témoignage et le jugement
dommageable. Dans une telle situation, en l'absence de toute prétention
civile découlant directement de l'infraction dénoncée, la recourante n'a
pas qualité pour se pourvoir en nullité.

    Sous l'angle de la causalité, la question n'est pas de savoir si
le juge civil aurait pu ou aurait dû prendre en compte les déclarations
litigieuses. La décision civile a été rendue et ses motifs sont connus.
La seule question est de savoir si le juge s'est fondé de manière
déterminante sur les déclarations prétendument fausses. La cour cantonale
a constaté que tel n'était pas le cas. Elle a ainsi exclu toute causalité
naturelle entre les déclarations litigieuses et le jugement dommageable,
ce qui lie la Cour de cassation (ATF 122 IV 17 consid. 2c/aa p. 23 et
les arrêts cités). Il en résulte que la recourante n'a pas de prétention
à faire valoir et qu'elle n'a donc pas qualité pour se pourvoir en nullité.

    Pour ce qui est des déclarations faites par le témoin dans la
procédure pénale dirigée contre la recourante, il ressort clairement des
décisions attaquées qu'elles ne font pas l'objet de la procédure pour
faux témoignage, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'entrer en matière. De
surcroît, comme le relève la recourante, cette affaire n'est pas encore
jugée, de sorte que l'on ignore si ces déclarations influenceront ou
non la décision; la recourante ne pourrait donc faire valoir à ce sujet
qu'une créance future éventuelle, ce qui - comme on l'a vu - ne suffit
pas pour fonder la qualité pour se pourvoir en nullité.

    On peut certes se demander si le jugement civil n'aurait pas été
différent dans l'hypothèse où le témoin, selon la version soutenue par
la recourante, avait dit toute la vérité. La recourante n'entreprend pas
vraiment de le démontrer. De toute manière, la recourante ne fait que
reprendre la version qu'elle a soutenue en vain devant le juge civil;
comme elle ne prétend pas disposer de nouveaux moyens de preuve, il n'y
a pas de raison de penser qu'elle puisse prouver sa version des faits
à l'encontre du témoin, ce d'autant plus qu'au pénal le doute profite à
l'accusé (cf. art. 6 par. 2 CEDH). Comme on l'a vu, l'appréciation des
preuves - y compris l'appréciation anticipée des preuves (cf. ATF 121 I
306 consid. 1b p. 309 et la jurisprudence citée) - ne peut donner lieu
à un pourvoi en nullité. Dans la mesure où la recourante présente une
version différente qu'elle n'est manifestement pas en mesure de prouver,
comme le montre la procédure civile, le classement pour ce motif ne viole
de toute manière pas le droit fédéral.

    Ainsi, comme la recourante n'a pas démontré qu'elle ait une prétention
civile contre la personne visée à raison des faits dont elle se plaint,
elle n'a pas qualité pour se pourvoir en nullité et il n'y a pas lieu
d'entrer en matière.

Erwägung 2

    2.- (Suite de frais).