Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 120 II 31



120 II 31

8. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 20 janvier 1994 dans la
cause dame G. contre X. (recours en réforme) Regeste

    Art. 271 Abs. 1 und Art. 257d OR; Anfechtung einer Kündigung, die in
Verletzung des Grundsatzes von Treu und Glauben ausgesprochen worden ist.

    Eine Kündigung, die missbräuchlich ist oder Treu und Glauben
widerspricht, ist anfechtbar, auch wenn sie auf Zahlungsrückstand des
Mieters beruht. Gegen Treu und Glauben verstösst der Eigentümer, der
seinem Mieter die Kündigung wegen Nichtbezahlung fälliger Mietzinse oder
Nebenkosten androht, bevor er die Gewissheit erlangt hat, dass dieser
den geforderten Betrag schuldet (E. 4).

Sachverhalt

    A.- La société X. est propriétaire d'un appartement de quatre pièces
à Porrentruy, loué par dame G. Par pli recommandé du 18 février 1993,
la société de gérance P. SA, mandatée par X., a exigé de la locataire le
paiement de 1'375 fr., savoir 150 fr. et 286 fr. à titre de différences
de loyer pour les années 1991 et 1992, ainsi que 939 fr. pour le loyer
de décembre 1992. Elle lui a imparti un délai de 30 jours pour régler
sa dette ou pour formuler d'éventuelles remarques, tout en la menaçant
de résilier le bail en cas de non-paiement. Le 25 février 1993, dame
G. a refusé de payer les 286 fr. réclamés. Quant au montant du loyer de
décembre 1992 (936 fr.), elle l'avait réglé avant l'envoi de la lettre
du 18 février 1993.

    Par formule officielle datée du 5 avril 1993, X. a résilié le contrat
de bail pour le 31 mai 1993. Avant cette échéance, la locataire a payé
le montant de 286 fr. par deux versements intervenus le 30 avril et le
4 mai 1993.

    B.- Sur demande de la locataire, le Tribunal des baux à loyer et
à ferme du district de Porrentruy a, par jugement du 6 juillet 1993,
annulé le congé signifié, au motif que celui-ci contrevenait aux règles
de la bonne foi.

    Statuant sur recours de X., la Cour civile du Tribunal cantonal du
canton du Jura a constaté, par jugement du 25 août 1993, la validité du
congé notifié.

    C.- Le Tribunal fédéral a admis, dans la mesure où il était recevable,
le recours en réforme interjeté par dame G. et il a annulé le congé
litigieux.

Auszug aus den Erwägungen:

                   Extrait des considérants:

Erwägung 4

    4.- La recourante fait encore grief à la cour cantonale d'avoir violé
l'art. 271 al. 1 CO.

    a) Cette disposition prescrit que le congé est annulable lorsqu'il
contrevient aux règles de la bonne foi. Elle trouve sa source dans l'art.
34septies Cst. féd. qui attribue à la Confédération le droit de légiférer
en matière d'annulabilité des congés abusifs, notamment.

    Le législateur se réfère, à l'art. 271 al. 1 CO, à la notion de
bonne foi et non à celle d'abus de droit. Pour BARBEY, cette "différence
de vocabulaire ne trahit cependant aucune intention particulière de la
part du législateur. Les discussions au sein de la seconde Commission
d'experts - qui se trouve à l'origine du système en définitive retenu -
témoignent au contraire de ce que, dans l'esprit de ces spécialistes, les
deux expressions devaient viser le même phénomène (...). La portée d'une
distinction éventuelle entre l'abus de droit et l'acte contraire à la bonne
foi n'a pas plus été approfondie dans la suite des travaux préparatoires
(...)." (Commentaire du droit du bail, Chapitre III: Protection contre
les congés concernant les baux d'habitation et de locaux commerciaux,
Genève 1991, n. 11 ad art. 271-271a CO; cf., également, COMMENTAIRE DE
L'USPI, n. 6 ad art. 272 CO).

    Le droit actuel écarte le principe de la nullité absolue des congés
abusifs, mais il admet qu'ils soient annulables, principalement lorsqu'ils
sont chicaniers (COMMENTAIRE DE L'USPI, n. 26 s. ad art. 34septies
Cst. féd. et n. 2 ad art. 271 CO; LACHAT/MICHELI, Le nouveau droit du bail,
2ème éd., Lausanne 1992, p. 323). Il n'est pas nécessaire que l'attitude
de l'auteur de la résiliation puisse être qualifiée d'abus de droit
"manifeste" au sens de l'art. 2 al. 2 CC (LACHAT/MICHELI, loc.cit.;
ZIHLMANN, Das neue Mietrecht, Zurich 1990, p. 189), car l'art. 271
al. 1 CO vise toute résiliation qui ne "repose sur aucun intérêt digne
de protection, qui constitue une véritable chicane, qui consacre une
attitude déloyale qui résulte d'une disproportion manifeste entre les
intérêts en présence ou dont le motif n'est manifestement qu'un prétexte"
(LACHAT/MICHELI, loc.cit.).

    L'art. 271 al. 1 CO s'applique même lorsque la résiliation du bail a
pour cause la demeure du locataire au sens de l'art. 257d CO. En pareille
hypothèse, le droit du propriétaire bailleur de résilier le contrat de
bail pour défaut de paiement du loyer s'oppose à celui du locataire
d'être protégé contre une résiliation abusive; le juge ne peut alors
annuler le congé litigieux que si celui-ci est inadmissible au regard de la
jurisprudence relative à l'abus de droit et à la bonne foi (COMMENTAIRE DE
L'USPI, n. 10 ad art. 271 CO). Il faut des circonstances particulières pour
que le congé soit annulé (LACHAT/MICHELI, op.cit., p. 151 et p. 331 s.).
   b) Il s'agit d'examiner si de telles circonstances existent en l'espèce.

    Contrairement à l'opinion du tribunal de première instance cantonale,
il est vrai que, comme la Cour civile cantonale l'a estimé, le montant
réclamé de 286 fr. ne peut être qualifié d'insignifiant - comme le
seraient, par exemple, des intérêts dus sur un terme arriéré.

    Cependant, il ne faut pas perdre de vue que, dans sa lettre du
18 février 1993, la demanderesse a réclamé le versement de 1'375 fr.;
selon les constatations souveraines de la cour cantonale, la demanderesse
avait déjà réglé 936 fr. - sur ce montant - avant le 18 février 1993;
la défenderesse a ainsi menacé la demanderesse d'une résiliation de
bail pour le non-paiement d'un montant supérieur à 1'000 fr.; pourtant,
restaient dus uniquement 436 fr., puisque la bailleresse avait exigé
par erreur le paiement du loyer de décembre 1993 déjà versé. Or, le
propriétaire qui, par suite d'une erreur, réclame à son locataire le
versement de plus de mille francs - alors que seuls 436 fr. sont dus -
en le menaçant de résilier le contrat de bail en cas de non-paiement,
contrevient aux règles de la bonne foi s'il maintient cette menace après
avoir réduit sensiblement ses prétentions, suite à une contestation du
locataire relative au montant réclamé.

    En l'occurrence, si elle avait agi correctement, la propriétaire
aurait renoncé à la menace de résiliation du 18 février 1993 et elle
aurait notifié une nouvelle lettre de mise en demeure faisant clairement
état du montant de la dette resté impayé. Cette manière de procéder
s'imposait en l'espèce. Dans son pli du 18 février 1993 la société de
gérance a, en effet, expressément requis la demanderesse de contrôler
l'exactitude du montant réclamé et de lui faire part de ses remarques
éventuelles. La menace de résiliation n'était dès lors que conditionnelle;
or, le propriétaire qui éprouve un doute sur le montant de sa créance
et invite son locataire à vérifier le montant réclamé, se comporte d'une
manière contraire aux règles de la bonne foi s'il le menace de résiliation
avant d'avoir acquis la certitude que celui-ci doit bien ledit montant.

    En conséquence, le recours doit être admis dans la mesure où il
est recevable et le jugement entrepris doit être annulé. En vertu des
circonstances particulières de l'espèce, il y a lieu d'annuler le congé
litigieux en application des dispositions de l'art. 271 al. 1 CO.