Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 120 IB 436



120 Ib 436

59. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 12 décembre
1994 dans la cause dame B. contre Coop Vaud Chablais Valaisan, Commune
de Crissier et Conseil d'Etat du canton de Vaud (recours de droit
administratif). Regeste

    Genehmigung eines Sondernutzungsplans und Massnahmen zur
Luftreinhaltung; Art. 11 ff. USG; Art. 5, 31 ff. LRV; Art. 5 UVPV.

    Vorsorgliche und zusätzliche Emissionsbegrenzung bei einem
Einkaufszentrum; Grundsätze des Umweltschutzgesetzes (E. 2a).

    Luftreinhaltung; Emissions- und Immissionsgrenzwerte, Erstellung
eines Massnahmenplans (E. 2b bis 2c/cc).

    In einer Zone, in welcher die für Stickstoffdioxyd (NO2)
festgelegten Grenzwerte bereits überschritten sind, ist die Genehmigung
eines Sondernutzungsplans im Hinblick auf den Bau eines bedeutenden
Einkaufszentrums grundsätzlich nicht zulässig, solange kein Massnahmenplan
verfügt worden ist (E. 2c/dd).

    Soweit der Teilnutzungsplan genügend bestimmt ist und die
Umweltverträglichkeitsprüfung durchgeführt worden ist, hat die
Planungsbehörde die notwendigen Anordnungen zur Begrenzung der Emissionen
des Einkaufszentrums zu treffen (E. 2d).

    Emissionsbegrenzungen, welche durch den mit dem Betrieb des
Einkaufszentrums verbundenen Verkehr veranlasst werden; Reduktion der Zahl
der Parkplätze für Automobile und Erschliessung durch den öffentlichen
Verkehr (E. 3).

Sachverhalt

    A.- Le plan général d'affectation (plan de zones) de la commune
de Crissier est entré en vigueur en 1985. Il délimite, au sud-ouest du
territoire communal, une vaste zone industrielle, subdivisée en plusieurs
secteurs (IA, IB, IC, etc.). Avant que ce plan soit applicable, la société
coopérative Coop Vaud Chablais Valaisan (ci-après: la société) avait déjà
fait part à la municipalité de Crissier (ci-après: la municipalité) de son
intention de construire un centre commercial au lieu-dit "Pra-Machera",
sur des terrains situés en bordure de la route nationale N1 et classés dans
la zone industrielle IA; il lui a d'emblée été indiqué que l'établissement
préalable d'un plan d'affectation spécial serait requis. La municipalité
a ensuite préparé, en collaboration avec la société, un projet de plan
partiel d'affectation (PPA) intitulé "Pra Machera"; son périmètre comprend
quatre parcelles - sur lesquelles la société a acquis ou est en voie
d'acquérir un droit de superficie -, qui sont desservies par une route
cantonale et deux routes communales. L'art. 1er du règlement du plan
partiel d'affectation (RPPA) précise que le projet consiste à réaliser
"un centre commercial, avec des activités tertiaires et socio-culturelles
ainsi que de l'industrie et de l'artisanat". Différents sous-périmètres
sont délimités, dont les destinations respectives sont énoncées à l'art. 2
RPPA, ainsi libellé:

    "Les constructions et aménagements prévus par le PPA comprennent:

    a. un commerce de grande surface avec des commerces tiers, d'une
surface
   de vente max. de 12'000 m2 dont 4'000 m2 pour les tiers. Les surfaces
   arrières, dépôts, zones de livraison et malls ne sont pas compris
   dans les

    12'000 m2;

    b1. des établissements publics, socio-culturel, cinémas, discothèques,
   restaurants, etc.

    b2. des bureaux destinés à des activités tertiaires;

    La surface totale de b1 et b2 est limitée à 5'500 m2 au max.,
   l'affectation b2 ne pouvant en aucun cas dépasser 3'700 m2;

    c. un garden-centre d'une surface de vente max. de 1'000 m2;

    d. des espaces verts;

    e. des parkings;

    f. les voies de circulation pour les véhicules et les piétons;

    g. une station service;

    h. une zone industrielle ou commerciale délimitée par la parcelle 781."

    Par ailleurs, l'art. 9 RPPA indique le mode de calcul du "nombre
d'emplacements de stationnement minimum pour véhicules" à réaliser dans
le périmètre du plan, à l'intérieur ou à l'extérieur des bâtiments (par
exemple, pour le commerce de grande surface: 10 places par tranche ou
fraction de 110 m2 de surface de vente; pour les bureaux: 1 place par 35
m2 de surface brute de plancher). La société a en outre déposé un rapport
d'impact au sens des art. 7 ss de l'ordonnance relative à l'étude de
l'impact sur l'environnement (OEIE; RS 814.011). Ce rapport, établi le
1er juin 1990, retient que le parking du centre commercial comprendrait
1'250 places de stationnement environ; sur cette base, il décrit les
impacts du projet, notamment quant à la pollution de l'air et au bruit,
et il conclut que son influence sur l'environnement devrait être faible
en phase d'exploitation.

    Le plan partiel d'affectation "Pra Machera" a été mis à l'enquête
publique en juillet 1990; la propriétaire d'une maison d'habitation
voisine, dame B., a formé opposition. Le conseil communal de la commune
de Crissier (ci-après: le conseil communal) s'est prononcé sur cet objet
dans sa séance du 22 avril 1991; conformément à la proposition de la
municipalité, il a écarté l'opposition de dame B. et il a adopté le plan
partiel d'affectation. Il a toutefois admis un amendement aux termes
duquel "le centre ne pourra être mis en fonction qu'après réalisation
d'un raccordement efficace aux transports en commun" ("amendement no 2").

    Dame B. a déféré la décision communale au Conseil d'Etat du canton
de Vaud (ci-après: le Conseil d'Etat), par la voie de la requête au sens
des art. 60 ss de la loi cantonale sur l'aménagement du territoire et
les constructions (LATC); elle se plaignait de la violation de diverses
prescriptions du droit fédéral de la protection de l'environnement
relatives à la limitation des émissions dans les domaines de la protection
de l'air et de la protection contre le bruit. Le Conseil d'Etat a rejeté
la requête par décision du 11 juin 1993; il a considéré en substance
que des mesures d'assainissement devraient être ordonnées pour la région
dans laquelle se trouve le périmètre du plan litigieux, tant en raison des
nuisances sonores que de la pollution atmosphérique existantes, mais que la
réalisation du centre commercial projeté était néanmoins admissible. Le
Conseil d'Etat a cependant retenu que la procédure d'établissement
d'un plan des mesures, au sens des art. 31 ss de l'ordonnance sur la
protection de l'air (OPair; RS 814.318.142.1), était en cours et que,
le cas échéant, des restrictions supplémentaires, quant à la taille
des parkings ou des commerces, pourraient ensuite être imposées dans le
permis de construire. La décision cantonale d'approbation du plan partiel
d'affectation "Pra Machera" a donc été assortie de la réserve suivante:

    "Toute construction ou aménagement dans le cadre du plan partiel
   d'affectation sera subordonné aux conditions et restrictions que
   viendrait à poser le plan des mesures en élaboration et aux conséquences
   qui en découlent, Coop Vaud Chablais Valaisan étant invité à suivre
   avec attention l'évolution de l'étude du plan des mesures."

    Agissant par la voie du recours de droit administratif, dame B. a
demandé au Tribunal fédéral d'annuler la décision prise le 11 juin 1993
par le Conseil d'Etat, pour violation de diverses prescriptions fédérales
sur la protection de l'environnement. Pendant l'instruction du recours,
un projet de "plan des mesures OPair" pour l'agglomération lausannoise
(projet, destiné à la consultation, adopté en janvier 1994 par les services
spécialisés du canton de Vaud et de la commune de Lausanne) a été versé
au dossier; pour sa part, la société a produit un rapport technique du
28 avril 1994, intitulé "Simulation d'intégration du projet [de centre
commercial à "Pra Machera"] dans le plan de mesures de l'agglomération
lausannoise".

    Le Tribunal fédéral a admis le recours au sens des considérants,
annulé la décision attaquée et renvoyé l'affaire au Conseil d'Etat pour
nouvelle décision.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- La recourante soutient qu'au stade de l'adoption du plan partiel
d'affectation, les autorités cantonales auraient déjà dû imposer, pour
le centre commercial projeté, une limitation plus sévère des émissions,
conformément aux prescriptions de l'art. 11 al. 3 LPE (RS 814.01) et
de l'art. 5 OPair.

    a) aa) La loi fédérale sur la protection de l'environnement a pour
but de protéger les hommes - notamment - des atteintes nuisibles ou
incommodantes (art. 1er al. 1 LPE), en particulier des pollutions
atmosphériques produites par la construction ou l'exploitation
d'installations (art. 7 al. 1 LPE); ces pollutions - dénommées
"émissions" au sortir des installations et "immissions" au lieu de
leur effet (art. 7 al. 2 LPE) - doivent être limitées par des mesures
prises à la source (art. 11 al. 1 LPE). Selon le principe général
de la prévention, "les atteintes qui pourraient devenir nuisibles ou
incommodantes seront réduites à titre préventif et assez tôt" (art. 1er
al. 2 LPE). Conformément à ce principe, l'art. 11 al. 2 LPE dispose que,
"indépendamment des nuisances existantes, il importe, à titre préventif,
de limiter les émissions dans la mesure que permettent l'état de la
technique et les conditions d'exploitation et pour autant que cela soit
économiquement supportable". Une telle limitation peut néanmoins se
révéler insuffisante, suivant les effets des pollutions atmosphériques
(immissions); l'art. 11 al. 3 LPE prévoit donc que "les émissions seront
limitées plus sévèrement s'il appert ou s'il y a lieu de présumer
que les atteintes, eu égard à la charge actuelle de l'environnement,
seront nuisibles ou incommodantes". En vertu de l'art. 13 al. 1 LPE,
le Conseil fédéral est compétent pour édicter, par voie d'ordonnance,
des valeurs limites d'immissions applicables à l'évaluation des atteintes
nuisibles ou incommodantes. Les mesures que les autorités compétentes sont
appelées à prendre, en vue de limiter les émissions conformément à l'art.
11 LPE, sont énumérées - de façon exhaustive, pour celles qui sont fondées
directement sur la loi fédérale sur la protection de l'environnement
(cf. ATF 119 Ib 480 consid. 5a, 118 Ib 26 consid. 5d) - à l'art. 12
LPE, qui prévoit notamment l'application des valeurs limites d'émissions
(art. 12 al. 1 let. a LPE), des prescriptions en matière de construction
ou d'équipement (art. 12 al. 1 let. b LPE) ou des prescriptions en matière
de trafic ou d'exploitation (art. 12 al. 1 let. c LPE); par ailleurs,
l'art. 12 al. 2 LPE renvoie aux ordonnances du Conseil fédéral ou, pour
les cas que celles-ci n'ont pas visés, aux décisions fondées directement
sur cette loi fédérale.

    Les prescriptions des art. 11 ss LPE sur la limitation des émissions
doivent être appliquées à l'occasion de la planification et de la
construction de nouvelles installations, par quoi on entend notamment les
bâtiments, les voies de communication ainsi que d'autres ouvrages fixes
(art. 7 al. 7 LPE). Ces règles s'appliquent aussi aux installations
existantes qui, lorsqu'elles ne satisfont pas aux prescriptions sur
la protection de l'environnement, doivent en principe être assainies
(art. 16 al. 1 LPE).

    bb) L'ordonnance sur la protection de l'air fait la distinction
entre deux catégories d'installations au sens de l'art. 7 al. 7 LPE:
les "installations stationnaires" (bâtiments et autres ouvrages fixes,
aménagements de terrain, appareils et machines, installations de
ventilation collectant les effluents gazeux des véhicules et les rejetant
dans l'environnement sous forme d'air évacué - art. 2 al. 1 OPair) et les
"infrastructures destinées aux transports" (routes, aéroports, voies
ferrées et autres installations où les effluents gazeux des véhicules
sont rejetés dans l'environnement sans avoir été collectés - art. 2
al. 3 OPair).

    Les différents locaux que le plan partiel d'affectation litigieux
permet de construire et d'aménager forment ensemble une installation
stationnaire au sens de l'art. 2 al. 1 OPair. Le "centre commercial
avec activités tertiaires et socio-culturelles" (selon la définition
de l'art. 1er RPPA) comprend aussi un parc de stationnement extérieur
et le plan d'affectation prévoit la réalisation, dans son périmètre,
de voies d'accès pour les véhicules automobiles (il mentionne par
ailleurs l'aménagement de voies du réseau routier général "en fonction
des nécessités du trafic créées par le présent PPA" - cf. art. 1er in
fine RPPA); il s'agit là d'infrastructures destinées aux transports,
selon la définition de l'art. 2 al. 3 OPair. Comme le relève le rapport
d'impact, une partie des émissions provoquées par l'exploitation du
centre - chauffage des locaux, circulation des véhicules dans le parking
intérieur - doivent être collectées et rejetées au moyen de cheminées; les
autres émissions sur l'aire d'exploitation sont rejetées directement dans
l'environnement et elles proviennent principalement des véhicules à moteur
(automobiles des clients et du personnel, véhicules de livraison). Les
émissions liées étroitement, mais indirectement, à l'exploitation du
centre commercial - à savoir les émissions provoquées par les véhicules
des clients ou des employés sur les voies d'accès (émissions secondaires;
cf. PETER ETTLER, Kommentar zum Umweltschutzgesetz, Zurich 1989,
n. 20 ad art. 25; ROBERT WOLF, Führt übermässige Luftverschmutzung zu
Baubeschränkungen und Auszonungen?, URP/DEP 1991 p. 74) - doivent aussi
être prises en compte. Du point de vue de la protection de l'air, il
faut procéder à une appréciation globale des effets de l'exploitation
du centre commercial, considéré comme une seule installation (au sens
de l'art. 7 al. 7 LPE; cf. ATF 119 Ib 480 consid. 4; arrêt non publié
du 20 janvier 1993 reproduit in URP/DEP 1993 p. 169, consid. 5c p. 177);
c'est d'ailleurs ce qu'ont fait les autorités cantonales en l'espèce.

    b) L'annexe 1 OPair fixe, pour diverses substances, des valeurs limites
d'émissions qui doivent être observées dans l'équipement et l'exploitation
des nouvelles installations stationnaires (cf. art. 3 OPair); il n'est
pas contesté que ces exigences pourraient être respectées, pour les
bâtiments du centre commercial, avec des dispositifs de ventilation et
des cheminées adéquats. En revanche, en ce qui concerne la limitation
préventive des émissions dues aux infrastructures destinées aux transports,
l'art. 18 OPair se borne à rappeler le principe de l'art. 11 al. 2 LPE
("l'autorité ordonne que l'on prenne, pour limiter les émissions dues au
trafic, toutes les mesures que la technique et l'exploitation permettent
et qui sont économiquement supportables"); cette ordonnance ne fixe donc
pas de valeurs limites d'émissions à ce propos.

    La décision attaquée retient que le trafic automobile occasionnerait,
en particulier, une augmentation d'environ 6% des émissions d'oxydes
d'azote (NOx); elle se réfère aussi aux calculs du rapport d'impact
quant à l'augmentation des émissions de monoxyde de carbone et
d'hydrocarbures. Elle n'indique toutefois pas si les mesures préventives
prises à ce stade sont suffisantes au regard des critères des art. 11
al. 2 LPE et 18 OPair. Cette question n'a cependant pas à être tranchée
dans la présente procédure.

    c) aa) Le Conseil fédéral a édicté, dans l'ordonnance sur la protection
de l'air, des valeurs limites d'immission pour certaines substances:
l'anhydride sulfureux (SO2), le dioxyde d'azote (NO2), le monoxyde de
carbone (CO), l'ozone (O3), ainsi que quelques autres substances contenues
dans des poussières (art. 2 al. 5 OPair et annexe 7 OPair). Dans le
cas particulier, l'autorité cantonale ne s'est prononcée qu'au sujet
des immissions de dioxyde d'azote (comme l'auteur du rapport d'impact,
au demeurant); la recourante ne fait pas valoir que d'autres substances
auraient dû être prises en considération à cet égard.

    La combustion des carburants provoque des émissions d'oxydes d'azote
(monoxyde et dioxyde, dont le mélange est désigné par NOx) et, en Suisse,
environ deux tiers de ces émissions proviennent des véhicules à moteur (les
oxydes d'azote se composent à l'émission de 90 à 95% de monoxyde d'azote
[NO], qui se transforme ultérieurement dans l'atmosphère en dioxyde d'azote
[NO2], plus toxique; cf. OFFICE FÉDÉRAL DE L'ENVIRONNEMENT, DES FORÊTS
ET DU PAYSAGE, La pollution de l'air en 1991 [cahier de l'environnement
no 179], Berne 1992, p. 64). Dans la procédure d'établissement du plan
d'affectation litigieux, les immissions de dioxyde d'azote ont été mesurées
à divers points; selon la décision attaquée, la valeur limite de 30 µg/m3
en moyenne annuelle (cf. annexe 7 OPair, ad NO2) est déjà dépassée dans
le secteur, indépendamment de la réalisation du projet litigieux. Le
rapport d'impact établi par la société intimée indique en effet que dans
un "périmètre de référence" (qui comprend les terrains entourant, sur une
surface de 0,5 km2 environ, le lieu-dit "Pra Machera"), les immissions de
NO2 sont actuellement - en l'occurrence en 1993, d'après les prévisions
faites en 1990 - comprises entre 42 et 55 µg/m3 en moyenne annuelle. Le
rapport technique du 28 avril 1994, produit par la société intimée,
comporte une carte des immissions de NO2 dans la région de Crissier
(cf. Annexes au rapport, "Evaluation des immissions annuelles de NO2",
figure 1 - état de référence 1990); selon cette carte, les valeurs moyennes
annuelles atteignent dans certains endroits 80 µg/m3 et, au lieu-dit "Pra
Machera" lui-même, elles sont d'environ 60 µg/m3. Quant au projet de plan
des mesures du mois de janvier 1994, il retient de façon générale que,
dans l'agglomération lausannoise - dont la commune de Crissier fait partie
-, les concentrations moyennes annuelles de NO2 en 1990 atteignaient 75
à 80 µg/m3 dans le centre et au voisinage de certaines routes à fort
trafic (p. 14 du projet); une carte de l'ensemble de l'agglomération
(figure 2.3. du projet, p. 15) indique du reste que ces immissions sont
particulièrement importantes le long du tracé de la route nationale N1
sur le territoire de la commune de Crissier. Dans une telle situation,
les conditions pour une limitation plus sévère des émissions, au sens de
l'art. 11 al. 3 LPE, peuvent être réunies.

    bb) La recourante soutient qu'il serait contraire à l'art. 5
al. 2 OPair d'admettre, même au stade du plan d'affectation spécial, la
réalisation d'une nouvelle installation dont l'exploitation engendrerait
une pollution supplémentaire dans un secteur où les immissions sont déjà
excessives. L'art. 5 OPair (qui figure dans une section de l'ordonnance
intitulée: "Limitation des émissions dues aux nouvelles installations
stationnaires") dispose ce qui suit:

    "Limitation plus sévère des émissions par l'autorité [titre]

    1 S'il est à prévoir qu'une installation projetée entraînera des
immissions
   excessives, quand bien même elle respecte la limitation préventive des
   émissions, l'autorité impose une limitation des émissions complémentaire
   ou plus sévère.

    2 La limitation des émissions sera complétée ou rendue plus sévère, de
   manière à ce qu'il n'y ait pas d'immissions excessives."

    Cette disposition doit être interprétée en relation avec l'art. 9
OPair (section intitulée "Limitation des émissions des installations
stationnaires existantes"), qui a la teneur suivante:

    "Limitation plus sévère des émissions [titre]

    1 S'il est établi qu'une installation existante entraîne à elle
seule des
   immissions excessives, quand bien même elle respecte la limitation
   préventive des émissions, l'autorité impose une limitation d'émissions
   complémentaire ou plus sévère.

    2 La limitation des émissions sera complétée ou rendue plus sévère
jusqu'à
   ce qu'il n'y ait plus d'immissions excessives.

    3 Pour la limitation des émissions complémentaire ou plus sévère,
   l'autorité ordonnera des mesures d'assainissement à effectuer dans
   les délais prévus à l'art. 10, 2e alinéa. Au besoin, elle imposera
   une réduction de l'activité ou l'arrêt de l'installation pour la durée
   de l'assainissement.

    4 Si les immissions excessives sont provoquées par plusieurs
   installations, on procédera conformément aux art. 31 à 34."

    Dans cette disposition, l'auteur de l'ordonnance a distingué deux
hypothèses: celle où les immissions excessives sont provoquées par
une seule installation (al. 1 à 3), d'une part, et celle où elles
sont provoquées par plusieurs installations (al. 4), d'autre part;
dans ce dernier cas, l'art. 9 OPair renvoie à d'autres prescriptions de
l'ordonnance (art. 31 ss OPair, section intitulée: "Mesures contre les
immissions excessives").

    La règle de l'art. 5 al. 2 OPair - à l'instar de l'art. 9 al. 2 OPair -
ne peut s'appliquer que dans la première des deux hypothèses ci-dessus, à
savoir quand l'exploitation de l'installation projetée entraînerait à elle
seule un dépassement des valeurs limites d'immission; cette interprétation
découle du reste clairement du texte allemand de l'art. 5 al. 1 OPair ("Ist
zu erwarten, dass eine einzelne geplante Anlage übermässige Immissionen
verursachen wird..."), ainsi que de l'art. 31 al. 4 OPair, qui renvoie non
seulement à l'art. 9 OPair, mais également à l'art. 5 OPair au cas où les
immissions excessives sont dues à une seule installation stationnaire. Il
importe peu que, pour la seconde des hypothèses précitées, l'art. 5 OPair
ne réserve pas expressément les art. 31 à 34 OPair, car lorsque les valeurs
limites sont déjà dépassées dans une localité ou une agglomération, ces
dispositions sont de toute manière applicables (cf. notamment art. 19
OPair); comme cela sera exposé (cf. infra, consid. 2c/cc), leur portée
n'est pas d'interdire de façon absolue toute nouvelle installation, ni
d'exiger d'emblée pour chaque nouveau projet une limitation des émissions
si sévère qu'elle exclurait toute possibilité raisonnable d'exploitation.

    cc) Aux termes de l'art. 31 al. 1 OPair, s'il est établi ou à prévoir
que des immissions excessives se produisent, l'autorité arrête un plan
des mesures, qui doit indiquer les sources des émissions ainsi que
les mesures propres à prévenir ou à éliminer les immissions excessives
(art. 31 al. 2 OPair); ces mesures seront réalisées en règle générale
dans les cinq ans dès l'adoption du plan (art. 31 al. 3 OPair). Dans une
situation complexe où les sources des émissions responsables des immissions
excessives sont multiples (installations stationnaires, infrastructures
destinées aux transports), les mesures à prendre sont nécessairement
nombreuses et diverses. Le plan des mesures est un instrument de
coordination qui permet aux autorités compétentes de procéder à une
appréciation globale de la situation; il permet aussi à ces autorités
d'ordonner, dans chaque cas particulier, une limitation complémentaire
des émissions en respectant le principe de la proportionnalité et
en garantissant l'égalité de traitement - ou l'égalité des charges -
entre les détenteurs d'installations (ATF 119 Ib 480 consid. 5a, 118 Ib
26 consid. 5d, 117 Ib 425 consid. 5c). Lorsqu'elle doit se prononcer
sur un projet de nouvelle installation, l'autorité compétente ne peut
pas, par une simple opération arithmétique, calculer l'ampleur de la
limitation complémentaire des émissions à ordonner; il y a en effet
un rapport direct entre cette question et les mesures à imposer pour
les installations existantes (la limitation sera nécessairement plus
sévère si la charge polluante totale augmente sensiblement en raison de
la nouvelle installation). Toutes les décisions à prendre en relation
avec la protection de l'air - dans les procédures de planification,
de construction, d'assainissement, etc. (cf. art. 32 et 33 OPair) -
doivent être coordonnées: c'est précisément l'objet du plan des mesures
(ATF 119 Ib 480 consid. 5b, 118 Ib 26 consid. 5e). Cela étant, il n'est
pas admissible d'ordonner une limitation plus sévère des émissions lors
de la construction d'une installation nouvelle - qui est conforme à la
destination de la zone et qui ne provoque pas des atteintes supérieures à
la moyenne (cf. infra) -, et de renoncer à imposer une limitation analogue,
par une décision d'assainissement, pour les installations existantes. Pour
respecter les principes de la coordination et de l'égalité des charges, il
faut prendre en considération toutes les sources des émissions responsables
des immissions excessives (ATF 119 Ib 480 consid. 5b in fine, 118 Ib 26
consid. 5d in fine).

    Le plan des mesures ne peut pas interdire directement toute nouvelle
construction dans un secteur où les immissions sont excessives; il peut
néanmoins prévoir une modification des plans d'affectation en vigueur, en
vue de réduire, par exemple, la surface ou les capacités de certaines zones
à bâtir. Il appartient alors aux autorités compétentes pour l'adoption
et la révision des plans d'affectation de se prononcer et d'examiner à
quelles conditions ces modifications peuvent intervenir, compte tenu des
principes régissant l'aménagement du territoire - notamment du principe de
la stabilité des plans (cf. art. 21 al. 2 LAT: les plans d'affectation
font l'objet des adaptations nécessaires lorsque les circonstances
se sont sensiblement modifiées; cf. ATF 120 Ia 227 consid. 2, 119 Ib
480 consid. 5c, 114 Ia 32 consid. 6, 109 Ia 113 consid. 3). Avant sa
révision éventuelle, le plan d'affectation déploie ses effets - pour
autant que des mesures provisionnelles, comme une zone réservée (art. 27
LAT; RS 700) n'aient pas été prises - et les constructions conformes à la
destination d'une zone doivent en principe être admises, du point de vue
de la protection de l'air, si leurs émissions ne sont pas supérieures à
la moyenne (ATF 119 Ib 480 consid. 5d - le Tribunal fédéral a notamment
considéré que ces conditions étaient remplies dans le cas d'une fabrique
dotée de quinze places de stationnement [ATF 118 Ib 26] et d'un immeuble
administratif pourvu d'un parking de cent trente-sept places [ATF 119
Ib 480]). En revanche, en autorisant la réalisation d'une nouvelle
installation qui serait la source d'émissions importantes alors que le
plan des mesures est encore en cours d'élaboration, l'autorité compétente
modifierait de façon sensible les données à prendre en considération et
le projet de plan des mesures devrait, le cas échéant, être revu pour
tenir compte de l'augmentation des immissions due au nouveau projet;
dans ces conditions-là, pour respecter les principes de la coordination
et de l'égalité des charges, il faut en principe attendre que les mesures
propres à prévenir les immissions excessives soient connues et arrêtées
(ATF 119 Ib 480 consid. 5e, 118 Ib 26 consid. 5f).

    Le Tribunal fédéral a admis que l'on déroge à ce principe dans le
domaine de la construction des routes nationales (cf. ATF 118 Ib 206
consid. 11f, 117 Ib 425 consid. 5e). L'art. 36bis al. 1 Cst. charge en
effet la Confédération d'assurer, par voie législative, l'établissement
et l'utilisation d'un réseau de routes nationales et, conformément à
l'art. 11 al. 1 de la loi fédérale sur les routes nationales (LRN; RS
725.11), l'Assemblée fédérale a fixé définitivement le tracé général
et le type des routes nationales à construire (cf. arrêté fédéral sur
le réseau des routes nationales; ARN, RS 725.113.11); il appartient
aux cantons de construire et d'entretenir ces routes conformément aux
dispositions arrêtées par la Confédération (art. 36bis al. 2 Cst.). Ce
mandat constitutionnel spécial doit être pris en considération dans la
pesée des intérêts lorsque l'application de la législation sur les routes
nationales entre en conflit avec les prescriptions du droit fédéral de
la protection de l'environnement, adopté sur la base de l'art. 24septies
Cst. (ATF 118 Ib 206 consid. 8a); cela peut justifier des solutions
particulières, qui ne sauraient s'appliquer dans une procédure relative
à la réalisation d'installations à destination purement commerciale.

    dd) Les autorités cantonales ont décidé d'établir un plan des
mesures pour l'agglomération lausannoise. Selon le droit vaudois, il
appartient au Service cantonal de lutte contre les nuisances d'élaborer
ce plan, qui doit ensuite être soumis à l'approbation du Conseil d'Etat
(art. 14 du règlement cantonal d'application de la loi fédérale sur
la protection de l'environnement [RALPE]); en principe, cette dernière
décision aurait dû intervenir avant le 1er mars 1989 (cf. art. 42 al. 3
et art. 43 OPair). Néanmoins, un projet de plan des mesures a été mis en
consultation - postérieurement à la décision attaquée -, mais il appartient
encore au Conseil d'Etat de se prononcer à ce sujet. On ne connaît donc
pas de manière définitive les mesures propres à prévenir ou à éliminer
les immissions excessives à Crissier et dans le reste de l'agglomération
lausannoise. Il faut dès lors examiner si, même avec une réserve relative
"aux conditions et restrictions que viendrait à poser le plan des mesures
en élaboration", le plan partiel d'affectation litigieux pouvait être
mis en vigueur à ce stade.

    L'exigence de stabilité des plans d'affectation (cf. supra,
consid. 2c/cc) n'entre pas en considération en l'espèce, car les autorités
compétentes ont elles-mêmes considéré qu'à l'endroit litigieux, les
circonstances s'étaient sensiblement modifiées depuis l'adoption du plan
des zones de 1985 - en particulier, la décision attaquée retient que
la zone industrielle s'est révélée trop vaste au regard des besoins des
entreprises - et qu'une adaptation du régime en vigueur était justifiée. Le
plan contesté maintient certes les terrains de l'intimée dans la zone à
bâtir et il confirme que ce secteur est destiné aux activités économiques
(au sens large); ce nouveau plan permet néanmoins la réalisation
d'installations fréquentées quotidiennement par un très grand nombre de
personnes (y compris le samedi et le soir, pour ce qui est des activités
"socio-culturelles"), ce qui entraînerait, en conséquence, des nuisances
sensiblement différentes de celles d'un établissement industriel au sens de
l'art. 112 RCATC. Les autorités communales et cantonales n'ont pas choisi,
en l'espèce, d'élaborer un plan d'affectation de détail ne remettant
pas en cause la destination de la zone industrielle IA et se bornant à
régler de façon plus précise certaines questions, comme l'implantation ou
le volume des bâtiments; au contraire, elles ont modifié sur des points
essentiels le régime d'affectation en vigueur.

    Il est constant que l'exploitation d'un grand centre commercial,
auquel s'ajoutent des locaux réservés à des "activités tertiaires et
socio-culturelles", entraînerait une augmentation sensible du trafic
motorisé dans les environs; disposant de 1'250 places de stationnement -
selon les données retenues dans la décision attaquée -, ce centre pourrait
accueillir chaque jour plusieurs milliers d'automobilistes. Les atteintes
supplémentaires qui résulteraient de cette exploitation ont fait l'objet
d'estimations chiffrées. Selon le rapport d'impact, l'augmentation des
immissions de dioxyde d'azote (NO2) dans le "périmètre de référence"
(cf. supra, consid. 2c/aa) serait, en proportion, d'environ quatre à
cinq pour cent dans la situation actuelle, à savoir 2 µg/m3 en plus
aux points spécialement exposés. Le dernier rapport produit par la
société intimée (rapport technique du 28 avril 1994) retient pour sa
part une augmentation de 3 µg/m3 dans le périmètre du plan litigieux,
en prenant en considération un parking de 1'530 places (ce que l'art. 9
RPPA n'exclut pas, selon ce rapport). Que l'on retienne l'une ou l'autre
de ces estimations, ces augmentations sont de toute manière sensibles,
au regard notamment de l'objectif à atteindre par le biais des mesures de
limitation des émissions (pour le NO2: 30 µg/m3 en moyenne annuelle); il
n'est pas contestable que, de ce point de vue, un grand centre commercial
provoque des atteintes notablement plus importantes que la moyenne des
bâtiments commerciaux, administratifs ou industriels.

    Par ailleurs, selon le droit fédéral, une installation telle que le
centre commercial litigieux est considérée comme une "installation pouvant
affecter sensiblement l'environnement", pour laquelle une étude de l'impact
sur l'environnement doit être effectuée (art. 9 al. 1 LPE). En effet,
les centres commerciaux d'une surface de vente supérieure à 5'000 m2 font
partie des installations auxquelles s'appliquent ces exigences formelles
spéciales (ch. 80.5 de l'annexe OEIE, par renvoi de l'art. 1er OEIE),
de même d'ailleurs que les parcs de stationnement (terrain ou bâtiment)
pour plus de 300 voitures (ch. 11.4 de l'annexe OEIE); dans ces cas,
les atteintes à l'environnement sont causées principalement par le trafic
motorisé lié à l'exploitation. Or, en l'espèce, les valeurs de seuil
des ch. 11.4 et 80.5 de l'annexe OEIE sont l'une et l'autre largement
dépassées; c'est là une raison supplémentaire de considérer que le projet
contesté serait la source d'émissions manifestement supérieures à la
moyenne. Autoriser sa réalisation en l'état pourrait dès lors compromettre
l'établissement et la mise en oeuvre du plan des mesures (cf. supra,
consid. 2c/cc).

    d) Comme cela vient d'être exposé, l'adoption du plan partiel
d'affectation équivaut à une modification du plan général d'affectation de
la commune et cette procédure doit être distinguée de celle, ultérieure,
de l'autorisation de construire. C'est pourquoi la décision attaquée
comporte la réserve selon laquelle "toute construction ou aménagement
dans le cadre du plan partiel d'affectation sera subordonné aux
conditions et restrictions que viendrait à poser le plan des mesures
en élaboration". A ce propos, le Conseil d'Etat a retenu qu'il n'était
pas exclu que l'autorité qui se prononcera sur la demande de permis de
construire ordonne des mesures de limitation complémentaire des émissions
entraînant une réduction du nombre de places de stationnement ou de la
surface de vente. Dans sa réponse au recours, le gouvernement cantonal
soutient que, de cette manière, l'application des prescriptions sur la
protection de l'air - et également sur la protection contre le bruit -
sera assurée en tenant compte du principe d'économie de procédure.

    aa) Lorsqu'un projet est soumis à une étude de l'impact sur
l'environnement (EIE), les règles formelles spéciales du droit fédéral
et du droit cantonal à ce sujet doivent permettre d'apprécier, de façon
coordonnée, si les exigences de la protection de l'environnement sont
respectées (art. 9 al. 1 LPE et 3 OEIE). Aux termes de l'art. 5 al. 1 OEIE,
l'étude d'impact est effectuée par l'autorité qui, dans le cadre de la
procédure d'autorisation ou d'approbation, est compétente pour décider
de la réalisation de l'installation; pour un projet tel que le centre
commercial litigieux, il appartient au canton de déterminer la "procédure
décisive" dans laquelle doit s'effectuer cette étude (art. 5 al. 2 et
3 OEIE, ch. 11.4 et 80.5 de l'annexe OEIE). L'art. 5 al. 3 in fine OEIE
dispose que "dans tous les cas où les cantons prévoient l'établissement
d'un plan d'affectation spécial, c'est cette procédure qui est considérée
comme procédure décisive, à condition qu'elle permette de procéder à
une EIE exhaustive". Néanmoins, le droit fédéral admet aussi que le
droit cantonal prévoie une "EIE par étapes", pour autant que chacune
des procédures successives permette à l'autorité compétente d'obtenir
toutes les informations dont elle a besoin pour pouvoir se prononcer
au terme de la procédure en question (art. 6 OEIE). La procédure par
étapes pourra notamment être appliquée lorsqu'un plan d'affectation
spécial n'est pas suffisamment détaillé pour permettre une appréciation
exhaustive d'un projet, mais qu'il règle néanmoins certaines questions
déterminantes quant aux dimensions, à l'implantation ou à l'équipement
de l'installation, lesquelles ne pourront en principe plus être revues
dans la phase ultérieure de l'autorisation de construire (cf. YVES NICOLE,
L'étude d'impact dans le système fédéraliste suisse, thèse Lausanne 1992,
p. 170; ROBERT WOLF, Zum Verhältnis von UVP und Nutzungsplanung, URP/DEP
1992 p. 146 ss).

    Le Conseil d'Etat du canton de Vaud a édicté un règlement d'application
de l'ordonnance fédérale relative à l'étude de l'impact sur l'environnement
(REIE - en vigueur depuis le 1er mai 1990). Selon le ch. 80.5 de l'annexe
à ce règlement, la procédure décisive - au sens de l'art. 5 OEIE - pour
la réalisation de centres commerciaux d'une surface de vente supérieure
à 5'000 m2 est, en première étape, la procédure d'adoption d'un plan
de quartier ou d'un plan partiel d'affectation; l'étude d'impact se
limite alors "aux éléments déterminants pour la procédure d'adoption et
d'approbation du plan" (art. 3 al. 2 REIE). Ensuite, en deuxième étape,
la procédure décisive est celle de l'autorisation cantonale spéciale
liée au permis de construire (art. 120 ss LATC; le ch. 80.5 annexe REIE
réserve toutefois le cas d'une étude d'impact exhaustive en première étape,
rendant superflue la seconde étape). De façon plus générale, l'art. 3
al. 1 REIE dispose que "l'EIE est mise en oeuvre dès l'élaboration du plan
[partiel d'affectation] s'il comporte des mesures détaillées applicables
à un projet dont il est possible de définir l'ampleur et la nature de
l'impact sur l'environnement". Ainsi, même si la procédure décisive
pour la réalisation de parcs de stationnement de plus de 300 places est
en principe la procédure de l'autorisation cantonale selon les art. 120
ss LATC (ch. 11.4 annexe REIE), le droit vaudois n'exclut pas que,
pour une telle installation, l'étude d'impact s'effectue déjà au stade
de l'établissement du plan d'affectation spécial; en l'espèce, cette
solution s'imposait en raison du lien étroit entre le centre commercial
et son parking.

    Cela étant, l'exigence de l'établissement préalable d'un plan partiel
d'affectation - ou plan de quartier - en vue de la réalisation du centre
commercial litigieux n'est pas fondée directement sur le règlement précité
(cf. ch. 80.5 annexe REIE); il s'agit d'une prescription du droit cantonal
de l'aménagement du territoire, applicable à tous les centres commerciaux
dont la surface de vente excède deux mille mètres carrés (les dispositions
du plan spécial devant prévoir que "le propriétaire assum[e] la totalité
des frais des équipements publics et privés nécessités par la construction
ainsi que par l'entretien de ces équipements" - art. 47 let. m LATC; la
réglementation communale de Crissier connaît une disposition analogue -
art. 34bis RCATC). Il est nécessaire qu'un tel plan partiel d'affectation
soit assez détaillé, dès lors qu'en vertu du droit cantonal, une étude
d'impact doit être effectuée à ce stade et que les incidences du projet
sur les installations d'équipement - général et de raccordement - doivent
aussi être examinées.

    bb) La procédure d'adoption et d'approbation du plan partiel
d'affectation "Pra Machera" est une procédure décisive au sens de l'art. 5
OEIE (cf. art. 3 al. 2 REIE). Pour la première étape de l'étude d'impact,
la décision communale d'adoption du plan, prise le 22 avril 1991, est
donc une décision finale (art. 17 OEIE, art. 13 et 16 al. 3 REIE), qui
a été approuvée et complétée par le gouvernement cantonal (cf. art. 61
LATC). Comme ces autorités doivent déterminer, à ce stade, si le projet
répond aux prescriptions fédérales sur la protection de l'environnement
(cf. art. 3 al. 1 OEIE), les dispositions relatives à la destination
des locaux, aux surfaces réservées aux diverses activités (commerces,
cinémas, bureaux, etc.; cf. art. 2 let. a, b, c, h RPPA) ainsi qu'au
nombre d'emplacements de stationnement, doivent nécessairement être
assez précises; c'est en fonction de ces données que le type et le volume
du trafic engendré par l'exploitation pourront être estimés et que les
atteintes à l'environnement pourront être évaluées.

    Le plan partiel d'affectation litigieux et son règlement limitent de
façon claire les superficies du "commerce de grande surface" (12'000 m2
pour la vente; art. 2 let. a RPPA), des bureaux et établissements publics
(5'500 m2; art. 2 let. b RPPA) ainsi que du garden-centre (1'000 m2 pour
la vente; art. 2 let. c RPPA); pour le cas particulier du sous-périmètre
constitué par la parcelle 781, le règlement contient également des
normes sur la densité des constructions (art. 12 RPPA). En outre, un
nombre minimum de places de stationnement, proportionnel à la surface des
commerces et bureaux, est imposé (art. 9 RPPA). Sur ces points décisifs
pour l'application des prescriptions fédérales sur la protection de l'air,
le plan partiel d'affectation détermine déjà en grande partie, en raison
de son caractère détaillé, le contenu d'une éventuelle autorisation
ultérieure; du reste, à ce stade-là, l'autorité compétente ne saurait
en principe réexaminer et remettre en cause les dispositions d'un plan
d'affectation en vigueur (ATF 119 Ib 480 consid. 5c, 116 Ia 207 consid. 3b,
115 Ib 335 consid. 4c). Dès lors, les conditions et restrictions posées
par le plan des mesures - qui ont été réservées par la décision attaquée -
doivent déjà être prises en considération au moment de l'établissement
du plan partiel d'affectation. En outre, la procédure d'adoption d'un
plan d'affectation se prête mieux, de façon générale, à la mise en oeuvre
coordonnée des mesures préventives et complémentaires de limitation des
émissions (cf. ATF 119 Ib 480 consid. 7a, 116 Ib 265 consid. 4c); en effet,
les autorités de planification communales et cantonales qui se prononcent
sur une modification d'un plan d'affectation peuvent effectuer une pesée
globale des intérêts en présence et prendre en considération l'ensemble
des prescriptions relatives à l'utilisation du sol, en particulier les
règles sur la protection de l'environnement (cf. art. 3 al. 3 let. b
LAT, art. 2 al. 1 let. d de l'ordonnance sur l'aménagement du territoire
[OAT; RS 700.1]; cf. ATF 118 Ia 151 consid. 4b et les arrêts cités). C'est
pourquoi il ne se justifiait pas, en l'espèce, de renvoyer à une procédure
subséquente l'application des dispositions fédérales sur la protection
de l'air; le Conseil d'Etat n'était donc pas fondé à approuver le plan
partiel d'affectation litigieux avant l'adoption du plan des mesures
de l'agglomération lausannoise (cf. arrêt non publié du 20 janvier
1993 reproduit in URP/DEP 1993 p. 169 consid. 4d). Le recours de droit
administratif doit être admis pour ce motif.

    cc) Le 29 avril 1994, le service cantonal de lutte contre les
nuisances a informé la société intimée qu'il pouvait "considérer que la
coordination du projet de plan de quartier "Pra Machera" avec le plan
des mesures de l'agglomération lausannoise [était] réalisée et que le
projet [pouvait] être inscrit dans ce plan des mesures sans risque de
le compromettre". Cette appréciation est toutefois fondée sur un projet
de plan des mesures qui peut encore être modifié après la consultation
des intéressés; le Conseil d'Etat, compétent pour approuver le plan des
mesures (art. 14 RALPE; cf. supra, consid. 2c/dd), ne s'est pas encore
prononcé à ce propos. Dans ces circonstances, le Tribunal fédéral ne peut
pas statuer lui-même sur le fond; l'affaire doit donc être renvoyée aux
autorités cantonales (art. 114 al. 2 OJ).

Erwägung 3

    3.- a) Après avoir arrêté le plan des mesures de l'agglomération
lausannoise, le Conseil d'Etat sera le cas échéant amené, dans sa
nouvelle décision sur le plan partiel d'affectation litigieux, à exiger
une limitation plus sévère des émissions (art. 11 al. 3 LPE). Cela étant,
les dispositions essentielles pour la limitation préventive des émissions
(art. 11 al. 2 LPE) doivent de toute manière être prévues au stade du
plan partiel d'affectation. A cet égard, il ne suffit pas de garantir le
respect des valeurs limites d'émission en ce qui concerne les effluents
gazeux des bâtiments (chauffage, véhicules dans les garages); il faut
aussi adopter des prescriptions permettant de réduire les nuisances
provoquées par le trafic automobile sur les voies d'accès (cf. supra,
consid. 2a/bb). Comme la décision attaquée le retient, il est possible de
fixer une limite maximale pour la surface de vente d'un centre commercial,
ou d'indiquer un nombre de places de stationnement à ne pas dépasser. Il
s'agit là de règles en matière de construction, d'équipement, de trafic
ou d'exploitation, qui, conformément à l'art. 12 al. 1 let. b et c LPE,
peuvent être appliquées en vue de limiter les émissions d'une installation
(cf. art. 33 al. 1 OPair; ATF 119 Ib 480 consid. 7a-b); le droit cantonal
de l'aménagement du territoire prévoit du reste la possibilité d'introduire
de telles dispositions dans un plan partiel d'affectation (art. 47 let. c,
g, i et j LATC) ou dans un plan de quartier (art. 64 LATC).

    b) La décision attaquée indique, en se fondant sur les données du
rapport d'impact, que le parking projeté comprendrait environ 1'250
places. Or l'application de l'art. 9 RPPA - qui prévoit un nombre
d'emplacements minimum proportionnel à la surface des différents locaux -
permettrait, selon le dernier rapport technique produit par la société
intimée (rapport technique du 28 avril 1994), d'aménager au moins 1'530
places de stationnement (1'182 places en relation avec les commerces
et le garden-centre [cf. art. 2 let. a, b1 et c RPPA] et 346 places
supplémentaires en cas d'extension du centre commercial sur la parcelle 781
[cf. art. 2 let. h RPPA]; ce calcul semble en outre ne pas tenir compte de
la centaine de places exigées au surplus pour les utilisateurs des bureaux
et les visiteurs [cf. art. 2 let. b2 et art. 9 RPPA]). Une réglementation
qui se borne à imposer un nombre minimum de places de stationnement -
très élevé en l'occurrence - sans fixer un nombre maximum, ne permet
en principe pas à l'autorité compétente d'ordonner, sur cette base, des
mesures de limitation des émissions provoquées par le trafic automobile
(cf. ROBERT WOLF, Führt übermässige Luftverschmutzung zu Baubeschränkungen
und Auszonungen?, URP/DEP 1991 p. 76). En l'espèce, il n'est pas exclu
que le nombre de places de stationnement puisse être réduit sans que soit
mise en péril la rentabilité de l'exploitation (c'est un critère à prendre
en considération dans l'examen des mesures de limitation préventive des
émissions; en revanche, les mesures de limitation plus sévère, au sens
de l'art. 11 al. 3 LPE, n'ont pas nécessairement à être économiquement
supportables); du reste, dans la procédure cantonale de recours, la société
intimée a proposé elle-même de modifier l'art. 9 RPPA afin de diminuer
la capacité du parking et de la ramener à 1'000 places pour les clients
des commerces. Le plan partiel d'affectation devrait être réexaminé ou
complété à ce propos.

    c) La décision attaquée évoque par ailleurs une éventuelle réduction
de la surface de vente du centre commercial litigieux (devant normalement
entraîner une diminution de la fréquentation initialement prévue), comme
corollaire d'une réduction du nombre des places de stationnement. En effet,
cette dernière mesure pourrait n'avoir que peu d'effets pour la limitation
des émissions si le nombre des mouvements de véhicules demeurait constant,
notamment dans l'hypothèse où d'autres possibilités de stationner seraient
offertes à proximité. L'organisation d'une desserte efficace par les
transports publics permet aussi de diminuer le volume du trafic privé et,
partant, les émissions d'oxydes d'azote; cette question est étroitement
liée à celle de la taille des parkings d'une installation (cf. WOLF,
op.cit., p. 95). Ces éléments doivent être examinés dans la procédure
d'établissement d'un plan partiel d'affectation tel que le plan contesté.

    En vertu du principe général de l'art. 3 al. 3 let. a LAT, les
autorités chargées de l'aménagement du territoire doivent veiller à
répartir judicieusement les lieux d'habitation et les lieux de travail,
et à les doter d'un réseau de transports suffisant (cette notion inclut
les transports publics - cf. DFJP/OFAT, Etude relative à la loi fédérale
sur l'aménagement du territoire, Berne 1981, n. 44 ad art. 3; cf. aussi
le texte allemand de l'art. 3 al. 3 let. a LAT: "das öffentliche
Verkehrsnetz"). A ce propos, le plan directeur cantonal du canton de
Vaud - instrument qui peut notamment définir "l'état et le développement
souhaité des transports" (art. 6 al. 3 let. b LAT) - énonce l'objectif
suivant, à la rubrique "protection de l'air": "diminuer les nuisances en
limitant les déplacements par des mesures d'aménagement et d'organisation
des transports" (objectif 2.3.c., adopté par le Grand Conseil le 20
mai 1987). Les plans d'affectation communaux doivent tenir compte des
principes d'aménagement du territoire de la loi fédérale ainsi que des
objectifs du plan directeur cantonal (cf. ATF 119 Ia 411 consid. 2b,
117 Ia 302 consid. 4b, 434 consid. 3d; cf. art. 43 al. 2 LATC). De toute
manière, pour un projet de l'importance du projet litigieux, les autorités
doivent prendre en considération les besoins, les conditions d'équipement
et les effets de l'exploitation dans l'ensemble de la région concernée,
et non seulement au niveau local (cf. ATF 117 Ia 430 consid. 4b).

    Le préavis municipal (projet de décision finale pour la première étape
de l'étude d'impact - cf. art. 16 al. 3 REIE) mentionnait la possibilité
d'assurer "une desserte bus", mais il n'était pas prévu de rendre un tel
équipement impératif en insérant une clause à cet effet dans le plan
partiel d'affectation. La proposition de l'exécutif a été amendée par
le conseil communal, qui s'est prononcé pour un raccordement efficace du
centre commercial aux transports en commun (amendement no 2, lequel n'a
cependant pas été adopté sous la forme d'une disposition du règlement
du plan partiel d'affectation). Dans la décision attaquée, l'autorité
cantonale n'a pas examiné la portée de cet amendement; elle n'a décrit
ni l'état du réseau de transports publics existant, ni les conditions
d'un éventuel raccordement. Le rapport d'impact ne contenait du reste
aucune indication à ce propos, alors que la desserte par les transports
publics aurait pu être considérée comme une mesure permettant de réduire
encore davantage les nuisances, au sens de l'art. 9 al. 2 let. d LPE (les
mesures dont la réalisation ne dépend pas directement du propriétaire de
l'installation peuvent aussi être visées par cette disposition; cf. NICOLE,
op.cit., p. 230). Or, si l'expérience montre qu'actuellement la plupart
des clients des grands magasins situés en périphérie des villes s'y rendent
avec leur véhicule privé, il n'est pas d'emblée exclu qu'une partie de ces
clients utilisent les transports publics, pour autant que l'offre dans ce
domaine soit adaptée aux besoins. En outre, le plan partiel d'affectation
litigieux n'est pas uniquement destiné à la construction d'un magasin
de grande surface (centre commercial au sens étroit), mais il prévoit
aussi la réalisation d'établissements publics et socio-culturels (cinémas,
discothèques, restaurants) ainsi que de bureaux (cf. art. 2 let. b RPPA);
une desserte par les transports publics peut, dans ces conditions, paraître
d'autant plus justifiée. Sur ce point, un développement des infrastructures
existantes peut contribuer à une limitation des émissions provoquées par
l'exploitation du centre commercial, conformément à ce qu'exige l'art. 11
LPE; il importe peu que ce genre de mesures ne soient pas mentionnées
à l'art. 12 al. 1 LPE, car les conditions d'équipement au sens large
(routes, transports publics, etc.) doivent de toute manière être prises
en considération par les autorités qui modifient de façon sensible le plan
d'affectation d'une commune en vue de la réalisation d'un projet concret.