Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 115 V 81



115 V 81

12. Arrêt du 5 juillet 1989 dans la cause Caisse cantonale genevoise de
compensation contre A. et Commission cantonale genevoise de recours en
matière d'AVS Regeste

    Art. 6 Abs. 2 IVG: Versicherungsmässige Voraussetzungen.  Zweck dieser
Gesetzesbestimmung: Das Erfordernis eines ununterbrochen fünfzehnjährigen
zivilrechtlichen Wohnsitzes in der Schweiz setzt voraus, dass der Ausländer
oder Staatenlose bei Eintritt der Invalidität auch eine ununterbrochene
Versicherungsdauer von mindestens fünfzehn Jahren aufgrund seines
Wohnsitzes aufweist (Erw. 2b).

    Art. 1 Abs. 2 lit. a AHVG und Art. 1 IVG: Wirkungen der Befreiung von
AHV und IV. War der Gesuchsteller während der Zeit seiner Tätigkeit bei
einer internationalen Organisation von der Unterstellung unter die AHV/IV
ausgenommen, so können die Jahre, während denen er nicht versichert war,
bei der Bestimmung der Wohnsitzdauer als Voraussetzung für Leistungen
der IV nicht berücksichtigt werden (Erw. 3).

Sachverhalt

    A.- J. A., né en 1938, originaire du Bangladesh, est parti du Pakistan
et, depuis le 1er juillet 1965, réside en Suisse. Dès le 1er décembre
1965, il a exercé un emploi temporaire en qualité d'huissier et coursier
au service du Bureau international du travail (BIT). A ce titre, il a
bénéficié de l'exemption du permis de séjour. Ensuite de la perte de son
emploi, il a été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour à l'année
(permis B) à partir du 14 juin 1978 et d'un permis (C) de résidence dès
le 16 mars 1982. Il a versé des cotisations AVS/AI en 1978, 1979, 1980,
1984 et 1985.

    Atteint d'artériosclérose coronaire, avec infarctus antérieur étendu en
1985 et status sur dilatations de l'artère interventriculaire antérieure,
J. A. a présenté une demande de prestations de l'assurance-invalidité le 16
mars 1987. Dans un prononcé présidentiel du 28 août 1987, la Commission
de l'assurance-invalidité du canton de Genève a admis une invalidité de
100% depuis le 15 août 1986. Par décision du 12 janvier 1988, la Caisse
cantonale genevoise de compensation a refusé l'allocation d'une rente
ordinaire d'invalidité, faute pour l'assuré de compter dix années de
cotisations ou une année de cotisations et quinze années ininterrompues
de domicile en Suisse, les conditions du droit à une rente extraordinaire
d'invalidité n'étant par ailleurs pas remplies.

    B.- Par jugement du 17 mars 1988, la Commission cantonale genevoise
de recours en matière d'AVS a admis le recours formé par J. A. contre
cette décision, annulé celle-ci et renvoyé la cause à l'administration
pour qu'elle statue au sens des considérants. La juridiction cantonale a
considéré, en bref, que seul l'art. 6 al. 2 LAI est applicable en l'espèce;
que, lors de la survenance de l'invalidité, l'assuré ne comptait pas
dix années entières de cotisations, n'ayant cotisé à l'AVS/AI que de
1978 à 1985, de sorte que l'une des conditions alternatives posées
par cette disposition légale n'était pas réalisée; qu'en revanche,
le recourant remplissait l'autre de ces conditions, selon laquelle "le
ressortissant étranger peut bénéficier des prestations s'il compte, lors
de la survenance de l'invalidité, un an minimum de cotisations et 15 ans
ininterrompus de domicile et de résidence habituelle en Suisse"; qu'en
effet, bien que l'assuré ait bénéficié de l'exemption de tout permis de
séjour lorsqu'il était fonctionnaire international, il n'en demeure pas
moins qu'il avait la liberté de se créer un domicile civil en Suisse,
ce qu'il a fait en s'établissant le 1er juillet 1965 à Genève, où il
a constitué le centre de son existence, de ses intérêts personnels et
professionnels, et où il ne fait aucun doute qu'il a résidé de manière
effective et sans interruption jusqu'au moment déterminant.

    C.- La Caisse cantonale genevoise de compensation interjette recours
de droit administratif contre ce jugement dont elle demande l'annulation,
motif pris que l'assuré ne comptait pas, lors de la survenance de son
invalidité, quinze années ininterrompues de domicile en Suisse, cette
condition devant être comprise en ce sens que la notion de domicile est
liée "à la condition d'appartenance au champ d'application personnel
du régime AVS/AI ou, en d'autres termes, à la qualité d'assuré au sens
de l'AVS/AI".

    J. A. conclut à la confirmation du jugement entrepris. De son côté,
l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS), qui se rallie aux raisons
invoquées par la caisse recourante, propose l'admission du recours, tout
en se référant à un arrêt non publié du Tribunal fédéral des assurances,
selon lequel il serait préjudiciable à la sécurité du droit qu'un résident
étranger puisse, au gré de ses intérêts, changer de statut dans l'AVS/AI
avec effet rétroactif.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- a) Selon l'art. 1er al. 1 let. a LAVS, auquel renvoie l'art. 1er
LAI, sont assurées conformément à la LAVS et à la LAI les personnes
physiques qui ont leur domicile civil en Suisse.

    En vertu de l'art. 1er al. 2 let. a LAVS, ne sont pas assurés les
ressortissants étrangers qui bénéficient de privilèges et d'immunités
diplomatiques ou d'exemptions fiscales particulières.

    b) Aux termes de l'art. 6 LAI, les ressortissants suisses, les
étrangers et les apatrides ont droit aux prestations ... s'ils sont
assurés lors de la survenance de l'invalidité (al. 1 première phrase). Les
étrangers et les apatrides n'ont droit aux prestations, sous réserve de
l'art. 9 al. 3 LAI, qu'aussi longtemps qu'ils conservent leur domicile
civil en Suisse et que si, lors de la survenance de l'invalidité, ils
comptent au moins dix années entières de cotisations ou quinze années
ininterrompues de domicile en Suisse (al. 2 première phrase).

Erwägung 2

    2.- a) (Interprétation de la loi)

    b) Le législateur a voulu fixer à l'art. 6 LAI les conditions
d'assurance à remplir pour avoir droit aux prestations de
l'assurance-invalidité. Telle est la ratio legis de cette disposition
légale. On relèvera au demeurant que l'art. 6 LAI, dont le titre
était libellé "Les conditions d'assurance et de domicile", est intitulé
"Conditions d'assurance" depuis l'entrée en vigueur, le 1er janvier 1968,
de la novelle du 5 octobre 1967 (RO 1968 30). A cet égard, la condition
de domicile - selon laquelle l'étranger et l'apatride n'ont droit aux
prestations qu'aussi longtemps qu'ils conservent leur domicile civil
en Suisse - n'est en réalité qu'une condition d'assurance, le droit aux
prestations cessant avec le transfert du domicile à l'étranger (FF 1967
I 692).

    S'agissant de l'exigence minimale de dix années entières de cotisations
ou de quinze années ininterrompues de domicile en Suisse, la volonté du
législateur, telle qu'elle résulte des travaux préparatoires, est que
l'étranger et l'apatride doivent avoir des liens particulièrement étroits
avec l'assurance-invalidité et avec notre pays. Cela ressort, en effet,
du message du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale, du 24 octobre 1958,
relatif à un projet de loi sur l'assurance-invalidité ainsi qu'à un
projet de loi modifiant celle sur l'assurance-vieillesse et survivants
(FF 1958 II 1189). La loi reprend du reste tel quel le projet d'art. 6
LAI (RO 1959 858; FF 1958 II 1320). Certes, cette disposition légale
a-t-elle été modifiée entre-temps par la novelle du 5 octobre 1967, mais
la modification de l'art. 6 al. 2 LAI est d'ordre purement rédactionnel,
le renvoi à l'al. 4 de l'art. 9 LAI ayant été adapté par suite de la
nouvelle teneur de cette dernière disposition légale, de sorte que la
réserve faite à l'art. 6 al. 2 LAI concerne dorénavant l'art. 9 al. 3 LAI
(RO 1968 30; FF 1967 I 693).

    Or, c'est sur la base du rapport de la Commission fédérale d'experts
pour l'introduction de l'assurance-invalidité, du 30 novembre 1956, que
s'analyse la ratio legis de l'art. 6 al. 2 LAI. En effet, la commission
d'experts, dans son rapport précité (p. 42), avait jugé indiqué d'accorder
également le droit aux prestations de l'assurance-invalidité aux étrangers
et aux apatrides qui n'auront peut-être payé aucune cotisation ou qui n'en
auront pas payé pendant dix ans au moins, mais qui auront été assujettis à
l'assurance durant au moins quinze années sans interruption. Considérant,
par ailleurs, que la durée d'assurance devait précéder immédiatement la
réalisation du risque (p. 44 du rapport), ladite commission avait tiré
de son rapport le principe suivant:

    "Pour les étrangers et les apatrides, le droit aux prestations est lié,
   sous réserve de conventions internationales contraires, à une durée
   de cotisations d'au moins 10 ans - dont un précédant immédiatement la
   réalisation du risque assuré - ou à une durée d'assurance ininterrompue
   d'au moins 15 ans précédant immédiatement la réalisation du risque
   assuré."

    Le Conseil fédéral, se fondant sur le rapport de la commission
d'experts, a repris dans son projet de loi l'idée que les étrangers et
les apatrides devront avoir payé des cotisations pendant dix années
entières au moins; en revanche, il n'a pas voulu que le paiement des
cotisations précède immédiatement la réalisation du risque, les étrangers
et les apatrides ne devant bénéficier des prestations, comme dans l'AVS,
qu'aussi longtemps qu'ils auront leur domicile en Suisse, c'est-à-dire
qu'ils seront assurés en raison de ce fait (FF 1958 II 1190). Dès lors,
si la Cour de céans a consacré l'interprétation littérale de l'art. 6
al. 2 LAI en ce qui concerne l'introduction de la condition de domicile
en lieu et place d'une durée déterminée d'assurance qui précéderait
immédiatement la réalisation du risque (ATFA 1968 p. 247 consid. 3), il
n'en demeure pas moins que le principe de la durée d'assurance n'a pas
été abandonné par le législateur, en ce sens que l'exigence d'un domicile
civil en Suisse suppose nécessairement que la personne est assurée parce
qu'elle est domiciliée dans notre pays, conformément à l'art. 1er al. 1
let. a LAVS en relation avec l'art. 1er LAI. Cela vaut aussi bien pour la
durée du droit aux prestations que pour les quinze années ininterrompues de
domicile en Suisse. En effet, bien que le Conseil fédéral n'ait pas repris
la formulation de la commission d'experts, laquelle proposait "une durée
d'assurance ininterrompue d'au moins 15 ans", c'est dans ce sens cependant
qu'il faut comprendre l'exigence minimale de quinze années ininterrompues
de domicile en Suisse, l'autorité exécutive ayant simplement adapté la
teneur de cette condition d'assurance à celle de la condition de domicile.

    Cela étant, le rapport étroit que doivent avoir l'étranger et
l'apatride avec l'assurance-invalidité et avec notre pays signifie,
d'une part, une intégration effective dans la société proprement dite
(DE CAPITANI, Die Voraussetzungen für den Anspruch auf Leistungen
der Invalidenversicherung, thèse Zurich 1966, notamment p. 91). Mais
le lien particulièrement étroit avec l'assurance-invalidité implique
d'autre part une durée d'assurance, soit que l'étranger et l'apatride
ont cotisé à l'AVS/AI pendant dix années entières au moins, soit qu'ils
comptent au moins quinze années ininterrompues de domicile en Suisse
(voir aussi INEICHEN, Der Rechtsanspruch auf Eingliederungsmassnahmen nach
schweizerischem Invalidenversicherungsrecht, thèse Fribourg 1966, p. 46).

Erwägung 3

    3.- En l'espèce, est litigieux le point de savoir si l'intimé a droit
à une rente d'invalidité. Ce dernier étant au bénéfice d'un passeport du
Bangladesh, seul l'art. 6 al. 2 LAI est applicable, faute de convention
bilatérale de sécurité sociale entre la Suisse et le Bangladesh.

    Comme cela ressort du dossier, l'intimé a exercé par intermittence,
dès fin 1965 jusqu'à 1978, son emploi temporaire d'huissier et de
coursier au service du BIT, avant d'oeuvrer à titre occasionnel pour
l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI). Bien que
l'on ignore quel était son statut dans le cadre du BIT, tout laisse penser
qu'il a bénéficié, au même titre qu'un fonctionnaire de l'Organisation
internationale du travail, de la liberté d'accès et de séjour sur le
territoire suisse (art. 14 al. 1 let. c de l'accord entre le Conseil
fédéral suisse et l'Organisation internationale du travail pour régler le
statut juridique de cette organisation en Suisse, du 11 mars 1946). De
même, tout indique qu'il a bénéficié également des exemptions fiscales
particulières accordées aux fonctionnaires non suisses du BIT en vertu de
l'art. 18 de cet accord, telle l'exonération des impôts fédéraux, cantonaux
et communaux conformément aux usages établis pour le personnel non suisse
des institutions internationales à Genève (art. 9 let. d de l'arrangement
d'exécution de l'accord précité, du 11 mars 1946). Aussi a-t-il été exempté
de l'assujettissement à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité
suisse (art. 1er al. 2 let. a LAVS en relation avec l'art. 1er LAI). C'est
la raison pour laquelle il n'a pas cotisé à l'AVS/AI jusqu'en 1978.

    Il apparaît ainsi que, lors de la survenance de son invalidité,
le 15 août 1986, l'intimé ne remplissait ni l'une ni l'autre des
conditions relatives à la durée d'assurance. D'une part, en effet,
comme cela résulte des inscriptions des comptes individuels (CI), il
n'a versé des cotisations AVS/AI qu'en 1978, 1979, 1980, 1984 et 1985,
de sorte que, au moment déterminant, il n'avait pas cotisé pendant au
moins dix années entières. D'autre part, les années durant lesquelles
il a travaillé au service du BIT ne sauraient être comptées comme durée
de domicile, l'intimé n'ayant pas été assuré pendant cette période. On
relèvera, à ce propos, qu'il en va de même dans le cadre de conventions
bilatérales comme, par ex., la convention de sécurité sociale conclue le
24 septembre 1975 entre la Confédération suisse et le Royaume de Belgique,
les périodes de résidence en Suisse pendant lesquelles une personne a
été exemptée de l'assujettissement à l'assurance-vieillesse, survivants
et invalidité suisse n'étant pas prises en considération dans la durée
de résidence requise (art. 11 du protocole final de cette convention;
arrêt non publié du Tribunal fédéral des assurances). Il n'est donc pas
nécessaire d'examiner encore si, comme semblent l'avoir admis les premiers
juges, l'intimé a son domicile en Suisse (cf. sur cette notion ATF 111 V
182 consid. 4, 105 V 168 consid. 3; voir aussi ATF 113 V 264 consid. 2b)
depuis qu'il y réside, soit à partir du 1er juillet 1965. Il suffit de
constater que, de 1978 à 1986, il n'y a pas quinze années ininterrompues
de domicile en Suisse.

    Il s'ensuit que l'intimé, dont il est constant qu'il ne saurait
bénéficier d'une rente extraordinaire d'invalidité (art. 39 LAI en
corrélation avec l'art. 42 LAVS et l'art. 9 al. 3 LAI), n'a pas droit
à une rente ordinaire de l'assurance-invalidité.

Entscheid:

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

    Le recours est admis et le jugement de la Commission cantonale
genevoise de recours en matière d'AVS, du 17 mars 1988, est annulé.