Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 115 II 387



115 II 387

69. Arrêt de la Ire Cour civile du 20 septembre 1989 dans la cause Montres
Choisi S.A. c. Y. S.A. (recours en réforme) Regeste

    Gebrauch einer Marke in der Schweiz.

    Art. 24 lit. b-c MSchG. Die Ausfuhr von Produkten mit nachgemachtem
oder nachgeahmtem Markenzeichen stellt, selbst wenn die Marke im
Bestimmungsland nicht geschützt ist, einen in der Schweiz begangenen
unerlaubten Gebrauch einer nach schweizerischem Recht geschützten Marke
dar und fällt damit in den Anwendungsbereich des Art. 24 MSchG.

Sachverhalt

    A.- Montres Choisi S.A., manufacture d'horlogerie à Bienne, est
titulaire de la marque "Atrexa" depuis 1977.

    En décembre 1983, un client d'Arabie Saoudite lui a commandé un lot de
3000 montres valant 555'000 francs; ces montres devaient, en exclusivité
pour l'acheteur, revêtir la marque "Atrexa", qui n'a pas été enregistrée
en Arabie Saoudite.

    Le 8 août 1984, un tiers a commandé 200 montres à Y. S.A., fabricant
de montres à Genève, exigeant qu'elles portent la marque "Atrexa". Le 24
août 1984, ces 200 pièces, munies de la marque "Atrexa", ont toutes été
livrées en Arabie Saoudite pour le prix de 49'914 francs.

    En août 1984, Montres Choisi S.A. a appris que d'autres montres
"Atrexa" étaient vendues par des tiers en Arabie Saoudite. Son client a
refusé d'écouler et de payer la marchandise commandée.

    B.- Le 9 juin 1986, Montres Choisi S.A. a ouvert action contre
Y. S.A. et ses deux administrateurs, concluant au paiement solidaire de
619'582 francs au titre de dommages-intérêts; ce montant représentait
le prix de la marchandise livrée mais non écoulée en Arabie Saoudite,
et que la demanderesse aurait dû reprendre de son client.

    Par arrêt du 6 janvier 1989, la Cour de justice du canton de Genève
a rejeté la demande.

    Le Tribunal fédéral a admis le recours en réforme interjeté par
Montres Choisi S.A. contre cet arrêt.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Aux termes de l'art. 24 LMF, sera poursuivi par la voie civile
ou pénale quiconque aura, notamment, usurpé la marque d'autrui pour ses
propres produits ou marchandises (let. b), aura vendu, mis en vente ou en
circulation des produits ou marchandises revêtus de marques qu'il savait
être contrefaites, imitées ou indûment apposées (let. c).

    En vertu du principe de la territorialité, la législation suisse ne
peut accorder une protection pénale qu'au droit exclusif conféré pour la
Suisse; tous les actes essentiels à la réalisation du délit pénal réprimé
à l'art. 24 LMF doivent être commis dans le pays de protection de la
marque, soit en Suisse. Selon la jurisprudence de la Cour de cassation
du Tribunal fédéral, tombe ainsi sous le coup de l'art. 24 LMF celui qui
envoie des marchandises revêtues illégalement d'une marque à l'étranger où
la marque n'est pas protégée; un tel envoi, et pas seulement la livraison à
l'acheteur, constitue déjà une mise en circulation de marchandises munies
illicitement d'une marque au sens de la disposition précitée (ATF 110 IV
110/111, 109 IV 146).

    Dans la mesure où elle sanctionne l'usage illicite fait en Suisse d'une
marque protégée en Suisse, cette jurisprudence doit également valoir en
matière de protection civile de la marque. Si une telle protection contre
un usurpateur n'était pas accordée, l'apposition des marques contrefaites
ou imitées sur des produits fabriqués en Suisse et destinés exclusivement
à l'exportation deviendrait alors admissible. Or tel ne peut être le but
visé par la loi concernant les marques de fabrique (ATF 110 IV 111). Au
demeurant, cette solution apparaît conforme à la jurisprudence rendue par
la Ire Cour civile en matière de brevets, s'agissant en particulier de la
portée territoriale des notions de vente, de mise en vente et de mise en
circulation d'une invention (art. 8 LBI); constitue ainsi une utilisation
illicite d'une invention brevetée en Suisse la vente et l'exportation
hors de Suisse de produits en violation des brevets (ATF 92 II 298).

    Peut, en revanche, rester indécise la question - non litigieuse en
l'espèce - de savoir si l'apposition d'une marque sur un produit voué
exclusivement au marché étranger constitue une mise en circulation
suffisante pour donner un droit à cette marque et à la protection qui
en découle. Il n'y a dès lors pas lieu de se pencher sur les critiques
doctrinales dirigées contre la jurisprudence du Tribunal fédéral rendue
sur ce point (en particulier ATF 113 II 75 ss).

Erwägung 2

    2.- Appliqués au cas particulier, ces principes conduisent à admettre
que la cour cantonale a jugé, à tort, que la demanderesse ne pouvait
pas invoquer la loi concernant les marques de fabrique à l'appui de
ses conclusions. En outre, fondée sur ces dispositions, l'action n'est
pas prescrite, puisque le délai de deux ans à compter du dernier acte
de contravention prévu à l'art. 28 al. 4 LMF a été respecté. En effet,
l'acte d'exportation, qualifié de contravention par la demanderesse,
a été accompli le 24 août 1984 et l'action a été ouverte le 9 juin 1986.

    L'arrêt attaqué doit ainsi être annulé et la cause renvoyée à la cour
cantonale pour qu'elle statue sur l'action de la demanderesse fondée sur
la loi concernant les marques de fabrique. Elle examinera si les actes
commis par les défendeurs tombent sous le coup de l'art. 24 LMF. Dans
l'affirmative, elle statuera sur l'existence et la réparation du dommage;
elle pourra, le cas échéant, se fonder sur l'art. 42 al. 2 CO, si les
conditions d'application de cette disposition devaient s'avérer remplies.