Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 115 IB 55



115 Ib 55

7. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public du 10 mars 1989
dans la cause X. Bank S.A. c. Commission fédérale des banques (recours
de droit administratif) Regeste

    Art. 6 BankG; Erstellen der Jahresrechnung.

    1. Voraussetzungen für ein Einschreiten der Eidgenössischen
Bankenkommission; Überprüfungsbefugnis des Bundesgerichts (E. 2-4).

    2. Grundsätze für die Risikobewertung bei unsicheren Forderungen
(E. 5a-5f).

    3. Der Alleinaktionär einer Bank kann grundsätzlich für unsichere
Forderungen Sicherheit leisten und so Rückstellungen vermeiden; die von
ihm erbrachten Leistungen müssen in der Jahresrechnung klar zum Ausdruck
kommen (E. 5e).

    4. Verpflichtung zur Bildung einer Rückstellung; Bedeutung der
Defizitdeckungsgarantie (E. 6).

Sachverhalt

    A.- Le 4 mars 1987, l'organe de revision de la société X.  Bank S.A. a
présenté à la Commission fédérale des banques un rapport sur l'activité
de sa cliente afin d'obtenir l'approbation de la présentation des comptes
au 31 décembre 1986. Selon ce rapport, l'exercice se traduisait par une
perte d'exploitation de 473'300 francs à laquelle il fallait ajouter
un amortissement de 565'100 francs sur les frais de constitution ainsi
que la création d'une provision de 1'689'400 francs nécessitée par trois
créances douteuses. Afin de compenser ce résultat déficitaire, l'organe
de contrôle indiquait que l'actionnaire unique de la banque avait versé
trois millions de francs sur un compte bloqué auprès de la banque, de
sorte qu'en définitive l'exercice se traduisait par un bénéfice de 22'200
francs. L'intervention de l'actionnaire était expressément indiquée sous
la rubrique "Produits divers" du compte de résultats.

    Deux autres créances, l'une d'un montant de 7'874'700 francs, contre
la société T. S.A., l'autre d'une somme de 1'918'800 francs contre la
société antillaise P., ont été considérées par l'organe de revision comme
des risques ne pouvant être appréciés correctement en raison du manque de
documentation à leur propos. Dans la mesure où, pour ces deux créances,
les sûretés, sous forme de pierres précieuses, n'atteignaient qu'une valeur
de liquidation de 2,5 millions de francs, le risque encouru a été fixé à
7'318'800 francs. Afin de pallier ce risque, l'actionnaire de la banque
avait versé une somme de 10 millions de francs sur un deuxième compte
bloqué; estimant que cette opération suffisait à écarter les risques,
l'organe de revision a renoncé à exiger de la banque la constitution
de provisions et a accepté que l'intervention de l'actionnaire demeure
occulte.

    La Commission fédérale des banques a refusé son consentement à
cette manière de publier les comptes de la banque. Par décision du 22
juin 1987, elle a considéré que les deux créances dont les risques ne
pouvaient être appréciés correctement étaient compromises et qu'elles
nécessitaient la création d'une provision correspondant au risque; la
rubrique "Pertes, amortissements et provisions" du compte de pertes et
profits devait dès lors être augmentée en conséquence. L'autorité fédérale
admettait en revanche de considérer que le blocage du deuxième compte
par l'actionnaire unique constituait également un apport à fonds perdu
- à indiquer expressément comme tel sous la rubrique "Produits divers"
du compte de résultats - compensant l'augmentation du passif due à la
création des provisions.

    Agissant en temps utile par la voie du recours de droit administratif,
la société X. Bank S.A. a conclu à l'annulation de la décision attaquée
en tant qu'elle considère que les deux créances auprès de T. S.A. et
P. sont compromises. A l'appui de ses critiques, elle a fait valoir que
les sociétés débitrices avaient effectué en 1987 des paiements montrant
qu'elles avaient la capacité de faire face à leurs obligations; par
ailleurs, en date du 23 décembre 1987, la société M. Ltd., dominée par
l'actionnaire de la banque, avait repris les deux créances litigieuses à
leur valeur nominale, faisant ainsi disparaître définitivement le risque
de perte.

    Face à la nécessité pressante de publier les comptes 1986 sans
accumuler trop de retard, la recourante a été autorisée, par mesure
provisionnelle, à procéder à la publication en excluant les deux créances
litigieuses du passif de son compte de pertes et profits.

    Les griefs de la recourante ont tous été rejetés; le Tribunal fédéral
a estimé toutefois que l'ordre de publier des comptes rectifiés contenu
dans la décision attaquée serait, après plusieurs années de procédure,
de nature à entraîner un préjudice disproportionné pour la recourante. Il
a donc admis partiellement le recours, annulé la décision attaquée et
renvoyé le dossier à l'autorité intimée pour nouvelle décision dans le
sens des considérants.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- a) Bien qu'elle soit indépendante de l'administration, la
Commission fédérale des banques n'est pas une autorité de recours au sens
de l'art. 105 al. 2 OJ. Le Tribunal fédéral peut donc revoir librement les
constatations de fait retenues dans la décision attaquée (ATF 108 Ib 274).

    b) Dans le cadre d'un recours de droit administratif en matière
de surveillance des banques, les recourants ne peuvent invoquer
l'inopportunité de la décision attaquée (cf. art. 104 lettre c OJ
a contrario; ATF 108 Ib 275). Ils peuvent faire valoir en revanche
une violation du droit fédéral, y compris l'excès ou abus du pouvoir
d'appréciation (art. 104 lettre a), ainsi que la constatation incomplète
ou inexacte des faits pertinents (art. 104 lettre b).

    Le Tribunal fédéral revoit cependant d'office l'application du droit
fédéral (art. 114 al. 1 in fine OJ) sans être lié par les conclusions ou
les motifs des parties, de sorte qu'il pourrait admettre le recours pour
d'autres raisons que celles indiquées par la recourante ou, au contraire,
confirmer la décision attaquée pour d'autres motifs que ceux retenus par
l'autorité intimée (ATF 107 Ib 91).

    c) Le Tribunal fédéral vérifie notamment si les conditions de
l'intervention de la Commission fédérale sont réunies. C'est là
une question juridique qu'il examine en principe librement, tout en
s'astreignant à une certaine retenue lorsque le litige porte sur des
problèmes techniques que l'autorité inférieure est plus apte à résoudre en
raison de son expérience en la matière. De plus, la Commission fédérale
dispose d'une relative liberté dans l'appréciation des circonstances du
cas particulier (ATF 108 Ib 275, 103 Ib 354).

    d) Le choix de la mesure à adopter dans une situation concrète est une
question d'appréciation. Hormis l'hypothèse de l'art. 23quinquies al. 1
de la loi fédérale sur les banques et les caisses d'épargne du 8 novembre
1934 (LB; RS 952.0) qui exige le retrait de l'autorisation lorsque les
conditions en sont remplies (cf. ATF 98 Ib 272), la Commission fédérale des
banques, en tant qu'autorité spécialisée dans la surveillance des banques
et des fonds de placement, jouit d'une importante marge de manoeuvre dans
le choix des mesures qu'elle décide d'appliquer. Elle doit cependant se
conformer aux principes généraux régissant toute activité administrative,
ce qui implique notamment l'interdiction générale de l'arbitraire, le
respect de l'égalité de traitement, de la proportionnalité ainsi que de la
bonne foi; la mesure choisie devra également correspondre au but essentiel
de la législation sur les banques, à savoir la protection des créanciers
(ATF 108 Ib 276).

Erwägung 3

    3.- Chargée de la haute surveillance des banques, la Commission
fédérale des banques n'a pas à contrôler directement les comptes de
toutes les banques soumises à la loi. Ce contrôle incombe principalement
aux organes de revision qui doivent cependant signaler à la Commission
les infractions aux prescriptions légales ou d'autres irrégularités
(art. 19 al. 2 et 21 al. 3 LB); mais leurs conclusions ne lient pas
la Commission. En vertu de l'art. 23ter al. 1 LB, lorsqu'elle apprend
que des infractions aux prescriptions sur la comptabilité des banques
(art. 6 LB) ou d'autres irrégularités ont été commises, la Commission
fédérale des banques a le pouvoir - et même le devoir - d'intervenir
pour rétablir l'ordre légal (ATF 105 Ib 408/409). Dans son principe,
l'intervention de l'autorité intimée échappe donc à la critique.

Erwägung 4

    4.- Selon l'art. 6 al. 1 LB, les banques doivent établir des comptes
annuels comprenant un bilan et un compte de pertes et profits. Le bilan
est dressé conformément aux prescriptions du code des obligations sur les
sociétés anonymes et à celles de la loi sur les banques (al. 2). En outre,
les comptes annuels et les bilans intermédiaires doivent être publiés ou
rendus accessibles au public (al. 4) sous une forme et dans des délais
prévus par l'ordonnance d'exécution de la loi (al. 5). Alors que les
art. 23 et 24 de l'ordonnance d'exécution de la loi sur les banques et les
caisses d'épargne du 17 mai 1972 (OB; RS 952.02) précisent les rubriques
et les indications devant figurer au bilan des banques, l'art. 25 OB
contient les exigences concernant le compte de pertes et profits. De plus,
les dispositions de l'ordonnance en matière de comptes sont complétées par
une annexe intitulée "Instructions régissant l'établissement des comptes
annuels conformément aux art. 23 à 25 de l'ordonnance d'exécution". Sous
lettre A de l'annexe sont énoncées les exigences relatives au bilan;
sous lettre B, celles concernant le compte de pertes et profits et sous
lettre C figurent des instructions générales.

Erwägung 5

    5.- En l'espèce, la première question à résoudre est de déterminer
si, comme l'affirme l'autorité intimée, les créances contre les sociétés
T. S.A. et P. présentent effectivement un risque rendant nécessaire la
constitution d'une provision.

    a) Le droit des sociétés et le droit bancaire ne contiennent aucune
disposition particulière réglementant l'évaluation des risques encourus
sur les créances; il convient donc de se référer à ce propos à la règle
générale aménagée par l'art. 960 al. 2 CO, selon laquelle la valeur de tous
les éléments de l'actif ne peut figurer au bilan pour un chiffre dépassant
celui qu'ils représentent pour l'entreprise à la date du bilan (ATF 105
Ib 410 consid. 4a; BODMER, KLEINER, LUTZ, Kommentar zum schweizerischen
Bankgesetz, Zurich, n. 12 ad art. 6). Dans la mesure où la valeur que
représente un actif pour l'entreprise n'est pas déterminée par cette
disposition, l'admissibilité d'une évaluation se jugera en appliquant les
principes généralement admis dans le commerce et auxquels fait référence
l'art. 959 CO (KÄFER, Berner Kommentar, n. 85 ad art. 960).

    b) En matière d'évaluation d'actifs, un des principes les plus
importants est celui de la prudence. Il implique que, dans le doute, les
comptes seront présentés sous la forme la moins favorable à l'entreprise,
compte tenu de la marge d'incertitude et des limites légales fixées au
pouvoir d'appréciation (JOURNOT, Obligations comptables et revision des
comptes, Winterthour 1984, p. 55/56; KÄFER, op.cit., n. 87 ad art. 960). A
ce principe se rattachent en outre deux corollaires, soit le principe de
la réalisation, qui stipule qu'un bénéfice non encore réalisé ne peut être
incorporé dans le bénéfice de l'exercice, et le principe de l'imparité,
qui requiert d'enregistrer immédiatement une perte non encore réalisée si
celle-ci est prévisible (JOURNOT, op.cit., p. 56; BODMER, KLEINER, LUTZ,
op.cit., n. 9 ad art. 6 cf.; pour le principe de l'imparité, ATF 105 Ib
410 consid. 4a).

    Le risque de perte sur une créance résulte principalement de la
solvabilité douteuse du débiteur. Celle-ci doit être évaluée sur la
base des faits passés ou présents, par exemple en fonction des retards
intervenus dans les paiements, de l'évolution antérieure de la situation
financière, de l'état des poursuites en cours ou de la qualité des
éventuelles garanties. Certains auteurs proposent également de juger les
risques en tenant compte d'événements futurs prévisibles ou encore en
considérant certains faits survenus entre la date de clôture de la période
comptable et la date de l'établissement du bilan (BOURQUIN, Le principe
de la sincérité du bilan, Genève 1976, p. 466/467; LOCHNER, La prise
en considération dans les comptes annuels des événements post-clôture,
Zurich 1988, p. 182, 234/235).

    c) Selon l'art. 44 lettre c OB, l'organe de revision doit établir
un tableau complet de tous les risques et de toutes les réévaluations
d'actifs, ainsi que des provisions et des réserves latentes leur servant
de couverture. Dans ce but, il doit disposer des documents nécessaires
pour apprécier correctement les opérations de la banque et notamment les
octrois de crédits (art. 9 al. 3 OB).

    Dans le cas particulier, la direction de la banque n'a pas pu remettre
à l'organe de revision une documentation suffisante - conforme à l'art. 9
OB concernant les créances contre les deux sociétés T. S.A. et P. Ne
disposant d'aucune information crédible sur la situation financière ou
économique des sociétés débitrices, les contrôleurs n'ont donc pas pu
apprécier correctement les risques encourus sur les créances. Se conformant
aux exigences du principe de la prudence, ils ont retenu par conséquent
l'existence d'un risque de perte sur ces crédits.

    Leur appréciation des risques échappe à la critique. En effet, à défaut
d'éléments objectifs sur la situation des débiteurs, le risque de perte
sur les créances doit être estimé égal au degré d'incertitude quant à la
solvabilité de l'emprunteur. Une prudence accrue est au surplus nécessaire
lorsque, comme en l'espèce, un des débiteurs est une société antillaise
dont la reconnaissance même de la personnalité morale en Suisse peut se
révéler problématique (cf. Archives 55, p. 141).

    d) Par ailleurs, l'organe de revision a judicieusement chiffré le
montant des risques en fondant son évaluation sur la valeur de liquidation
des pierres précieuses mises en gage par la société T. S.A. Le principe de
la prudence interdisait, en effet, de retenir pour ces pierres une valeur
supérieure, égale au prix d'achat, dans la mesure où une telle estimation
suppose que la banque soit en mesure de trouver, dans les circonstances
défavorables d'une réalisation forcée du gage, un acheteur acceptant de
payer le prix plein. C'est donc à bon droit que la valeur du gage a été
limitée au prix qu'obtiendrait la banque en cas de liquidation.

    e) Reste à examiner si les circonstances postérieures à la date de
clôture du bilan ne modifient pas l'appréciation des risques.

    A cet égard les versements de 591'435 francs et de 25'501 US$
effectués en 1987 au titre d'amortissement et d'intérêts par les deux
sociétés débitrices n'apportent aucune information suffisante sur leur
situation financière réelle. Sans renseignement véritable sur leur
capacité à faire face à leurs obligations et notamment à effectuer les
paiements qui leur sont crédités, le risque de perte demeure entier.

    En principe, l'intervention de l'actionnaire unique de la société
bancaire garantissant les créances douteuses de certains clients de sa
banque est de nature à modifier l'appréciation des risques encourus sur ces
créances, si la garantie est donnée à temps, si elle s'avère suffisante
et n'est soumise à aucune condition. L'actionnaire étant distinct de la
personne morale qu'il domine, rien ne l'empêche de s'engager envers sa
société au même titre qu'un tiers. Toutefois, les exigences particulières
de transparence imposées aux banques pour des motifs de protection du
public par l'art. 6 LB (ATF 105 Ib 411/412) requièrent dans un pareil cas
que l'octroi de sûretés soit mentionné clairement lors de la publication
des comptes annuels.

    Dans le cas particulier, toutefois, les pièces du dossier montrent
que l'engagement de l'actionnaire de bloquer 10 millions de francs
sur un compte auprès de la banque n'est pas suffisant pour influencer
l'appréciation des risques encourus sur les créances litigieuses.

    Dans une lettre du 13 août 1987, l'organe de revision a indiqué
qu'"au début de novembre 1986", soit avant le bouclement des comptes
1986, le propriétaire s'est engagé à couvrir tout risque ne pouvant être
objectivement apprécié. Cependant, lorsque cet engagement a trouvé son
expression dans la lettre de l'actionnaire du 23 février 1987, il est
apparu que le blocage des 10 millions de francs sur un compte n'avait pas
pour but direct de garantir les créances litigieuses. Selon le texte de
cette lettre, le montant bloqué devait être affecté, en cas de besoin,
au seul rétablissement des fonds propres de la banque. L'opération
ne présente dès lors qu'un lointain rapport avec la solvabilité des
débiteurs douteux. Le fait pour eux de ne pas honorer leurs dettes ne
provoque pas automatiquement une utilisation de la somme bloquée; il
faut encore que la perte susceptible de se produire soit d'une ampleur
telle qu'elle affecte l'équilibre nécessaire entre les fonds propres
de la banque et l'ensemble de ses engagements. Dans cette hypothèse,
l'intervention de l'actionnaire au profit de la banque serait limitée
exclusivement au montant imposé par le rétablissement des fonds propres;
elle n'évite pas l'enregistrement d'une certaine perte, plus ou moins
grave selon la proportion prévue par l'art. 12 OB. En d'autres termes,
dans la mesure où l'engagement de l'actionnaire se calcule par rapport
aux fonds propres de la banque et non pas directement en fonction du
paiement des créances contractées par T. S.A. et P., il ne s'agit pas
d'une sûreté apte à modifier l'appréciation des risques sur ces crédits,
mais bien plutôt d'une garantie sur le bon fonctionnement de la banque et
en particulier sur le respect de l'art. 12 OB. Cet engagement s'apparente
ainsi à une garantie de couverture du déficit de l'exercice.

    Faute de rapports suffisamment étroits avec l'évolution effective de la
situation des débiteurs, cet engagement ne peut être pris en considération
au stade de l'appréciation du risque.

    Quant au rachat des créances le 23 décembre 1987 par la société
M. Ltd., dominée par l'actionnaire unique de la banque, il convient
d'emblée de constater que cette transaction, décidée en juin 1987
seulement, a eu lieu entièrement lors de l'exercice comptable 1987;
or, au 31 décembre 1986, date à laquelle il faut se placer pour juger
en l'espèce de l'appréciation des risques, aucune assurance concrète
ne pouvait, par définition, être donnée quant à ce futur rachat. Le
principe de l'étanchéité des périodes comptables exclut, par conséquent,
d'en tenir compte.

Erwägung 6

    6.- a) Lorsqu'un risque de perte est admis sur une créance, une
correction de valeur doit obligatoirement être enregistrée dans les comptes
sous la forme d'une provision. Celle-ci sert à saisir pour une période
déterminée, d'une part, les charges et les pertes qui, à la date du bilan,
sont connues quant à leur origine mais pas quant à leur importance ou,
d'autre part, des engagements et des charges existant déjà à la date
du bilan mais dont le montant et l'échéance ne peuvent être déterminés
avec précision ou dont l'existence est incertaine (Manuel de revison
comptable, tome I, p. 117). Figurant au passif du compte de pertes et
profits (cf. art. 25 ch. 2.7 OB), la provision influence le résultat
de l'exercice et peut, le cas échéant, entraîner une perte susceptible
d'entamer les fonds propres de la banque, au risque de rompre la proportion
nécessaire entre ceux-ci et l'ensemble des engagements de l'établissement
(art. 4 LB et art. 11 ss OB).

    b) Dans la mesure où le blocage des 10 millions de francs sur un compte
de l'actionnaire ne constitue pas une garantie de la solvabilité des
sociétés débitrices (cf. consid. 5e), les créances litigieuses devaient
être tenues pour douteuses. Partant, une provision correspondant aux
risques devait nécessairement apparaître dans les charges du compte
de pertes et profits. C'est donc à bon droit que l'autorité intimée a
augmenté le passif du compte de pertes et profits d'une provision de 7,4
millions de francs et a arrêté la rubrique "pertes, amortissements et
provisions" à 10'079'000 francs.

    En revanche, la décision attaquée est erronée lorsqu'elle admet qu'une
partie des 10 millions de francs bloqués par l'actionnaire - non pas en
garantie des créances litigieuses, mais pour l'éventuel rétablissement des
fonds propres de la banque - figure comme apports à fonds perdu à l'actif
du compte de pertes et profits qui se trouve ainsi équilibré. Dès lors que
l'engagement de l'actionnaire visait à garantir le respect de l'art. 12 OB
et à couvrir dans cette mesure le déficit de l'exercice, les fonds mis à
disposition ne pouvaient figurer - en tout ou partie - dans le compte de
résultats que si la garantie de couverture des pertes a effectivement été
utilisée; sa simple existence ne constitue pas un apport à fonds perdu. En
effet, une garantie de couverture du déficit n'a de sens que lorsqu'elle
est donnée avant la survenance de la perte résultant de l'exercice. Au
moment où celle-ci est enregistrée, la garantie doit être mise en oeuvre
et entraîner une mise à disposition effective des fonds nécessaires.

    En l'espèce, l'actionnaire a versé 10 millions de francs sur un compte
bloqué jusqu'à ce que l'organe de contrôle soit en mesure d'attester
que les fonds propres sont intacts. Ce faisant, l'intéressé a perdu de
vue que la banque devait faire face immédiatement à un important déficit
consécutif à la création des provisions. Or, ce résultat déficitaire étant
à enregistrer au 31 décembre 1986, il ne pouvait, s'il voulait éviter
une atteinte aux fonds propres de la banque, laisser l'argent sur son
compte dans l'expectative d'une future consolidation des crédits accordés
à T. S.A. et P.; il devait le verser sans réserve à la banque. Même
si lui-même n'était plus autorisé à disposer du montant bloqué, la
banque n'en avait, semble-t-il, pas non plus l'usage, ou tout au moins
n'a-t-elle pas fait appel à cette garantie pour assainir sa situation,
ainsi que l'atteste l'utilisation ultérieure du montant bloqué pour
opérer le rachat des créances par la société M. Ltd. Dans ces conditions,
le blocage des 10 millions de francs constitue au mieux une garantie de
couverture des pertes - limitée au rétablissement des fonds propres de
la banque - qui n'a pas été utilisée; elle ne peut, à ce titre, avoir la
moindre influence sur l'exercice considéré.

    Ultérieurement, les fonds bloqués ont changé d'affectation et plutôt
que de garantir le respect de l'art. 12 OB, ils ont été employés le
23 décembre 1987 pour opérer le rachat des créances douteuses; c'est
à ce moment seulement que l'actionnaire a effectué l'apport à fonds
perdu et a assaini les finances de la banque. Ainsi qu'il a été vu
précédemment (cf. consid. 5e in fine), cette manoeuvre ne peut être
prise en considération dans le cadre d'un recours relatif exclusivement
à l'exercice 1986.