Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 114 IB 190



114 Ib 190

29. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public du 11 novembre 1988
dans la cause F. Ballmer S.A. contre Département fédéral de justice et
police (recours de droit administratif) Regeste

    Strassenverkehr; Ausnahmen von den gesetzlichen Höchstmassen.

    1. Zulässigkeit der Verwaltungsgerichtsbeschwerde gegen eine
Grundsatzerklärung, die in allgemeiner Weise die künftige Haltung der
Behörde festlegt (E. 1a).

    2. Zuständigkeit des Bundesamtes für Polizeiwesen, seine
Rechtsanwendung mittels Grundsatzerklärung festzulegen (E. 3).

    3. Die gestützt auf Art. 80 VRV erteilte Bewilligung hat
Ausnahmecharakter und kann somit nur erfolgen nach Abwägung des Interesses
an der Durchführung des Transportes mit einem überdimensionalen Fahrzeug
und des öffentlichen Interesses an grösstmöglicher Verkehrssicherheit
(E. 4).

Sachverhalt

    A.- La société F. Ballmer S.A. assure la distribution exclusive pour la
Suisse des unités de construction autonomes et mobiles Portakabin. Parmi
son assortiment, la société vend notamment les grandes unités de la série
Pullman fabriquées d'une pièce en Grande-Bretagne et importées par la
route. Pour les convois routiers dépassant les dimensions prescrites par
l'art. 9 LCR, elle doit bénéficier d'une autorisation spéciale délivrée
par l'Office fédéral de la police.

    Par décision du 9 septembre 1986, cette autorité a informé la société
importatrice que, dès le 1er janvier 1987, elle ne lui délivrerait plus
d'autorisations spéciales pour des convois routiers dont le poids et les
dimensions excéderont certaines limites fixées à 28 t de poids total,
4 m de largeur, 4 m de hauteur et 16 m de longueur pour les véhicules
articulés (18 m pour les trains routiers).

    Le recours de la société qui se plaignait de ne plus pouvoir importer
les unités Portakabin de la série Pullman a été rejeté le 15 janvier 1988
par le Département fédéral de justice et police.

    Le Tribunal fédéral a rejeté le recours de droit administratif formé
contre cette dernière décision.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 1

    1.- a) La décision prise en première instance par l'Office fédéral de
la police ne concerne pas une autorisation déterminée, mais constitue une
déclaration d'intention relative à des décisions futures. A ce titre,
elle définit clairement l'attitude qu'adoptera à l'avenir l'autorité
et restreint d'autant sa marge d'appréciation. Il s'agit donc d'une
décision au sens de l'art. 5 PA qui pouvait faire l'objet d'un recours
immédiat, sans que l'administré doive attendre le refus d'une autorisation
particulière. Partant, la décision sur recours rendue par le Département
fédéral de justice et police en application du droit public fédéral peut
faire l'objet d'un recours de droit administratif conformément aux art. 97
ss OJ.

Erwägung 2

    2.- a) L'art. 9 de la loi fédérale sur la circulation routière
du 19 décembre 1958 (RS 741.01; LCR) fixe les dimensions et le poids
des véhicules autorisés à circuler en Suisse. Un régime dérogatoire
est toutefois prévu à l'alinéa 8 de cette disposition, qui habilite
notamment le Conseil fédéral à prescrire "les conditions auxquelles
peuvent être autorisées, dans certains cas, des courses nécessitées par
les circonstances" lorsque les véhicules utilisés dépassent les dimensions
et le poids maximaux.

    b) En application de cette délégation de compétence, le Conseil
fédéral a édicté l'art. 80 de l'ordonnance sur les règles de la circulation
routière du 13 novembre 1962 (RS 741.11; OCR) qui prévoit, à son alinéa
premier, que "des exceptions aux normes légales sur les dimensions et le
poids maximaux seront accordées seulement": (lettre b) "pour le transport
de marchandises indivisibles lorsque, malgré l'emploi d'un véhicule
approprié, les prescriptions ne peuvent pas être respectées...". Selon
l'art. 80 al. 2 OCR, "lorsque la circulation risque d'être considérablement
gênée, l'autorisation sera refusée, sauf si l'emploi d'un autre moyen de
transport (chemin de fer, bateau) ne peut raisonnablement être exigé,
compte tenu de la nature de la marchandise, de l'urgence du transport,
de la distance à parcourir, des possibilités de transbordement, etc.".

Erwägung 3

    3.- L'art. 79 al. 3 OCR donne compétence à l'Office fédéral de la
police pour délivrer les dérogations aux dimensions légales en faveur des
véhicules en circulation internationale. Etant compétente pour accorder ces
autorisations, l'autorité fédérale pouvait fixer sa pratique d'une manière
générale afin d'assurer une égalité de traitement entre administrés. Cette
décision de principe - qui ne dispense pas la recourante de solliciter
une autorisation particulière pour chaque convoi - a pour but d'éviter à
l'administré de se trouver soudainement et sans avertissement en présence
d'un refus, dommageable pour lui. L'Office fédéral de la police pouvait,
sans outrepasser ses compétences, aviser la recourante des limites dans
lesquelles il était disposé à lui accorder à l'avenir des autorisations
exceptionnelles pour des transports d'éléments Portakabin. Clarifiant
la situation juridique, cette procédure échappe au grief de violation du
droit fédéral.

Erwägung 4

    4.- Sur le fond, le litige porte sur la question de l'admissibilité
d'une limite maximale aux dérogations susceptibles d'être délivrées pour
les baraquements préfabriqués importés par la recourante.

    a) Le texte de l'art. 80 OCR - spécialement sa version allemande, plus
explicite - n'aménage pas un droit à obtenir l'autorisation dérogatoire
lorsque les conditions prévues aux alinéas 1 et 2 sont remplies par le
requérant. Il signifie simplement qu'à défaut d'y satisfaire, l'octroi
de l'autorisation n'entre pas en ligne de compte. Cette disposition ne
préjuge pas en revanche de la décision adoptée finalement par l'autorité en
fonction de la nature exceptionnelle du transport. Le régime dérogatoire
prévu par le Conseil fédéral n'exclut donc pas un refus de l'autorisation
lorsque la requête répond à toutes les conditions posées par l'art. 80
al. 1 et 2 OCR.

    b) Dans la mesure où l'autorisation dérogatoire de l'art. 80 OCR a
pour effet de supprimer l'interdiction de dépasser les limites légales
aménagées dans un but de sécurité publique par l'art. 9 al. 2 à 7 LCR,
cette permission constitue clairement une autorisation exceptionnelle
qui ne peut, en principe, être délivrée que dans la mesure limitée où
une entorse à la règle se concilie avec l'intérêt public (GRISEL, Traité
de droit administratif, p. 410; KNAPP, Précis de droit administratif, No
659). L'obtention proprement dite de l'autorisation dépendra donc d'une
appréciation de l'autorité compétente, qui devra prendre en considération
les différents intérêts en présence. Elle devra en particulier examiner si,
dans chaque cas d'espèce, les transports en cause présentent un caractère
extraordinaire suffisant pour justifier la dérogation sollicitée.

    c) En arrêtant le principe d'un régime dérogatoire, le législateur
fédéral désirait réserver le dépassement de dimensions aux seuls cas
répondant à une nécessité (BO CN 1956 p. 351). Il n'a donc pas voulu
une limite maximale aux dimensions des convois à partir de laquelle
aucune exception ne serait plus autorisée; il ressort même des exemples
de dérogations que fournit le rapporteur de la commission du Conseil
national que des dépassements considérables des limites légales peuvent
être tolérés sur les routes (transports de générateurs ou de turbines;
BO CN 1956 p. 366). Toutefois, chaque transport extraordinaire s'apprécie
en fonction du risque qu'il implique pour la sécurité publique et de
la nécessité qu'il revêt. Sous cet angle, le dépassement admissible des
limites légales varie selon les dimensions effectives du convoi et son
importance objective. A mesure que l'on s'écarte des limites légales, le
requérant doit par conséquent établir une importance objective toujours
plus grande de son transport.

Erwägung 5

    5.- a) En l'occurrence, l'importation des éléments Portakabin de
la série Pullman satisfait aux critères de l'art. 80 al. 1 lettre b et
al. 2 OCR; une autorisation dérogatoire n'étant donc pas d'emblée exclue,
l'autorité compétente devait procéder à une balance des intérêts en
présence. Au stade de l'autorisation de principe, seuls certains éléments
peuvent toutefois être pris en considération; les circonstances concrètes
d'un transport (état des routes, densité de la circulation, destination,
etc.) y échappent par définition. Cela n'empêche pas cependant de
déterminer l'importance réelle des transports et de la confronter, compte
tenu des dimensions des convois, aux exigences de la sécurité publique.

    b) L'importation régulière de baraquements préfabriqués ne présente pas
une importance suffisante pour justifier une mise en danger répétée de la
sécurité routière par des convois de dimensions excessives. La recourante
ne saurait, par conséquent, obtenir des autorisations dérogatoires sans
que des restrictions ne soient portées à la taille des marchandises.

    A cet égard, l'autorité intimée a estimé que l'importance des éléments
Portakabin ne justifiait pas un dépassement de certaines dimensions,
en particulier 4 m de largeur; passé ces limites, elle a retenu, en se
fondant sur ses circulaires du 12 juin 1974 et du 20 février 1975, que des
atteintes graves à la fluidité du trafic sont à craindre, de sorte que
la sécurité des autres usagers de la route peut être mise sérieusement
en péril. Elle a estimé également que la multiplication des transports
spéciaux augmente les risques pour la circulation, ce qui justifie aussi,
selon elle, une pratique restrictive quant à l'octroi de dérogations.

    c) La limite du tolérable en matière de sécurité du trafic dépend de
considérations techniques que l'Office fédéral de la police est mieux
à même d'apprécier que le Tribunal fédéral. Dans ces conditions, bien
qu'il dispose d'une pleine cognition, le Tribunal fédéral s'astreint à
une certaine retenue et reconnaît une latitude de jugement à l'autorité
inférieure (ATF 109 V 211, 108 Ib 200, 104 Ib 225). Or, en considérant
qu'à partir de 4 mètres de large, un convoi met la sécurité routière en
danger d'une manière critique, l'autorité de première instance n'a pas
abusé de cette latitude de jugement. Il n'est pas contestable en effet
qu'à partir d'une telle dimension, la présence de convois sur des routes
au profil souvent tourmenté présente un grave danger pour la circulation
malgré les mesures préventives susceptibles d'être adoptées.

    Pour sa part, la recourante n'a pas établi qu'une nécessité
impérieuse l'oblige à importer des baraquements préfabriqués d'une
dimension supérieure à 4 mètres; si l'on peut admettre au vu du dossier
qu'il existe un besoin raisonnable à dépasser les limites légales,
rien n'indique en revanche que l'intérêt privé en jeu soit prépondérant
au point de justifier un dépassement du plafond fixé dans la décision
attaquée à partir duquel un convoi met en péril la sécurité routière
d'une manière critique. En l'absence de toute nécessité exceptionnelle
imposant un dépassement de ce plafond, on ne saurait reprocher à l'autorité
intimée d'avoir accordé la prépondérance à la sécurité du trafic. La
restriction générale de la largeur doit être considérée comme raisonnable
et s'applique par ailleurs à d'autres types de transports qui, eux non
plus, ne répondent pas à une nécessité extraordinaire (cf. circulaire en
matière de transport de containers-citernes émise le 26 février 1975 par
la Commission intercantonale de la circulation routière). La décision
attaquée échappe donc sur le fond au grief de violation du droit fédéral.

    d) Il est inutile, dans ces conditions, d'examiner en plus si les
garanties des art. 4 et 31 Cst. - englobés dans la notion de droit fédéral
- sont observées. Tout au plus convient-il de remarquer que, dans la
mesure où la limite de 4 mètres concerne également d'autres entreprises et
d'autres genres de transports dont l'importance est comparable à celui de
la recourante, il n'est pas déraisonnable d'exiger que cette limite soit
strictement respectée. Admettre, dans ce contexte, de légers dépassements
conduirait, par égalité de traitement, à repousser les limites elles-mêmes;
ce processus pourrait alors se reproduire et vider de son sens la fixation
de la limite du tolérable pour de tels transports. Partant, la décision
attaquée ne peut être taxée d'arbitraire lorsqu'elle requiert un strict
respect des dimensions arrêtées par l'Office fédéral de la police.

    De plus, du moment que l'interdiction de dépasser les limites
fixées répond à des impératifs de sécurité publique et se fonde sur
une juste balance des intérêts en présence, la restriction à la liberté
du commerce et de l'industrie qu'elle implique respecte les exigences
constitutionnelles et en particulier le principe de la proportionnalité
(ATF 113 Ia 40, 112 Ia 320).