Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 114 IA 350



114 Ia 350

60. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 26 octobre 1988
dans la cause X. contre Grand Conseil du canton de Genève (recours de
droit public) Regeste

    Art. 2 UebBestBV; Persönliche Freiheit. Art. 5 und 6 des Genfer
Gesetzes über das Arzt-Patientenverhältnis; Art. 7A des Genfer Gesetzes
über die Behandlung von Geisteskranken und die Aufsicht über psychiatrische
Kliniken. Voraussetzung der Einwilligung des gesetzlichen Vertreters
eines Patienten zu einem medizinischen Eingriff.

    1. Bei der abstrakten Normkontrolle zu beachtende Grundsätze (E. 2).

    2. Die kantonalen Bestimmungen über die Patientenrechte, insbesondere
diejenigen über die Einwilligung zu einem medizinischen Eingriff, verletzen
den Grundsatz der derogatorischen Kraft des Bundesrechts nicht (E. 4).

    3. Tragweite der persönlichen Freiheit im Verhältnis Patient-Arzt
(E. 6).

    4. Die Genfer Bestimmungen, die den gesetzlichen Vertreter
als zuständig erklären für die Zustimmung zu einem medizinischen
Eingriff an dem zu diesen Äusserung unfähigen Patienten verstossen,
so wie sie abgefasst sind, nicht gegen die persönliche Freiheit. Der
urteilsfähige Patient ist ausschliesslich zur Einwilligung zu einem
psychochirurgischen Eingriff befugt; hingegen wird die Zustimmung des
gesetzlichen Vertreters bei urteilsunfähigen Patienten verlangt. Bei
Untersuchungen oder Behandlungen im Zusammenhang mit Forschungs- und
Versuchsprojekten kann das kantonale Recht eine schriftliche Zustimmung
des Patienten und seines gesetzlichen Vertreters verlangen (E. 7a).

    5. Bei Urteilsunfähigkeit des Patienten ist die Einwilligung
seines gesetzlichen Vertreters oder, bei Fehlen eines solchen, bei ihm
nahestehenden Personen oder Familienangehörigen einzuholen (E. 7b).

Sachverhalt

    A.- Le 13 janvier 1983, 17 associations et organisations politiques
ont déposé à la Chancellerie de l'Etat de Genève une initiative populaire
non formulée au sens de l'art. 67 de la Constitution cantonale.

    Selon l'exposé des motifs, cette initiative intitulée "pour les droits
des malades" tendait à une humanisation des hôpitaux, à une meilleure
information du malade, à l'institution d'une possibilité de consulter le
médecin traitant en cours d'hospitalisation, à un assouplissement des
horaires de visites, à une protection du patient contre les recherches
médicales et à une diminution du nombre des internements en psychiatrie.

    L'initiative a été transmise au Grand Conseil qui, le 24 mars 1983,
a décidé d'en confier l'étude à une commission parlementaire. Celle-ci
a déposé trois rapports successifs, les 3 avril 1984, 12 juillet 1985 et
21 avril 1987, après une large consultation des milieux intéressés.

    B.- Le 7 mai 1987, le Grand Conseil a adopté un projet de loi émanant
de cette initiative populaire et concernant les rapports entre membres des
professions de la santé et patients. Ce projet a été accepté par le peuple
le 6 décembre 1987, et le Conseil d'Etat a promulgué la nouvelle loi par
arrêté du 21 décembre 1987 publié dans la Feuille d'avis officielle du
23 décembre 1987.

    La nouvelle loi - intitulée loi concernant les rapports entre
membres des professions de la santé et patients - réglemente notamment
le droit des patients à l'information médicale et leur accès au dossier
médical (art. 1er et 2), leur faculté de faire appel à des médecins de
l'extérieur (art. 3 et 7 al. 3) et leur liberté de recevoir des visites
et de maintenir des liens avec l'extérieur pendant un séjour hospitalier
(art. 7). Elle insiste sur le respect de la dignité et de la personnalité
du malade (art. 9) et lui confère un droit de plainte en cas de violation
de l'un des droits institués par la loi (art. 10). La loi cantonale du 7
décembre 1979 sur le régime des personnes atteintes d'affections mentales
et sur la surveillance des établissements psychiatriques (LPAAM) a été
modifiée en vue de limiter la pratique de la psychochirurgie, d'interdire
la mise en cellule d'isolement à caractère carcéral et de réduire les
possibilités pour le personnel hospitalier de s'opposer au droit du patient
de quitter l'établissement (art. 11 al. 1). La nouvelle loi modifie enfin
la loi sur l'exercice des professions de la santé du 16 septembre 1983
et trois lois d'organisation et de procédure (art. 11 al. 2, 3, 4, 5).

    Les art. 5 et 6 de la nouvelle loi et 7A nouveau LPAAM traitent
du consentement éclairé du patient pour toute mesure diagnostique et
thérapeutique (art. 5), pour les examens ou traitements qui ressortissent
à la recherche clinique et sont encore de nature expérimentale, ou
constituent des nouveautés non encore éprouvées (art. 6) et pour la
pratique de la psychochirurgie (art. 7A LPAAM). Ces dispositions ont la
teneur suivante:

    Art. 5

    Consentement

    1 Le consentement éclairé du patient est nécessaire pour
   toute mesure diagnostique et thérapeutique, les dispositions concernant
   les mesures diagnostiques et thérapeutiques d'office étant réservées.

    2 Le consentement est valablement donné par le patient
   capable de discernement. En l'absence de discernement, le médecin
   demande l'accord du représentant légal.

    3 Dans le cas d'urgence, lorsque le patient n'est pas en
   mesure de se prononcer et que l'intervention thérapeutique est vitale,
   le consentement est présumé.

    4 En cas de refus ou de retrait du consentement pouvant
   entraîner des conséquences graves pour le patient, le médecin en
   informe ce dernier de façon approfondie. Si le patient persiste,
   le médecin est en droit de demander une confirmation écrite.

    5 Lorsque le refus émane du représentant légal du patient
   et qu'il peut avoir pour le malade des conséquences graves, le médecin
   peut s'adresser à l'autorité tutélaire. Si l'urgence est telle
   que cette démarche pourrait compromettre les chances de survie du
   patient, le médecin peut procéder à l'intervention avant la décision
   de l'autorité tutélaire.

    6 Le patient donne des renseignements complets et véridiques
   sur son état de santé et suit les prescriptions à l'exécution desquelles
   il a donné son consentement.

    Art. 6

    Recherche, expérimentation et enseignement

    1 Lorsque les examens ou les traitements proposés ressortissent
   à la recherche clinique et sont encore de nature expérimentale, ou
   constituent des nouveautés non encore éprouvées, le médecin l'indique au
   patient, en expliquant les avantages attendus et les risques possibles.

    2 Les expériences sont effectuées avec le consentement
   écrit, qui peut être retiré en tout temps, du patient et de son
   représentant légal. Elles ne doivent pas nuire au rétablissement de
   la santé et respecter les normes édictées par l'Académie suisse des
   sciences médicales, dans leur dernière version.

    3 La participation du patient à l'enseignement requiert
   son consentement éclairé ou celui du représentant légal.

    Les responsables de l'enseignement veillent à ce qu'il soit
   donné dans le respect de la dignité et de la sphère privée du malade.

    Art. 7A (nouveau) LPAAM

    La psychochirurgie ne peut être pratiquée que si:

    a) le patient ou son représentant légal y consent et

    b) l'indication thérapeutique est formelle.

    C.- Agissant par la voie du recours de droit public, X., citoyen
genevois, demande au Tribunal fédéral d'annuler les art. 5 et 6 de la
loi cantonale du 6 décembre 1987 concernant les rapports entre membres
des professions de la santé et patients, ainsi que le nouvel art. 7A
LPAAM. Il invoque une violation des art. 4 Cst. et 2 Disp. trans. Cst. Le
conseiller d'Etat chargé du département de la prévoyance sociale et de
la santé publique propose le rejet du recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- Appelé à statuer sur un recours de droit public dirigé contre
un arrêté de portée générale, le Tribunal fédéral examine librement la
conformité de cet arrêté au droit constitutionnel fédéral ou cantonal
(cf. ATF 111 Ia 24, 109 Ia 74 consid. 3). Il n'annule toutefois l'arrêté
que s'il ne se prête à aucune interprétation conforme à la Constitution;
il s'en abstient si une de ces interprétations peut être admise de façon
soutenable (ATF 109 Ia 69, 277 consid. 2a et les arrêts cités). Dans
la procédure dite de contrôle abstrait des normes, il est en effet
rarement possible de prévoir d'emblée tous les effets de l'application
d'un texte légal, même si, par sa précision, celui-ci n'offre guère de
marge d'appréciation à l'autorité chargée de l'appliquer. Si, dans les
circonstances ordinaires que l'auteur de la norme devait considérer,
une disposition semble, comme telle, compatible avec la Constitution,
l'éventualité qu'elle puisse se révéler inconstitutionnelle lors de son
application à des cas particuliers ne suffit pas au juge constitutionnel
pour l'annuler. Il ne le fera que si la perspective d'un contrôle concret
ultérieur n'offre pas de garanties suffisantes aux destinataires de
la norme litigieuse (ATF 111 Ia 25, 106 Ia 137/138). Le rejet du grief
d'inconstitutionnalité invoqué dans le cadre du contrôle direct d'une
norme n'empêche en effet pas le recourant de soulever à nouveau ce grief
contre la même disposition à l'occasion de son application à un cas
d'espèce. L'arrêt rendu au terme de cette procédure ne bénéficie ainsi,
dans cette mesure, que d'une autorité relative de la chose jugée (ATF
102 Ia 282). Le législateur n'en a pas moins pour devoir d'adopter une
réglementation à même de prévenir, dans toute la mesure du possible, la
violation ultérieure des droits fondamentaux. Il doit ainsi prendre en
considération les conditions dans lesquelles la règle qu'il édicte sera
appliquée et, en particulier, la qualité des organes chargés de cette
application (ATF 111 Ia 25/26, 109 Ia 302). Le juge constitutionnel ne
saurait laisser, de toute façon, subsister une norme dont la teneur permet
de craindre, avec une certaine vraisemblance et au vu des circonstances,
qu'elle soit interprétée à l'avenir contrairement à la Constitution
(ATF 106 Ia 137/138, 350). A cet égard, la nature et la portée des droits
individuels en jeu et tout particulièrement la gravité de l'atteinte dont
ils sont menacés sont des éléments décisifs. Quand la norme critiquée
est susceptible de porter aux droits fondamentaux invoqués une atteinte
particulièrement grave, le Tribunal fédéral exige qu'elle constitue une
base légale claire et nette; il sort par conséquent de la réserve qu'il
s'impose de manière générale dans le cadre de son contrôle abstrait
(cf. ATF 109 Ia 122 consid. c, 106 Ia 282).

Erwägung 4

    4.- a) Le principe de la force dérogatoire (ou de la primauté)
du droit fédéral énoncé à l'art. 2 Disp. trans. Cst. veut que le droit
fédéral prime d'emblée et toujours le droit cantonal dans les domaines
que la Constitution ou un arrêté fédéral urgent place dans la compétence
de la Confédération et que celle-ci a effectivement réglementé. Les
normes cantonales qui seraient contraires au droit fédéral, notamment par
leur but ou les moyens qu'elles mettent en oeuvre, doivent ainsi céder
le pas devant le droit fédéral. Ce principe n'exclut cependant toute
réglementation cantonale que dans les matières que le législateur fédéral
a entendu régler de façon exhaustive, les cantons restant au surplus
compétents pour édicter, quand tel n'est pas le cas, des dispositions
de droit public dont les buts et les moyens envisagés convergent avec
ceux prévus par le droit fédéral (ATF 112 II 424, 109 Ia 67 consid. 2a,
104 Ia 108 consid. 4a, 101 Ia 506 consid. 2b). Dans les domaines régis
en principe par le droit civil fédéral, les cantons conservent donc la
compétence d'édicter des règles de droit public en vertu de l'art. 6 CC,
pour autant que le législateur fédéral n'ait pas entendu régler la matière
de façon exhaustive, que les règles cantonales soient motivées par un
intérêt public pertinent et qu'elles n'éludent pas le droit civil, ni n'en
contredisent le sens ou l'esprit (ATF 112 II 424 et les arrêts cités). Le
Tribunal fédéral examine librement la conformité d'une règle de droit
cantonal à une règle de droit fédéral quand il est appelé à examiner cette
question par le biais du grief de violation de l'art. 2 Disp. trans. Cst.

    b) Les art. 5 et 6 de la loi genevoise du 6 décembre 1987 et l'art. 7A
nouveau LPAAM règlent les rapports entre les médecins et les patients
des hôpitaux publics et privés, conformément à l'intention des auteurs
de l'initiative "pour les droits des malades" (Mémorial des séances
du Grand Conseil 1983, p. 821). Hormis les dispositions relatives au
contrat de mandat (art. 394 s. CO), qui régissent les relations entre
le médecin privé et son patient, le droit civil fédéral ne pose pas de
règles spécifiques applicables à ce domaine, qui peut par conséquent
être réglementé par des normes du droit public cantonal dans les limites
indiquées ci-dessus. En exigeant que le patient consente à l'acte médical,
les dispositions litigieuses reprennent un principe déjà fixé par le
droit civil fédéral (cf. consid. 6 ci-dessous). Elles vont cependant
au-delà des règles du contrat de mandat en prévoyant que le consentement
du représentant légal peut dans certains cas se substituer à celui de
la personne incapable de discernement. De même, elles soumettent les
traitements qui ressortissent à la recherche clinique et la pratique de
la psychochirurgie à des conditions spéciales relatives au consentement
et à l'indication thérapeutique. En conférant des droits aux patients et
en imposant des limites au pouvoir des médecins, ces mesures établissent
un certain équilibre dans leurs relations réciproques, et réduisent
le danger d'atteintes illicites à l'intégrité physique des patients
(cf. consid. 7 ci-dessous). Elles répondent ainsi à un intérêt public
pertinent. Au surplus, loin d'entraver ou d'éluder des règles ordinaires
du contrat de mandat, elles en prolongent et en renforcent la portée dans
des situations qui requièrent une protection accrue des malades face aux
médecins. Il apparaît ainsi que la législation genevoise en la matière
respecte la primauté du droit fédéral. Le grief tiré de la violation de
l'art. 2 Disp. trans. Cst. doit par conséquent être rejeté.

Erwägung 5

    5.- La liberté personnelle, droit constitutionnel non écrit,
imprescriptible et inaliénable, donne à l'individu le droit d'aller et de
venir et le droit au respect de son intégrité corporelle. Elle le protège,
en outre, dans l'exercice de sa faculté d'apprécier une situation de fait
déterminée et d'agir selon cette appréciation. Cette garantie n'englobe
certes pas la protection de toute possibilité de choix et de détermination
de l'homme si peu importante soit-elle; elle recouvre cependant toutes les
libertés élémentaires dont l'exercice est indispensable à l'épanouissement
de la personnalité humaine. Elle se conçoit ainsi comme une garantie
générale et subsidiaire, à laquelle le citoyen peut se référer lorsque
les droits fondamentaux dont il invoque la violation ne sont pas l'objet
de garanties particulières (ATF 111 Ia 232/233 consid. 3a, 107 Ia 55/56
consid. 3a, 101 Ia 346 consid. 7a et arrêts cités).

    Le droit à l'intégrité physique - ou, en d'autres termes, le
principe de l'intangibilité du corps humain - est un aspect de la liberté
personnelle qui peut, à l'instar des autres droits individuels, être limité
par la nécessité de sauvegarder un intérêt public prépondérant. De telles
restrictions doivent, conformément au principe de la proportionnalité,
ne pas aller au-delà de ce qu'exige l'intérêt public considéré. Elles
doivent en outre reposer sur une base légale suffisante, sous réserve
des mesures exceptionnelles que l'autorité peut prendre en vertu de son
pouvoir de police. Enfin, comme tout autre droit fondamental, la liberté
personnelle, sous tous ses aspects, ne saurait être complètement supprimée
ou vidée de son contenu par les restrictions légales qui peuvent lui être
apportées dans l'intérêt public (ATF 112 Ia 162 consid. 3a, 249, 111 Ia 234
consid. 3c, 109 Ia 281 et les arrêts cités). C'est ainsi que le législateur
peut autoriser une intervention médicale sur le corps humain, contre le
gré du patient, dans des cas exceptionnels où un intérêt public clairement
établi l'impose de manière absolue. Tel est le cas de mesures destinées à
prévenir la diffusion d'épidémies, par un dépistage, une vaccination ou
un traitement d'urgence (cf. ATF 104 Ia 486 consid. 4b, 99 Ia 749). Des
mesures comparables peuvent, dans le même sens, être ordonnées, pour les
besoins de procédures civiles et pénales particulières (cf. ATF 112 Ia
249, 110 Ia 121/122, 106 Ia 35, consid. 4a, 99 Ia 412 consid. 4, 90 I 39
consid. 5, 110 ss). Au demeurant, le principe de l'intangibilité du corps
humain déploie ses effets non seulement durant la vie des individus mais
aussi au-delà de leur décès (ATF 111 Ia 233).

Erwägung 6

    6.- La relation entre le patient et son médecin privé est d'ordinaire
régie par un contrat de mandat au sens des art. 394 s. CO (ATF 110 II
378 consid. b, 105 II 284/285 et les arrêts cités; WOLFGANG WIEGAND,
Der Arztvertrag, insbesondere die Haftung des Arztes, in: Arzt und Recht,
Berner Tage für die juristische Praxis 1984, Berne 1985, p. 81 s., 84/86;
WERNER E. OTT, Voraussetzungen der zivilrechtlichen Haftung des Arztes,
thèse Zurich 1978, p. 23), aux termes duquel le mandataire assume un
devoir d'information. Lorsque le patient se confie aux soins d'un hôpital
public, il se noue entre eux des liens juridiques qui impliquent également
un tel devoir. Aucune intervention médicale ne peut être pratiquée sur
un patient sans qu'il ait donné son consentement libre et éclairé, ce
qui suppose qu'il ait été informé par le praticien quant à la nature
et aux conséquences de l'intervention et qu'il y ait donné son accord
préalable. Le droit de l'individu d'être informé et de se décider en
conséquence se déduit du reste directement de son droit à la liberté
personnelle et à l'intégrité physique (ATF 108 II 62 consid. 3, OLIVIER
GUILLOD, Le consentement éclairé du patient, thèse Neuchâtel, 1986, p. 29,
37; EUGEN BUCHER, Der Persönlichkeitsschutz beim ärztlichen Handeln, in:
Arzt und Recht, Berner Tage für die juristische Praxis 1984, Berne 1985,
p. 39 s., 43/44; MICHEL NEY, La responsabilité des médecins et de leurs
auxiliaires notamment à raison de l'acte opératoire, thèse Lausanne, 1979,
p. 86; JOST GROSS, Die persönliche Freiheit des Patienten, thèse Berne,
1977, p. 134 s.).

    L'exigence du consentement libre et éclairé du patient est liée au
risque inhérent à tout acte médical, qui ne peut être assumé que par celui
qui y est exposé. L'accord du patient est libre et éclairé s'il est donné
à la suite d'une information objective et complète du praticien quant à la
nature et aux conséquences possibles de l'opération, et en l'absence de
toute pression de tiers. Cette liberté de choix part de la considération
que les patients qui possèdent la capacité de prendre des décisions au
sujet des soins qui leur sont prodigués doivent être à même de le faire,
et obtenir pour cela toute information pertinente sur leur état de santé et
les possibilités de traitement. Ils doivent être renseignés en particulier
sur les améliorations qui peuvent résulter du traitement, sur les risques
qu'il comporte (nature et degré de probabilité), ainsi que sur son coût. Le
consentement libre et éclairé apparaît donc comme un mode de manifestation
de la volonté sur le respect mutuel et la participation (OLIVIER GUILLOD,
op.cit., p. 262 et n. 399). La validité du consentement préalable donné
par le patient est limitée par l'art. 27 al. 2 CC, disposition qui protège
la personnalité contre des engagements excessifs, nul ne pouvant aliéner
sa liberté, ni s'en interdire l'usage dans une mesure contraire aux lois
ou aux moeurs.

    Même lorsque le droit édicté n'a pas expressément réglementé les cas
dans lesquels ce consentement est requis, le médecin qui procède à une
opération sans informer son patient ni en obtenir l'accord commet en
principe un acte contraire au droit, soit une atteinte non autorisée
à l'intégrité corporelle, indépendamment de toute responsabilité
contractuelle éventuelle. L'illicéité d'un tel comportement affecte
l'ensemble de l'intervention et rejaillit de la sorte sur chacun des gestes
qu'elle comporte, même quand ils sont exécutés correctement du point de
vue médical. Le risque de l'acte médical, normalement supporté par le
patient, passe au praticien qui intervient sans obtenir le consentement
éclairé qu'il aurait pu et dû solliciter. L'opération faite sans le
consentement éclairé du patient est ainsi absolument contraire au droit et
elle l'est tout entière. Tels sont les principes que le Tribunal fédéral
a finalement posés dans ce domaine, après avoir, dans un premier temps,
nié la nécessité de l'information et du consentement préalable du patient
pour une intervention chirurgicale mineure (ablation de verrues), au
motif qu'il y avait tout lieu de croire que le patient n'eût pas renoncé
à l'intervention s'il avait été informé du risque normal et minime qu'il
courrait (ATF 108 II 61/63, 105 II 286 ss consid. 6, 66 II 36).

Erwägung 7

    7.- L'initiative populaire non formulée "pour les droits des malades"
avait notamment pour but de réglementer la soumission de toute intervention
médicale au consentement du patient. La loi du 6 décembre 1987 a donné
suite à ce voeu des initiants. Son art. 5 réglemente les conditions dans
lesquelles le consentement libre et éclairé du patient doit intervenir;
il est donné valablement par le patient capable de discernement. Si
le patient n'est pas capable de discernement, le médecin doit demander
l'accord du représentant légal et, en cas de refus de celui-ci, l'accord
de l'autorité tutélaire quand ce refus peut avoir pour le malade des
conséquences graves. En cas d'urgence, le consentement du patient qui
n'est pas en mesure de se prononcer est présumé et l'accord préalable
de l'autorité tutélaire n'est pas nécessaire si la requête auprès de
celle-ci est susceptible de compromettre les chances de survie du patient.
L'art. 6 soumet à des formes particulières le consentement du patient
à des examens ou traitements qui ressortissent à la recherche clinique
et sont encore de nature expérimentale ou constituent des nouveautés non
encore éprouvées. En pareil cas, le consentement, ordinairement informel,
doit être donné par écrit et peut être retiré en tout temps. Si le patient
est mineur ou interdit, l'intervention ne peut en outre avoir lieu qu'avec
le consentement conjoint de son représentant légal. L'art. 7A nouveau LPAAM
autorise la psychochirurgie - dont les initiants demandaient l'interdiction
et qui, selon les travaux préparatoires (Mémorial des séances du Grand
Conseil 1985, p. 4721, 4728), n'était pas pratiquée à Genève au moment
de l'adoption de la loi - si l'indication thérapeutique est formelle et
si le patient ou son représentant légal y consentent.

    Le recourant conteste la constitutionnalité de ces textes dans la
mesure où ils confèrent au représentant légal le pouvoir de consentir
à une intervention médicale sur une personne incapable d'y consentir
elle-même. Une telle substitution serait incompatible avec le caractère
d'un tel acte, strictement personnel selon les termes de l'art. 19
al. 2 CC.

    a) Il est généralement admis qu'un patient mineur ou interdit peut
consentir seul à un traitement médical qui lui est proposé lorsqu'il est
capable de discernement. Cette capacité de consentir personnellement doit
être appréciée par le médecin au regard de la nature des problèmes que
pose son intervention. L'information du médecin doit être particulièrement
prudente, simple et claire. Si la capacité de discernement d'un interdit
doit être présumée chaque fois que l'interdiction n'est pas fondée sur
l'art. 369 CC, les détenteurs de l'autorité parentale devraient être
appelés à intervenir chaque fois qu'il y a un doute sur la capacité
d'une personne mineure d'apprécier objectivement les tenants et les
aboutissants de l'intervention proposée, l'intérêt thérapeutique du
patient étant prépondérant dans tous les cas. Les hypothèses où l'urgence
d'une intervention est telle que le consentement éclairé des uns ou des
autres serait préjudiciable à cet intérêt, demeurent réservés (cf. GUILLOD,
op.cit., p. 249 ss, MAX NAGELI, Die ärztliche Behandlung handlungsunfähiger
Patienten aus zivilrechtlicher Sicht, thèse Zurich 1984, p. 117 s., 143;
EUGEN BUCHER, op.cit., p. 45).

    L'art. 5 de la loi du 6 décembre 1987 n'établit aucune distinction
entre les patients capables de discernement. Qu'ils aient le plein
exercice de leurs droits civils ou qu'ils soient mineurs ou interdits, leur
consentement personnel suffit. Il devrait en aller de même de l'art. 7A
nouveau, lettre a LPAAM. Sur ce point précis, cette disposition doit,
pour être conforme à la liberté personnelle, être interprétée en ce sens
que le patient capable de discernement est habilité à consentir seul
à une mesure de psychochirurgie, le consentement du représentant légal
n'étant exigé que pour les patients incapables de discernement.

    Seul l'art. 6 de la loi du 6 décembre 1987 exige pour les examens ou
traitements qui ressortissent à la recherche et à l'expérimentation, le
consentement écrit du patient et de son représentant légal. Le recourant
conteste à tort la constitutionnalité de cette disposition au regard
des droits personnels du patient. En effet, dans ce domaine spécial,
l'opportunité du traitement proposé est hautement discutable et les risques
courus sont accrus et peu prévisibles. La nature de telles interventions,
qui peuvent parfois trouver leur justification autant dans l'intérêt
de la science que dans l'intérêt thérapeutique du patient, légitime un
renforcement de la protection de celui-ci à l'égard du pouvoir médical
(WOLFRAM EBERBACH, Die zivilrechtliche Beurteilung der Humanforschung,
Francfort/Berne, 1982, p. 90; MATHIAS HOHERMUTH, Zur Frage der
Aufklärungspflicht des Arztes bei biomedizinischen Versuchen am Menschen
mit Hinweisen auf das amerikanische und deutsche Recht, thèse Zurich, 1979,
p. 67 s., 82 s., 133 s.). Le concours du représentant légal est au reste
aussi de nature à aider le médecin dont l'information unilatérale qu'il
doit donner constitue une responsabilité particulièrement lourde quand elle
s'adresse, par exemple, à une personne mineure. Au demeurant, l'art. 6 al.
2 de la loi attaquée limite l'importance de ce concours en offrant au
patient la possibilité de retirer en tout temps unilatéralement son propre
consentement, ce qui a pour effet d'interdire la poursuite de l'expérience.

    b) Le patient privé du discernement suffisant pour se prononcer sur
l'opportunité d'une intervention médicale ne peut y consentir de manière
libre et éclairée. Le choix offert au législateur intervenant dans ce
domaine est alors le suivant:

    - ou bien il fait une confiance absolue au médecin et l'autorise à
décider seul, en présumant soit le consentement du patient soit le refus
de ce consentement, à partir des risques encourus considérés objectivement,

    - ou bien il exige du médecin de requérir le consentement de tiers
qui peuvent être soit la famille ou les proches du patient, soit son
représentant légal s'il s'agit d'une personne mineure ou interdite.

    aa) En l'absence d'une réglementation antérieure à la législation
attaquée, le droit genevois laissait implicitement au médecin le droit de
décider une intervention sur le patient incapable de discernement. L'art. 5
de la loi du 6 décembre 1987 et l'art. 7A LPAAM ont aménagé une solution
différente. Ils soumettent la pratique de toute mesure diagnostique et
thérapeutique, ainsi que la pratique de la psychochirurgie, au consentement
du représentant légal de la personne incapable de discernement. Le
nouveau droit ne traite en revanche pas du cas de la personne privée,
in concreto, de son discernement et qui n'a pas de représentant légal
(cf. à ce propos MAX NÄGELI, op.cit., p. 133 s.); cette question n'est
cependant pas litigieuse, faute pour le recourant de l'avoir évoquée au
moyen d'une motivation conforme aux exigences de l'art. 90 al. 1 lettre b
OJ. Le seul problème à résoudre est donc celui de savoir si le consentement
du représentant légal peut remplacer celui du patient lorsque celui-ci est
incapable de discernement, en raison du caractère strictement personnel
du consentement de la personne à une atteinte à son intégrité corporelle.

    bb) Les droits des personnes incapables de discernement ne peuvent être
exercés que par leur représentant légal, ce qui a pour conséquence que leur
exercice est exclu quand la représentation l'est aussi (JACQUES MICHEL
GROSSEN, Traité de droit civil suisse, t. II/2, Les personnes physiques,
p. 51/52). C'est ainsi que, en dépit des critiques de la doctrine, le
Tribunal fédéral a maintenu sa jurisprudence selon laquelle l'époux privé
de discernement ne peut ouvrir action en divorce par l'intermédiaire de
son représentant légal, à cause du caractère strictement personnel du
droit de demander le divorce (ATF 85 II 221, 78 II 99, 68 II 144).

    S'agissant des interventions médicales, le consentement de la personne
intéressée est requis comme du fait justificatif permettant de restreindre,
in casu, la portée du principe de l'intangibilité du corps humain déduit de
la liberté personnelle, et cela dans les limites de l'art. 27 al. 2 CC.
Contrairement à l'opinion du recourant, la doctrine admet qu'on se
trouve en présence d'un droit strictement personnel relatif et que,
si le patient est incapable de discernement, le consentement libre
et éclairé doit être recueilli auprès de son représentant légal s'il
en existe un (HANS HINDERLING, Die ärztliche Aufklärungspflicht, in:
Ausgewählte Schriften, Zurich, 1982, p. 51 s., p. 74). Celui-ci doit se
déterminer exclusivement en fonction des intérêts du patient, ce qui
est une notion essentiellement objective. Il doit, dans sa décision,
tenir compte des voeux qui peuvent avoir été émis par ce dernier avant
qu'il ne soit privé de son discernement. Il ne saurait de toute façon
consentir à livrer son protégé à une expérimentation scientifique, voire
à une intervention mutilante ou de nature à porter une atteinte grave
à son intégrité physique (OLIVIER GUILLOD, op.cit., p. 254/256; id., Le
consentement à l'acte médical: une longue convalescence, in: Aspects de
droit médical. Fribourg 1987, p. 83 s., 85; MAX NÄGELI, op.cit., p. 21, 98,
133; EUGEN BUCHER, Die Ausübung der Persönlichkeitsrechte insbesondere die
Persönlichkeitsrechte des Patienten als Schranken der ärztlichen Tätigkeit,
thèse Zurich 1956, p. 157 s.; JACQUES MICHEL GROSSEN, op.cit., p. 84/85).

    cc) La réglementation litigieuse met en oeuvre les conceptions dont
s'étaient inspirés les auteurs de l'initiative populaire "pour les droits
des malades".

    Au cours des travaux préparatoires, tous les partisans d'une extension
des droits des malades face au pouvoir médical se sont exprimés en faveur
de la solution qui a en définitive été retenue par le législateur. Seuls
certains commissaires se sont demandé s'il n'était pas préférable d'exiger,
dans le cas visé à l'art. 5 de la loi du 6 décembre 1987, le consentement
de la famille ou des proches au lieu de celui du représentant légal. Cette
proposition a été écartée pour le motif, difficilement compréhensible
il est vrai, du caractère personnalissime du consentement (Mémorial des
séances du Grand Conseil 1987, p. 2000). Ce choix du législateur pourrait
certes se discuter sous l'angle de l'opportunité. Saisi d'un recours
fondé essentiellement sur le grief de violation de la liberté personnelle
du patient, le Tribunal fédéral doit toutefois se borner à constater que
l'exigence du consentement du représentant légal ne porte pas à ce droit
fondamental une atteinte supérieure à celle que lui porterait l'exigence
du consentement des proches.

    En définitive, l'institution du consentement éclairé du représentant
légal d'un patient incapable de discernement apparaît comme un moyen
de rééquilibrer les rapports entre patients et médecins et de prévenir
l'exercice abusif du pouvoir médical. Le but de la réglementation
litigieuse est ainsi seulement de limiter les droits du médecin dans
l'intérêt du patient et de sa liberté personnelle. L'accord du représentant
légal qui ne peut prendre en compte que l'intérêt du patient déterminé
objectivement, et dont le refus est soumis au contrôle de l'autorité
tutélaire, constitue une mesure de protection d'autant plus satisfaisante
que, en cas d'urgence, la présomption de consentement préserve le patient
d'une attitude dilatoire de son représentant légal ou de l'autorité
tutélaire.

    Les dispositions critiquées doivent de toute façon être interprétées
en ce sens que le consentement du représentant légal ne permet en aucun cas
au médecin de pratiquer des interventions qui, en fonction de leur nature,
ne pourraient être admises que par l'intéressé lui-même. L'égalité de
traitement entre les incapables de discernement pourvus d'un représentant
légal et ceux qui ne le sont pas, par exemple les majeurs qui se trouvent
dans un état comateux, sera sauvegardée si l'on admet que le médecin doit
dans la seconde hypothèse prendre l'avis des proches ou des familiers avant
d'entreprendre une opération qui ne peut être différée (cf. MICHEL NEY,
op.cit., p. 86). Les textes critiqués ne ferment pas la porte à l'exigence
d'une telle démarche. Ce n'est au reste pas l'objet du recours.

Entscheid:

             Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Rejette le recours au sens des considérants dans la mesure où il
est recevable.