Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 114 IA 139



114 Ia 139

22. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 16 mars 1988
dans la cause R. contre Société X. et Cour suprême du canton de Berne
(recours de droit public) Regeste

    Art. 58 Abs. 1 BV, art. 6 Ziff. 1 EMRK. Personelle Trennung von
Überweisungsrichter und erkennendem Strafrichter im Berner Strafverfahren.

    Dürfen im Appellationsverfahren dieselben Richter des
Obergerichtsamten, die bereits am Entscheid der Anklagekammer über die
Überweisung hinsichtlich derjenigen Anklagepunkte mitgewirkt haben, in
denen sich Untersuchungsrichter und Generalprokurator nicht haben einigen
können? Im konkreten Fall keine Verletzung von Art. 58 Abs. 1 BV und 6
Ziff. 1 EMRK (E. 4).

Sachverhalt

    A.- Par ordonnance du 19 décembre 1984, le Juge d'instruction du
district de Moutier a prononcé la clôture de l'instruction ouverte
contre R.; il a proposé au Ministère public de renvoyer l'intéressé
devant le Tribunal du district sous l'accusation d'escroquerie et de
gestion déloyale, et de clore la procédure pour le surplus. Le Procureur
suppléant du canton de Berne a considéré que l'escroquerie n'entrait pas en
considération et que l'affaire devait être classée sur ce point. Le Juge
d'instruction ayant maintenu son point de vue, l'affaire a été transmise
à la Chambre d'accusation de la Cour suprême du canton de Berne.

    Cette juridiction a prononcé que R. devait être renvoyé devant le
Tribunal de district pour y être jugé non pour escroquerie, mais pour
abus de confiance. Conformément à cet arrêt, le Juge d'instruction et
le Procureur ont rendu conjointement une ordonnance de renvoi retenant
l'abus de confiance et la gestion déloyale.

    Le Tribunal du district de Moutier a reconnu l'accusé coupable
relativement à certains actes constitutifs de gestion déloyale et l'a
acquitté des autres charges retenues contre lui, notamment de celles
qualifiées d'abus de confiance. R. a néanmoins appelé du jugement. L'appel
devait être jugé par-devant la Ire Chambre pénale de la Cour suprême. La
composition de cette section étant identique à celle de la Chambre
d'accusation, R. a demandé la récusation de tous ses membres au motif qu'il
était inadmissible, au regard des art. 58 al. 1 Cst. et 6 ch. 1 CEDH,
que les juges qui avaient participé à l'arrêt de renvoi se prononcent
ensuite sur l'action pénale en instance d'appel. Le plénum de la Cour
suprême a rejeté la demande de récusation.

    Agissant par la voie du recours de droit public, R. a demandé au
Tribunal fédéral d'annuler cette décision pour violation des art. 58
al. 1 Cst. et 6 ch. 1 CEDH. Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                   Extrait des considérants:

Erwägung 4

    4.- Les développements qui précédent montrent que la thèse défendue par
le recourant a influencé certains droits positifs mais ne correspond pas à
un principe généralement appliqué. Par ailleurs, la pratique du Tribunal
fédéral et des autorités de Strasbourg confirme que l'impartialité des
juges contestés par le recourant doit s'apprécier notamment en fonction
de la nature procédurale de leur première intervention dans l'affaire,
ainsi que des questions qui devaient alors être résolues. Un examen du
droit cantonal applicable est donc nécessaire.

    Au moment où le Juge d'instruction estime que l'enquête est complète,
il en prononce la clôture (art. 183 CPP bern.). Dans les cas passibles de
la réclusion à vie ou de réclusion à durée minimale déterminée, il transmet
l'affaire à la Chambre d'accusation (art. 192 CPP bern.). Dans les autres
cas, il la transmet au Ministère public avec une proposition d'abandon
de la poursuite ou de renvoi en jugement (art. 184 CPP bern.). Il propose
un renvoi en jugement si les charges relevées lui paraissent suffisantes
pour rendre le prévenu suspect d'une action punissable (art. 184 al. 3
CPP bern.). Si le Procureur adhère à la proposition, celle-ci a les effets
d'une ordonnance (art. 185 al. 1 CPP bern.). L'ordonnance de renvoi doit
être communiquée à l'accusé (art. 186 al. 1 CPP bern.); elle doit indiquer
notamment les faits mis à sa charge, en indiquant aussi exactement que
possible le temps et le lieu de l'infraction et la partie lésée, ainsi que
les dispositions visées de la loi pénale (art. 206 al. 1 ch. 2 et 3 CPP
bern.). Elle n'est pas susceptible de recours (art. 191 al. 1 CPP bern.).

    Si le Procureur n'adhère pas à la proposition du Juge d'instruction
et que les deux magistrats ne puissent s'entendre, le Juge d'instruction
saisit la Chambre d'accusation (art. 185 al. 2 CPP bern.). Cette autorité
peut ordonner un complément d'enquête (art. 193 al. 1, 196 CPP bern.);
le cas échéant, elle prononce elle-même le renvoi. Elle doit trancher
uniquement les points sur lesquels le Juge d'instruction et le Ministère
public n'ont pas pu aboutir à un accord; elle peut se rallier à l'une
ou à l'autre de leurs positions ou encore retenir une autre solution
(WAIBLINGER, Das Strafverfahren des Kantons Bern, ch. 1 ad art. 185 CPP
bern.; JAEGGI, Das Überweisungsverfahren im bernischen Strafprozess,
thèse Berne 1935, p. 35). Sur les points litigieux, elle peut ordonner
un non-lieu ou donner des directives dans ce sens si elle estime que les
conditions d'un renvoi ne sont pas réalisées. Au lieu de renvoyer la cause
au tribunal qui est compétent en fonction des peines prévues par la loi
pénale, elle peut désigner un tribunal habilité à juger des infractions
moins graves si les circonstances permettent d'admettre que seule une
peine entrant dans la compétence de ce tribunal entre en considération;
elle peut, à cet égard, tenir compte des faits propres à atténuer la
culpabilité ou la peine (art. 208 al. 1 CPP bern.; cf. WAIBLINGER, op.cit.,
ch. 1 ad art. 208 CPP bern.; PIQUEREZ, Traité de procédure pénale bernoise
et jurassienne, t. I, p. 42 ss). La Chambre d'accusation siège à huis clos
(art. 194 al. 1 CPP bern.).

    En l'espèce, après la clôture de l'instruction, le Juge d'instruction
et le Procureur suppléant ont été d'avis divergent quant au renvoi
de R. pour escroquerie, tandis qu'ils admettaient tous deux que les
charges relevées rendaient le prévenu suspect de gestion déloyale. La
Chambre d'accusation devait seulement, dans ces conditions, examiner
et trancher l'objet du désaccord, soit la question de l'escroquerie.
Elle s'est prononcée sur ce point en retenant une autre qualification
juridique des faits. En revanche, elle n'avait pas à examiner si le
soupçon de gestion déloyale était justifié ou non et elle n'a pas pris
position sur cet élément de l'affaire. Elle l'a certes mentionné, mais
seulement pour préciser qu'il n'était pas litigieux et que le renvoi pour
gestion déloyale était en fait déjà décidé; le dispositif de son arrêt
ne se rapporte qu'à l'abus de confiance.

    Le Tribunal de district a acquitté R. de l'accusation d'abus de
confiance retenue par la Chambre d'accusation. Il en résulte que la Cour
suprême ne doit se prononcer que sur la gestion déloyale et sur les frais
du procès, questions que la Chambre d'accusation n'a précisément pas eu
à examiner. Les points tranchés ou à trancher par ces deux organes sont
donc tout à fait différents; ils ne sont ni interdépendants ni étroitement
analogues. L'issue de la procédure d'appel apparaît aussi incertaine, et
non prédéterminée par le résultat de la procédure de renvoi. Le prononcé
rendu dans le cadre de cette procédure-ci ne se présente pas comme une
circonstance qui, d'un point de vue objectif, donne aux juges de la
Première Chambre pénale l'apparence de la prévention. A la différence
du juge en cause dans l'affaire Ben Yaacoub (rapport de la Commission
européenne des droits de l'homme du 7 mai 1985; Publications de la Cour
européenne des droits de l'homme, série A, vol. 127), ils ne statueront
pas sur le bien-fondé d'une accusation qu'ils ont eux-mêmes retenue à un
stade antérieur du procès. Ils trancheront certes un litige opposant les
mêmes parties, mais dont l'objet est différent. Cette situation n'est pas
contraire aux art. 58 al. 1 Cst. et 6 ch. 1 CEDH, de sorte que le plénum
de la Cour suprême a pu rejeter la demande de récusation présentée par
le recourant sans violer ces garanties constitutionnelles.