Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 113 V 198



113 V 198

32. Arrêt du 9 septembre 1987 dans la cause P. contre Caisse d'assurance du
personnel de la Ville de Genève et Tribunal administratif, Genève Regeste

    Art. 73 Abs. 1 BVG: Rechtspflege.

    - Dürfen Vorsorgeeinrichtungen des öffentlichen Rechts über die
Ansprüche ihrer Mitglieder Verfügungen erlassen? Frage i.c. offengelassen
(Erw. 2).

    - Ungeachtet der rechtlichen Natur der betroffenen Vorsorgeeinrichtung
(Einrichtung des öffentlichen oder des privaten Rechts) sind Streitigkeiten
im Sinne von Art. 73 Abs. 1 BVG durch die gleiche letzte kantonale Instanz
zu beurteilen (Erw. 3).

Sachverhalt

    A.- Georgette P., née en 1925, est entrée au service de la Ville de
Genève le 1er février 1962. A ce titre, elle a été affiliée à la Caisse
d'assurance du personnel de la Ville de Genève, des Services industriels
de Genève et du personnel communal transféré dans l'administration
cantonale (ci-après: la caisse), qui est une institution de prévoyance
de droit public inscrite (provisoirement) au registre de la prévoyance
professionnelle.

    Georgette P. ayant manifesté le désir de prendre sa retraite à l'âge
de 60 ans, la caisse lui a remis une "proposition de pension" par laquelle
elle l'informait que sa pension de retraite s'élèverait à 66 pour cent
du traitement assuré. L'assurée s'est opposée à cette proposition. Elle
s'estimait en droit d'obtenir une pension équivalant à 70 pour cent de
son gain assuré. Par décision du 8 mars 1985, le comité de gestion de la
caisse a rejeté la prétention de l'assurée.

    B.- Se conformant à l'indication des voies de droit figurant dans
cette décision, Georgette P. a porté le différend devant le Tribunal
administratif du canton de Genève, mais elle a été déboutée par cette
autorité, qui s'est ralliée pour l'essentiel aux motifs de la caisse
(jugement du 7 mai 1986).

    C.- Georgette P. interjette recours de droit administratif contre
ce jugement en concluant derechef au versement par la caisse d'une rente
équivalant à 70 pour cent de son traitement assuré.

    La caisse conclut principalement à l'irrecevabilité du recours et,
subsidiairement, à son rejet. Quant à l'Office fédéral des assurances
sociales (OFAS), il estime que le litige ressortissait à la juridiction
de la Cour de justice du canton de Genève, et non à celle du Tribunal
administratif. Aussi propose-t-il d'annuler le jugement entrepris et de
transmettre la cause à la Cour de justice.

    D.- Le juge délégué a invité les parties et le Tribunal administratif
à se déterminer sur le préavis de l'OFAS. La juridiction cantonale a versé
au dossier la correspondance échangée en avril et mai 1986 entre la Cour
de justice et la chancellerie d'Etat du canton de Genève sur la compétence
des juridictions genevoises en matière de prévoyance professionnelle.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- a) Selon l'art. 128 OJ, le Tribunal fédéral des assurances
connaît en dernière instance des recours de droit administratif contre des
décisions au sens des art. 97 et 98 let. b à h OJ, en matière d'assurances
sociales. Jusqu'au 31 décembre 1984, les litiges opposant une institution
de prévoyance professionnelle à un assuré échappaient à la compétence du
juge des assurances sociales et donc, en particulier, à celle du Tribunal
fédéral des assurances. Cette situation a toutefois été modifiée, de
la manière suivante, par l'entrée en vigueur de la loi fédérale sur la
prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (LPP):

    Selon l'art. 73 al. 1 LPP, chaque canton désigne un tribunal qui
connaît, en dernière instance cantonale, des contestations opposant
institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit. Le Conseil fédéral
a fixé l'entrée en vigueur de cette disposition au 1er janvier 1985
(art. 1er al. 1 de l'ordonnance sur la mise en vigueur et l'introduction
de la loi sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et
invalidité, en corrélation avec l'art. 98 al. 2 LPP). L'art. 73 al. 1
LPP s'applique, d'une part, aux institutions de prévoyance enregistrées
de droit privé ou de droit public - aussi bien en ce qui concerne les
prestations minimales obligatoires qu'en ce qui concerne les prestations
allant au-delà (art. 49 al. 2 LPP) - et, d'autre part, aux fondations de
prévoyance du personnel non enregistrées, dans le domaine des prestations
qui dépassent le minimum obligatoire (art. 89bis al. 6 CC).

    Les décisions des tribunaux cantonaux, désignés en vertu de l'art. 73
al. 1 LPP, peuvent être déférées au Tribunal fédéral des assurances par
la voie du recours de droit administratif (art. 73 al. 4 LPP).

    b) Dans le cas particulier, le litige oppose une institution de
prévoyance à un ayant droit. Dans la mesure où la prétention de la
recourante se fonde sur un cas d'assurance (ouverture du droit à une
pension de retraite) qui est survenu sous l'empire du nouveau droit
fédéral de la prévoyance professionnelle, elle relève des autorités
juridictionnelles mentionnées à l'art. 73 LPP (ATF 112 V 356),
contrairement à ce que soutient l'intimée à l'appui de sa conclusion
principale. A cet égard, il importe peu que certains faits invoqués par
la recourante (notamment le rachat d'années d'affiliation) se soient
produits avant l'entrée en vigueur de la LPP.

Erwägung 2

    2.- L'art. 97 du "Statut" de la caisse prévoit que les décisions
du comité de gestion peuvent faire l'objet, dans les trente jours,
d'un recours devant le Tribunal administratif. Cependant, le moyen
juridictionnel visé par l'art. 73 al. 1 LPP est une action (message du
Conseil fédéral, FF 1976 I 180; ATF 112 Ia 184), qui est définie comme
une demande adressée à un organe judiciaire et tendant à l'attribution de
droits ou de prestations, voire à la constatation de l'existence ou de
l'inexistence d'un droit (GRISEL, Traité de droit administratif, p. 940
et les arrêts cités). De fait, la LPP ne prévoit pas la possibilité pour
les institutions de prévoyance de rendre des décisions au sens propre du
terme. Il est dès lors douteux, comme le Tribunal fédéral l'a d'ailleurs
relevé dans l'ATF 112 Ia 180, déjà mentionné, que les institutions de
prévoyance de droit public aient conservé le pouvoir de statuer sur
les prétentions de leurs affiliés au moyen de telles décisions, cela
d'une manière contraignante et en application de dispositions de droit
fédéral, cantonal ou communal (cette possibilité étant de toute façon
exclue s'agissant d'institutions de droit privé). Si la question devait
être résolue par la négative, il s'ensuivrait que la décision du comité
de gestion de la caisse du 8 mars 1985 serait nulle en tant que telle et
qu'elle devrait être considérée comme une simple déclaration, non sujette
à recours dans un délai déterminé et qui ne pouvait s'imposer qu'en vertu
de la décision d'un tribunal (GRISEL, op.cit., p. 940; cf. également
SPIRA, Le contentieux des assurances sociales fédérales et la procédure
cantonale, in Recueil de jurisprudence neuchâteloise 1984, p. 15 note 3;
SCHWARZENBACH, Die Rechtspflege nach dem BVG, in SZS 27/1983, p. 183).

    La solution du présent litige n'exige toutefois pas que l'on examine
plus avant ce problème, du moment que la recourante a respecté le délai
statutaire de trente jours.

Erwägung 3

    3.- a) En prévision de l'entrée en vigueur de la LPP, le Grand
Conseil genevois a modifié l'art. 34 let. c de la loi cantonale sur
l'organisation judiciaire (LOJ; RS GE E 2 1) par une loi du 10 novembre
1983, entrée en vigueur le 1er janvier 1985. Selon la nouvelle version de
cette disposition (première phrase), il appartient à une chambre civile
de la Cour de justice, fonctionnant en qualité de tribunal des assurances,
de connaître comme juridiction cantonale unique:

    "Des contestations, relatives
   à la prévoyance professionnelle, nées entre institutions de prévoyance
   ou compagnies d'assurances privées soumises à surveillance, d'une
   part, et employeurs ou ayants droit, d'autre part (art. 331 à 331c
   CO; art. 73 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle,
   vieillesse, survivants et invalidité)."

    Le législateur genevois n'a toutefois pas supprimé l'art. 11 al. 1
let. b de la loi sur le Tribunal administratif et le Tribunal des conflits
du 29 mai 1970 (RS GE E 3,5 1), selon lequel la première de ces autorités
est compétente pour connaître des actions relatives à des prétentions
qui découlent "des régimes de retraite des fonctionnaires de l'Etat,
des communes et des autres corporations et établissements de droit
public". C'est sur la base de cette réglementation, en relation avec les
dispositions statutaires de la caisse, que le Tribunal administratif a
en l'espèce affirmé sa compétence.

    b) Au terme de l'échange de vues auxquelles elles ont procédé au
printemps 1986, la Cour de justice et la chancellerie d'Etat se sont
accordées à reconnaître que l'adjectif "privées" dont use l'art. 34 let. c
LOJ se rapporte aussi bien à l'expression "institutions de prévoyance"
qu'aux mots "compagnies d'assurances". Elles sont parvenues à la
conclusion que - nonobstant l'entrée en vigueur de la LPP - le Tribunal
administratif a conservé le pouvoir de statuer sur les litiges opposant un
affilié à une institution de droit public, la Cour de justice étant pour
sa part compétente lorsque sont en cause des institutions de droit privé.

    c) Cette interprétation, à laquelle s'est rallié le Tribunal
administratif selon une lettre adressée par cette autorité à l'exécutif
genevois, le 13 mai 1986, n'est toutefois pas conciliable avec l'art. 73
LPP. En effet, sous réserve de quelques exceptions (voir en particulier
les art. 50 al. 2, 51 al. 5 et 69 al. 2 LPP), l'intention du législateur
fédéral a été d'instaurer un régime identique pour les institutions de
droit privé et de droit public (à propos de ces exceptions, voir RIEMER,
Das Recht der beruflichen Vorsorge in der Schweiz, p. 85 s.). Ainsi,
au stade des délibérations parlementaires, il subsistait une divergence
entre les deux conseils sur l'opportunité de soumettre plus largement les
institutions de droit public à des normes spéciales, notamment en ce qui
concerne l'organisation, l'administration et le financement, divergence qui
a été finalement éliminée au profit d'une réglementation aussi uniforme
que possible (BO 1980 CE 289-293, 1981 CN 1099 ss, 1982 CE 20-21). Cette
volonté d'unification résulte également des modifications apportées au
code des obligations lors de l'entrée en vigueur de la LPP, puisque le
champ d'application des art. 331a à c CO a été étendu, avec effet au 1er
janvier 1985, aux rapports de travail de droit public de la Confédération,
des cantons et des communes (art. 342 al. 1 let. a CO, dans sa version
introduite par le ch. 2 de l'annexe à la LPP; ATF 113 V 124 consid.
3b). Logiquement, le législateur a donc imposé aux parties de porter les
litiges visés par l'art. 73 al. 1 LPP devant un même tribunal cantonal,
quelle que soit la forme juridique de l'institution de prévoyance concernée
(RIEMER, op.cit., p. 130 ss; SCHWARZENBACH, loc. cit., p. 175; PFITZMANN,
Die öffentlich-rechtlichen Pensionskassen im BVG-Obligatorium, in SZS
29, 1985, p. 234; message du Conseil fédéral, FF 1976 I 179 ss; voir
également, a contrario, RJAM 1980 No 422 p. 200, relatif à l'art. 30bis
LAMA); c'est là une règle de compétence fonctionnelle à laquelle il n'est
pas possible de déroger (RIEMER, op. cit., p. 131; SPIRA, loc.cit., p. 17).

    Il s'ensuit que l'art. 73 al. 1 LPP exclut la coexistence de
voies de droit parallèles. Cela ne signifie pas qu'il s'oppose à un
échelonnement de la procédure cantonale en deux instances, dont l'une
serait hiérarchiquement subordonnée à l'autre (cf. RIEMER, op.cit.,
p. 130). Mais ce n'est pas la question qui se pose en l'espèce car,
sous l'angle de la procédure genevoise, la Cour de justice et le Tribunal
administratif sont des juridictions de même rang.

    d) Cela étant, il ressort clairement de l'art. 34 let. c LOJ que le
législateur genevois a désigné la Cour de justice pour trancher - comme
tribunal cantonal unique - les contestations mentionnées à l'art. 73 al. 1
LPP, ce qui s'explique vraisemblablement par le fait que cette autorité
judiciaire exerçait déjà d'autres attributions en matière d'assurance
sociale (assurance-maladie, assurance-accidents obligatoire et assurance
militaire; art. 34 let. a et b LOJ). Le Grand Conseil aurait donc dû,
par la même occasion, abroger ou modifier l'art. 11 al. 1 let. b de la
loi sur le Tribunal administratif et le Tribunal des conflits. Selon
toute vraisemblance, cette omission procède d'une inadvertance, car
il n'a jamais été question, lors des travaux préparatoires de la loi
du 10 novembre 1983, de permettre la coexistence de deux voies de
droit. Dans son exposé des motifs, le Conseil d'Etat a au contraire
insisté sur la nécessité d'adapter la réglementation cantonale aux
exigences de l'art. 73 LPP, tout en indiquant que la Cour de justice
connaîtrait désormais "des contestations prévues dans le titre premier
de la cinquième partie, intitulée 'Contentieux', de la loi fédérale sur
la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité"
(Mémorial du Grand Conseil 1983 III 4024).

    Dans ces conditions, le Tribunal administratif n'aurait pas dû
entrer en matière sur le litige, ce qui justifie l'annulation du jugement
entrepris et la transmission de l'affaire à la Cour de justice. Le fait
que les parties ont reconnu - implicitement tout au moins - la compétence
du Tribunal administratif n'y change rien. En effet, le Tribunal fédéral
des assurances examine d'office les conditions formelles de validité et
de régularité de la procédure, soit en particulier le point de savoir si
c'est à juste titre que la juridiction cantonale est entrée en matière sur
le recours ou, comme en l'espèce, sur l'action (ATF 112 V 83 consid. 1,
111 V 346 consid. 1a). En outre, il n'appartient pas à la Cour de céans
de rendre un jugement au fond, en vertu du principe de l'économie de
la procédure: l'incompétence ratione materiae est un vice relativement
grave, auquel il ne serait en l'occurrence possible de remédier que si
l'on pouvait considérer la transmission du cas à la Cour de justice comme
une formalité superflue, parce que cette autorité se serait déjà exprimée,
notamment dans une jurisprudence bien établie (cf. ATF 102 Ib 235, 97 I
290). Or, on est tout à fait en dehors de cette hypothèse en l'espèce.

Entscheid:

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

    Le recours est admis en ce sens que le jugement du Tribunal
administratif du canton de Genève du 7 mai 1986 est annulé, la cause
étant transmise à la Cour de justice de ce même canton pour jugement au
sens des motifs.