Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 105 II 135



05 II 135 23. Arrêt de la Ire Cour civile du 9 mai 1979 dans la cause
BIS, Services et travail temporaire S.A. contre Département de l'économie
publique du canton de Genève (recours de droit administratif) Regeste

    Pariser Verbandsübereinkunft zum Schutze des gewerblichen Eigentums;
Bundesgesetz vom 15. Dezember 1961 zum Schutz von Namen und Zeichen
der Organisation der Vereinten Nationen und anderer zwischenstaatlicher
Organisationen.

    1. Das Bundesgesetz gewährt den Namen, Sigeln und Zeichen der
zwischenstaatlichen Organisationen einen weitergehenden Schutz als Art. 6
ter der Pariser Verbandsübereinkunft; letztere Bestimmung kann nicht
zugunsten einer einschränkenden Anwendung des Bundesgesetzes angerufen
werden (E. 2).

    2. Der Gebrauch des Namens oder des Sigels einer zwischenstaatlichen
Organisation in einer Firma ist selbst dann verboten, wenn keine
Verwechslungsgefahr besteht (E. 2c).

    3. Auf Art. 5 des Bundesgesetzes darf sich nur berufen, wer selber den
Namen, das Sigel oder das Zeichen einer zwischenstaatlichen Organisation
benützt; eine Tochtergesellschaft kann nicht die Benützung durch die
Muttergesellschaft geltend machen (E. 3a).

    4. Nur die in der Schweiz erfolgte Benützung von Namen, Sigeln und
Zeichen einer zwischenstaatlichen Organisation schafft wohlerworbene
Rechte im Sinne von Art. 5 des Bundesgesetzes (Art. 3b).

    5. Löschung einer Firma, die entgegen den Bestimmungen des
Bundesgesetzes gebildet und eingetragen wurde (E. 4).

Sachverhalt

    A.- Les noms, noms abrégés et sigles de la Banque des Règlements
Internationaux ont été publiés dans la Feuille fédérale du 9 septembre 1965
(FF 1965 II, p. 1075) en application de la loi fédérale du 15 décembre
1961 concernant la protection des noms et emblèmes de l'Organisation
des Nations Unies et d'autres organisations intergouvernementales
(R.S. 232.23, ci-après abrégée en LPNE). Le sigle BIS, également publié,
est l'abréviation du nom anglais de la banque: Bank for International
Settlements.

    La société "BIS, Services et Travail Temporaire S.A.", a été constituée
le 25 mars 1977 à Genève. Elle y a été inscrite le 30 mars 1977 sur
le registre du commerce. Son but est la "mise à disposition... de tout
personnel, main-d'oeuvre et services". Elle est une filiale de la société
"BIS, Société internationale de services" fondée à Paris en 1954.

    Le 7 septembre 1977, sur requête de la Banque des Règlements
Internationaux, le préposé au registre du commerce de Genève a sommé
la société "BIS, Services et Travail Temporaire S.A.", de demander la
modification de sa raison de commerce, à savoir la radiation du sigle
BIS. La société a fait opposition, soutenant que l'emploi du sigle BIS
dans son nom commercial ne pouvait créer de confusion avec la Banque des
Règlements Internationaux.

    Le préposé au registre du commerce a transmis le dossier au Département
cantonal de l'économie publique, autorité de surveillance. Le 30 novembre
1978, le Département a ordonné au préposé de radier le sigle BIS sur le
feuillet ouvert pour la société "BIS, Services et Travail Temporaire S.A.".

    La société "BIS, Services et Travail Temporaire S.A." a formé un
recours de droit administratif tendant à l'annulation de la décision.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- L'art. 3 al. 1 LPNE interdit l'utilisation des noms, sigles et
emblèmes désignant des organisations intergouvernementales auxquelles
appartiennent un ou plusieurs pays de l'Union de Paris pour la protection
de la propriété industrielle. L'interdiction s'étend aux noms et sigles
en anglais et dans les langues officielles de la Suisse. L'inscription
au registre du commerce de raisons individuelles ou sociales formées en
violation de cette disposition est interdite (art. 6 al. 1 LPNE).

    La Banque des Règlements Internationaux est une organisation
intergouvernementale à laquelle appartiennent plusieurs pays membres de
l'Union de Paris, dont la Suisse. En exécution de l'art. 4 LPNE, son sigle
anglais "BIS" a été publié dans la Feuille fédérale du 9 septembre 1965
(FF 1965 II p. 1075).

Erwägung 2

    2.- La recourante soutient que les art. 3 et 6 LPNE doivent être
interprétés à la lumière des dispositions de la Convention de Paris pour
la protection de la propriété industrielle, du 20 mars 1883, revisée à
Lisbonne le 31 octobre 1958 et à Stockholm le 14 juillet 1967 (RO 1970,
p. 620). Selon l'art. 6ter al. 1 litt. b de la Convention de Paris, les
Etats contractants s'obligent à refuser ou invalider l'enregistrement et
à interdire l'utilisation, comme marques de fabrique ou de commerce, des
noms, sigles et emblèmes désignant des organisations internationales
intergouvernementales dont un ou plusieurs pays de l'Union sont
membres. Toutefois aucun pays de l'Union n'est tenu d'appliquer cette
disposition au détriment de titulaires de droits acquis de bonne foi
avant l'entrée en vigueur de la Convention dans ce pays; les pays de
l'Union ne sont pas non plus tenus d'appliquer cette disposition lorsque
l'enregistrement et l'utilisation de la marque n'entraînent aucun risque de
confusion entre l'utilisateur et l'organisation en cause, ni ne suggèrent
l'existence d'un lien entre eux (art. 6ter al. 1 litt. c). De l'avis de
la recourante, l'art. 45 ORC permet, dans des conditions similaires,
l'emploi de désignations nationales dans une raison de commerce. Les
art. 3 et 6 LPNE ne sauraient, soutient-elle, assurer aux noms, sigles
et emblèmes des organisations intergouvernementales une protection que
la Convention de Paris ne leur garantit pas et qui, au surplus, n'est
pas accordée aux désignations nationales.

    a) Le juge et l'autorité administrative sont liés par le texte clair
d'une disposition légale s'il n'est pas inconciliable avec le sens réel de
la loi (ATF 101 Ia 207). La recourante n'a avancé aucun argument décisif en
faveur d'une application restrictive des art. 3 et 6 LPNE. Au contraire,
le texte sans équivoque de ces deux articles exprime fidèlement la pensée
du législateur.

    b) En adoptant la LPNE, le législateur fédéral n'entendait pas
uniquement permettre la ratification de l'Acte de Lisbonne (art. 6 ter,
ancien art. 17 et actuel art. 25 de la Convention de Paris). Il voulait
également faire droit à une requête présentée par l'office européen
de l'Organisation des Nations Unies et par d'autres organisations
intergouvernementales (FF 1961 I 1334 ss.).

    En 1957, le directeur de l'office européen avait demandé que le
Gouvernement suisse voulût bien étudier les mesures à prendre pour la
protection du nom, du sigle et de l'emblème de l'Organisation des Nations
Unies. Il souhaitait une protection semblable à celle que la loi fédérale
du 25 mars 1954 accordait à l'Organisation mondiale de la santé (RO 1954
p. 1323 ss.).

    L'art. 3 LPNE ne fait que généraliser la protection que les art. 1 et
2 de la loi du 25 mars 1954 assuraient au nom, au sigle et à l'emblème
de l'Organisation mondiale de la santé. L'art. 6 LPNE est identique à
l'art. 3 de la loi de 1954. Enfin l'art. 5 LPNE est repris de l'art. 4
de la loi précitée, qui réservait les droits acquis des utilisateurs de
bonne foi s'il n'en résultait aucun préjudice pour l'Organisation mondiale
de la santé.

    La loi du 25 mars 1954 sur laquelle la LPNE a été calquée, était
antérieure de quatre ans à l'Acte de Lisbonne. On ne peut donc exclure a
priori que le législateur fédéral ait voulu accorder aux noms et sigles
des organisations intergouvernementales une protection plus étendue que
celle garantie par la Convention de Paris.

    c) L'art. 6ter al. 1 litt. b de la Convention de Paris définit
la protection minimum que les Etats de l'Union doivent accorder aux
noms et sigles des organisations intergouvernementales. Les parties
contractantes peuvent refuser cette protection dans certains cas
(art. 6ter al. 1 litt. c), mais rien ne les oblige à user de cette
faculté (G.H.C. BODENHAUSEN, Guide d'application de la Convention de
Paris, p. 101). Un examen comparé de la LPNE et de la Convention de Paris
montre que le législateur fédéral a consciemment accordé aux organisations
internationales une protection plus étendue que celle de l'art. 6ter de
la Convention.

    La LPNE interdit toute imitation des emblèmes d'une organisation
internationale (art. 1 al. 2, 2 al. 2, 3 al. 2), alors que la Convention
de Paris en prohibe uniquement l'imitation au point de vue héraldique
(art. 6 ter al. 1 litt. a; FF 1961 I p. 1336 s.).

    L'art. 6ter de la Convention de Paris ne règle que l'enregistrement
et l'utilisation de marques de fabrique ou de commerce. Il ne s'applique
pas à l'utilisation des noms, sigles ou emblèmes protégés comme marques
de service (BODENHAUSEN, op. cit., p. 99) ou comme éléments du nom
commercial. L'art. 6 LPNE, au contraire, prohibe également l'enregistrement
de raisons de commerce formées en violation des art. 1 à 3.

    La Convention de Paris permet aux Etats de l'Union de réserver les
droits de ceux qui, de bonne foi, auront fait usage, avant l'entrée en
vigueur de la Convention, des noms, sigles ou emblèmes d'une organisation
internationale (art. 6ter al. 1 litt. c). L'art. 5 LPNE ne réserve de
tels droits que s'il n'en résulte aucun préjudice pour l'organisation
intergouvernementale en cause.

    On ne peut donc invoquer l'Acte de Lisbonne pour limiter la protection
que le texte clair des art. 3, 5 et 6 LPNE assure aux noms, aux sigles et
aux emblèmes des organisations intergouvernementales. Aucune disposition de
la loi n'autorise l'emploi du sigle d'une organisation intergouvernementale
lorsque tout risque de confusion est exclu. En conséquence, un tel emploi
est interdit même dans cette hypothèse.

    d) L'art. 45 ORC règle exclusivement l'utilisation de désignations
nationales dans une raison de commerce. Il ne s'applique donc pas en
l'espèce. Contrairement à ce que soutient la recourante, il n'est pas
inconcevable que la loi accorde aux noms et sigles des organisations
internationales une protection plus large qu'aux désignations nationales.

Erwägung 3

    3.- La recourante fait valoir que la société "BIS, Société
internationale de services", utilise son nom commercial dans divers pays
d'Europe depuis sa création à Paris en 1954, alors que le sigle BIS de
la Banque des Règlements Internationaux n'a été publié dans la Feuille
fédérale qu'en 1965. Elle invoque l'art. 5 LPNE, lequel dispose:

    "Celui qui, avant la publication prévue à l'art. 4, aura commencé à
   faire, de bonne foi, usage des noms, sigles, armoiries, drapeaux et
   autres emblèmes protégés, pourra continuer à en faire le même usage s'il
   n'en résulte aucun préjudice pour l'organisation intergouvernementale
   intéressée... "

    a) Seul peut être mis au bénéfice de cet article celui qui a fait
personnellement usage du nom, du sigle ou de l'emblème d'une organisation
intergouvernementale. Un commerçant ne saurait prétendre utiliser le
sigle d'une organisation intergouvernementale en se prévalant de l'usage
qu'un tiers en aurait fait de bonne foi avant la publication dans la
Feuille fédérale.

    Quels que soient les liens économiques unissant une filiale à sa
société mère, la société "BIS, Services et Travail Temporaire S.A.",
à Genève, est, de par la volonté de ses fondateurs, une personne morale
distincte de "BIS, Société internationale de services", à Paris. Celle-ci
est juridiquement un tiers pour celle-là. La recourante ne saurait donc
se prévaloir de l'usage du sigle BIS par la société française.

    b) Les dispositions de la LPNE ont un caractère essentiellement pénal
(FF 1961 I, p. 1337). Elles sont l'expression en droit interne d'un
engagement implicitement contracté par la Suisse lorsqu'elle accueille
une organisation internationale, celui de "prendre toutes les mesures
nécessaires au bon fonctionnement de l'institution sur son territoire"
(FF 1961 I, p. 1335). De la nature et du but de ces normes découle que
leur champ d'application est limité au territoire sur lequel s'étend la
souveraineté suisse. En l'absence de disposition contraire, la LPNE ne
régit que des faits qui se produisent en Suisse et son art. 5 ne s'applique
qu'à l'usage fait en Suisse des noms, sigles et emblèmes d'organisations
internationales. L'usage fait à l'étranger ne fonde pas de droits acquis au
sens de l'art. 5 LPNE (dans le même sens, pour l'interprétation de l'art. 6
ter al. 1 litt. c de la Convention de Paris, BODENHAUSEN, op. cit.,
p. 101). Or, la recourante ne prétend pas qu'elle-même ou sa société mère
ait fait usage du sigle BIS en Suisse avant le 9 septembre 1965.

Erwägung 4

    4.- La recourante fait valoir qu'une modification de sa raison sociale
lui causerait un préjudice considérable, sans rapport avec l'intérêt de la
Banque des Règlements Internationaux à l'usage exclusif du sigle BIS. Les
exigences de la sécurité juridique s'opposeraient à la modification d'un
acte administratif formateur de droits subjectifs.

    a) Il est conforme à la nature du droit public et à l'intérêt public
qu'un acte administratif contraire à la loi puisse être révoqué. La
sécurité du droit peut cependant exiger qu'une décision administrative
en force ne soit pas remise en question. En l'absence de norme réglant
la révocation d'un acte administratif illégal, la solution est dictée par
la mise en balance de l'intérêt public à l'application du droit objectif
et des exigences de la sécurité du droit. Ces dernières l'emportent
notamment lorsque l'acte administratif a fondé des droits subjectifs, ou
lorsque la décision a été prise à la suite d'une procédure d'opposition et
d'enquête permettant d'examiner l'intérêt public sous tous ses aspects et
de le comparer aux intérêts privés auxquels il se heurte, enfin lorsque
le particulier a déjà fait usage d'un droit qui lui avait été conféré
(ATF 100 Ib 302; 99 Ib 340 et les arrêts cités).

    b) Si l'acte administratif conférant au particulier un droit dont
il a fait usage ne peut généralement être révoqué, ce principe ne vaut
que pour les décisions autorisant un acte unique, et non pour celles qui
permettent à l'administré d'adopter un comportement durable (ATF 100 Ib
303 consid. 4).

    L'inscription d'une raison individuelle ou sociale sur le registre
du commerce fonde certes un droit subjectif. L'inscription opérée, le
commerçant a l'usage exclusif de son nom commercial (art. 956 CO). Mais
son droit subjectif est opposable aux tiers, et non à l'Etat (ATF 82 I
43 ss.). L'inscription ne confère pas au commerçant le droit d'utiliser
une raison individuelle ou sociale fausse, fallacieuse ou contraire à
l'intérêt public.

    Cela découle à l'évidence des art. 944 al. 1 CO, 38 et 61 ORC qui
permettent la modification ou la radiation d'office de raisons de commerce
non conformes aux prescriptions.

    La procédure d'inscription, enfin, ne permet pas au préposé d'examiner,
sous tous ses aspects, la conformité de la raison de commerce avec
l'intérêt public. Son pouvoir d'examen est limité aux renseignements
unilatéraux et lacuneux dont il dispose (PATRY, in Schweizerisches
Privatrecht, tome VIII/1, p. 128).

    c) Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, l'intérêt
public à l'élimination d'une raison de commerce qui ne répond pas aux
exigences légales l'emporte sur l'intérêt privé du titulaire (ATF 100 Ib
36; 99 Ib 340; 82 I 42 ss.; 77 I 163). L'intérêt public à la protection des
noms, sigles et emblèmes des organisations internationales a un caractère
prépondérant. Il l'emporte sur l'intérêt privé de la recourante, d'autant
que la Banque des Règlements Internationaux est intervenue dans les plus
brefs délais pour obtenir la radiation de l'inscription irrégulière.

Entscheid:

             Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Rejette le recours.