Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 104 IV 222



104 IV 222

51. Arrêt de la Cour de cassation pénale du 15 décembre 1978 dans la
cause A. contre Ministère public du canton de Vaud Regeste

    Art. 55 Abs. 1 StGB, Landesverweisung.

    Die Landesverweisung schützt einerseits die öffentliche Sicherheit
und ist anderseits Strafe, die gemäss Art. 63 StGB zu bemessen ist. Auf
Nichtigkeitsbeschwerde greift der Kassationshof nur ein, wenn der kantonale
Richter sein Ermessen überschritten hat (Erw. 1b).

    Während der zwiefache Charakter der Landesverweisung bei ihrer
Anordnung und Bemessung zu berücksichtigen ist, gilt für den Entscheid
über den bedingten Vollzug einzig die Regel von Art. 41 Ziff. 1 Abs. 1 StGB
(Erw. 2c).

Sachverhalt

    A.- A., de nationalité espagnole, a commis des attentats à la pudeur
des enfants, au sens de l'art. 191 ch. 1 CP sur un garçon de 8 ans,
et au sens de l'art. 191 ch. 1 et 2 CP sur un garçon de 13 ans.

    Il a été condamné, de ce chef, par le Tribunal correctionnel du
district de Cossonay le 17 mai 1978, à 18 mois d'emprisonnement, avec
sursis pendant 5 ans. Il a en outre été condamné à 10 ans d'expulsion
du territoire suisse, sans sursis. Un sursis à une peine de 10 jours
d'arrêts, prononcée en 1976, pour ivresse au guidon, a été révoqué.

    Né en 1934, troisième de cinq enfants, A. a été élevé dans le Maroc
espagnol. Il a dû abandonner l'école à l'âge de 13 ans pour gagner
sa vie. En janvier 1962 et sans avoir fait l'objet d'aucune remarque
défavorable de la part des autorités de police, il a quitté le Maroc pour
se rendre en Suisse. Il a d'abord travaillé durant sept ans dans la région
lausannoise, puis à partir d'août 1969 il a trouvé un emploi aux Câbleries
de Cossonay, où il donne entière satisfaction. Célibataire, il occupe avec
un collègue de travail un petit appartement à Penthalaz. Sur son salaire de
1800 fr. environ, il verse chaque mois 570 fr. à sa mère et à sa soeur qui
vivent en Espagne. Mis à part le fait qu'il s'enivre régulièrement et qu'il
a été condamné en 1976 à 10 jours d'arrêts avec sursis, pour ivresse au
guidon, A. n'a pas occupé défavorablement l'autorité de police en Suisse.

    B.- A. a recouru contre la peine d'expulsion prononcée et contre le
refus du sursis à cette peine. La Cour de cassation pénale du Tribunal
cantonal du canton de Vaud a rejeté son recours le 26 juillet 1978.

    C.- A. se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral. Il conclut à la
suppression de la peine d'expulsion, subsidiairement, à ce qu'elle soit
assortie du sursis.

    Se référant à l'arrêt attaqué, le Ministère public a renoncé à se
déterminer sur le pourvoi.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- a) Le recourant, invoquant ses relations personnelles avec la
Suisse, où il vit depuis longtemps, s'en prend en premier lieu au principe
de la peine d'expulsion qui a été prononcée contre lui. Il fait valoir que
la cour cantonale, en maintenant l'expulsion, n'a pas tenu suffisamment
compte de ces circonstances personnelles.

    b) L'art. 55 al. 1 CP laisse au juge le pouvoir d'apprécier si un
étranger condamné à la réclusion ou à l'emprisonnement doit être expulsé
de Suisse. L'expulsion sert d'une part à la protection de la sécurité
publique et d'autre part elle constitue une véritable peine. Cette qualité
de peine accessoire, qui lui est conférée par la loi, exige qu'elle soit
fixée en application de l'art. 63 CP, c'est-à-dire d'après la culpabilité
du délinquant, en tenant compte des mobiles, des antécédents et de la
situation personnelle de celui-ci (ATF 94 IV 103 consid. 2). S'agissant
dès lors d'une question de mesure de la peine, la Cour de cassation du
Tribunal fédéral n'intervient dans cette question que si le juge du fait
outrepasse son pouvoir d'appréciation en prenant une décision manifestement
insoutenable, arbitrairement sévère ou clémente (ATF 78 IV 72). C'est au
juge aussi qu'il incombe, dans chaque cas particulier, de faire la part
du but répressif et du but de sécurité publique que remplit l'expulsion
(ATF 94 IV 104).

    Il convient encore de préciser que, tant au regard de la jurisprudence
que de certains auteurs, le juge doit faire montre de retenue avant de
prononcer l'expulsion d'un étranger qui vit depuis longtemps en Suisse,
qui y est enraciné, qui n'a plus guère de rapports avec l'étranger et
qui serait dès lors lourdement frappé par une expulsion (ATF 74 IV 5;
SCHWANDER, Strafgesetzbuch, p. 210, n. 396; SCHULTZ, Allg. Teil, II,
3e éd., p. 115).

    Même au regard de cette dernière règle, on ne saurait véritablement
dire que, sur le principe du prononcé d'une peine d'expulsion, l'autorité
cantonale a excédé son pouvoir d'appréciation.

    Certes, au vu des liens qui unissent le recourant à la Suisse, la
peine apparaît-elle comme lourde; mais, avant de la prononcer, l'autorité
cantonale n'a nullement perdu de vue la situation personnelle du condamné
et elle en a fait amplement état dans sa décision. Elle a en outre tenu
également compte de la gravité du cas et du fait que les actes commis par
le recourant étaient de nature à perturber gravement l'avenir des victimes,
ce dernier aspect justifiant à ses yeux l'expulsion en tant que mesure de
sûreté. De telles considérations ne sont ni excessives ni insoutenables,
si bien que la peine d'expulsion, ajoutée à la peine principale de 18
mois d'emprisonnement, ne peut être qualifiée d'exagérément sévère au vu
de l'ensemble des circonstances.

    Le pourvoi doit donc être rejeté sur ce premier point.

Erwägung 2

    2.- a) Le recourant fait valoir en second lieu que le refus du sursis
en ce qui concerne la mesure d'expulsion viole les exigences de l'art. 41
ch. 1 CP, fondées sur les perspectives d'amendement du condamné, et qu'il
est en contradiction avec les motifs qui ont entraîné l'octroi du sursis
pour la peine principale.

    b) On relève d'emblée que l'art. 41 ch. 1 al. 4 CP autorise
expressément le juge, en cas de concours de peines, à limiter le sursis
à certaines d'entre elles. Selon le cas, en effet, le sursis peut ne se
justifier que pour la peine principale et non pour la peine accessoire,
ou vice versa (ATF 95 IV 15 consid. 3), notamment lorsque les deux
genres de peine diffèrent quant à leur but et quant à leurs modalités
d'exécution. Ainsi le juge peut-il accorder le sursis pour la peine
principale, mais le refuser pour la peine accessoire, si le pronostic
est défavorable dans le domaine particulier de la peine accessoire, alors
qu'il est au contraire favorable en ce qui concerne la manière dont par
ailleurs vit le condamné (ATF 86 IV 215 consid. 6). Ainsi un traitement
différencié se justifie-t-il tout particulièrement lorsque le pronostic
favorable dépend de l'exécution de la peine accessoire, soit - dans le
cas de l'expulsion - du fait que le condamné doive quitter la Suisse.

    Du point de vue subjectif, l'octroi du sursis dépend uniquement
des perspectives d'amendement, aux termes de l'art. 41 ch. 1 al. 1 CP;
il ne peut dès lors être refusé que si les antécédents et le caractère
du condamné voire les circonstances particulières du cas ne permettent
pas de prévoir que cette mesure, appliquée à la peine accessoire, le
détournerait de commettre de nouvelles infractions (ATF 86 IV 216). Savoir
si un tel pronostic peut ou non être posé relève de l'appréciation. La
Cour de cassation pénale saisie d'un pourvoi en nullité ne saurait donc
intervenir que si l'autorité cantonale a excédé son pouvoir d'appréciation,
c'est-à-dire lorsqu'elle a fondé son pronostic sur des considérations
manifestement insoutenables (ATF 100 IV 194).

    c) En l'espèce, la cour cantonale, considérant que l'expulsion avait
à la fois le caractère d'une peine et celle d'une mesure de sûreté,
a examiné d'une part si les conditions du sursis étaient réunies pour
l'expulsion vue sous son aspect répressif et, d'autre part, si la sécurité
publique exigeait que le recourant soit mis par l'éloignement - vu comme
une mesure de sûreté - dans l'incapacité physique de récidiver. Admettant
sans autre que l'octroi du sursis à la peine tant principale qu'accessoire
détournerait le recourant de la délinquance, elle a réfuté même certains
arguments des premiers juges, en considérant, à juste titre, que la
réinsertion sociale paraissait devoir se faire beaucoup plus aisément à
l'endroit où le recourant travaille régulièrement et à la satisfaction
de ses employeurs depuis 16 ans que dans un pays où il n'a jamais vécu
et avec lequel il n'a que des liens lointains. En revanche, se référant
à l'expertise à laquelle avait été soumis le recourant, elle a estimé
que même si l'on pouvait espérer que le condamné serait détourné par
le sursis de récidiver, il continuerait néanmoins à présenter pour la
sécurité publique un danger potentiel considérable qu'une simple menace
d'expulsion ne suffirait pas à écarter, vu les conclusions de l'expert
et la nature perverse de l'accusé (élément constant).

    Cette manière de voir et le critère qu'elle implique doivent être
taxés d'insoutenables. En effet, si l'on doit bien tenir compte du
double caractère de l'expulsion - mesure de sécurité et peine - avant
de décider de son application in concreto, cette distinction n'est plus
de mise quand il s'agit d'octroyer le sursis. A ce stade du jugement,
la seule règle applicable est celle de l'art. 41 ch. 1 al. 1 CP. Il ne
reste alors qu'à déterminer si les antécédents, le caractère du condamné
ou les circonstances particulières du cas font prévoir que cette mesure,
appliquée à la peine accessoire, détournera le condamné de commettre
d'autres infractions. Ce pronostic, duquel dépend l'exécution ou la
suspension de la peine accessoire, porte exclusivement sur le risque de
commission de nouvelles infractions par le condamné, tout comme dans le
cas de l'examen du sursis à la peine principale, sans quoi il n'est pas
possible d'éviter contradictions insoutenables ou insurmontables, ainsi
que le démontre amplement l'arrêt attaqué. Il est difficile d'admettre en
effet que le recourant puisse présenter encore un danger pour la sécurité
publique, même s'il s'abstient de recommencer. Cela revient à dire que
si le juge doit se préoccuper de la sécurité publique lorsqu'il prononce
la peine ou la mesure qui sanctionnera l'infraction ou encore lorsqu'il
impose les règles de conduite prévues à l'art. 41 ch. 2 CP, il ne doit
pas la prendre en considération autrement que par le biais du risque de
récidive lorsqu'il décide du principe même du sursis en application de
l'art.41 ch. 1 al. 1 CP.

    En examinant le problème de l'octroi du sursis à la peine principale,
l'autorité cantonale a tranché favorablement la question de savoir si le
recourant aurait une bonne conduite à l'avenir. Elle a également estimé
que ce pronostic favorable devait être retenu également dans le domaine
de la peine accessoire, l'octroi du sursis étant selon elle de nature à
amender le condamné. Elle a encore précisé que la réinsertion sociale
paraissait devoir se faire beaucoup plus aisément à l'endroit où le
recourant travaille à la satisfaction de ses employeurs depuis 16 ans
(c'est-à-dire en Suisse) que dans son pays d'origine, où il n'a jamais
vécu et avec lequel il n'a que des liens lointains. Cette manière de voir
est irréprochable au regard de l'art. 41 ch. 1 al. 1 CP. Il convenait
de s'y tenir et d'accorder le sursis aux deux peines tant principale
que secondaire.

    Le pourvoi doit dès lors être admis sur ce point et la cause renvoyée
à la cour cantonale pour qu'elle assortisse la peine d'expulsion du sursis.