Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 104 II 337



104 II 337

58. Arrêt de la IIe Cour civile du 16 novembre 1978 dans la cause
S. contre S. Regeste

    Art. 485 Abs. 1, Art. 560 Abs. 2 ZGB. Schuldner der persönlichen
Verpflichtung, die durch die vermachte Sache gesichert ist, ist der Erbe,
nicht der Vermächtnisnehmer: Bezahlt der Vermächtnisnehmer die Schuld,
so gehen die Rechte des Gläubigers auf ihn über und er kann auf den Erben
Rückgriff nehmen (Bestätigung der Rechtsprechung).

Sachverhalt

    A.- a) Par testament public, reçu le 24 avril 1967 par le notaire X.,
à Lausanne, Marius S. a institué unique héritier Antoine S. Marius S. est
décédé le 1er février 1975.

    Antoine S. a accepté la succession. b) Le testament contient, sous
ch. V, la clause suivante:

    "Je lègue ma villa de la route du Pavement 36, à Lausanne, à mon
   neveu Jean-Pierre S."
Aucune autre disposition de l'acte ne complète et ne précise cette clause.

    c) La villa léguée était grevée d'une hypothèque en faveur du Crédit
foncier vaudois pour un montant primitif de 50'000 fr., selon acte notarié
du 13 juillet 1964. Au 13 janvier 1976, la dette avait été réduite à
43'171 fr. 20, montant échu.
   d) Le legs a été délivré le 28 décembre 1977.

    Jean-Pierre S. a payé la dette hypothécaire par 48'689 fr. 75 au
total, en capital et intérêts au 10 mars 1978. Le Crédit foncier vaudois
l'a subrogé pour ce montant "dans tous les droits du créancier contre
l'héritier".

    B.- Jean-Pierre S. et Antoine S. sont en litige au sujet de la dette
envers le Crédit foncier vaudois, garantie par la villa léguée. Selon
Jean-Pierre S., c'est Antoine S. qui, en sa qualité d'héritier, était
débiteur: ayant dégrevé l'immeuble dont il est propriétaire, le légataire
est fondé, en vertu de l'art. 827 CC, à exiger le remboursement de
ce qu'il a payé pour éteindre la dette hypothécaire. Antoine S. lui,
soutient qu'une saine application de l'art. 485 CC conduit à considérer
que le légataire reprend la dette hypothécaire.

    Le 23 mai 1978, les parties sont convenues de soumettre le litige au
Tribunal fédéral, jugeant en instance unique.

    C.- Par demande du 29 mai 1978, Jean-Pierre S. a ouvert action contre
Antoine S. Il réclame paiement des sommes suivantes:

    - 1'588 fr. 75, plus intérêts à 5% dès le 30 décembre 1977;

    - 5'494 fr., plus intérêts à 5% dès le 8 février 1978;

    - 41'637 fr., plus intérêts à 5% dès le 10 mars 1978.

    Antoine S. a conclu au rejet de la demande.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Selon l'arrêt Gottrau c. Schaller, du 9 avril 1915, du fait que,
en vertu de l'art. 485 CC, le légataire n'est pas en droit d'exiger
la délivrance du legs libéré des charges réelles qui le grèvent, il ne
s'ensuit pas qu'il devienne débiteur de l'obligation personnelle garantie
par la chose léguée. Ce point est réglé par l'art. 560 al. 2 CC, aux termes
duquel les héritiers sont tenus personnellement des dettes du défunt. Ce
n'est donc pas le légataire, mais l'héritier qui devient débiteur: la
chose léguée est grevée d'une dette due par un tiers, l'héritier, et le
légataire a la position du tiers propriétaire d'une chose qui constitue
le gage immobilier garantissant la dette de l'héritier. Dès lors, si le
légataire paie le créancier hypothécaire, il est subrogé aux droits de
ce dernier (art. 110 ch. 1 CO, 827 CC) (ATF 45 II 158/159 consid. 2).

Erwägung 2

    2.- Le défendeur soutient que cette jurisprudence, vieille de plus de
soixante ans, doit être réexaminée. Selon lui, l'art. 485 al. 1 CC devrait
être interprété comme une règle spéciale dérogeant à l'art. 560. A cela
s'ajoute, dit-il, un facteur dû à l'évolution des moeurs: la généralisation
des cédules hypothécaires au porteur a contribué à créer, dans l'esprit
du public, la confusion de la dette et de la garantie; dès lors, dans le
silence du testament, on doit présumer que le de cujus a entendu que les
dettes hypothécaires seraient reprises par le légataire.

    Cette argumentation ne saurait être accueillie.

    a) Dire que l'art. 485 al. 1 CC devrait être interprété comme une
règle spéciale dérogeant à l'art. 560 CC, c'est confondre deux ordres
des questions que l'arrêt Gottrau distingue à juste titre: d'une part,
l'acquisition, par les héritiers, de l'universalité de la succession,
actif et passif, et partant le transfert des obligations, d'autre
part, l'état, matériel et juridique, dans lequel la chose léguée doit
être livrée. Les commentateurs se rallient à la jurisprudence de 1915
(TUOR, 2e éd., n. 10 art. 485; ESCHER, 3e éd., n. 8 ad art. 485). PIOTET
(Droit successoral. Traité de droit privé suisse. IV p. 120/121) paraît
préférer la solution du Code civil allemand (par. 2166), qui, présumant
que le légataire n'a droit qu'à la valeur nette de l'immeuble, l'oblige
à libérer l'héritier jusqu'à concurrence de la valeur du gage. Mais,
contrairement à ce que pense cet auteur, il n'est pas possible au juge
de "compléter" dans ce sens l'art. 485 al. 1 CC, en vertu de l'art. 1er
al. 2 CC. Le système du Code civil suisse ne contient pas de lacune sur
ce point, mais il a réglé la situation d'une autre manière: il distingue
entre la charge, dont traite l'art. 485, et la dette personnelle,
régie par l'art. 560. Instituer, par interprétation de l'art. 485 al. 1
CC, la présomption d'une volonté du testateur d'imposer au légataire
une reprise de dette serait donc, non pas compléter, mais modifier le
système légal. Ainsi, par le biais d'une présomption que rien n'autorise,
on créerait, en l'absence de toute disposition de dernière volonté, une
reprise de dette à la charge d'une personne gratifiée dans le testament;
dans l'hypothèse où le débiteur serait un tiers en faveur duquel le de
cujus aurait hypothéqué son immeuble, on aboutirait à la constitution
d'un legs, sous forme de remise de dette, en faveur d'une personne qui
ne serait même pas mentionnée dans l'acte.

    Le défendeur se prévaut de ce que, dans l'arrêt Gottrau, le Tribunal
fédéral a laissé indécise la question de savoir si le principe selon
lequel l'héritier devient débiteur de l'obligation personnelle garantie
par la chose léguée est aussi applicable à la cédule hypothécaire. Mais
cette réserve est la conséquence du raisonnement initial: dans la cédule
hypothécaire, "le caractère accessoire du gage immobilier par rapport à la
dette personnelle est moins marqué que dans l'hypothèque du droit commun"
et, ajoute le Tribunal fédéral, "il faut naturellement excepter de la
règle posée plus haut les charges foncières et les lettres de rente, qui
sont exclusives de toute obligation personnelle" (ATF 45 II 158 consid. 2).

    b) Le défendeur affirme que, de nos jours, on conçoit la dette et
la garantie comme un tout, mais il ne l'établit pas: l'opinion isolée
du notaire entendu comme témoin ne saurait être tenue pour une preuve
suffisante. Au demeurant, supposé que les conceptions aient évolué
dans ce sens, ce serait au législateur d'intervenir, le cas échéant,
en modifiant la loi: en l'état actuel du droit, le juge ne peut pas,
on l'a vu, s'écarter de l'interprétation donnée dans l'arrêt Gottrau.

    c) A titre subsidiaire, le défendeur se demande si, dans le silence
du testament, on ne pourrait pas reconstituer la volonté du testateur
à l'aide d'éléments extrinsèques à l'acte. On ne peut répondre que par
la négative: les éléments extrinsèques peuvent tout au plus servir à
interpréter les indications contenues dans le texte, mais ils ne sauraient
en aucun cas y suppléer (ATF 101 II 33/34 consid. 2 et les références); or,
à suivre le raisonnement du défendeur, on introduirait dans le testament
une disposition (soit l'obligation pour le légataire de reprendre la
dette) qui n'y est pas. Le défendeur n'a d'ailleurs établi aucun fait qui
constituerait l'indice d'une volonté du testateur sur ce point: selon le
notaire qui a instrumenté l'acte, "la question de savoir à qui incomberait
le paiement de la dette garantie par hypothèque n'a pas été soulevée".

Erwägung 3

    3.- Au vu de ce qui précède, il n'y a aucune raison en l'espèce de
revenir sur la jurisprudence de l'arrêt Gottrau: le demandeur est fondé
à réclamer le remboursement de ce qu'il a payé pour éteindre la dette
hypothécaire.

Erwägung 4

    4.- Quant au montant de la créance du demandeur, il est établi que
ce dernier a versé au Crédit foncier vaudois une somme totale de 48'689
fr. 75, représentant le capital et les intérêts. Ce n'est pas contesté.

    La demande tend au paiement des intérêts au taux de 5% dés la date
des paiements. Mais le demandeur peut prétendre seulement à des intérêts
moratoires, qui, à défaut de terme convenu, ne sont dus que dès la mise
en demeure du débiteur par l'interpellation du créancier (art. 102, 104
CO). Il n'établit pas, ni même n'allègue une interpellation antérieure
à la convention de procédure du 23 mai 1978: les intérêts doivent donc
être alloués dès cette date.

Entscheid:

             Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
Condamne Antoine S. à payer à Jean-Pierre S. la somme de 48'689 fr. 75,
avec intérêts à 5% dès le 23 mai 1978.

    Rejette la demande pour le surplus.