Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 104 II 136



104 II 136

22. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 31 mars 1978 dans la
cause P. contre S. Regeste

    Art. 44 ff. OG, Art. 594 Abs. 2 ZGB.

    Der Entscheid, mit dem die in Art. 594 Abs. 2 ZGB zugunsten der
Vermächtnisnehmer vorgesehenen vorsorglichen Massnahmen angeordnet
werden, kann nicht mit Berufung angefochten werden; er betrifft nicht
eine Zivilrechtsstreitigkeit.

Sachverhalt

    A.- Marius S., décédé le 1er février 1975, a laissé comme seul
héritier institué son neveu Antoine S., né le 8 mars 1960, sous la
puissance paternelle de son père et sous la curatelle du notaire, Z.,
à Lausanne. Les testament dispose notamment ce qui suit:

    "... si celui-ci (Antoine S.) revend mes immeubles de l'avenue de

    Morges 12 à 18, à Lausanne, il devra verser à titre de legs: à
mon neveu

    Charles P. 700'000 fr., à ma nièce Monique B. 500'000 fr., à ma
petite-nièce

    Martine S. 200'000 fr., à mon petit-neveu Christian S. 200'000 fr., à
   mon petit-neveu Marc Henri S. 200'000 fr."

    La valeur des immeubles, de 1'600'000 fr., est inférieure de
200'000 fr. au montant total des legs modaux. Ces immeubles représentent
l'essentiel de la succession.

    Faisant valoir que ses droits éventuels seraient en péril et invoquant
les art. 490 al. 2 CC, 594 al. 2 CC et 152 al. 2 CO, Charles P. a déposé
une requête de mesures provisionnelles dans laquelle il concluait en
substance:

    - principalement, à ce que l'héritier fût invité à constituer
   en sa faveur une sûreté immobilière sous forme d'une cédule hypothécaire
   de 700'000 fr.;

    - subsidiairement, à l'inscription à titre de sûreté d'une
   hypothèque de 700'000 fr.;

    - plus subsidiairement, à l'annotation d'une restriction du
   droit d'aliéner;

    - plus subsidiairement encore, à ce qu'interdiction fût
   faite à l'héritier de disposer des immeubles en cause.

    Le président du Tribunal civil du district de Lausanne a rejeté la
requête le 16 décembre 1976.

    Charles P. a recouru au Tribunal cantonal vaudois, qui, par arrêt du
11 novembre 1977, a rejeté le recours.

    Charles P. a recouru en réforme au Tribunal fédéral, reprenant ses
conclusions premières mais limitant ses moyens à la fausse application
de l'art. 594 al. 2 CC.

    Le Tribunal fédéral a déclaré le recours irrecevable.

Auszug aus den Erwägungen:

                   Extrait des considérants:

Erwägung 1

    1.- Selon les art. 44 à 46 OJ, le recours en réforme est ouvert dans
les "contestations civiles". La jurisprudence entend par contestation
civile (Zivilrechtsstreitigkeit, causa civile) une procédure contradictoire
visant à provoquer une décision définitive sur des rapports de droit civil
(ATF 103 II 317 consid. 2c, 101 II 359 consid. 1, 368/369 consid. 2a,
100 II 7, 292 consid. 1 et les arrêts cités). En matière successorale,
rentre dans la juridiction gracieuse la décision qui ne se prononce pas
sur l'existence d'un droit matériel, mais se limite à faire établir la
composition de la succession ou à en garantir la conservation (ATF 94 II
58 et les références).

Erwägung 2

    2.- a) Dans un arrêt Marchand contre Marchand, rendu sous l'empire
de la loi fédérale sur l'organisation judiciaire fédérale de 1893, telle
qu'elle avait été modifiée en 1911, le Tribunal fédéral a jugé que la
décision ordonnant la liquidation officielle d'une succession ne règle pas
une contestation civile et partant ne peut pas être déférée au Tribunal
fédéral par la voie du recours en réforme: il n'y a pas prétention de
droit matériel formulée par une partie contre une partie adverse, mais
simple requête présentée par une partie à une autorité, qui statue dans
le cadre de la procédure non contentieuse, non comme autorité de jugement
(ATF 39 II 433). Le Tribunal fédéral relève que le projet Jaeger (1909)
de revision de la loi d'organisation judiciaire de 1893 prévoyait un
recours de droit civil contre la décision relative à la liquidation
officielle d'une succession, disposition qui a été supprimée.

    Il résulte des travaux préparatoires de la loi de modification
de 1911 que le juge fédéral Jaeger, auteur du projet, estimait qu'une
telle décision ne peut pas être l'objet d'un recours en réforme, parce
qu'il n'y a pas contestation civile. A côté du recours en réforme, le
projet de 1909 instituait un recours en cassation (Kassationsbeschwerde)
(art. 105-115 du projet; cf. l'exposé des motifs, p. 72 ss) comprenant
trois catégories de cas, savoir:

    - à l'art. 106, quatorze cas relevant de la juridiction non
   contentieuse, dont les cas des articles actuels 44 lettres b, d, e et

    45 lettre b OJ, ainsi que, parmi d'autres, la liquidation officielle;

    - à l'art. 107, des décisions en matière d'exécution forcée,
   comme, par exemple, la mainlevée provisoire;

    - à l'art. 108, les cas qui font actuellement l'objet du
   recours en nullité de l'art. 68 OJ.

    Le projet du Conseil fédéral a conservé le recours de droit civil, tout
en réduisant la liste des cas de recours non contentieux de l'art. 106
du projet Jaeger. Il l'a supprimé, entre autres, pour la liquidation
officielle des successions. Il explique cette modification par le motif
qu'il s'agit de cas soulevant avant tout des questions de fait et,
partant, que l'unité du droit fédéral ne saurait souffrir de ce que les
juridictions cantonales statuent en dernier ressort (Message du Conseil
fédéral du 11 mai 1911, texte français, p. 7/8). La liste a encore été
réduite lors des débats parlementaires. Comme le remarque l'arrêt Marchand,
ces suppressions ont été dictées par le souci de diminuer le nombre des
recours de droit civil, et non pas parce que les cas éliminés auraient
été considérés comme susceptibles d'être l'objet d'un recours en réforme.

    Le système de 1911 est demeuré: la loi de 1943, actuellement en
vigueur, a maintenu la notion de contestation civile, dont le contenu n'a
pas été modifié. Elle a conservé, sous le nom de "recours en nullité",
le recours de droit civil, le limitant aux cas de l'art. 68 OJ et
transportant au chapitre du recours en réforme les cas de recours contre
les décisions de nature non contentieuse (art. 44 lettres b, d, e; 45
lettre b OJ).

    Ainsi, il apparaît clairement que l'organisation judiciaire fédérale
a toujours restreint, sous réserve de quelques exceptions, le recours
en réforme aux contestations civiles et que la décision relative à
la liquidation officielle d'une succession a toujours été rangée dans
la procédure non contentieuse. On ne peut sur ce point que reprendre
l'argumentation de l'arrêt Marchand: destinée à sauvegarder les droits
des créanciers de la succession, soit à garantir la conservation d'un
droit, la décision de liquidation officielle a un caractère purement
conservatoire et ne statue nullement sur l'existence des droits respectifs
des créanciers et des successeurs à cause de mort (cf. GULDENER, Grundzüge
der freiwilligen Gerichtsbarkeit der Schweiz, Zurich 1954, p. 4, 15/16;
Schweizerisches Zivilprozessrecht, 2e éd., Zurich 1958, p. 39; PIOTET,
Droit successoral, Traité de droit privé suisse, IV, p. 736).

Erwägung 3

    3.- Les mesures conservatoires prévues en faveur des légataires
par l'art. 594 al. 2 CC entrent dans la même catégorie que la
liquidation officielle. Comme la liquidation officielle tend à éviter
que les créanciers du défunt soient en concours avec les créanciers de
l'héritier, et à parer ainsi à une confusion des patrimoines qui leur
serait préjudiciable, ces mesures sont un correctif à l'art. 564 al. 2 CC:
elles doivent empêcher que les légataires soient payés après les créanciers
de l'héritier (cf. PIOTET, op.cit. pp. 754-756). De toute évidence,
il s'agit également de mesures à caractère purement conservatoire.

Erwägung 4

    4.- a) Le recourant invoque l'arrêt Pesenti contre Scolari, du 31
janvier 1974, partiellement publié aux ATF 100 II 92 ss Il se prévaut
de ce que le Tribunal fédéral a déclaré recevable un recours en réforme
relatif à la fourniture de sûretés par le grevé en matière de substitution
fidéicommissaire sur les biens résiduels. Mais il ressort de la partie non
publiée de l'arrêt que le litige portait sur l'existence de l'obligation
du grevé. Le chiffre 1 du dispositif de la décision cantonale constatait
que le grevé de la substitution n'était pas tenu de transférer aux appelés
les biens dont il héritait, mais seulement ce qu'il en laisserait à son
décès. Ce qui était en cause, c'était donc des droits matériels.

    b) Le recourant fait également état de l'opinion de Lemp (n. 44
ad art. 205 CC, reprise par WURZBURGER, Les conditions objectives du
recours en réforme au Tribunal fédéral, thèse Lausanne 1964, p. 29), selon
lequel le litige relatif aux sûretés en garantie des apports de la femme
(art. 205 CC) relève de la juridiction contentieuse: ces sûretés ne sont
pas assimilables à un séquestre ou à une mesure provisoire devant garantir
l'exécution rapide d'un droit exigible; il s'agit d'une garantie durable,
identique à un gage conventionnel (en sens contraire: la jurisprudence et
la doctrine citées par WURZBURGER, op.cit., p. 29 n. 91; voir cependant
ATF 82 II 94 ss, où le Tribunal fédéral est directement entré en matière
sur le point de savoir si un conjoint survivant usufruitier est tenu de
fournir des sûretés en faveur des cohéritiers, en vertu de l'art. 464 CC).

    Mais l'opinion de Lemp ne peut pas être invoquée dans le cadre du
présent litige. On peut envisager que, lorsque la loi prévoit directement
l'obligation de fournir des sûretés, comme dans les cas des art. 205,
464, 490, 760 CC, il y a un droit légal à des sûretés, avec le même effet
qu'aurait une convention: dès lors, le litige relatif à la constitution
de telles sûretés peut être qualifié de contestation civile en ce sens
qu'il tranche sur l'existence d'un droit matériel, fondé sur la règle
légale. Il en va autrement quand la loi prévoit des mesures conservatoires
indéterminées: dans ce cas, le créancier ne peut soutenir qu'il est de
par la loi au bénéfice d'un droit à la constitution d'un gage.

    La solution contraire étendrait le recours en réforme là où
le législateur l'a délibérément exclu. Par ailleurs, les mesures
conservatoires de l'art. 594 al. 2 CC ont été prévues en substitution de
la liquidation officielle, qui, contrairement à ce qu'avait envisagé le
législateur, n'a pas été accordée aux légataires (cf. PIOTET, op.cit.,
pp. 754 ss): elles vont donc moins loin qu'une telle mesure, contre
laquelle le recours en réforme n'est pas ouvert.