Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 104 III 55



104 III 55

15. Arrêt du 12 juillet 1978 dans la cause République algérienne
démocratique et populaire Regeste

    Arrestvollzug.

    Wann haben die Betreibungs- und die Aufsichtsbehörden vom Arrestbefehl
abzuweichen und einer Erklärung des Gläubigers Rechnung zu tragen,
wonach die arrestierten Vermögenswerte nicht Eigentum des Schuldners,
sondern eines Dritten seien? (E. 4).

Sachverhalt

    A.- a) En 1976, le Président du Tribunal de première instance de
Genève a rendu trois ordonnances de séquestre contre la République
algérienne démocratique et populaire, l'une sur requête de la Banque
commerciale arabe S.A. (BCA) et de Zouheir Mardam Bey conjointement, les
deux autres sur requête de chacun de ces créanciers séparément (nos 676
SQ 252, du 24 août 1976, 476 SQ 325, du 28 août 1976, et 976 SQ 327, du
11 novembre 1976). En exécution de ces ordonnances, ont été séquestrés,
en main du notaire Pillet, à Genève, des titres BCA (actions, bons de
jouissance, certificats).

    Dans le cadre des poursuites en validation de séquestre, la
notification des commandements de payer (nos 665604, 6718286, 6719619,
tous trois du 18 juillet 1977) s'est heurtée au refus du Département
politique fédéral de notifier les actes par la voie diplomatique. Faute
de pouvoir recourir au Conseil fédéral, qui avait déclaré irrecevables
de précédents recours contre un même refus, les créanciers ont agi par
la voie de la plainte et du recours, au sens des art. 17 et 19 LP: par
arrêts du 27 avril 1977, la Chambre des poursuites et des faillites du
Tribunal fédéral a invité l'Office des poursuites de Genève à procéder à la
notification par publication (art. 66 al. 4 LP) des commandements de payer
et des ordonnances de séquestre (cf. ATF 103 III 1 ss.). La publication
a eu lieu les 18 et 19 juillet 1977 dans la Feuille fédérale, la Feuille
d'avis officielle du canton de Genève et le quotidien français "Le Monde".

    b) La République algérienne démocratique et populaire a porté
plainte auprès de l'autorité cantonale de surveillance, demandant que
les notifications faites le 18 juillet 1977 dans la Feuille d'avis
officielle du canton de Genève fussent annulées. Elle faisait valoir,
très sommairement, que les conditions d'application de l'art. 66 al. 3 et
4 LP n'étaient pas réalisées en l'espèce. Son représentant écrivait qu'il
n'avait été consulté que le dernier jour du délai de plainte et qu'ainsi
il n'avait pas eu le temps de prendre connaissance du dossier; il demandait
qu'un délai supplémentaire lui fût octroyé pour compléter la motivation de
sa plainte. L'Office des poursuites lui a accordé cette possibilité. Dans
une écriture du 7 septembre 1977, la plaignante a tenu l'argumentation
suivante: étant donné le comportement du Département politique fédéral,
la notification ne pouvait se faire que par publication; toutefois, dans
un procès civil opposant François Genoud à la BCA, les créanciers ont
allégué que les actions séquestrées n'appartiennent pas à la République
algérienne démocratique et populaire, mais à Zouheir Mardam Bey, qui dit
les détenir à titre fiduciaire pour un tiers: ils ne pouvaient donc pas
en demander le séquestre; ayant été ordonné, celui-ci est devenu caduc
et doit être annulé d'office.

    Dans une lettre adressée le 16 novembre 1977 à l'autorité cantonale de
surveillance, la plaignante s'est référée à l'arrêt rendu le 15 novembre
1977, dans la cause BCA contre Genoud, par la Ire Cour civile du Tribunal
fédéral, qui dit que Zouheir Mardam Bey est le propriétaire fiduciaire
des actions.

    B.- L'autorité cantonale de surveillance a rejeté la plainte le 24
mai 1978. Sa décision est motivée comme il suit:

    Le grief initial de fausse application de l'art. 66 al. 3 et 4 LP
n'est pas fondé, l'Office des poursuites n'ayant fait qu'exécuter les
ordres qui lui ont été donnés par le Tribunal fédéral dans ses arrêts
du 27 avril 1977. Bien que les griefs nouveaux soient tardifs, il y a
lieu d'entrer en matière, car la plaignante invoque un moyen susceptible
d'entraîner l'annulation d'office des séquestres. Mais ce moyen n'est
pas pertinent. En effet, dans le cadre de la procédure de séquestre,
les créanciers n'ont attribué la propriété des actions qu'à la République
algérienne démocratique et populaire. Or, l'Office des poursuites ne peut
se fonder que sur l'attitude adoptée par les séquestrants dans la procédure
de séquestre: en principe, il doit s'en tenir au texte de l'ordonnance,
n'ayant pas à rechercher, ni à apprécier les déclarations contradictoires
que les intéressés ont pu faire au cours de procédures judiciaires dont
l'objet n'était pas le problème de la propriété des actions séquestrées.

    C.- La République algérienne démocratique et populaire recourt au
Tribunal fédéral. Elle demande l'annulation de la décision attaquée,
ainsi que l'annulation de la notification par publication dans la Feuille
d'avis officielle du canton de Genève des ordonnances de séquestre et des
commandements de payer. Son argumentation se réduit à faire valoir que,
dans toute la procédure opposant la BCA à Genoud, il a été allégué que les
actions séquestrées avaient été achetées à titre fiduciaire par Zouheir
Mardam Bey pour le compte d'un tiers dont il se refusait de dire le nom.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Le grief de violation de l'art. 66 al. 3 et 4 LP ne fait plus
l'objet de recours devant le Tribunal fédéral. Dans ces conditions,
les conclusions tendant à l'annulation des notifications par publication
du 18 juillet 1977 ont perdu toute raison d'être. La recourante demande
seulement au Tribunal fédéral de dire que les ordonnances de séquestre
sont devenues caduques ensuite de "faits nouveaux qui se sont produits
après le 27 avril 1977", ce qui priverait de fondement les poursuites en
validation de séquestre. Mais il en résulterait simplement une caducité
subséquente des séquestres et des poursuites; il ne saurait être question
d'annuler ou de révoquer des publications qui, lorsqu'elles ont eu lieu,
ont été faites à juste titre. La recourante elle-même ne prétend pas que
l'Office des poursuites de Genève aurait dû savoir le 18 juillet 1977
déjà que les ordonnances de séquestre étaient privées de fondement, faute
de biens pouvant être séquestrés. Dès lors, le recours est irrecevable
dans la mesure où il tend à l'annulation, respectivement à la révocation
des publications.

Erwägung 2

    2.- Mais l'acte de recours permet de voir avec une clarté suffisante
quel est en réalité l'objet, licite, du recours. La recourante reproche
à l'autorité cantonale de ne pas s'être ralliée à l'argumentation selon
laquelle les ordonnances de séquestre sont devenues caduques faute de biens
qui pussent être séquestrés, les créanciers eux-mêmes ayant affirmé que
les actions séquestrées n'étaient pas la propriété de la débitrice. Sous
cette forme rectifiée, le recours est recevable. La recourante cite
des passages de l'arrêt de la Ire Cour civile du Tribunal fédéral, du
15 novembre 1977, ce qu'elle n'a pas fait dans l'instance cantonale:
elle avait invoqué l'arrêt dans son écriture du 16 novembre 1977, mais
il n'était pas encore rédigé. L'autorité cantonale ne paraît pas avoir
eu connaissance des motifs quand elle a rendu la décision attaquée:
on pourrait se demander si, dès lors que la recourante s'était référée
à l'arrêt, elle n'aurait pas dû le consulter d'office, une fois rédigé;
mais il s'agit là d'un point accessoire, car la recourante n'a invoqué
cet arrêt qu'à titre complémentaire, pour renforcer une argumentation
fondée sur la procédure devant les juridictions civiles genevoises. Ces
considérations amènent à laisser indécise la question de savoir s'il peut
être tenu compte de l'arrêt dans l'instance fédérale.

Erwägung 3

    3.- Selon la jurisprudence fédérale, que la recourante cite
correctement, le créancier peut demander le séquestre de biens qui,
d'après les signes extérieurs (possession, inscription au registre
foncier, texte des papiers-valeurs, etc.), sont la propriété de tiers ou
qui sont revendiqués par un tiers ou bien encore sur lesquels un tiers
prétend avoir un droit réel restreint. Ce sera l'objet de la procédure de
revendication de tirer au clair si les biens séquestrés tombent sous le
coup de l'exécution forcée en faveur des créanciers ou s'ils y échappent
ensuite de la prétention invoquée par le tiers (ATF 96 III 109 s. consid. 2
93 III 92 ss. consid. 2 et les arrêts cités). Le créancier qui requiert
le séquestre de certains biens fait ainsi connaître, en règle générale,
qu'il les considère comme étant la propriété du débiteur, lors même que
nominalement ils appartiennent à un tiers. L'Office des poursuites doit
s'en tenir à ce point de vue et exécuter le séquestre, pour autant que les
biens dont est demandé le séquestre ne sont pas manifestement la propriété
d'un tiers, non celle du débiteur; dans ce dernier cas, en revanche,
il est tenu d'ignorer l'ordonnance de séquestre, comme nulle. Il doit
également refuser d'exécuter le séquestre quand le créancier lui-même
désigne les biens comme étant la propriété d'un tiers; si le séquestre a
été exécuté, il sera levé d'office, étant nul (cf., outre les deux arrêts
cités ci-dessus, ATF 82 III 70).

Erwägung 4

    4.- On se trouve dans ce dernier cas, selon la recourante.  Mais on
ne saurait se rallier à l'argumentation du recours. L'espèce présente
des données spécifiques, en ce sens que la débitrice et recourante,
République algérienne démocratique et populaire, revendique elle-même
la propriété des actions séquestrées. Dans une éventualité de ce type,
on peut se demander si le créancier ne serait pas fondé à dire que,
quoiqu'il considère les biens comme étant la propriété d'un tiers, il en
requiert le séquestre dès lors que le débiteur les revendique, pour le
cas où ce dernier parviendrait à faire prévaloir son point de vue dans
le cadre d'un procès contradictoire ou par quelque autre voie. Toutefois,
la question n'a pas à être examinée plus avant, car les créanciers n'ont
pas soutenu - en tout cas pas clairement - que les biens séquestrés
n'appartenaient pas à la débitrice, mais à un tiers. A ce propos, il
convient de préciser l'affirmation de l'autorité cantonale, selon laquelle
"en principe, l'office doit s'en tenir au texte de l'ordonnance, n'ayant
pas à rechercher, ni à apprécier les déclarations contradictoires que
les intéressés ont pu faire au cours de procédures judiciaires" (ou de
quelque autre manière): en règle générale, les autorités de poursuite
et de surveillance n'ont pas à rechercher d'elles-mêmes si et comment
le créancier a, en dehors de la procédure de séquestre et de poursuite,
exprimé son point de vue sur la propriété des biens séquestrés; toutefois,
quand les intéressés à la procédure (notamment le débiteur ou le tiers
revendiquant) offrent des preuves à ce sujet ou prennent des conclusions,
elles doivent les examiner et se prononcer. Or, tel était précisément
le cas en l'espèce. L'autorité cantonale de surveillance aurait donc dû
dire si, par la position adoptée par eux dans le procès civil BCA contre
Genoud (et par les allégations articulées pour l'étayer), la BCA ou Zouheir
Mardam Bey ont manifesté, de manière à lier les autorités de séquestre et
de poursuite, qu'ils considéraient que les actions séquestrées n'étaient
pas la propriété de la République algérienne démocratique et populaire,
mais celle d'un tiers. Comme elle ne s'est pas exprimée à ce sujet,
il incombe au Tribunal fédéral d'examiner la question. Il convient
toutefois de préciser préalablement que les autorités de poursuite et de
surveillance ne doivent tenir compte d'une telle déclaration du créancier -
surtout quand elle a été faite en dehors de la procédure de poursuite ou de
séquestre - que si elle est parfaitement claire, ne donnant prise à aucun
doute: dans tous les autres cas, lesdites autorités doivent s'en tenir à
l'ordonnance de séquestre et réserver la décision sur de telles questions
de droit matériel au juge, qui statue en procédure de revendication.

Erwägung 5

    5.- En l'espèce, on ne peut parler d'une déclaration claire, ne donnant
prise à aucun doute. Dans le procès BCA contre Genoud, où il n'était
pas question au premier chef de la propriété des actions litigieuses,
mais qui portait sur le point de savoir qui était autorisé à exercer,
avec ces actions, le droit de vote aux assemblées générales de la BCA,
Zouheir Mardam Bey et la BCA ont soutenu que Zouheir Mardam Bey était
propriétaire des actions à titre fiduciaire. Au vu de l'arrêt de la Ire
Cour civile du Tribunal fédéral et des citations de pièces faites par
la recourante à l'appui de son argumentation, on ne sait pas qui est
réellement propriétaire, respectivement qui Zouheir Mardam Bey et la BCA
considèrent comme le réel propriétaire des actions. Ainsi, il n'y a pas de
déclaration claire par laquelle les créanciers auraient eux-mêmes reconnu
à un tiers la propriété des actions séquestrées. En l'état, on doit donc
s'en tenir à l'ordonnance de séquestre: la question de savoir qui est le
réel propriétaire des actions devra être élucidée dans la procédure de
revendication, manifestement déjà ouverte.

    Dans ces conditions, le recours apparaît dénué de fondement et doit
être rejeté dans la mesure où il est recevable.

Entscheid:

Par ces motifs, la Chambre des poursuites et des faillites:

    Rejette le recours dans la mesure où il est recevable.