Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 102 V 208



102 V 208

51. Arrêt du 9 décembre 1976 dans la cause Bron, contre Caisse cantonale
genevoise de compensation et Commission cantonale genevoise de recours
en matière d'AVS Regeste

    Art. 25 Abs. 2 AHVG. Über den Anspruch auf Waisenrente im Falle
beruflicher Ausbildung und deren Unterbrechung.

Sachverhalt

    A.- A. Bron, née le 26 février 1956, a bénéficié d'une rente d'orphelin
de mère, qui a été servie jusqu'en février 1974. Par lettre du 25 février
1974, la Caisse cantonale genevoise de compensation a averti le père de
la bénéficiaire de la suppression de la rente, à moins que sa fille ne
fasse un apprentissage.

    En réponse à cette lettre, G. Bron a déclaré que la prénommée avait
quitté l'école en février et commencerait un apprentissage en automne
1974. Il a indiqué par la suite qu'elle se trouvait depuis le mois de
janvier 1975 en Angleterre, où elle suivait des cours de langue à raison
de deux matinées par semaine, et cela jusqu'à fin juin 1975.

    La caisse de compensation a estimé que la fréquentation de tels cours
ne pouvait être qualifiée de formation professionnelle et, par décision
du 5 juin 1975, a refusé de reprendre le paiement de la rente d'orphelin.

    B.- G. Bron a recouru. Il faisait valoir que sa fille avait quitté
l'Ecole de commerce, préférant s'orienter vers une profession manuelle;
que, du fait du nombre de places limité tant à l'Ecole des arts et métiers
que dans le secteur privé, elle était allée parfaire ses connaissances
linguistiques en Angleterre, au pair, avec un salaire de 6 livres et
demie par semaine et des frais d'écolage s'élevant à 5 livres; qu'elle
se trouvait ainsi en cours de formation.

    Mais la Commission cantonale genevoise de recours en matière d'AVS,
faisant sien l'avis de l'administration, a rejeté le recours par jugement
du 22 octobre 1975.

    C.- Le père de l'assurée interjette recours de droit administratif. Il
conclut à l'octroi de la rente durant le séjour en Angleterre, soit
pour la période du 1er janvier au 30 juin 1975, expose les conditions
de ce séjour et signale par ailleurs que sa fille est depuis le mois de
septembre 1975 élève de l'Ecole des arts et métiers.

    Dans un mémoire personnel, A. Bron relate qu'elle a quitté l'Ecole de
commerce après s'être rendu compte de son erreur d'orientation; qu'elle a
alors choisi la profession d'ébéniste; qu'ayant cherché en vain un patron
d'apprentissage, il lui restait la voie de l'Ecole des arts et métiers,
pour laquelle le délai d'inscription était toutefois échu; que, contrainte
d'attendre un an, elle a effectué quelques travaux en tant que secrétaire
temporaire, puis s'est décidée à parfaire ses connaissances en anglais;
que l'obligation de se présenter à fin juin 1975 aux examens d'entrée
ne lui a pas permis de poursuivre les cours jusqu'au certificat prévu;
que l'anglais lui sera d'une grande utilité dans l'exercice de son futur
métier, qui implique des stages de perfectionnement à l'étranger; que le
séjour en Angleterre fait ainsi partie de sa formation professionnelle.

    La caisse intimée conclut au rejet du recours. Quant à l'Office
fédéral des assurances sociales, il estime que l'avis de la caisse et des
premiers juges repose sur une conception trop rudimentaire du problème
de la formation professionnelle mais, après avoir analysé des principes
jurisprudentiels et les circonstances de l'espèce, renonce à formuler
une proposition et déclare s'en remettre à justice.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Selon l'art. 25 al. 1 LAVS, le droit à la rente d'orphelin
s'éteint à l'accomplissement de la 18e année. Pour les enfants qui font
un apprentissage ou des études, ce droit dure toutefois jusqu'à la fin
de l'apprentissage ou des études, mais au plus tard jusqu'à l'âge de 25
ans révolus.

    La jurisprudence constante, reprise par la pratique administrative,
a conféré une acception large aux termes d'apprentissage ou d'études,
les englobant dans la notion générale de formation professionnelle. Est
considérée comme une telle formation toute préparation systématique
tendant à donner des connaissances professionnelles déterminées, durant
laquelle l'orphelin ne peut prétendre à aucun salaire ou qu'à un salaire
sensiblement inférieur - soit inférieur de plus de 25 pour cent - à la
rémunération initiale de celui qui possède une formation complète dans
la branche en cause. Peut faire partie déjà de cette formation, le cas
échéant, l'acquisition de connaissances préliminaires, en particulier
de connaissances linguistiques (voir p.ex. ATFA 1960, p. 109 et 1958,
p. 127, ainsi que les arrêts qui y sont cités; voir aussi les Directives
concernant les rentes, Nos 194 et 195).

Erwägung 2

    2.- En l'espèce, après avoir abandonné dès février 1974 ses études
commerciales et travaillé quelque temps comme secrétaire temporaire,
l'assurée s'est rendue en Angleterre pour y parfaire ses connaissances
linguistiques. La question litigieuse est si ce séjour, qui a débuté en
janvier pour se terminer en juin 1975, peut être qualifié de période de
formation professionnelle au sens des dispositions et principes ci-dessus
rappelés.

    La réponse serait d'emblée négative si, après l'abandon de ses
études, l'assurée n'avait pas envisagé une autre formation professionnelle
nettement définie. On se trouverait alors en présence de l'un de ces cas où
le séjour à l'étranger a le caractère de simple passe-temps utilitaire,
pure occasion de perfectionner l'usage d'une langue dont on ne peut
même savoir si elle sera jamais utile dans une activité future et encore
indéterminée. Mais les circonstances de l'espèce rendent nécessaire un
examen plus approfondi. Selon ses dires dignes de créance, en effet,
l'assurée a eu dès le courant de l'année 1974 des vues précises sur
son avenir professionnel, vues qu'elle a réalisées en entrant au mois
de septembre 1975 à l'Ecole des arts et métiers pour y acquérir la
formation d'ébéniste. Et elle fait valoir que l'exercice de son futur
métier impliquera des stages de perfectionnement à l'étranger, lesquels
seront facilités par la connaissance de l'anglais.

    Le séjour en Angleterre, destiné à parfaire les connaissances
linguistiques, n'entre pas dans la formation proprement dite d'ébéniste;
nul ne paraît vouloir contester cette évidence. Mais peut-on y voir
l'acquisition de connaissances préliminaires qui feraient partie déjà de
la formation professionnelle? Pareille hypothèse n'est admissible que si
les rapports entre les connaissances préliminaires et l'activité à venir
sont tels que ces connaissances appartiennent au bagage professionnel
indispensable ou à tout le moins usuel de ceux qui se préparent au
métier en cause. Or, aussi profitable et précieuse puisse-t-elle être
en maintes conjonctures, la possession de langues étrangères n'est de
façon générale pas indispensable, dans l'exercice de sa profession, à
celui qui se destine à un métier manuel et ne peut non plus être tenue
pour usuelle; elle ne participe donc pas de la préparation systématique
à la profession. Sans doute est-il plausible que l'assurée sera amenée
à accomplir des stages de perfectionnement à l'étranger, et peut-être la
possession de la langue anglaise lui facilitera-t-elle ces stages. Mais
les connaissances linguistiques acquises durant le séjour ici en question
n'ont pas pour autant avec la formation professionnelle envisagée des
liens suffisamment étroits pour que l'acquisition puisse en être considérée
comme partie intégrante de cette formation.

    Le séjour effectué en Angleterre de janvier à juin 1975 ne saurait
dès lors être qualifié de période de formation professionnelle.

Erwägung 3

    3.- L'Office fédéral des assurances sociales soulève une autre
question, qui est celle d'un éventuel maintien du droit à la rente pour
toute la durée écoulée depuis sa suppression, soit à partir du 1er mars
1974 et jusqu'au début de la formation nouvelle. Il estime qu'elle souffre
de demeurer indécise, le litige portant sur la seule période du 1er janvier
au 30 juin 1975. Mais, s'il est exact que la décision administrative
attaquée ne refuse en termes exprès de reprendre le paiement de la rente
que pour cette dernière période, elle implique néanmoins le clair refus de
la rente aussi pour le temps antérieur au séjour en Angleterre. Et, alors
même que la recourante paraît ne pas vouloir contester ce refus, le juge
- qui n'est lié ni par les conclusions des parties ni par les motifs que
celles-ci invoquent (art. 114 al. 1 et 132 lettre c OJ) - a la faculté d'en
vérifier le bien-fondé. La Cour de céans peut donc trancher la question,
et le principe de l'économie de la procédure doit l'amener à le faire.

    La jurisprudence, suivie par la pratique administrative, a très
tôt reconnu que toute interruption temporaire de l'apprentissage ou des
études n'entraînait pas nécessairement la suppression du droit à la rente
d'orphelin durant cette interruption. Elle a ainsi admis le maintien du
droit à la rente pendant les périodes de service militaire obligatoire
(ATFA 1966, p. 89 et 170, 1953, p. 295). Elle a considéré de même que,
si une activité lucrative était exercée pour combler une lacune entre la
fin d'un semestre scolaire - ou l'obtention du certificat de maturité
- et l'entrée au service militaire, ou entre la fin de celui-ci et le
début d'un semestre, ou encore entre deux périodes de service militaire,
il ne fallait pas y voir une interruption de la formation de l'intéressé;
à la stricte condition toutefois que ce dernier poursuive sa formation à
l'issue de la suspension momentanée due à des circonstances extérieures
(ATF 100 V 164). Elle a prononcé enfin que le laps de temps écoulé entre
la résiliation prématurée d'un contrat d'apprentissage et la conclusion
d'un nouveau contrat n'était pas réputée interruption importante de la
formation professionnelle, en raison des démarches entreprises sans délai
pour trouver une nouvelle place d'apprentissage (RCC 1975, p. 384).

    Un trait commun aux affaires résolues de la sorte par la jurisprudence
est la poursuite, après sa suspension temporaire, de la formation
précédemment en cours ou à tout le moins d'une formation qui en constitue
la suite normale. Or le présent cas, quelque analogie puisse-t-il
présenter par ailleurs, s'en distingue sur ce point caractéristique et
essentiel. L'assurée a abandonné en effet de son plein gré - encore que
pour des motifs dont on ne saurait lui faire grief - une formation en
cours, pour commencer par la suite une formation nouvelle sans rapport
avec la précédente. Elle avait certes l'intention ferme, qu'elle a
mise à exécution, d'acquérir une formation professionnelle; sans doute
aussi a-t-elle recherché assidûment une place lui procurant la formation
désormais envisagée, recherche qui a été contrecarrée par des obstacles
objectifs. Il n'y en a pas moins eu rupture, et non pas simple césure,
dans le cours de la formation. Assimiler pareille rupture à la suspension
temporaire de la formation déborderait le cadre tracé par la jurisprudence.

Erwägung 4

    4.- C'est dès lors à juste titre que la caisse de compensation a
refusé de reprendre le paiement de la rente d'orphelin pour la durée du
séjour accompli en Angleterre de janvier à juin 1975 et a implicitement
nié le maintien du droit à la rente au-delà du 1er mars 1974.

    La période postérieure à la décision litigieuse n'est pas l'objet de
la présente procédure. Il appartient d'abord à la caisse de se prononcer,
par décision susceptible de recours, sur le droit à la rente d'orphelin
de l'assurée après la fin du séjour en Angleterre et notamment dès son
entrée à l'Ecole des arts et métiers.

Entscheid:

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

    Le recours est rejeté dans le sens des considérants.