Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 102 IV 24



102 IV 24

7. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 23 février 1976
dans la cause Demierre contre Ministère public du canton de Vaud. Regeste

    Art. 191 Ziff. 1 Abs. 2 StGB: Unzucht mit pflegebefohlenen Kindern.

    Ein gelegentlicher Schüler kann sich zum Lehrer in dem
Abhängigkeitsverhältnis befinden, das die Anwendung dieser Bestimmung
rechtfertigt (Erw. 1 lit. b und c).

Sachverhalt

    A.- En 1973 et 1974, Robert Demierre a commis, à plusieurs reprises,
des actes contraires à la pudeur sur la personne de sept fillettes âgées
de 8 à 10 ans. A l'égard de trois d'entre elles, il s'est agi d'actes
analogues à l'acte sexuel (qualification non contestée). En outre,
Demierre a montré aux enfants des photographies pornographiques.

    Trois des fillettes, et de celles-ci deux qui avaient été victimes
d'actes analogues à l'acte sexuel, venaient chez Demierre pour prendre des
leçons de solfège. En effet, en 1970, à la demande du comité de la fanfare
de son village, Demierre avait institué des cours mixtes de solfège et
d'instrumentation deux fois par semaine, le soir, de 19 h à 20 h. A fin
1973, la classe de solfège s'est réduite à un garçon et une fillette. Ces
deux enfants venaient ensemble au cours, mais le garçon partait le premier
et la fillette restait ainsi seule chez Demierre. A l'égard de cette
enfant, les actes contraires à la pudeur et les actes dits analogues ont
été commis de façon répétée d'octobre 1973 à octobre 1974. Dans le courant
de 1974, les deux autres fillettes en cause sont venues prendre des leçons
de solfège. Demierre a agi soit au cours des leçons qu'il donnait, soit
à l'occasion de petits services que lui rendaient les enfants. Celles-ci
assistaient aux cours de solfège avec l'accord tacite de leurs parents.

    B.- Le 18 juin 1975, le Tribunal correctionnel du district de Nyon a
infligé deux ans de réclusion à Demierre. Le recours interjeté par celui-ci
a été rejeté par la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois
le 13 octobre 1975.

    C.- Demierre se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral. Il conclut
à la réduction de la peine et à l'octroi du sursis.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- a) Le recourant invoque en premier lieu une violation de l'art. 191
ch. 1 al. 2 CP. Il conteste que les victimes se soient trouvées dans
une relation de dépendance suffisante a son égard pour justifier
la qualification d'élèves au sens de cette disposition et, partant,
l'application de la peine aggravée prévue par celle-ci.

    La cour cantonale, pour appliquer l'art. 191 ch. 1 al. 2 CP, s'est
bornée à constater que les victimes du recourant étaient ses élèves
et elle a considéré comme dénués de pertinence les arguments que le
recourant entendait tirer de la notion d'enfants "confiés". En réalité,
le recourant invoquait l'absence d'un lien de dépendance suffisant pour
justifier l'application de la peine aggravée prévue par la loi.

    b) L'opinion abrupte que l'autorité cantonale fonde sur une
interprétation littérale de la loi et du mot "élève" doit être quelque
peu nuancée.

    Si le législateur a prévu, à l'art. 191 CP, une peine plus sévère
lorsque la victime est l'élève, l'apprenti ou le domestique du délinquant
ou si elle est son descendant, son enfant adoptif, l'enfant de son
conjoint, son pupille ou un enfant confié à ses soins, c'est parce qu'il
existe alors entre l'auteur et la victime une relation particulièrement
étroite, qui donne à l'auteur une autorité spéciale sur l'enfant et
place celui-ci dans une certaine dépendance (RO 99 IV 265 consid. 6). Le
législateur, considérant qu'il est particulièrement condamnable de profiter
d'un tel rapport de confiance et de dépendance pour commettre sur un
enfant des actes contraires à la pudeur, s'est montré d'une sévérité
accrue dans ce cas (RO 99 IV 157 consid. 2a).

    En se fondant sur le but de la loi, on peut ainsi se demander si, dans
le cas d'enseignements extra-scolaires, occasionnels, très spécialisés,
purement techniques, et de brève durée, où il n'existe vraiment ni rapport
de dépendance, ni rapport réellement éducatif, l'art. 191 ch. 1 al. 2
CP doit véritablement trouver application. La question peut cependant
rester indécise, car la relation particulièrement étroite et l'autorité
spéciale de l'auteur, qui justifient l'application de la peine aggravée
prévue par la loi existent bien en l'espèce.

    Entre un maître et un élève, entre celui qui enseigne et celui qui
apprend, se noue généralement un rapport qui excède la simple transmission
du savoir. Le maître est investi d'un devoir d'éducation qui fait de lui
sur le plan moral un exemple, ou tout au moins un modèle. Si une telle
relation et cette responsabilité apparaissent avec une grande évidence dans
l'enseignement scolaire permanent, public ou privé, ils se révèlent aussi -
sous une forme plus atténuée - dans plusieurs situations où l'enseignement
est dispensé de manière occasionnelle. L'existence d'un rapport de
dépendance, soit d'une responsabilité accrue du maître, dépend alors
des circonstances, notamment de la forme des relations, de leur durée,
de leur fréquence, de la différence d'âge, de la personnalité respective
des intéressés, voire de la nature de l'enseignement, etc. (cf. HOFFMANN,
Das Abhängigkeitsverhältnis als strafbegründendes und strafschärfendes
Merkmal der Sittlichkeitsdelikte, thèse Berne 1968, p. 79 ss).

    Or, en l'espèce, la régularité, la fréquence et la durée de
l'enseignement du solfège à l'égard d'une des victimes - puis,
ultérieurement, de deux autres encore -, la jeunesse des enfants et
le relativement grand âge du recourant, n'ont pu que créer le rapport
d'autorité et de dépendance et la responsabilité éducative du recourant
qui justifient l'application de l'art. 191 ch. 1 al. 2 CP.