Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 102 II 128



102 II 128

21. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 4 mai 1976 dans la cause P.
contre L. Regeste

    Auf Geldleistungen hinzielende Vaterschaftsklage, die von einem
Kind mit gewöhnlichem Aufenthalt in der Bundesrepublik Deutschland bei
einem schweizerischen Gericht gegen den angeblichen Vater erhoben wird,
der in der Schweiz Wohnsitz hat. Anwendung der Haager Übereinkommen vom
24. Oktober 1956 über das auf Unterhaltsverpflichtungen gegenüber Kindern
anzuwendende Recht.

    1. Die selbständige Anknüpfung der durch die Übereinkommen gesondert
geregelten Unterhaltsverpflichtungen und der Ausschluss jeglicher
familienrechtlicher Wirkungen bedeutet nicht, dass ein Gericht nicht -
vorfrageweise - über den Bestand des Vaterschaftsverhältnisses befinden
könnte, wo das anwendbare - im vorliegenden Fall deutsche - Recht dieses
als Rechtsgrund für den Unterhaltsanspruch voraussetzt. Dem Entscheid über
diesen Punkt wird für die Verurteilung zu Unterhaltsleistungen freilich
nur tatsächliche Bedeutung zukommen. Der angerufene Richter wird demnach -
gestützt auf das deutsche Recht - sowohl über das Vaterschaftsverhältnis
als der grundlegenden Voraussetzung für die Unterhaltspflicht wie auch
hinsichtlich der Modalitäten und des Umfanges der Unterhaltspflicht
materiell zu entscheiden haben (Erw. 3).

    2. Die Anwendung des ausländischen Rechts, die auf einer
Kollisionsnorm des Bundesrechts (das auch die von der Schweiz
ratifizierten internationalen Übereinkommen einschliesst) beruht, ist der
Überprüfung durch das Bundesgericht entzogen. Im vorliegenden Fall hat das
Bundesgericht als Berufungsinstanz lediglich zu prüfen, ob das kantonale
Gericht das anwendbare Recht auf Grund der durch die Haager Übereinkommen
vom 24. Oktober 1956 eingeführten Regeln richtig bestimmt hat (Erw. 4).

Sachverhalt

                      Résumé des faits:

    A.- a) Dame H., née L., ressortissante de la République fédérale
d'Allemagne, a donné naissance, le 29 juin 1962, à Bonn, à une fille,
prénommée Maria Christiane.

    Le 24 juin 1964, la Cour d'appel de Bonn a prononcé le divorce des
époux H.-L. Par un arrêt du même jour, elle a déclaré que Maria Christiane
n'était pas l'enfant légitime du mari.

    Dame L. ayant désigné P., de nationalité française, comme étant le
père naturel de l'enfant, le Stadtjugendamt de Bonn a entrepris dès 1965,
sans succès, des démarches en vue d'obtenir une contribution à l'entretien
de Maria Christiane.

    Le 11 novembre 1971, le Stadtjugendamt de Bonn, agissant en qualité
de tuteur de Maria Christiane L., a assigné P., qui avait pris domicile à
Vésenaz, devant le Tribunal de première instance de Genève, aux fins de
le faire déclarer père naturel de l'enfant et d'obtenir sa condamnation
au paiement d'une contribution à l'entretien de celle-ci. P. s'est opposé
à la demande.

    b) Le 23 janvier 1975, le Tribunal de première instance de Genève a
rejeté l'action. Son jugement est motivé en substance comme il suit:

    En vertu de la Convention de La Haye du 24 octobre 1956 sur la loi
applicable aux obligations alimentaires envers les enfants, entrée en
vigueur pour la République fédérale allemande le 1er janvier 1962, pour
la France le 1er juillet 1963 et pour la Suisse le 17 janvier 1965, était
applicable au fond du litige, à partir de cette dernière date, la loi de
la résidence habituelle de l'enfant, en l'espèce le droit allemand. Pour
la période antérieure au 17 janvier 1965, soumise au droit suisse, la
demande est mal fondée, le délai de péremption de l'art. 308 CC étant
expiré. Pour la période postérieure au 17 janvier 1965, la demande
doit être considérée comme prématurée. En effet, selon les nouvelles
dispositions sur le enfants illégitimes, entrées en vigueur en République
fédérale allemande le 1er juillet 1970, la demande en paiement d'une
contribution alimentaire exige la constatation préalable de la paternité,
dans une procédure séparée ayant effet erga omnes. Cette action n'entre
pas dans le cadre de la Convention de La Haye et ne peut être portée que
devant un tribunal allemand. Ce n'est qu'une fois que la paternité a été
constatée que l'action alimentaire prévue par la Convention est recevable.

    B.- Statuant le 16 janvier 1976 sur appel du demandeur, la Cour de
justice de Genève a annulé le jugement de première instance et renvoyé
la cause à l'instance inférieure pour jugement au fond.

    Elle estime qu'un juge étranger, saisi d'une action, en vertu
de la Convention de La Haye de 1956, par un enfant ayant sa résidence
habituelle en République fédérale allemande, peut appliquer sans réserve
la loi de ce pays et procéder, selon les conditions qu'elle prescrit,
à la constatation préjudicielle de la paternité. Dans le cas contraire,
les enfants résidant en Allemagne et plaidant contre un père présumé
domicilié à l'étranger perdraient les avantages de la Convention de La
Haye et seraient moins bien traités que les enfants qui dirigent leur
action contre un père présumé domicilié en Allemagne.

    C.- Le défendeur recourt au Tribunal fédéral. Il conclut à la réforme
de l'arrêt attaqué en ce sens que la cause n'est pas renvoyée au Tribunal
de première instance pour qu'il statue sur le fond, l'action de la
demanderesse étant rejetée.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 3

    3.- La convention de La Haye du 24 octobre 1956 ne règle que les
conflits de lois en matière d'obligations alimentaires; les décisions
rendues en application de ladite convention ne peuvent préjuger des
questions de filiation et des rapports familiaux entre le débiteur et le
créancier (art. 5 al. 2). Le Message du Conseil fédéral du 9 mars 1964
(FF 1964 I p. 519) précise la portée de cette disposition:

    "Cette disposition doit faciliter l'adhésion à la convention d'Etats
dont
   le droit subordonne par principe l'obligation alimentaire à l'existence
   d'un lien de filiation entre l'enfant et le débiteur des aliments. Ces

    Etats n'auraient par exemple pas accepté qu'une obligation alimentaire
   imposée à l'un de leurs ressortissants fût fondée sur une loi étrangère
   s'écartant, en matière d'état ou de droit de famille, d'un principe
   fondamental de leur propre droit interne. En séparant nettement du
   domaine alimentaire les questions de filiation et de rapports familiaux,
   et en soumettant à son régime les seules questions d'aliments, la
   convention rassure donc ces Etats puisqu'elle empêche qu'un enfant
   au bénéfice d'une décision d'entretien fondée sur une loi applicable
   en vertu de la convention ne puisse invoquer cette décision à l'appui
   d'une action en reconnaissance judiciaire d'un lien de filiation entre
   lui et le débiteur des aliments. Une telle reconnaissance continuera
   à dépendre uniquement de la législation particulière de chaque Etat."

    Le rattachement séparé de l'obligation alimentaire, créée en
catégorie autonome, et l'exclusion de tout effet de droit de famille
ne signifient cependant pas qu'un tribunal ne puisse pas se prononcer,
à titre préalable et accessoire, sur l'existence d'un lien de famille
(filiation établie), lorsque la loi applicable prévoit l'existence de ce
lien comme fondement du droit aux aliments. La règle de l'art. 5 al. 2 de
la convention aura pour conséquence que la décision, sur ce point, n'aura
que valeur de motif et portée de fait pour la condamnation alimentaire;
elle n'affectera nullement l'état des intéressés et sera dépourvue de
l'autorité de la chose jugée (v. OVERBECK, Les nouvelles conventions
de La Haye sur les obligations alimentaires, Annuaire suisse de droit
international, XXIX 1973, p. 146/147; dans le même sens: MÜLLER-FREIENFELS,
Zum räumlich-persönlichen Geltungsbereich Haager IPR Übereinkommen,
insbesondere des Übereinkommens über das auf Unterhaltsverpflichtungen
gegenüber Kindern anzuwendende Recht v. 24.10.1956, Festschrift für
Hans G. Ficker, 1967, p. 328; HOLLEAUX, Actes de la huitième session
de la Conférence de La Haye, p. 177). En revanche, le problème se pose
de savoir si la décision incidente sur la question préalable doit être
prise en application de la loi qui régit l'obligation alimentaire ou si,
au contraire, elle doit être rattachée séparément. Le juge ne saurait
éluder cette question, en ne tenant compte, dans l'application de la loi
interne du pays de résidence de l'enfant, que des dispositions relatives
à l'obligation alimentaire et en faisant abstraction de celles qui lient
cette obligation à l'établissement d'une filiation. Car, d'une part,
il n'a pas le pouvoir de modifier la loi interne qu'il reconnaît comme
applicable et, d'autre part, il violerait l'art. 1 al. 1 de la convention,
selon lequel la loi de la résidence habituelle de l'enfant détermine,
non seulement dans quelle mesure, mais aussi si et à qui l'enfant peut
réclamer des aliments.

    On ne saurait non plus résoudre la question préalable de la filiation
en appliquant la loi désignée par le droit international privé du pays
de résidence de l'enfant, c'est-à-dire du pays dont la loi interne est
reconnue applicable pour régir la question principale, ou en appliquant la
loi désignée par le droit international privé du for. En effet, l'idée et
le but de la convention, en retenant applicable la loi de la résidence,
sont de ne prendre en considération que le droit matériel du pays de la
résidence, à l'exclusion de son droit international privé, et d'éviter que
le sort du litige ne soit lié au contenu d'une règle de conflit qui varie
avec le tribunal saisi (Actes de la huitième session de la Conférence
de La Haye 1956, p. 310 et Documents de la huitième session, p. 127;
cf. aussi, sur ce qui précède, BISCHOFF, Les conventions de La Haye en
matière d'obligations alimentaires, Journal du droit international 1964,
p. 768/769).

    Aussi la majorité de la doctrine et de la jurisprudence s'est-elle
prononcée, conformément à l'art. 1er al. 1 de la convention, pour
l'application de la loi de la résidence habituelle non seulement au
quantum de l'obligation, mais aussi à son principe (v. OVERBECK, loc.cit.,
p. 147 et les citations aux n. 19 et 20; MÜLLER-FREIENFELS, loc.cit.;
BISCHOFF, loc.cit., p. 769; FIRSCHING, De la filiation en droit français,
autrichien et allemand, Revue international de droit comparé, 1973, p. 33;
BELLET, Les nouvelles conventions de La Haye en matière d'obligations
alimentaires, Journal du droit international 1974, p. 9; DE CESARI, Diritto
agli alimenti del figlio naturale, convenzioni dell'Aja e ordine pubblico,
Rivista di diritto internazionale privato e processuale 1974, p. 255 et
n. 52; SONNENBERGER, Vaterschaftsfeststellung und Unterhaltsanspruch
im internat. Privatrecht, Zeitschrift für das gesamte Familienrecht
1973, p. 554 II). Ce point de vue est confirmé par la genèse de la
convention (Actes VIII, p. 168 et 311; Documents VIII, p. 125 et 127,
Rapport de la commission spéciale: "Dans la pratique une convention en ce
domaine n'a de valeur réelle que si elle a pour résultat de soumettre les
obligations alimentaires en leur entier aux dispositions d'une loi unique"
et: "Par l'application de la loi de la résidence habituelle de l'enfant,
on évite en outre que la personne qui doit entretenir l'enfant ne puisse
se soustraire à l'obligation alimentaire en s'établissant dans un pays
où cette obligation est soit inconnue, soit reconnue seulement dans une
mesure très restreinte"). Si le principe de l'obligation était soumis
à une loi autre que celle de la résidence habituelle de l'enfant et si
la filiation était érigée en question préalable à juger selon une loi
déterminée par un rattachement distinct, une réponse négative à cette
question pourrait faire obstacle à l'action alimentaire et empêcher
l'application de la convention (cf. v. OVERBECK. L'application par le
juge interne des conventions de droit international privé, Recueil des
cours de l'Académie de droit international, 1971, I p. 62-65).

    L'autorité cantonale a dès lors fait une saine application de la
convention en invitant le juge de première instance à statuer au fond, sur
la base du droit allemand, aussi bien en ce qui concerne - préalablement
- la condition fondamentale de l'obligation alimentaire, à savoir la
paternité, respectivement le lien de filiation avec le défendeur, qu'en
ce qui a trait aux modalités et au montant de cette obligation.

Erwägung 4

    4.- Aux termes du par. 1600a BGB, introduit par la loi du 19 août
1969 (Nichtehelichengesetz), entrée en vigueur le 1er juillet 1970, les
effets juridiques de la paternité ne peuvent être invoqués qu'à partir
du moment où ils sont constatés. Ainsi, les nouvelles dispositions ont
supprimé les actions alimentaires dans la mesure où elles ne peuvent
plus être intentées avant l'établissement de la filiation (mais elles
peuvent l'être en même temps, cf. PALANDT, BGB, 32e éd., par. 1600a
n. 4). L'allocation d'aliments est subordonnée à la constatation formelle
d'un lien de filiation à l'égard du père et l'établissement de ce lien
est la condition de l'obligation alimentaire. C'est la conséquence de
l'assimilation de l'enfant né hors mariage à l'enfant légitime.

    L'essentiel du recours est fondé sur ces principes - incontestés -
du droit allemand. Le recourant soutient que le droit actuel allemand est
incompatible avec la convention de La Haye, qui ne s'occupe que des actions
alimentaires et qui, selon son art. 5, ne peut pas préjuger d'autres
questions de droit de famille, notamment établir la filiation. Saisi d'un
recours en réforme, le Tribunal fédéral n'examine que l'application
du droit fédéral, cette notion comprenant aussi les conventions
internationales ratifiées par la Suisse et qui s'appliquent au même titre
qu'une loi fédérale (ATF 96 II 7). En revanche, l'application du droit
étranger qui intervient en vertu d'une règle de conflit du droit fédéral
échappe à l'examen du Tribunal fédéral. En l'espèce, la Cour fédérale
de réforme est tenue uniquement de rechercher si l'autorité cantonale a
désigné correctement le droit applicable en vertu des règles instituées
par la convention de La Haye, mais non pas de revoir l'application du
droit, puisque ce droit est étranger (ATF 77 II 117 consid. 2, 88 II 203
consid. 4).

    Au demeurant, l'application du droit allemand ne conduit pas
nécessairement à l'impasse relevée par le recourant.

    Certes, la Convention de La Haye de 1956 ne règle que le statut
alimentaire, alors que le droit allemand, désigné par la convention comme
applicable, exige l'action d'état, d'où découlent les conséquences
alimentaires. Si le juge genevois, dans le but de satisfaire aux
exigences du droit allemand, procède à la déclaration de paternité,
cette déclaration n'aura, dans le régime conventionnel, que valeur de
motif et si le dispositif contient des dispositions sur un point autre que
l'obligation alimentaire, l'effet de la convention restera limité à cette
dernière (art. 1er al. 2 de la convention de 1958 sur l'exécution). Cela ne
signifie cependant pas que l'enfant soit empêché d'invoquer la convention
pour demander des prestations alimentaires, parce que le droit du pays
de sa résidence habituelle exige l'établissement préalable du rapport
de filiation. Simplement, et aux fins de l'exécution, les effets du
jugement seront limités au plan alimentaire (cf. v. OVERBECK, Une règle
de conflits uniforme en matière d'obligations alimentaires envers les
enfants, Nederlands Tudschrift voor international Recht, 1958, p. 265/266).

Entscheid:

            Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Rejette le recours dans la mesure où il est recevable.