Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 100 IV 104



100 IV 104

27. Arrêt de la Cour de cassation pénale du 30 janvier 1974, dans la cause
Northen contre Procureur général du canton de Genève et Ministère public
de la Confédération Regeste

    Art. 24 des Bundesgesetzes über die Betäubungsmittel vom 3.
Oktober 1951.

    1.  Der unrechtmässige Vermögensvorteil, der Gegenstand des dem Staat
verfallenden Betrages ist, entspricht dem durch die Widerhandlung erlangten
effektiven Gewinn (Erw. 1-3).

    2.  Für die Festsetzung des widerrechtlichen Gewinnes ist auf den
Zeitpunkt von dessen Erlangung und nicht auf denjenigen der Urteilsfällung
abzustellen (Erw. 4).

Sachverhalt

    A.- En septembre et octobre 1972, Andrew Northen a organisé et
participé à un trafic de haschich entre le Maroc, la Suisse et le
Canada. Ce trafic lui a rapporté une somme de 2000 dollars ($).

    B.- Par jugement du 28 juin 1973, le Tribunal de police du canton de
Genève l'a condamné, pour infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants,
à deux ans d'emprisonnement et dix ans d'expulsion du territoire suisse.

    Sur appel du Ministère public fédéral, la Cour de justice du canton
de Genève, par arrêt du 22 novembre 1973, appliquant l'art. 24 de la
loi fédérale sur les stupéfiants, a complété le jugement et condamné
Northen à verser à l'Etat la somme de 2000 $, à titre de restitution de
l'enrichissement illégitime.

    C.- Northen se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral; il demande
à être libéré de l'obligation de faire restitution de l'enrichissement
illégitime.

    Le Ministère public fédéral ainsi que le Procureur général du canton
de Genève proposent le rejet du pourvoi.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- L'art. 24 de la loi fédérale du 3 octobre 1951 sur les stupéfiants
stipule que "celui qui se procure un enrichissement illégitime en
commettant une infraction au sens des art. 19 à 22, est condamné à
restitution en faveur de l'Etat".

    C'est à juste titre que la Cour de justice de Genève a jugé la
présente espèce à la lumière de cet art. 24, puisque le recourant a commis
l'infraction réprimée à l'art. 19 ch. 1 de la loi sur les stupéfiants.

    La première loi fédérale sur les stupéfiants, du 2 octobre 1924, ne
contenait pas de règle semblable à celle de l'art. 24. Ni le Message du
Conseil fédéral sur la loi de 1951, qui reprend seulement le contenu de
cette disposition sans fournir d'indications complémentaires (FF 1951 I
870), ni les débats aux Chambres fédérales (Bull. stén. CE 1951, p. 336; CN
1951, p. 267) ne fournissent d'éléments pouvant servir à l'interprétation
de l'art. 24, qu'il faut dès lors appliquer à la lumière de son texte
et du but de la loi.

    L'art. 24 de la loi sur les stupéfiants correspond à l'art. 59 CP en
ce sens qu'il tend à empêcher que la rétribution de l'infraction ne soit
abandonnée à son bénéficiaire en l'attribuant à l'Etat (cf. ROLF JENNY,
Drogenkonsum und Drogenhandel in der Sicht des Kriminologen, p. 42). Mais,
s'appliquant à tout "enrichissement illégitime" procuré à l'auteur
par la commission de l'infraction, il recouvre non seulement les cas
visés à l'art. 59 CP, mais il le dépasse, puisqu'il ignore certains des
éléments restrictifs propres.à cette disposition. En outre, il se réfère
à la notion d'enrichissement illégitime qui, selon la jurisprudence, a une
portée plus large en matière pénale qu'en droit civil et qui s'étend même
à ce qui n'est pas appréciable en argent (RO 70 IV 63). Quant à l'art. 59
CP, il n'est pas une disposition générale sur la dévolution des profits
illicites que le délinquant a acquis par une infraction; il a bien plutôt
un caractère subsidiaire, pour le cas où l'obtention d'un avantage illicite
ne donne pas naissance à une obligation de dédommager selon l'art. 41 CO
(RO 91 IV 168 consid. 2 a). On se trouve donc en présence de deux règles
indépendantes trouvant application à des conditions qui leur sont propres.

Erwägung 2

    2.- Dans l'état présent de la jurisprudence, l'art. 59 ne s'applique
que si le délinquant qui a bénéficié de la prestation a encore de
la fortune au moment du jugement (RO 79 IV 114). Mais, en présence de
dispositions spéciales et plus précises obligeant l'accusé qui a retiré de
certaines infractions un avantage illicite à verser à l'Etat un montant
correspondant, la jurisprudence a posé que l'obligation de restitution à
l'Etat n'était pas conditionnée par l'existence chez l'accusé d'un avoir
net au moment du jugement (RO 91 IV 169 consid. 2 b).

Erwägung 3

    3.- La loi sur les stupéfiants, notamment à son art. 24, vise à enlever
toute rentabilité au trafic illicite de stupéfiants. Ce but ne serait pas
atteint si la mesure de la restitution du gain illicite dépendait de l'état
des actifs du condamné. D'ailleurs, la notion d'enrichissement illégitime
contenue à l'art. 24 de la loi sur les stupéfiants est totalement
indépendante du fait que l'accusé disposerait ou non d'un actif net.
L'enrichissement est la différence entre l'état d'un patrimoine avant
et après un déplacement illégitime de biens. Cet enrichissement peut
se produire soit par une augmentation de patrimoine, par accroissement
de l'actif ou par diminution du passif (lucrum emergens), soit par une
non-diminution du patrimoine (damnum cessans) (cf. notamment VON TUHR,
Partie générale du Code des obligations, éd. française, I, p. 370). Si
l'application de l'art. 24 devait être limitée aux accusés disposant d'une
fortune au moment du jugement, cette disposition serait en grande partie
vidée de sa substance et la notion d'enrichissement illégitime prendrait
un sens que ne lui ont jamais donné ni la doctrine, ni la jurisprudence,
ni le législateur. Il ne ressort donc ni du texte de l'art. 24 et de son
sens, ni du but de la loi, qu'échapperaient à l'obligation de restitution à
l'Etat les accusés qui ont vu leur passif diminuer grâce à leurs revenus
provenant d'infractions à la loi sur les stupéfiants, ou qui se sont
épargné des dépenses ou des accroissements- de leur passif. D'ailleurs,
la version allemande de l'art. 24 ne laisse place à aucune équivoque sur
ce point. En effet, elle n'utilise pas l'expression "ungerechtfertigte
Bereicherung" mais celle de "unrechtmässiger Vermögensvorteil", et elle
précise que la restitution doit porter sur l'"entsprechender Betrag". Il
s'ensuit clairement que la loi commande la dévolution à l'Etat non
pas de l'enrichissement subsistant (cf. art. 64 CO), mais bien du
montant correspondant à l'avantage économique que l'auteur a retiré
de l'infraction.

    Dès lors, l'autorité cantonale n'a pas violé le droit fédéral en
condamnant le recourant à verser à l'Etat, à titre de restitution de
l'enrichissement illégitime, ce qu'il a touché pour son trafic illicite,
et cela indépendamment de sa situation de fortune et en dépit du fait
qu'il n'aurait pas d'avoir net.

Erwägung 4

    4.- Au surplus, pour apprécier l'enrichissement illégitime,
il faut de toute façon se placer au moment de l'infraction, et non
au moment du jugement, sans quoi le but de la loi serait également
détourné. L'application de l'art. 24 ne saurait en effet dépendre de
l'usage que l'accusé a fait de son enrichissement postérieurement à
l'infraction. Toute autre interprétation créerait immanquablement entre
les accusés une inégalité dépendant de la nature de l'enrichissement et
de la forme des prestations qu'ils ont reçues.

    Enfin, il n'est pas nécessaire d'examiner in casu si, comme le soutient
le Ministère public fédéral, la dévolution à l'Etat est obligatoire, en
ce sens que l'application de l'art. 24 n'est pas laissée à l'appréciation
du juge.

Entscheid:

Par ces motifs, la Cour de cassation pénale:

    Rejette le pourvoi.